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SOCIETE* ARCHÉOLOGIQUE
DE NANTES
— 2 —
Ac. —
Ad). —
Ad m. —
Agr. —
Ane. —
Ant. —
Arc h. —
Arr.
Art. —
Ass. —
B.-a. —
Bib. —
Bib, bret. —
Centr. —
Com. —
Comm. —
Conf. —
Cons. —
Cor. —
Dél.—
Dêp. —
Dir. —
Ec —
El. —
Fond. —
Gén. —
Géog. —
Mist. —
Hon. —
Hort. —
Inst. —
i*. _
Lit. —
Min —
Mun. —
Nat. —
PrK v.-pr*.
Prof. —
Publ. —
Secr. —
S', *". —
Soc. —
Se. —
Sup. —
Très. —
Chev. —
0. —
G.O-
G. C. —
Av. —
Boul. —
Ch. —
Imp. —
Pass. —
PL —
R. —
Q. -
Académie, académique.
Adjoint.
Administration, administrateur, admi-
nistratif, — ive.
Agriculture, agriculteur, agricole.
Ancien, — ne.
Antiquaire.
Arcliénlogie, archéologique.
Arrondissement.
Artiste, artistique.
Association,
Beaux-arts.
Bibliothèque, bibliothécaire.
Bibliophiles bretons
Central, — e.
Comité.
Commission, commissaire.
Confère ne.
Cons'^il, conseiller.
Correspondant. "
Délégué.
Département,— départemental, — e.
Directeur.
K^ole.
Elève.
Fondateur.
Général, — e.
Géographie, géographique.
Histoire, historique.
Honneur, honoraire.
Horticulture, horticulteur, horticole.
Instruction.
Larréat.
Littéraire.
Ministère.
Municipal, — e.
Naturel, — le.
Président, vice-président.
Professeur.
Public, — ique.
Secrétaire.
Saint, sainte.
Société.
Sciences, scientifique.
Supérieur.
Trésorier.
Chevalier.
Officier.
Commandeur.
Grand-officier.
Grand-croix.
Avenue.
Boulevard.
Château.
Impasse.
Passage.
Place.
Rua.
Quai.
BULLETIN
DE LA
/ /
SOCIETE ARCHEOLOGIQUE
DE. NANTES
ET DU DÉPARTEMENT DE LA LOIRE-INFÉRIEURE
TOME TRENTE-NEUVIEME
Année 1898
PREMIER SEMESTRE
NANTES
BUREAUX DE LA SOCIÉTÉ ARCHÉOLOGIQUE
1898
La Société archéologique entend laisser aux auteurs des travaux insérés
dans son Bulletin l'entière responsabilité de leurs opinions.
LISTE DES MEMBRES
DE LA
SOCIETE ARCHEOLOGIQUE DE NANTES
ET DE LA. LOIRE-INFÉRIEURE
-Œ::*Çfe=S-
BUREAU
MM. le marquis Anatole de BREMOND
d'ars migré, ^
René BLANCHA.RD, 0. A. ^
le baron Christian de WjSMES
Paul de BERTHOU
Alcide DORTEL, 0. A. ^
le baron Gaétan de WISMES
Joseph SENOT db la LONDE
Charles RIARDANT
Raymond POUVREAU
Henri db la PEYRADE
Paul SOULLARD
Président.
5 Vice-j)résident8.
I Secrétaires généraux.
I Secrétaires du Comité.
Trésorier.
Trésorier-adjoint.
1 ^ibliothécaires-
) archivistes.
6
COMITE CENTRAL
MEMBRES A VIE
Fondateur
(ADMIS LE 9 AOÛT i84&)
M. DB LA NICOLLIÈRE-TEIJEIRO, 0. A. y.
Anciens Présidents^
MM. l'abbé CaHOUR, 0. A. ^ (1869-1871) ;
le marquis de BREMOND D'ARS MIGRÉ, ^ (1884-1886);
LE MEIGNEN, 0. A. Q (1887-1889 et 1896-1898) ;
le marquis de DION, ^ (1890-189-');
DE LA NICOLLIÈRE-TEIJEIRO, 0. A. Q (1893-189b).
MEMBRES ÉLUS
Claude db MONTI de REZÉ, j
ORIEUX, ^, 0. A. 0, ( sortants «n 1899.
PIED, O.l. Q, )
l'abbé ALLARD, i
le docteur BUREAU, 0. L i^, 0. A. i^ji, > sortants en 1900.
l'abbé DURVILLE, )
CHAILLOU, 0. A. ^, \
le marquis de l'ESTOURBEILLON, 0. A. 0, > sortants en 1901,
MAITRE, 0. I. Q, 0. A..^. )
' Les autres présidents de la Société ont été : MM. Nau (1845-186?), décédé
le 4 juillet 1865 ; — le Ticomte Sioc'han de Kersabiec (1863-1868), décédé le
28 novembre 1897; — l'intendant militaire Gallei (1872-1874), décédé le
11 aoiit 1891,- — Marionneau, ^, 0. 1. Q (1875-1877), décédé le 13 septembre
1896 ; — le baron de Wismes (1878-1880), décédé le 5 janvier 1887; — le ri-
corate .T. de la Laurencie (1881-1883), démissionnaire.
— 7
MEMBRES TITULAIRES
Date de la réception.
1878 4 juin.
1886 12 janvier.
185Î 5 octobre.
1893 C juin.
1886 11 mai.
1892 3 mai.
1879 4 novembre.
1885 3 mars.
1886 2 noTembre.
1881 8 février.
1874 l«f décembre,
1891 8 décembre.
1897 12 janvier.
1895 8 mai.
1889 12 novembre.
ALIZON (Kmile), anc. notaire et pr' de la Chambre,
anc. pr* du Congrès annuel de» notaires de France,
suppléant de juge de paix, r. Franklin, 20.
ALLARD (l'abbé Louis), chanoine d'Angers, écrivain,
r. Haute Roche, 4 bis,
ANIZON (le docteur Paul), anc. adm. du Kureau de
bienfaisance, 1* de la Soc. ac, r.- des Halles, 22.
AUGEAKD (Eugène), notaire, suppléant du juge de
paix, S*-Mars-la-Jaille.
AVIAU DE TEKNAY (le comte Ludovic d'), r. Tourne-
fort, 2, etch. de Ternay, Les Trois-Moutiers (Vienne).
AVKOUIN-FOULON (Louis), r. Sully, 6, et ch. de la
Couronnerie, Carquefou.
BACQUA (Auguste), maire de S'-Fiacre, pi. Louis XVI,
1, et ch. du Coin, La Haie-Fouassière.
BAGNEUX (le vicomte Zénobe Frotikr de), r. Sully, 2,
ch. de la Pellissonnière, Beaupère (Vendée), et r. du
Bac. 86, Paris.
BALBY de VERNON (le marquis Georges de), écrivain,
maire de S'-Julien-de-Vouvantes, m. de la Soc. des
agr. de France et de la Soc. hist. et arch. de l'Orléa-
nais, ch. de la Briais, S'-Julien-de-Vouvantes.
BASTARD (Charles), écrivain, numismate, m. delà Soc.
française d'arch., ch. de Kerlan, Savenay, et r. de
Courcelles, 99, Paris.
BAUGÉ (Simon), dir. particulier de VUrbaine et de la
Seine, juge suppléant au Tribunal de commerce,
r. du Chapeau-Rouge, 10.
BEAUCAlKES(le vicomte Robert Horric de), ch. de la
Cholière, Orvault.
BEAUFRETON (Emile) , agenl-voyer, S'-Philbert-de-
Grand-Lieu.
BELLEVÙE (le comte Xavier Fournibr de), cons. gén.
de la Loire-Inférieure, m. de la Comm. dép., ch. de
Moulinroùl, Soudan.
BÉNARD (Léon), docteur ès-lettres, écrivain, prof, au
Lycée, r. de Paris, 28, Angers (Maine-et-Loire).
— 8 —
1884 3 juin.
1875
1854
1892
1886
1871
2 mars.
7 férrier.
1846
6 mai.
1886
2 novembre
1896
7 avril.
1887
6 avril.
1898
3 mai.
1890
15 juillet.
1803
7 mars.
1879 7 janvier.
novembre,
novembre.
12 janvier.
5 mai.
BERTHOU (Paul de), archÏTiste paléographe, écrivain,
m. de la Soc. de l'Ec. des Chartes et de la Soc. de
l'hist. de France, r.de Gigant, 38, etch. de Gadouzan,
S'-Dolay, La Roche-Bernard (Morbihan).
BLANCHARD (René), 0. A. M, 1' de l'Institut et de la
Soc. arch. de la Loire-Inférieure, écrivain, secr. et
bib. -archiviste de la Soc. des Bib. bret., bib.-adj.
de la Bib. publ., r. Royale, 1.
BLANCHET (le docteur Ferdinand), anc. pr» de la Soc.
ac, pr' hon. de la Soc. nantaise d'hort., m. de la Soc-
des se. nat. de l'Ouest de la France, de la Soc. art. et
lit. de l'Ouest et de la Soc. de géog. commerciale,
r. du Calvaire, 3, et Le Pellerin.
BOIS DE MAQUILLÉ (le comte Constant du), écrivain,
r. Basse-du-Château, 3, et ch. de la Touche, Nozay.
BOIS DE LA PATELLIÈRE (Henri du), écrivain, maire
de S'-Etienne-de-Mont-Luc, S^-Etienne-de-Mont-Luc.
BOISGHEVALIER (Olivier du), ch. de l'ordre royal du
Cambodge et du Dragon- Vert de l'Annam, r. du Ly-
cée, 9, et ch. de la Noë, S'-Philbert-de-Grand-Lieu.
BORD (Gustave), écrivain, anc. dir. de la Revue de la
Révolution, St-Nazaire.
BOÛARD (le vicomte René de), dir. des lignes à va-
peur Ghevillotte frères, r. Anizon, '2.
BOUBÉE (loseph), ch. de la Meule, Arthon.
BOUCHAUD (Adolphe), pi. de la Petite-Hollande, 3, et
ch. de la Bernardière, Basse-Indre.
BOUGOiJIN (François), architecte, anc. élève de l'Éc. des
B.-a., dél. et anc. pr'.de la Soc. des arch., médaillé de
la Soc. cent, des architectes français , r. du Calvaire, 1 0 .
BOUILLE (le comte Henri de), ch. de Casson, Nort.
BOUYER (l'abbé Jules), chanoine hon., anc. mission-
naire, anc. aumônier des Dames Blanches, sup. du
Petit-Séminaire de Guérande, Guérande.
BREIL DE PONTBRIAND (le comte Fernand du), cons.
gén. et député de la Loire-Inférieure, maire d'Erbray,
m. hon. delaSoc. art. et lit. de l'Ouest, r. Scribe, 4,
ch. de la Haie-Besnou, Erbray, et boul. St-Germain,
238, Paris.
BREMOND d'ARS MIGRÉ (le marquis Anatole de), ^,
chev. de St-Jean-de-Jérusalem (Malte) et de St-
Sylvestre, écrivain, anc. s. -préfet, secr. du Cons.
gén. du Finistère, pr' du Comice agr. de Pont-Aven,
cor. de la Soc. nationale des ant. de France, dél. de
la Soc. des Bibl. bret., pr' du Com. dép. de la Soc.
9
1892
1896
1891
1897
1896
1895
8 mars.
7 juillet.
1890 18 mars.
3 féyrier.
12 janfier.
14 janvier.
1885 13 janvier.
5 mars.
1884
4 mars.
1890
'l décembre,
1860
6 novembre
1863
15 décembre
bibliographique, pr* bon. du Gons. héraldique de
France, pr« d'honn. de la Gomm . du Musée arch.,
r. Harrouys, 5, et oh. de la Porte-Neuve, Riec
(Finistère).
BRÉVEDENT du PLESSIS (Irénée de),r. St-Pierre, 1.
BROGA (Alexis de), art. peintre, r. Urvoy-de-St-
Bedan, Il .
BRUC DE LIVERNIÈRE(le comte Léopold de), r. Chau-
vin, 2, ch. de Bruc, Guémené-Penfao , et ch. de la
Chapelle-Faucher, St-Pierre-de-Côle (Dordogne).
BRUC (le vicomte Maurice de), camérier d'hon. de
S. S. le pape Léon XIII, ch. de Bruc, Candé (Maine-
et-Loire).
BUREAU (le docteur Louis), 0. L i^,0. A. ^, licencié
es. se. nat., écrivain, dir.-conservateur du Muséum
d'hist. nat., prof. à l'Ec. de médecine, cor. du Muséum
de Paris, m. du Gons.de l'Ass. française pour l'avan-
cement des se, m. fond, de la Soc. zoologique de
France, collaborateur adj. à la carte zoologique dé-
taillée de la France, secr. gén. très, de la Soc. des
8c. nat. de l'Ouest de la France, cons. comm. de la
Soc. française de secours aux blessés, m. de la Soc.
ac, r. Gresset, 15, et ch. de la Meilleraye, Riaillé.
CALLIER (Gharles), juge de paix du 3^ arr. de Nantes,
r. de la Fosse, 14.
CARAVANNIKZ (Allred). statuaire, I* du Salon, m. de
la Soc. des art. français et de la Soc. des Amis des
arts, r. Sully, 8, et St-Suliac (lUe-et-Vilaine) .
CHAILLOU (Félix), 0. A. ^, avocat, écrivain, m. de la
Soc. française d'arch. et de la Soc. des se. nat. de
l'Ouest de la France, q. de la Fosse, 7i), et ch. des
Cléons, Vertou.
CHARRON (Georges), négociant, ag. gén. de l'Abeille
et de la Caisse générale des familles , r. Gresset, 8.
CHASTELLIER (Léon), r. Félibien, 36.
GHEGUILLAUME (Joseph), avocat, docteur en droit,
r, de l'Héronnière, 4, et ch. du Retail, Soullans
(Vendée).
CHESNE.A.U (Alfred), négociant, r. Boreau, 21, Angers
(Main-3-et-Loire).
CLÉRIÇ.A.YE (Constant Clérickau de la), architecte,
m. et anc. pr'. de la Soc. des architectes, secr. de la
Comm. dép. des bâtiments civils, anc. adj. au maire
de Nantes, r. Crébillon, 22.
— 10
1890 10 juin.
1884
1892
1880
1er avril.
1895
8 mai.
1895
3 décembre
1886
12 janvier.
1889
12 novembre
8 mars.
3 mai.
3 léTrier.
1878
19 février.
1883
3 avril.
1890
15 juillet.
1895
3 décembi-e
1898
5 juillet.
1881
5 avril.
GLOSTUKE (Kené Lk Pkcq de la), cons. d'arr. de Ro-
morantin, maire de Montrieux, Neung-sur-Beuvron
(Loir-et-Cher).
C0RM3RA1S (Ludovic), anc. auditeur au Cens, d État,
anc. cons. de prélecture, cons. gén. de la Loire-In-
férieure, m. de la Comm. dép., maire de St-Philbert-
de-Grand-Lieu, dél. de la Soc. française de secours
aux blessés pour la XI* région militaire et de la
Soc. des Bib. bret., v.-pr'. du Syndicat des agr. pour
l'arr. de Nantes, pr'. de la Comm. du Musée Dobrée,
m. de la Comm du Musée arch., boul. Delorme, î4,
et ch. du Rocher, St-Philbert-de-Grand-Lieu.
COTÏKUX (Marcel), anc. notaire, ex, e''t,Chàteaubriant
COURSONDELAVILLKNËUVE(levicomteRobertde) ^,
colonel du 13" de ligne, r. de Nièvre, 50, Nevers (Nièvre).
DION (le marquis .\lbert de) 3^, ch. de Maubreuil,
Carquefou, et q. d'Orsay, 27, Paris.
DORTKL (Alcide), 0. A. Q, avocat, cons. gén. de la
Loire-Infériettre, anc. secr. de la Soc. des Bib. bret.,
m. du Com. de la Bibl. publ., de la Comm. du
Musée arch. et de la Soc. ac, r. de l'Héronnière, 8.
DUPUY (Jules), ^,0. I. sî>,chev. du Mérite agr., ancien
préfet, Druyes (Yonne).
DURVILLE (l'abbé Georges), vicaire à Ste-Croix, 1» de
la Soc. arch. de la Loire-Inférieure, écrivain, pi.
Ste-Croix.
KSTOURBKILLON de la GARNAGHE (le marquis Jlégis
de 1'), 0. A. Q, député, cons. mun. de Vannes,
écrivain , cor. de la Soc. nationale des ant. de
France, inspecteur et 1* de la Soc. française d'arch.,
fond. dir. de la Revue historique de l'Ouest, anc.
pr'. de la So:. polymattiique du Morbihan, secr.-
adj . de la Soc des Bib. bret., m. de l'Ass. bret.,
de la Soc des Hospitaliers-Sauveteurs-Bretons et de
la Soc. art. et litt. de l'Ouest, l' de la Soc. arch. de
la Loire-Inférieure, pi. de l'Évêché, 10, Vannes
(Morbihan). ,
EVELLIN( Louis), chasublier,av. deLausnière,13, Paris,
FABRE (Xavier), notaire, r. de Saille, Guérande.
FONTKNAU (Félix), r. Mondésir, 12.
FRABOULET(Mathurin), architecte, m. de la Soc. des
architectes et de la Soc. des Amis des arts.r. Guépin,?.
FRANCE (Jules de), titulaire de deux médailles
d'hon., comm.-voyer, r. Charles Monselet, 30.
GAHIER(Stanislas), anc. notaire, agent d'affaires, anc.
cons. mun. de Nantes, r. d'Orléans, 5.
11 -
1892
1896
1898
1S95
1868
1893
1890
1886
7 juin.
7 juillet.
\*' février.
1891 3 juin.
1873 14 janvier.
5 mars.
7 janvier.
7 novembre.
4 février.
11 mai.
1854 2 juin.
1873 14 janvier.
1878 19 février.
GAUTIER (Gaston), dir. de la Compagnie du gaz,
r. Philippe Lebon, '19, Le Havre (Seine-Inférieure).
GAZEAU (Aimé de), r. Royale, 7.
GOUSSET (Henri), m. de la Soc. des Amis des arts,
pi. Saint-Pierre, 3.
HHiURTAUX-V.lRSAVAUX (Gustave), inspecteur de
la Soc. gén , hôtel de Bourgogne, r. de Bourgogne,
15, Paris, et eh. dfs Rallières, S*-Père-en-Retz.
HUETTE (René), écrivain, anc. rédacteur du Progrès
et anc. dir. de ÏOuest artistique et littéraire, m.
de la Soc. art. et lit. de l'Ouest, imp. Rover -Collard'
7, Paris.
HUNAULT (Victor), anc. comm.-priseur, r. Regnard, 5.
ISEGHEM (Henri van). ^, 0. I. =^,0. A. li>, anc. bâ-
tonnier, anc. cons. gén. de la Loire-Inférieure, prés,
du Tribunal civil de Nantes, v.-pr' de la Soc. de pa-
tronage des libérés du dép., m. de la Soc. des Amis
des arts, r. du Calvaire, 7, et ch. de la Cailière,
Bouguenais.
JOSSO (Clément), architecte, diplômé par le gouver-
nement, m. perpétuel de la Soc. art. et lit. de l'Ouest,
m. de la Soc. des art. français, r. d'Assas, 76, Paris.
JOSSO (le docteur Paul), r. de Strasbourg, 28.
KERVENOAËL (le vicomte Emile Jouan de), docteur
en droit, m. de la Soc. française d'arch. et de la Soc.
des Bib. bx'et,, r. Tournefoit. 3, et ch. de Boisy-Sour-
dis, La Verrie (Vendée).
LA BORDERIE (Arthur Lkmoynk de), C. de St-Grégoire
le Grand, anc. député, archiviste paléographe, m. de
l'Institut, pr'. de la Soc. des Bib. bret. et de l'Ass.
art. et lit. de Bretagne, anc. pr' de la Soc. arch.
d'Ille-et-Vilaine, s. -dir. de la classe d'arch de l'Ass.
bret., fond, (en lb57) et anc. dir. de la Revue de
Bretagne et de Fenci^e.r.St- Louis, 22, Rennes (Ille-et-
Vilaine), et pi. du Marchix, 14, Vitré (llle-et-Vilaine).
LAFONT (Georges), architecte, inspecteur diocésain
secr.de la Soc. des architectes, pr* fond. bon. de la
Comm.des fêtes nantaises, m. de laComm. dép. des
bâtiments civils, du Cons. centr. d'hygiène et de sa-
lubrité, de la Comm. du Jardin des Plantes et du
Com. des Amis des arts, m. d'honn, de la Comm.
du Musée arch., r. Rosière, 17.
LALLIÉ (Alfred), docteur en droit, écrivain, anc.
député de la Loire-Inférieui-e, maire de St-Colombin,
m. du Cons. de la Soc. des Bib. bret., r. Lafayette,
18, et ch. du Pay. St-Colombin.
— 12 —
189Ô 2 avril. LAUBRIÈRE (Louis Priant de), anc. vic.-pr* de la Soc.
hist. et arch. de Château-Thierry (Aisne), m. de la
Soc. géologique de France, r. Saint-Clément, 6.
1879 4 novembre. LAUNAY (Léonce Gontard de), écrivain, 123 ter, r.
Franklin, Angers (Maine-et-Loire).
1890 22 avril. LAUZON (Etienne de), écrivain, cons. d'arr. de la
Mothe-Achard, r. Maurice-Duval. 5, et ch. de la
Forêt, La Mothe-Achard (Veniée).
1887 3 mai. LE COUR-GRANDMAISON (Charles), écrivain, cons.
gén. et sénateur de la Loire-Inférieure, anc. secr.
de la Chambre des députés, pr' de la Soc. française
de secours aux blessés (Com. de Nantes) et de l'Ass ,
amicale des anc. él. de l'Externat des Enfants-ÎCan-
tais, pr^ d'hon. de la Soc. orphéonique La Sainte-
Cécile, v.-pr» du Cons. de la Soc. industrielle, r. de
Bréa, 2, ch. de Molte-Chette, Vertou, et r. Casimir
Périer, 27, Paris.
— — LE C0UR-GRANDM.\1S0N (Henri) ^, cons. gén. de la
Loire-Inférieure, secr. de la Comm. dép., maire de
Campbon, comm, de la Soc. des courses, r. de Bréa, 2,
et ch. de Coislin, Campbon.
1873 2 décembre. LE MEIGNEN (Henri), 0 A. !^, avocat, écrivain, prof.
à V&c. libre de droit, v.-pr' de la Soc. des Bib. bret.,
de la Soc. nantaise des Amis de l'hort. et du
Comice agr. de Champtoceaux, m. de l'Ass. bret., du
Com. de la Bib. et de la Comm. du Musée arch., anc.
cons. d'arr. de Nantes, maire de Bouzillé (Maine-et-
Loire), r. Bonne-Louise, 7, etch. delà Classerie, Rezé.
1877 6 février. LSROUX (Alcide). avocat, écrivain, m. et anc. pr' de
la Soc. ac, m. de la Soc. franc, d'arch. et de l'Ass.
bret., r. Mercosur, 9.
— !•' mai. LINYER (Louis), avocat, anc. bâtonnier, m. du Cens.
et prof, à l'Éc. libre de droit, anc. adj. au maire de
Nantes, m. et anc. pr'. de la Soc. ac, pr* fond, de la
Soc. de géog. commerciale, m. de la Soc. française
d'arch., de la Soc. art. et lit. de l'Ouest et de laSoc.
des Amis des arts, r. Paré, 1, ch. des Jubinières,
Héric, et ch. de Veillon, Talmont (Vendée).
1891 7 avril. LISLS uu DRENEUC (Georges de), av. Le Lasseur.
1872 28 octobre. LISLE du DRENEUC (Pitre de), 0. A. ^, écrivain, 1»
de la Soc. française d'arch. et de la Soc. arch. de la
Loire-Intérieure, conservateur elm. d'hon. delà
Comm. du Musée arch., conservateur du Musée
Dobrée. cor. du Min. pour les travaux hist., de la
Comm. des Monuments hist. et dei mégalithes de
- 13 —
France, du Com. des B.-a, des dép. et de la Soc.
nationale des ant. de France, auxiliaire de la Comm.
de géog. hist. et des mégalithes de France, m. du
Com. de la Bib. publ. et de la Comm. du Musée des
B.-a., av. de l'Eperonnière (r. de Paris, 19).
18«7 3 mai. LONDE (Joseph Senot de la), docteur en droit, écrivain,
anc. maire de Thouaré, r. Haute-du-Château, 6, et
ch. de la Picauderie, Thouaré.
1898 1" février. LOTZ-BRISSONNEAU (Alphonse), ingénieur des arts
et manufactures, m. du Com. des Amis des arts, q.
de la Fosse, 86.
1870 8 mars. MAITRE (Léon), 0. I. i^,0. A. «^.écrivain, m. de la
Soc. française d'arch., anc. él. et m. de la Soc. de l'Ec.
des Chartes, archiviste du d'p., m. du Com. des
travaux hist. et se. près du Min. de l'instr. publ.
anc. pr' de la Soc. ac, imp. Vignole, 1 (r. Sully).
1895 8 janvier. MARTIN (Arthur), 0. ^, capitaine de vaisseau,
éirrivain, r. Beauvais, 43, Lorient (Morbihan).
1885 7 juillet. MÉNARD (.\nthime), chev, de St-Grégoire-le-Grand,
député, avocat, docteur endroit, anc. dir. du Nouvel-
liste de V Ouest, m. du Cons. de la Soc. des Bib,
bret, maire de laChapelle-Launay, Savenay, et av. de
Tourville, 4, Paris.
1890 22 avril. MËRLIERS DE LONGUEVlLLE(Sévèredes),0. ^, anc.
capitaine de frégate, anc. maire de St-Aignan, pi.
St-Pierre, 2, et ch. de Trioncelle, St-Aignan.
1898 8 novembre. MONTESSUSDBBALLORE(lecommandantFernandde),
^,0. A. ^, chef d'escadron d'artillerie, comman-
dant l'artillerie de la place de Nantes, écrivain, 1' de
l'Ac. des sciences, au Château.
1888 1»' mai. MONTFORT (Guy de), ch. du Loho, Malestroit (Mor-
bihan).
1884 5 février. MONTI de RSZÉ (Bernard de), anc. officier de cavale-
rie, q. Ceineray, 3, r. de Nantes, 17, Laval, et ch.
de l'Enfrière, La Gravelle (Mayenne).
— — MONTI DE REZÉ (Claude de), chev. de St-Grégoire-le-
Grand, écrivain, m. du Cons. d'adm. de la Revue
historique de VOuest,A\i Cons de la Soc. des Bib.
bret, m. delà Soc. hist. et arch. du Maine, q. Cei-
neray, 3, et ch. du Fief-Milon, Pouzauges (Vendée).
1886 6 avril. MONTI dk REZÉ (le comte Henri de), cons. comm.de la
Soc. française de secours aux blessés, r. de Stras-
bourg, 31, et ch. de Rezé, près Nantes.
1868 5 juin. N.IU (Paul), architecte, dél. de la Soc. des archi-
- 14 —
tt>ctes, m. de la Comm. du Mus'"e arch., rue La-
fayette, 18, et ch. de Port-Sinan, Rouans.
1845 9 août. NICOLLlÈRK-TEIJKlllO. (Stéphane Praud de la), 0. A
y, écrivain, archiviste de la Ville, cor. de la Soc.
nationale des ant. de France, m. du Coin, de la
Bibl. publ., Petite-r. Fénelon, 3.
1886 1" juin. OHEIX (llohprt), écrivain, anc. secr. de l'Ass. bret. ,
dél. de la Soc. des Bib. bret , m. de la Soc. polyma-
thique du Morbihah, etc., r. Notre-Dame, Loudéac, ôt
Trévé, Loudéac (Côtes-du-Nord).
1864 6 décembre. ORIEUX (F<]ugène), ^ 0. A. p, écrivain, agent-voyer
en chef hon., anc. pr'. de la Soc. ac, pr'. lion, delà
Soc. nantaise d'hor» , pr*. d'hon. de la Soc. amicale
des anc. él. de l'Ec. professionnelle, T.-pr*. de la
Comm. du Musée a:rch., m. de la Comm du Muséum
d'hist. nat.,du Cora. de la Soc. de géog. commerciale
et delà Soc. des Bib. bret., pass. du Nord, 11.
P.\GEOT (Charles), agent-voyer, Guémené-Penfao.
PALVADEAU (.loseph), r. du Calvaire, 27, et ch. de
la Morlière, Orvault.
PARIS-RÉBY (Emile), peintre verrier, r. du Jardin,
des Plantes, 7.
PEYRADE (Henry Espitali* de la), anc. cons. mun.
de Nantes, ch. de la Trémissinière, près Nantes.
PICHELIN (Paul), banquier, m. de la Soc. des Amis
des arts, r. Bonne-Louise, 12.
PIED (Edouard), 0. I. Q, écrivain, anc. économe du
Lycée, pass. Leroy, 14.
POMMIER (Félix), conservateur du Musée des B.-a.
très, du Musée dép. et m. de la Comm. du Musée
arch., r. Leroy, 23.
1884 4 mars. POUVRE.VU (Raymond), anc. cons. d'arr. de Nantes,
dir. de la Mutuelle du Mans, pass. St-Yves, 1.
1886 2 novembre. RADIGOIS (l'abbé Auguste), anc. sup. du Collège de
Châteaubriant, anc. curé de S'-Sébastien, aumônier
du Pensionnat des Frères, r. de Bel-Air, 14.
1898 8 mars. REVELIÈRE (Jules), receveur de l'Enregistrement en
retraite, r. de Paris, 73, et Blain.
1893 5 décembre. RÉVÉREND (Jules), anc. courtier-interprète, bib.-adj .
de la Soc. de géog. commerciale, ch. de Bourgerel,
Muzillac (Morbihan).
1881 8 février. RL\RD ANT (Charles), anc. dir. du Comptoir d'escompte
(Agence de Nantes), m. du Gom. de la Bib. publ.,
pi. Royale, 6, et av. de Grillaud.
1896
14 janvier.
1894
6 mars.
1888
3 avril.
1883
6 mars.
1874
4 août.
1888
10 janvier
_
l" mai.
— 15
1898
1890
1886
1896
1898
1886
1896
1862
1890
1898
1890
5 avril.
5 juillet.
2 décembre.
— 14 novembre
9 février.
14 janvier.
8 novembre
21 juin.
7 avril.
7 janvier.
18 mars.
8 novembre
6 mai.
1887
6 avril.
1886
9 février.
1883
3 avril.
1895
3 décembre
RIBIER (Eugène de), aijrégé des lettres, prof, de rhé-
torique au Lycée, r. du Coudray, bi bis.
RIGAULT (Félix), vérificateur des Douanes, r. de
Coutances, 18.
ROBUGHON (Jules), 1' de la Soc. française d'arch.,
de la Soc. d'encourageraentau bien etde l'Exposition
universelle de 1889, écrivain, libraire, photographe,
éditeur, m. de la Soc. des an t. de l'Ouest, de la
Soc. art. et lit. de l'Ouest, delà Soc. d'émulation
de la Vendée, de la Soc. des Bib. bret., de l'Ass.
art. de Bretagne et de la Soc. arch. d'iUe-et-Vilaine,
r du Moulin à vent, 3, Poitiers (Vienne), et r. Mi-
gnon, 2, Paris.
ROUXEAU (le docteur Alfred), 0. A. ^, anc. interne
des hôpitaux de Paris, prof, de physiologie à l'Ec. de
médecine, secr. de la Gazette médicale de Nantes,
r. de l'Héronnière, 4.
SAY (Edouard), m. de la Soc. des Amis des arts, r. Ro-
sière, 15, et ch. du Breuil, Plessé. à
SECHEZ (Paul) , inspecteur d'assurances,q. Penthièvre, 5.
SÉCILLON (le vicomte Stéphen de), r. Prémion, 1.
SOREAU (l'abbé Henri), prof, de dessin au Pension-
nat S'-Stanislas, r. S'-Stanislas.
SOULLARD (Marcel), r. Basse- iu-Château, 10, et cb. de
la Noë, près Nantes.
SOULLARD (Paul), négociant, r. Basse-du-Chàteau,
10, et ch. de la Noë, près Nantes.
SL'YROT (Gabriel de), r. du Lycée, 13, et ch. de la
Gastièie, Mortagne-s.-Sèvre (Vendée).
TACHARD (Elie) ^, 0. A. ^, dir. du service de santé
du XI' corps d'armée, pass. Russeil, 16.
TA.ILLEPIED df. BONDY (le comte Jules de), C. ^^
chev. de Malte, C. des SS. Maurice et Lazare, du
nombre extraordinaire de Charles III, 0. d'Albert le
Valeureux, chev. du Danebrog, chev. G. C. d'Isabelle
la Catholique, C. de Pie IX, etc., anc. envoyé extraor-
dinaii'e et plénipotentiaire de Isolasse, ch. deChas-
say, S"-Luce.
TOCHÉ (Charles), art. peintre, r. Pétrarque, 6, Paris.
TOUCHE (Henri Le Lièvre delà), ch. de Rochefort,
La Haie-Fouassière.
TOUCHE (Xavier Lb Lièvre delà), numismate, ch. de
Jaille, Sucé.
TRUELLE SAINT-EVRON (Charles), m. hon. de la Soc.
des Amis des livres, boul. S*-Aignan, 20.
— 16 -
1367 5 novembre. TULLAYK (le comte Alfred delà), pi. Dumoustiers, 4,
ch. du Plessis-Tizon, près Nantes, etEtampes (Seine-
et-Oise).
189R 4 février. VALLET (Joseph), sculpteur, r. de Rennes, 48.
— — VINCENT (Antoine), anc. juge au Tribunal de com»
merce, r. de Courson, 3.
— — VINCENT (Félix), cb. de la Gobinière, Orvault.
1883 1" mai. VOLL.\TIEK (Philibert), chef de bureau à, la Préfac-
ture, q. de la Fosse, 39.
1887 1" mars. WISMES (Christian de Blocquel de Croix baron de),
écrivain, 1» de la Soc. ac, anc. v.-pr* de la Conf. La
Moricière, m. delà Comm. adm. des Amis des arts,
cor. de la Soc. de l'Art chrétien, r. Félix, 12.
— — WISMKS (Gaétan de Blocquel de Croix barong à.-.),
écrivain, 1' de la Soc. ac, anc. v.-pr» de la Conf.
La Moricière, r. du Coudray, 33.
17 —
MEMBRES CORRESPONDANTS
1898
1" février,
188 2
17 janvier.
1887
5 avril
1885
13 janvier.
1875 6 décembre.
1872 2 juillet.
1891
8 décembre.
1887
I" mars
1S98
8 novembre.
189G
3 novembre
1886
11 mai.
1883
1 1 décembre
1865 20 juin.
ACHON fie chevalier Charles d'), an. él. de l'Ec. des
chartes, ch. de la Roche-de-Gennes, Gennes (Maine-
et-Loire.
AUMONT (Joseph), photographe, r. Crébillon, 11,
Nantes.
BARMON (Henri Nicolazo de), camérier d'hon. de
S. S. le Pape Léon XIII, ch. de la Touche, Fégréac.
BÉJARRY (le comte Amédée de) ^^, sénateur de la
Vendée, anc. lieutenant-colonel du 6î' régiment ter-
ritorial, r. Tournefort, 7. Nantes, et ch. de la Roche-
Loucherie, S'<'-Hermine (Vendée).
BIAIS (Emile), 0. A. <Ui, archiviste de la Ville, con-
servateur du Musée arch., cor. du Min. des B.-a.,
r. du Rempart-de-l'Est, 34, Angouléme (Charente).
BLANCHARD (Gustave), écrivain, l'des Jeux floraux,
fond, du Colibri, anc. percepteur, r. Morand, 14,
Nantes.
BODARD (Ludovic de), ch. de la Jacopière, Craon
(Mayenne).
BOCERET (Emmanuel Priour de), écrivain, r. Bi-
zienne, Guérande.
BONNE AU (Louis), 0. I. Q,iuge de paix, m. de la Soc.
des Bibl. bret. et de la Soc. polymathique du Mor-
bihan, écrivain, 1' de nombreux concours lit., q. de
baint-Goustan, 28, Aurav (Morbihan).
CASADKS (dom Pelegrin), secr. de la Soc. arch. de
Barcelone, Barcelone (Espagne).
CAZENOVE DK PRADINE (Henri de), ch. de Montes-
quieu, Mézin (Lot-et-Garonne).
CHÂTELLIER (Paul Maufras du), 0. I. Q , écrivain,
cor. de la Soc nationale des ant. de France, ch. de
Kernuz, Pont- l'Abbé (Finistère).
CORSON (l'abbé Amédée Guillotin de), chanoine bon.
de Rennes, écrivain, 1» de l'Institut, de la Soc. fran-
çaise d'arch., de la Soc. ac. de Nantes, de la Soc. arch.
de la Loire-Inférieure, etc., anc. pr' de la Soc. arch.
dlUe-et-Vilaine, ch. de la Noë, Baio-de-Bretagne
(Ule-et-Vilaine).
18 —
1896
3 novembre.
1.898
1885
1885
1898
1888
1881
1890
I89i
1879
1886
1894
1 1 janvier.
9 février.
13 jan.ier.
1 ! janvier.
7 février.
20 décembre.
2 avril.
5 mai.
4 mars.
11 mai.
6 novembre.
1891
8 décembre
1881
7 juin.
1869
4 mai.
1885
7 juillet.
1896 3 novembre.
C )RTELLINI Y DIAZ DKL ALCÂZ.\R (Jacinto), repré-
tc tant de l'héroïque bataillon des artilleurs de la
Havane, m. de la royale Soc. g<^og. de Lisbonne et de
la Soc. arch. de Barcelone, dél. gén. de l'Institut
héraldique d'Italie, puerta de Moros. "î, Madrid (Rs-
DKSGR.VNGES (Louis), 0. A. y, prof. àl'Ec. nor-
male de Savenay, Savenay.
DRESNAY (le vicomte Maurice du), licencié ès-lettres,
attaché à la Légation de France à Tokio, Tokio
(Japon), et ch. du Dréneuc, Fégréac.
EUDEL (Paul), 0. A. y, critique d'art, r. Victor
Massé, 9, Paris.
FRADRT (Olivier), principal clerc de notaire, comp-
table, Canopbon.
GENDRK (l'abbé Armand), vicaire de Vallet.
GENUIT (le docteur Mdrcel), ch. de la Guicbardaje,
Tréal (Morbihan).
GIROUSSE (l'abbé Félix), vicaire de Machecoul.
HERRIOT (Edouard), anc. él. de l'Éc. normale sup.
agr-'gé des lettres, prof, au Lycée de Lyon, r. Mont-
golfier, 89, Lyon (Rhflne).
KERGUENNEC (François Le Chauff de), maire de
St-Molf, Guérande.
LE GOUVELLO (le vicomte Hippolyte). cons. d'arr. de
St-Nazaire, maire de Sévérac, m. de la Comm. du
Musée Dobrée, St-Gildas-des-Bois.
LONGR.AIS (Frédéric Jouon des), archiviste paléo-
graphe, anc. él. de l'Éc. des Chartes, r. du Griffon
4, Rennes, et ch. de la Martinière, Rennes (llle-et-
Vilaine).
MAUPASSANT (le comte Charles de), ch. de Glermont,
Oudon, et r. de Monceau, 69, Paris.
MF^RESSB (Gabriel), banquier, m. et anc. pr'. delà
Chambre de coaimerce, m. de la Soc. des se. nat.
de 1 Ouest de la France, St-Nazaire.
MEYNIER (l'abbé Paul), curé de Basse-Goulaine.
PANT1N.de la guère (le comte Alplionse de), chev.
de Malte, décoré des médailles militaires de Charles
VU et de la Coridad, C. de Charles III d'tfspagne,
anc, officier, m. de la Soc. nationale des ant. de
France, de la Soc. française d'arch. et de la Soc. des
ant. du Centre, r. du Paradis, 22, Bourges (Cher),
et ch. de Dames, St-Eloi-de-Gy (Cher).
PERÈZ-ARCAS (Antonio), décoré des croix de Charles
- 19 —
II et d'Isabelle la Catholique, m. de la Soc. de géog.
de Lisl.onne, de la Soc. arch. de Barcelone, de la
Soc. commerciale de Paris, etc., calle Santa Teresa
7 30, Madrid (Espagne).
1881 18 janvier. PERRON (Louis), expert et greffier de paix, La Croix-
de-Pierre, Varades.
1873 !•' juillet. POGARD-KERVILEK (René), ^. 0. A. H} . C. de St«
Grégoire-le-Grand et d'Isabelle la Catholique , écri-
vain, ingénieur en chef des ponts et chaussées, cor.
du Min. de l'inst. pub. et de la Soc. nationale des ant.
de France, l'de l'Ac. française, v-pr*. d'hon. de la
Soc. des Bib. bret., q. du Commerce, St-Nazaire
1897 12 janvier. QUILG.\RS (Henri), écrivain, Guérande et Gras, en
la Madeleine de Guérande.
1895 2 avril. SAURET (le commandant Henri) ^, 0. A. P, breveté
d'État-Major , chef d'État-Major de l'artillerie du
18' Corps d'armée, Tarbes (Hautes-Pyrénées).
1885 7 juillet. TOUCHE (Henri Roumain de la), anc. procureur impé-
rial, prt. du Cons. d'arr. d'Ancenis, ch. de Champto-
ceaux fMaine-el-Loire) .
— 20 -
MEMBRES HONORAIRES
1859
18H4
1832 5 avril.
1898 1" février. ABGKALL (l'abbé Jean-Marie), chanoine hon. de
Quimper, aumônier de rH<5pital, v.-pr» de la Soc.
arcîi". du Finistère, cor. de la Comm. des monuments
hist.,1' de la Soc. française d'arch.,Quimper(Fini8tère).
1864 7 juin. BARïHP':LEMY (le comte Anatole de) ^f^, écrivain, m.
de l'Institut, de la Soc. nationale des ant. de France
et du Cons. des travaux hist. et se. près du Min.
de l'inst. publ.,r. d'Anjou, 9, Paris.
b avril. CAHOUR (l'abbé Abel), 0. A. ^, chanoine hon., écri-
vain, anc. aumônier du I.ytée, aumônier hon. de la
Grande-Providence, r. des Orphelins, 12.
5 juin. CHOIX (le K. P. Camille de la) ^^c, religieux delà
Compagnie de Jésus, écrivain, Poitiers (Vienne;.
DORGÈRE (le R. P. Alexandre) ^, missionnaire apos-
tolique, r. de Vertais, 16, Nantes, et Whyddah
(Dahomev).
1893 6 novembre. POTTIER (l'abbé Fernand), 0. 1. ^, chanoine titulaire,
pr' de la Soc. arch de Tarn-et-Qarpnne, cor. du Min.
de l'inst. publ. pour les ti-avaux hist., du Min. des
B.-a., delà Comm. des monuments hist., inspecteur
de la Soc. française d'arch., prof, d'arch. au Grand-
Séminaire, r. du Moastier, 59, Montauban (Tarn-et-
Garonne).
1877 6 mars. ROUSSE (Joseph). 0. A. ^, écrivain, anc. cons. gén.
de la Loire-Inférieure, bib. de la Bib. pub., m. de la
Comm. du Musée arch., de la Comm. du Musée des B.-
a. et du Cons. de la Soc. des Bib. bret. r. Royale, 14
Nantes.
1873 1" juillet. SEIDLER (Charles), 46, Hammersraith, Eyot Gardens,
Londres (Angleterre).
Messieurs les Secré'aires généraux prient leurs collègues de vouloir bien
leur faire connaître les rectiacations à apporter à la liste des sociétaires et
déclinent toute responsabilité pour les erreurs et les lacunes qu'entraînerait
un défaut de communication.
— 21 —
SOCIETES CORRESPONDANTES
FRANGE
Aune Socité académique des sciences, arts, belles-lettre»
agriculture et industrie de Saint-Quentin (Saint-
Quentin) .
Allier Société d'émulation du département de l'Allier,
(Sciences, arts et belles-lettres) (Moulins).
Alpes-Maritimes Société des lettres, sciences et arts des Alpes-Mari-
times (Nice et Paris).
Aube Société académique d'agriculture, des sciences, arts-
et belles-lettres du département derAube(TROYES;.
Aude Commission archéologique et littéraire de l'arron-
dissement de Narbonne (Narbonne).
Aveyron. . . , Société des lettres, sciences etarts de l'Aveyron (Rodez).
Basses-Pyrénées . . . Société des sciences, lettres et arts de Pau (Pxtj).
Belfort . . Société belfortaine d'émulation (Belfort).
Bouchefi-du-lihône . . Société de statistique de Marseille (Marseille).
Charente Société archéologique et historique de la Charente
(Angoulême).
Charente- Inférieure . Société des archives historiques (Kevue de Saintonge
et d'Aunis) (Saintes).
Cher Société des antiquaires du Centre (Bourges).
Corrèze Société scientifique, historique et archéologique de
la Corrèze (Brives).
Côies-du-Nord Société archéologique et historique des Côtes-du-
Nord (Saint-Brieuc).
— Société d'émulation des Côtes-du-Nord(SAiNT-BRiKuc).
Creuse Société des sciences naturelles et archéologiques de
la Creuse (Guéret).
Deux-Sèvres Société de statistique, sciences, lettres et arts du
département des Deux-Sèvres (Niort).
Dordogne So:;iété historique et archéologique de Périgord
(Périgueux).
Drame Bulletin d'histoire ecclésiastique et d'archéologie re-
ligieuse des diocèses de Valence, Gap, Grenoble et
Viviers (Romans).
Finistère Société archéologique du Finistère (Quimpbr).
— Société académique de Brest (Brest).
— 22 —
Gard Académie de Nîmes (Nîmes).
Gironde Société archéologique de Bordeaux (Bordeaux).
Hautes-Alpes Société d'études des Hautes-Alpes (Gap).
Haute-Garonne Socii té archéologique du Midi de la France (Toulouse).
Haute-Marne 5»ociélé historique et archéologique de Langres
(Langres).
Haute-Saône Société d'agriculture, science et arts du départe-
ment de la Haute-Sacîne (Vesoul).
Haute-Vienne Société archéologique et historique du Limousin
(Limoges).
— Société des amis] des sciences et arts de Roche-
chouart (Rochechouart).
Ille-et-V Haine Société archéologique du département d'Ille-et-
Vilaine (Renxes).
— Annales de Bretagne publiées par la Faculté des
lettres de Rennes (Rennes).
Indre-et-Loire Société archéologique de la Touraine (Tours).
Isère Académie Delphinale (Grenoble)
Jura Société d'émulation du Jura (Lons-le-Saulnier).
Landes Société de Borda (Dax).
Loir-et-Cher Société des sciences etj^lettres du Loir-et-Cher (Blois).
— Société archéologique, scientifique et littéraire du
Vendômois (Vendôme).
Loire j Société d'agriculture, industrie, sciences, arts et
belles-lettres du département de la Loire (Saint-
Etienne).
Loire- Inférieure Société académique de Nantes et du département
de la Loire-Inférieure (Nantes).
— Société des sciences naturelles «le l'Ouest de la France
(Nantes).
Loiret Société archéologique et historique de l'Orléanais
(Orléans).
Lot Société dt^s études littéraires, scientifiques et artis-
tiques du Lot (Gauors).
Lozère Société d'agriculture, industrie, sciences et arts du
département de la Lozère (Mende).
Maine-et-Loire Société académique de Maine-et-Loire (Angers).
— Société des sciences, lettres et beaux-arts de Cholet
et de l'arrondissement (Cholet).
Manche Société d'agriculture, d'archéologie et d'histoire na-
turelle du département de la Manche (Saint-Lô).
Marn'. Société d'agriculture, commerce, sciences et arts du
département de la Marne (Chalons-sur-Marne).
Mayenne Commission historique etarchéologique de laMayenne
(Latal).
— 23 —
Meurthe-et-Moselle... Société d'archéologie lorraine et Musée historique
lorrain (Nanct).
Meuse ;... Société des lettres, sciences et arts de Bar-le-Duc
(Bar-lk-Duc).
Morbihan Société polymathique du Morbihan (Vannes).
Oise Société académique d'archéologie, sciences et arts
du département de l'Oise (Beauvais).
Orne Société historique etarchéologiquederOrne(ALEXçoN)
Pas-de-Calais Société des antiquaires de la Morinie (Saint-Omer).
Rhône Société académique d'architecture de Lyon (Lyon).
Saône-et- Loire Société Kduenne (Autun).
Sarthe Société d'agriculture, sciences et arts de la Sarthe
(Le Mans).
— Revue historique et archéologique du Maine (Le
Mans et Mamers) .
Seine Journal des savants (Paris).
— Société nationale des Antiquaires de France (Paris).
— Société française d'archéologie pour la conservation
et la description des monuments (Congrès archéo-
logiques) (Paris et Gaen).
— Revue de la Société des Etudes historiques, faisant
suite à l'Investigateur (Paris).
— Comité des travaux historiques et scientifiques (M. I.
P. Paris).
Seine- Inférieure Commission des antiquités de la Seine-Inférieure
(Rouen).
— Société havraise d'études diverses (Le Havre).
Seine-et-Oise Société archéologique de Rambouillet (Rambouillet).
Somme Société des antiquaires de Picardie (Amiens et Paris).
Tarn-et-Garoane . .. . Société archéologique deTarn-et-Garonne(MoKTAUBAN)
Var Sociétés d'études scientifiques et archéologiques de la
ville de Draguignan (Draguiosan).
Vendée Société d'émulation de la Vendée (La Roche-sur-Yon).
Vienne .. Société des antiquaires de l'Ouest (Poitiers).
Yonne . Société des sciences historiques et naturelles de
l'Yonne (.\uxerre).
EXTRAITS
Des procès-verbaux des Séances.
SÉANCE DU MARDI ii JANVIER 1898, k 3 h. 1/2.
Présidence de M. Henri Lk Meignen, président.
Etaient présents : MM. René Blanchard, le vicomte de Kerve-
NOAëL, Maître, RiARDANr.SouLLARD, Truelle Saint-Evron,
Antoine Vincent et le baron Christian de Wismes.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
Il amène une observation de M. le Président sur la statuette
présentée par M. Séchez. Cette statuette, donnée comme trouvée dans
les ruines de la chapelle de Toussaint, a été achetée chez un bro-
canteur, ce qui la rend moins intéressante au point de vue nantais.
L'authenticité lui en paraît contestable, car ces objets sont très rares
à Nantes. Fournier en a cité beaucoup, il est vrai, mais on se de-
mande si ses assertions ne sont pas une forte mystification. M. Maitre
ajoute que M. de Berthou a acheté à Saint-Père-en-Retz une statuette
de ce genre trouvée à Sainte-Marie de For nie ; celle-ci est authen-
tique.
M. Charles Riardant montre à ses collègues un Baiser de paix du
XVI«ou du XVI1« siècle et lit une note Intéressante à ce sujet. Il
ajoute que M. l'abbé Barreau a fait un travail fort instructif sur ces
objets de piété.
A l'unanimité et à mains levées, M.Louis Desgranges, professeur
à l'école normale de Savenay, et M. Olivier Fradet, principal clerc
de notaire à Gampbon, présentés par MM, Léon Maître et Alcide
Dortel, sont admis comme membres correspondants.
M. le Président communique une lettre du ministère des Beaui-
Arts, invitant à donner avant le 30 janvier les noms des délégués
au Conorès des Sociétés savantes. M. Maître dit avoir une carte par
une autre voie. MM. Riardant et le vicomte de Kervenoaël se font
inscrire.
— 25 -
M. Paul Soullard a remarqué dans un article de M. Biancard une
classification des monnaies bretonnes différente de celle de
M. Poëy d'Avant.
M. le Présidet dit que M. Géniaux, avec l'aide de M. l'abbé Abgrall,
publie un ouvrage très curieux sur les monuments de la Bretagne,
^equel a, entre autres mérites, celui de ne pas être cher. Ces mes-
sieurs donneront dans la salle des Sociétés savantes, le 24 janvier,
une séance de projections accompagnées d'explications. Cette soirée
promet d'être très intéressante. Des cartes d'invitation seront en-
voyées aux membres des Sociétés savantes de la ville.
La séance est levée à 5 heures.
Le Secrétaire général.
Baron de Wismes.
SÉANCE DU MARDI i" FÉVRIER 1898, à 8 h. du soir.
Présidence de M. Henri Le Meignen, président.
Etaient présents : MM. de Berthou, Charron, le vicomte
DE KERVENOAëL, SeNOT DE LA LONDE, MaÎTRE, RÉVÉREND,
RiARDANT, Paul SouLLARD, le baron Christian et le baron
Gaétan de Wismes.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. le Président résume en quelques mots l'intéressante conférence
donnée par M. l'abbé Abgrall à la salle de la Société de géographie.
M. Charron montre des photographies de Tréguier, une vue de la
cathédrale de cette ville et présente un ouvrage de M. Renan, revêtu
d'une dédicace de l'auteur. Quelques explications sur la cathédrale
de Tréguier nous sont fournies par M. Charron qui donne lecture
d'une notice de M. Renan. La ville de Tréguier fut fondée, nous dit-
il, par des émigrés bretons du Vl« siècle. La cathédrale, édifice go-
thique, très intéressant, possède de curieuses stalles en vieux chêne
sculpté. A propos de certains détails de ces stalles, M. de Berthou
fait observer que les deux époques où l'on trouve ainsi des sujets
obscènes sculptés sur les monuments sont le XI* siècle et plus tard
la Renaissance. M. le Président remercie M. Charron de sa commu-
nication et émet le vœu que tous nos collègues fassent ainsi part à
la Société de leurs impressions de voyage.
M. Alphonse Lotz-Brissonneau, présenté par MM. Henri Le Meignen
et Georges Charron, et M. Henri Gousset, présenté par MM. le baron
- 26 —
Gaétan de Wismes et Joseph Senot de la Londe, sont élus membres
titulaires. M. le chevalier Charles d'Achon présenté par MM. Léon
Maître et Joseph Senot de la Londe est nommé membre correspon-
dant. M. d'Achon a déjà procuré à M. Maître de nombreux docu-
ments.
Sur la proposition de M. le Président, M. l'abbé Abgrali est élu
par acclamation membre honoraire de notre Société.
La parole est à M. Senot de la Londe pour nous donner lecture
d'un document inédit concernant un combat en champ clos entre un
chevalier français et un chevalier anglais sur la place publique du
Mans pendant la guerre de Cent ans. Au lieu d'un document piomis
par lui, M Senot de la Londe nous en présente deux ayant trait au
même sujet. Il s'agit d'un différend entre Pierre Boylesve, chevalier
français, et un chevalier anglais, gouverneur de Sainte-Suzanne, le
jeune sire Descalles, qui l'avait arrêté indûment sur la place pu-
blique du Mans, malgré un sauf-conduit. La première pièce est une
lettre du duc de Bedtbrd, de l'année 1431, ordonnant de rendre jus-
tice à Pierre Boylesve; la seconde est le procès-verbal du combat en
champ clos qui eut lieu entre les deux chevaliers et se termina par
la mort du sire Descalles. Ce document est de 1431 comme le pre-
mier, mais postérieur de huit mois ; il contient une foule de détails
aussi curieux qu'intéressants. Chacun examine les premiers parche-
mins encore revêtus de leurs sceaux, et tous les deux d'une conser-
vation parfaite M. le Président est l'interprète de tous en remer-
ciant M, Senot de la Londe d'avoir bien voulu extraire pour nous de
son précieux chartrier quelques-unes des pièces les plus curieuses.
M. de Berthou rend compte d'une publication qu'il a entreprise
avec M. Maître, aux frais de la Société des Bibliophiles bretons, l'é-
dition de Vltinéraire de Bretagne de Dubuisson-Aubenet. Le pre-
mier volume, qui doit comprendre les 36 premiers chapitres jusqu'à
Nantes, va paraître très prochainement; le second comprendra
Nantes et les remarques. Pour donnerune idée du travail, NL de Ber-
thou lit le chapitre intitulé : « V Ancien circuit de Nantes. » Il s'agit
là de l'ancienne muraille romaine, et ce sujet si intéressant donne
lieu à plusieurs observations et remarques de MM. Le Meignen et
Maître.
Le Secrétaire général,
Vicomte db Kervenoaël.
— 27 —
SEANCE DU MARDI 7 MARS 1898, à 3h. 12.
Présidence de M. Henri Le Meignen, président.
Etaient présents : MM. de Berthou, René Blanchard, Che-
GuiLLAUME, DoRTEL, l'abbé DuRviLLE, GoussET, le vicomte
DE Kervenoael, Lallié, Lotz-Brissonneau, Maître, de la
Peyrade, Pouvreau, Riardant, Antoine Vincent, le baron
Christian et le baron Gaétan de Wismes.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. le Président souhaite la bienvenue à deux nouveaux collègues :
M. Alphonse Lotz-Brissonneau , un bibliophile distingué , et
M. Henri Gousset, dont le père a joué un rôle important dans
l'enseignement nantais.
M. Jules Revelière, receveur de l'Enregistrement en retraite, pré-
senté par MM. Maitre, P. de Lisle du Dreneuc et A. Vincent, est
admis comme membre titulaire.
M. Lotz-Brissonneau présente un très joli dyptique, malheureuse-
ment moderne, mais reproduisant merveilleusement l'ancien ; un
autre, ancien celui-là, une belle médaille de Ferdinand , roi de
Naples et de Sicile, et une superbe monnaie de Louis XIIL d'une va-
leur nominale de huit louis.
M. Lotz annonce la préparation d'un ouvrage sur Nantes, avec
la collaboration artistique de M. Béraldi, l'artiste connu. Cet ouvrage
ne sera tiré qu'à 200 exemplaires, dont 50 sont déjà souscrits, et
coûtera 100 francs au plus. Il sera terminé d'ici dix-huit mois, deux
ans au plus tard. Les gravures seront sur bois dans le texte, à l'eau-
forte hors texte. M. Lepère, qui en est chargé, est venu deux fois à
Nantes, car ce sera Nantes au point de vue impressionniste, un peu
humoristique. Le texte sera imprimé sur papier filigrane aux armes
de Nantes ; le tirage sera fait par M. Grimaud. M. Lotz recueille les
oeuvres de l'artiste et en possède de 250 à 300, assez pour en faire don
au Musée. M. Le Meignen remercie M. Lotz de sa précieuse commu-
nication et le félicite de ce travail, qui sera une gloire pour Nantes.
M. le Président pense qu'un grand nombrede membres de la Société
ont assisté aux séances que M. l'abbé Abel Soreau a donné à Saint-
Stanislas. M. Soreau a réuni avec amour et succès des planclies sur
le vieux Nantes, mais n'a pu trouver grand chose sur notre ville aux
XIV« et XV» siècles. La belle collection de M. Petit se trouve entre
— 28 -
les mains de M"' Sémeril ainsi que deux sépias d'un élève de Rem-
brandt représentant également des vues de Nantes.
M. l'abbé Durvilledit que M. l'abbé Soreau a cité Mathurin Rodier
comme enterré dans la cathédrale, alors que par testament cet ar-
chitecte avait déclaré vouloir être enterré à Saint-Laurent avec sa
femme. Cette dernière a été inhumée en 1585; lui a dû mourir peu
après.
M. l'abbé Durville lit un travail très documenté sur les anciens
fiefs delà ville de Nantes {intérieur de la ville) : le fief de V évoque et
le fief au duc. yi. le Président adresse à l'auteur pour ce remarquable
travail ses remerciements et ses félicitations et lui demande s'il en a
disposé. — Non, répond M. l'abbé Durville, je fais mes travaux pour
la Société. Cette réponse, si flatteuse pour nous, soulève de nouveaux
applaudissements.
M. de Berthou lit un travail de Dubuisson-Aubenet sur l'ancien
Nantes, qui est écouté avec le même vif intérêt que les précédents.
La séance est levée à 5 h. 3/4-
Le Secrrlaire général,
Baron de Wismes.
SEANCE DU MARDI 5 AVUIL 1898. à 3 h. i|2.
Présidence de M. Henri Le Meignen, président.
Etaient présents : MM. de Berthou, le marquis de Bremond
d'Ars Migré , Chaillou , Charron , Gheguillaume , le
marquis de Dion, Dortel, l'abbé Durville, Leroux, Senot
de LA Londe, Maître, DE la Peyrade, Orieux, Révérend,
RiARDANT, Paul Soullard, Truelle Saint-Evron, Félix
Vincent, le baron Christian elle baron Gaétan de Wismes.
M Lotz-Brissonneau s'excuse de ne pouvoir assister à la réunion.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. le Président exprimeles regrets de la Société pour la double
perte qu'elle vient de faire. M. Alfred Bossis, un de ses membres les
plus assidus, a succombé le 20 mars, et, le lendemain, la mort em-
portait notre distingué collègue M. Alexandre Rousseau.
M. Félix Chaillou donne des indications sur les fuseaux dont on se
servait aux Gléons. 11 n'a pas retrouvé le bois, parce qu'il était pro-
bablement léger et s'est effrité, mais les deux extrémités — la
fusaïole en terre cuite, qui a un intérêt local, et la ti, en bronze. Le
— 29 -
trou delà fusaïole est plus petit que l'intérieur de la ti. Le corps se
composait d'un petit poinçon, pointu des deux bouts, entrant dans
le corps de la ti et dans la fusaiole, et probablement changé de
temps à autre. Ces objets, très grossièrement faits, — M. Chaillou in-
siste sur ces mots,— appartiennent à la partie industrielle desCléons.
Il en résulte que lorsqu'on n'avait pas de fusaïoles, on en découpait
dans des poteries. M Chaillou a eu la chance de trouver une de
ces poteries et l'exhibe. C'est une poterie très cuite, très résistante,
pour que la lusaïole ne fût pas tordue. M. Chaillou clôtoette inté-
ressante communication en invitant de nouveau la Société à venir
aux Cléons et en disant tout le plaisir qu'il a de recevoir les ap-
préciations de ses collègues sur les objets de son musée. M. le Pré-
sident le remercie aimablement et parle de la satisfaction que cause
une visite chez notre érudit collègue. M. le marquis de Dion dit
quelques mots sur les fuseaux que possède le musée de Cluny.
M. le baron Gaétan de Wismes montre la statue de Louis XV,
faite en 1744 pour la ville de Rennes, reproduite avec une sorte de
lavis. Cette très belle pièce, qui fait l'admiration de l'assistance, est
signée Le Forestier, architecte, 1756. Cette statue ne doit plus exister.
M. le Président remercie M de Wismes de sa très intéressante
communication et dit qu'on pourrait en faire une autre sur Le
Forestier.
M. Eugène de Ribier, agrégé des lettres, professeur de rhétorique
au Lycée, présenté par MM. Georges Charron et Henri Le Meignen,
est admis comme membre titulaire. M. Charron remercie de l'ad-
mission de M. de Ribier, dont il fait l'éloge en quelques mots, et
M. le Président revient à nouveau sur l'utilité que la Société peut
retirer de la science des membres de l'Université.
M. l'abbé Georges Durville lit une étude intitulée : Un architecte
de cathédrale au XV' siècle, Mathurin Radier, « maistre maccon »
de l'Eglise de Nantes. Ses rapports avec le Chapitre, choix de sa sé-
pulture et fondation de son anniversaire en l'église de Saint- Laurent.
Cette étude, aussi bien pensée que bien écrite, vaut à l'auteur,
outre les applaudissements chaleureux de l'assistance, les compli-
ments flatteurs et mérités de M. le Président
M. le baron Gaétan de Wismes communique un document inédit
sur la procession de la Fête-Dieu à JSantes à diverses époques.
C'est une pièce curieuse, dont la lecture est écoutée avec l'attention
qu'elle mérite.
M. le Président termine la séance en nous disant quelques mots
du cinquantenaire de Chateaubriand. La fête en sera célébrée à
— 30 —
Saint-Malo le 19 juillet prochain (cette date a été ajournée au 7 août).
Notre Société a donné une souscription. Un concours de prose et de
poésie sera ouvert et des récompenses seront accordées.
La séance est levée à 5 h. 1/2.
Le Secrétaire général.
Baron de Wismes.
SÉANCE DU M4RDI 3 M.\l 1898. à 8 h. du soir.
Présidence de M. Henri Le Meignen, président.
Etaient présents : MM. Gallier, Charron, Gousset, Leroux,
Maître, Pied, Riardant, de Ribier et le baron Christian de
Wismes, — M. Bonnigal, invité.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. Charron demande quand la Société prendra possession du
nouveau Musée et rendra son invitation à la Société polymathique.
M. le Président lui répond qu'on veut présenter le Musée comme
l'aurait fait M. Dobrée, ce qui demande du temps. Il vaudrait mieux
laisser voir quelques salles ; mais il faudrait que la presse s'occupât
de cette question.
M. le Président souhaite la bienvenue à M. Eugène de Ribier, qui le
remercie avec une modestie de bon goût.
M. le Président donnne lecture des travaux de M, Henri Quilgars,
retenu à Paris par ses études .
I. — Le menhir de la Pierre-Blanche dont nous parle ce dernier a
été signalé plus d'une fois par les archéologues qui se sont occupés
de la presqu'île Guérandaise. M. Henri Quilgars a pratiqué une
fouille au mois d'octobre 1896 sous ce menhir, et il résulte de ses
recherches que ce monument ne doit pas appartenir à l'époque dite
communément celtique : rien n'empêche de croire que ce mégalithe
de quartz soit de l'époque romaine. M. le Président rappelle que
M. James Milla fait des dépouvertes de ce genre dans le Morbihan.
II. — Les Rochers de Kramaguen, près Guérande ; tel est le titre
du second travail de M. Henri Quilgars. Ces rochers situés sur la
route de Saille, à 1 kilomètre de Guérande, ont souvent attiré l'atten-
tion des archéologues par leur position et leur forme bizarre. Les
Guérandais les montrent aujourd'hui comme les derniers témoins du
port de leur ville. Quelques auteurs ont contribué à accréditer cette
légende, entre autres M. Ernest Desjardins, membre de l'Institut,
dans sa géographie de la Gaule romaine.
Dans des pages pleines de verve, M. Henri Quilgars combat à bon
droit l'opinion d'un auteur- plus modeste : M. Monnier, de Nantes.
D'après ce dernier les rochers de Kramaguen seraient une représen-
tation grossière de la déesse Guen, à laquelle la ville voisine était
dédiée. M. Quilgars se demande avec raison comment les Celtes
auraient pu consacrer à cette déesse une ville qui n'existait pas à
cette époque, puis il conclut en disant que la période glacière a
laissé de nombreuses traces dans le pays guérandais. Pourquoi les
découpures des rochers de Kramaguen ne seraient-elles pas l'effet
des glaciers, qui partout où ils ont passé ont laissé des traces faciles
à suivre? Cette explication paraît, en tout cas, plus vraisemblable
que la première. M. Maître fait remarquer que Hermagouaye signi-
fie : Terre des Murailles {XV^ siècle).
Monsieur le Président donne ensuite lecture d'une communication
de M. Furret, concernant l'emplacement qu'occupait le front sud de
l'enceinte romaine nantaise. Le front sud de l'enceinte romaine
nantaise partait de l'église Saint-Saturnin, établie dans un bastion
que fortifiait l'angle de l'enceinte romaine. Il en résulte que la mu-
raille antique doit former la séparation entre les immeubles bordant
la voie antique constituant la Basse-Grande rue, la place du Pilori
et la rue Basse-du-Château, et ceux bordant la voie du moyen âge,
constituée par les rues Sainte-Croix, de la Juiverie et de l'Emeri.
Plusieurs maisons contigUes au mur antique ont deux étages
souterrains, ce qui s'explique par la profondeur du sol naturel
en cet endroit. Des recherches faites dans ces étages permettraient
d'acquérir la preuve certaine des faits exposés.
Monsieur le Président fait remarquer l'importance de la commu-
nication de M. Furret ; puis il nous dit quelques mots sur le cin-
quantenaire de Chateaubriand, dont la date est fixée au 7 août : le
panégyrique sera prononcé par le R. P. OUivier.
La séance est levée à 9 h. 3/4,
Le Secrétaire général,
Baron de Wismes.
32
SEANCE DU MARDI 7 JUIN 1898. à 3 h. 12.
Présidence de M. Henri Le Meignen, président.
Etaient présents : MM. de Berthou, Caravanniez, Charron,
le marquis de Dion, Dortel, l'abbé Durville, le vicomte
DE Kervenoael, Pître de Lisle du Dreneuc, Maître,
Orieux, Pied, Riardant, de Ribier, Antoine Vincent,
le baron Christian et le baron Gaétan de Wismes.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. le vicomte René de Boiiard, présenté par MM. Georges Charron
et Edouard Pied, est nommé membre titulaire. M. Charron fait en
quelques mots l'éloge de notre nouveau collègue, qui sera, nous dit-il,
une précieuse recrue pour la Société.
M. Eugène Orieux lit un intéressant commentaire d'une charte de
Louis le Gws. Ce document énumère les domaines qui appartenaient
aux évêques de Nantes et ceux qui dépendaient des comtes de Nantes.
Un édit de 614 conduisait à l'hérédité; c'est par Charles le Chauv
que lut décrété le principe même de l'hérédité, nous dit M. Orieux,
qui commence son travail en rendant hommage à la science et à la
complaisance si connues et si appréciées de M. l'abbé Durville, dont
le concours lui a été précieux.
L'original de la charte n'existe plus; elle est de 1123 et l'évèque
de Nantes alors se nommait Brice. Parmi les domaines de la rive
gauche de la Loire sur lesquels la charte donne des détails, on peut
citer notamment l'abbaye de Saint-Martin de Vertou, entourée par
la chàtellenie de Couffon et la seigneurie de Goulaine, le prieuré de
Chémeré, Aizenay avec l'église Saint-Benoît, le Puy Saint-Bonnet, le
Pallet, seigneurie appartenant en 1090 aux sires du Pallet, puis aux
Goulaine et aux Barrin, la chàtellenie de Champtoceaux, Saint-
Julien de Concelles aux moines de Saint-Florent. Sur la rive droite,
mentionnons Chassay, la baronnie de Derval, Conquereuil, Hercé et
Fercé au diocèse de Rennes, Béré, domaine donné à Marmoutier en
10.50, Soudan, Erbray, Abbaretz, la chàtellenie de Vioreau, Saint-
Julien de Vouvantes, Joué, Varades, Teille, Ligné, Mauves, Saint-
Mars-du-Désert , Casson , Sucé, Orvault, Sautron, le monastère
d'Indre, Garquefou, Ranzay, Saint-Joseph de Portricq, Thouaré,
Doulon La charte énumère les églises de Nantes : Saint-Donatien et
Saint-Rogatien, Sainte-Mère de Dieu, Saint-Clément, Saint-André.
Les domaines de l'évèque, tant églises que navires et biens de toutes
sortes, s'élevaient au nombre de 84, mais à l'époque de la charte on
— 33 —
n'en trouve que 22 ou 23, au lieu de 84. Beaucoup de seigneurs
étaient alors, il est vrai, possesseurs de biens réclamés par l'Eglise,
les sieurs du Pont, de Besné, de Derval, Brient-le-Bœuf, sire de
Nozay en 1202, le seigneur de Teille, Brient de Châteaubriant,
Hervé de Joué, Guihenoc d'Ancenis, Guillaume de Monstrelais, en
1120. M. Orieux soumet à la Société un certain nombre d'étymolo-
gies et termine son travail en citant la description de Chassay don-
née par le poète Fortunat, qui fut dans ce beau domaine l'hôte du
grand saint Félix.
M, le président félicite M. Orieux de cette consciencieuse et inté-
ressante étude, qui soulèvera certainement des controverses. C'est,
dit-il, le propre des travaux sérieux d'amener la discussion et de la
discussion naît souvent la lumière. M. Maître lait observer que la
plus forte objection qu'on puisse faire contre la charte, c'est son
style qui fait douter de son authenticité. On peut s'étonner aussi
que Guérande manque à l'énumération donnée par la charte.
M. l'abbé Durville, qui déclare que le concours donné par lui à
M. Orieux s'est borné à la communication de quelques notes, fait
observer que l'omission de Guérande vient de ce que la charte ré-
sume trois chartes anciennes, antérieures à l'église de Guérande.
Du reste, on pourrait identifier un domaine cité par la charte avec
un lieu des environs de Guérande.
Plusieurs expressions choquantes, de très mauvaise latinité, se
trouvent à côté d'excellent latin ; peut-être la charte a-t-elle été
mal copiée par dom Lobineau. M. Maître s'étonne aussi de nepas
trouver parmi les domaines de l'église Saint-Etienne de Mer Morte ;
M. l'abbé Durville ne croit pas que Saint-Etienne de Mer Morte
dépendit de l'église.
Après une très intéressante discussion, à laquelle prennent part
MM. Le Meignen, Maître, l'abbé Durville, de Ribier, la parole est
donnée à M. Charron, qui présente une obole de Richard Cœuv de
Lion, découverte par lui à Nantes. Cette monnaie est citée par Poëy
d'Avant ; on en a trouvé de semblables en Aquitaine et en Poitou,
mais on n'en rencontre que rarement à Nantes.
M. le Président parle des fêtes projetées pour le cinquantenaire
de Chateaubriand et M. de Lisle du Dreneuc dit quelques mots du
musée si curieux et si intéressant de M. du Châtellier, qu'il nous en-
gage vivement à visiter.
La séance est levée à 5 heures 1/2.
Le Secrétaire général.
V'« DE KeRYENOAËL.
34
SÉANCE DU MARDI 5 JUILLET 1898, à 3 h. 1/2.
Présidence de M. Edouard Pied.
Étaient présents : MM. le vicomte de Boùard, Charron, de la
Peyrade, de Ribier et le baron Christian de Wismes.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
L'admission de MM. .Jules de France, commissaire-voyer, présenté
par MM. Le Meignen et Pouvreau, et de M. Félix Rigault, vérifica-
teur des douanes, présenté par MM. Charron et P. SouUard, est
prononcée à l'unanimité et par acclamation.
La séance est levée à 4 heures.
Le Secrétaire général,
Baron de Wismes.
SÉANCE DU MARDI 8 NOVEMBRE 1898, à 3 h. 1/2.
Présidence de M. Henri Le Meignen, président.
Etaient présents : MM. René Blanchard, Dortel, l'abbé Dur-
ville, Orieux, Pied, Riardant, Rigault, Paul Soullard,
Félix Vincent et le baron Christian de Wismes,
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. le Président demande à la Société de ratifier l'admission pro-
visoire de deux nouveaux membres, faite pendant les vacances,
M. le commandant de Montessus et M. le médecin principal Tachard.
Le commandant Fernand de Montessus de Ballore, chef d'escadron
d'artillerie et commandant du Château,est un archéologue distingué,
mais modeste. Il a publié, sous le pseudonyme de Salvator.nn article
sur la Colombie et a fait don à la Société d'un très bel ouvrage
illustré sur les poteries colombiennes. Probablement il prendra
une part très active à nos travaux. M. Dortel demande la permission
d'ajouter que le commandant de Montessus est l'inspirateur de
l'ouvrage sur le Château de Nantes, qui a paru dans la Revue nan-
taise sous la signature de MM. D. Caillé et Furret et a été publié
dans un fascicule séparé. Le commandant a découvert dans l'en-
ceinte du château des choses nouvelles, que personne ne soupçon-
nait et dont il pourra faire part à la Société.
Quant à M. Elle Tachard, chef du service de santé du XI« corps,
— 35 —
il est originaire de Montauban et faisait partie de la Société archéo-
logique de cette ville Cette Société fait des excursions au loin, et a
choisi cette année la Bret igne comme but de sa visite. Des lettres
d'invitation ont été envoyées. M. Riardant se plaint de n'avoir pas
reçu la sienne M. le Président et plusieurs membres déclarent, à
ce propos, qu'il n'y a pas lieu de s'en étonner, car partout, à Paris
comme dans les départements, le service des postes est indignement
mal fait: les erreurs, les retards et les vols y sont d'ordre journalier;
de nombreux faits sont cités à l'appui.
Ces deux nouveaux collègues sont présentés par MM. Le Meignen,
et René Blanchard.
M. le Président propose d'admettre également, bien que sa candi-
dature n'ait pu être mise à l'ordre du jour, M. le vicomte Stéphen
de Sécillon, qu'il présente avec M. Pitre de Lisle, conservateur de
notre Musée.
Enfin M. le Président propose comme membre correspondant,
avec M. Charles Riardant, M. Louis Bonneau, juge de paix d'Auray,
qui a fait à Locmariaquer des travaux de sondage extraordinaires, qui
seront publiés dans le Bulletin de Lafas.
Sur la proposition de M. le Président, et en l'absence de toute
opposition, le commandant de Montessus, le médecin principal
Tachard et le vicomte de Sécillon sont nommés par acclamation
membres titulaires de la Société archéologique et M. Bonneau
l'est comme membre correspondant.
M. le Président rappelle qu'une médaille d'or, dont la première
a été olïerte par le marquis de Dion, et dont le coin a été généreu-
sement donné à la Société par son ancien président, récompense, tous
les trois ans, la meilleure communication intéressant le département
de la Loire-Inférieure et l'ancien diocèse de Nantes.
Le 3* concours a été clos le l^"" novembre et le jury doit être nommé
par l'assemblée générale. Celle-ci décide à l'unanimité que le Bureau
et le Comité central formeront le jury de cette année. M. le Président
rappelle, en outre, que, suivant la décision prise par le Comité, afin
d'éviter les inconvénients qui se sont déjà produits, le titulaire
sera désigné par le jury dans son rapport, au lieu d'être nommé
par l'assemblée d'après ce rapport. M. le Président croit bon d'en-
trer à cet égard dans quelques détails sur le rôle du Comité central,
qui est seul chargé de tous les intérêts moraux et matériels de la
Société.
M. le Président fait part à ses collègues de trois petits événements
qui se sont produits pendant les vacances.
— ^6 —
1° Tout d'abord le Congrès pour l'avancement des sciences (ou de
Lafas), qui s'est tenu à Nantes du 4 au 11 août. La Société n'a pris
qu'une faible part à ce Congrès, qui a été très pâle par suite de cir-
constances connues. La Société archéologique s'est fondue avec la
Société anthropologique. On a entendu des savants distingués, tels
que M. de Mortillet, M. Rivière, mais ils n'ont fait qu'une courte
apparition.
2° Ensuite le cinquantenaire des funérailles de Chateaubriand,
célébré le 7 août à Saint-Malo. La Société y a pris part par le
don qu'elle a fait à cette occasion. C'a été une joie pour les admira-
teurs de Chateaubriand de voir l'éclat donné aux fêtes. Quatre dis-
cours incomparables ont été prononcés par le R. P. Ollivier, des
Frères Prêcheurs, malouin, par le vicomte Melchior de Vogué, de
l'Académie, par son collègue M. Ferdinand Brunetière,directeur de la
Revue des Deux-Mondes, et par notre éminent confrèrefM. Arthur de
La Borderie, de l'Institut. Chateaubriand a reçu là un hommage qui
lui était dû et qui a ravivé son souvenir, un peu oublié dans les mas-
ses. 11 n'y avait là rien d'officiel : pas d'illuminations, pas de troupes;
c'était une fête intime et littéraire, mais elle a été aussi complète
que possible ; aucune note discordante ne s'y est fait entendre.
3» Enfin c'est le passage pendant une journée, le 13 septembre, de
la Société archéologique de Tarn-et-Garonne, présidée par M. le cha-
noine Pottier, laquelle compt-e autant de protestants que de catho-
liques. Quelques membres seulement ont pu, en raison de la date,
se réunir à M. le Président pour faire à cette Société, avec laquelle la
nôtre est depuis longtemps en relations, un accueil digne d'elle.
MM. René Blanchard, Charron, Dortel, l'abbé Durville, C. Le Cour,
ont fait faire à leurs collègues du Midi une longue et charmante
promenade à travers notre ville Partis de la Duchesse Anne, ils
ont pris le bateau jusqu'à Trentemoult, ont visité Sainte-Anne,
Notre-Dame,notre ancien musée et le musée Dobrée, où une réfection
leur avait été préparée, Saint-Nicolas, le musée des Beaux-Arts,
Saint-Similien et les vieilles rues adjacentes, puis ont été prendre
un lunch dû à la gracieuse attention de M. Tachard, qui a hospita-
lisé M; Pottier et un autl^e ecclésiastique. Leur promenade a été
couronnée par notre magnifique cathédrale, notre vieux Château,
dont l'aimable commandant de Montessus leur a fait les honneurs,
et la curieuse église Sainte-Croix. La Société montalbanaise a fait
le lendemain l'excursion de Clisson. M. le chanoine Pottier a
adressé à notre Président, qui a dans cette circonstance si bien re-
présenté la Société, une lettre de chaleureux remerciement^.
— 37 —
Cette Société a fait, dit M. Dortel, des voyages en Italie et en Bel-
gique. M. le Président ayant été nommé, ainsi que M. Le Cour,
membre d'iionneur de cette Société, propose, à titre de réciprocité, de
décerner à M. le chanoine Pottier le titre de membre honoraire de
la nôtre, ce à quoi l'assistance acquiesce avec empressement.
M. le baron de Wismes communique à l'assemblée une lettre
adressée au ministre des Beaux-Arts par un certain nombre d'ar-
tistes fréquentant la Bretagne, afin d'empêcher l'aliénation des rem-
parts de la ville close de Concarneau, Ces remparts constituent, en
effet, un spécimen en parfaite conservation, qu'il serait fâcheux de
voir disparaître, alors que, sous prétexte d'intérêts commerciaux, on
a déjà annihilé tant de merveilles d'architecture ancienne. Il serait
urgent de faireintervenir la Commission des monuments historiques.
M. le baron de Wismes dit ensuite avoir reçu aujourd'hui même
la visite de M. de la NicoUière-Teijeiro, notre ancien président,
qui l'a chargé de l'excuser de ne pouvoir, en raison de son état de
santé, venir à la séance et l'a prié de remettre à la Société l'intéres-
sant ouvrage publié à l'occasion du Congrès : La ville de Nantes et la
Loire-Inférieare, qu'il a obtenu du Maire de Nantes pour notre
bibliothèque.
L'ordre du jour appelle la lecture d'un travail de M. Eugène
Orieux : Le général de la paroisse de Batz, 1732-1738. Les travaux
de notre respectable collègue se distinguent toujours par l'abon-
dance des détails recherchés avec une conscience scrupuleuse.
Celui ci ne fait pas exception à la règle ; aussi la lecture en est
saluée par les applaudissements de l'assemblée.
Nos collègues accueillent également avec une faveur marquée le
compte rendu d'une excursion archéologique par M. Alcide Dortel et
souhaitent que de verbale cette relation devienne écrite : « Verba vo-
lant, scripta manant. »
L'abondance de nos travaux ne permet pas de donner lecture de
deux autres études inscrites à l'ordre du jour : La période du bronze
en Armoriqué, par MM Paul du Chàtellier et Pitre de Lisledu Dreneuc
et Dn inventaire des objets de toilette, bijoux et mobiliers d'une
jeune femme à la findu XVIII" siècle, par M. Stéphane de la Nicol-
lière-Teijeiro. La lecture en est renvoyée à une prochaine réunion.
Avant de lever la séance, M, le Président tient à rendre un
hommage mérité à deux de nos collègues décédés récemment, M le
baron Bertrand-Geslin, ancien vice-président, homme d'une exquise
politesse, d'une grande amabilité, qui s'intéressait beaucoup à la
Société dt était très serviable, et M. Alphonse Pot, excellent et digne
— 38 —
collègue, plein de modestie, que l'éloignement, le soir, et ses occu-
pations, le jour, empêchaient de venir souvent à nos séances, mais
qui s'y intéressait également beaucoup.
Après cet hommage si justement mérité, la séance est levée à
5 heures 3/4.
Le Secrétaire général.
Baron de Wismes.
SÉANCE DU MARDI 6 DÉCEMBRE. 1898, à3h. i;2.
Présidence de M. Henri Le Meignex, président.
Étaient présents : M. Alizon, l'abbé Allard, Baugé, le vicomte
HoRRic DE Beaucaire, DE Berthou, René Blanchard, du
Bois de la Patellièpe, Bouchaud, Bougoûin, le vicomte
de Boûard, de Brévedent, Charron, Cheguillaume, le
marquis de Dion, Dortel, l'abbé Durville, Gousset, le
docteur Josso, Brtant de Laubrière, Leroux, Pître de
LiSLE DU Dreneuc, Senot de la Londe, Maître, Claude de
MoNTi DE Rezé. de laNicollière-Teijeiro, Orieux, Paris-
Réby, Pied, Pommier, Pouvreau, de Ribier, le docteur
Rouxeau, l'abbé Soreau , Paul Soullard, le vicomte de
Sécillon, le médecin principal Tachard, Vallet, Antoine
Vincent, le baron Christian elle baron Gaétan de "Wismes.
Un certain nombre de membres ont exprimé leurs regrets de ne
pouvoir assister à la séance.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté.
M. le Président annonce à l'assemblée, une des plus nombreuses
qui se soient «vues depuis la fondation de la Société, que le Comité
central a attribué à l'unanimité la médaille d'or du concours
triennal à M, le chanoine Guillotin de Corsoç pour son travail mo-
numental sur les Grandts Seigneuries de la Haute-Bretagne, mais
qu'elle a tenu à récompenser le zèle, le dévouement et le talent hors
ligne de deux autres membres , si connus pour leurs magnifiques
travaux : M. René Blanchard et M. l'abbé Durville, en leur décernant
une médaille d'argent. Cette décision est ratifiée par les chaleureux
et unanimes applaudissements de l'assistance.
11 est ensuite procédé à la nomination d'un nouveau Bureau. Le
vote, qui se fait au scrutin de liste et par appel nominal, donne les
résultats suivants.
Nombre de votants : 41. — Majorité absolue : 21.
— 39 —
Président
M. le marquis Anatole de Bremond d'Ars Migré, 39 voix ÉLU.
M. le marquis de Balby de Vernon : 2 voix.
Vice-présidents
MM. René Blanchard 36 voix : ÉLU.
le baron Christian de Wismes 36 voix : ÉLU.
MM. CHAIL7 0U, DoRTEL, Maître, chacun : 3 voix; Pître de Lisle :
1 voix.
Secrétaires généraux
MM. Paul DE BERTiiou 35 voix: ÉLU.
Alcide DORTBL 29 voix : ÉLU.
MM. Maître : 7 voix ; l'abbé Durville : 5 voix ; René Blanchard :
4 voix. — 2 bulletins blancs.
Secrétaires du Comité
MM. le baron Gaétan DE Wismes 38 voix: ÉLU.
Joseph Senot de LA Londe 37 voix: ÉLU.
MM. Séchez et Marcel Soullard, chacun : 3 voix ; Dortel : 1 voix.
Trésorier
M. Charles RrARDANT 38 voix : ÉLU.
M. Paul Soullard : 2 voix. — 1 bulletin blanc.
Trésorier-adjoint
M. Raymond Pouvreau 40 voix : ÉLU.
I bulletin blanc.
Bibliothécaires-archivistes
MM. Henry Da la Peyrade. 38 voix : ÉLU
Paul Soullard 37 voix: ÉLU.
MM. DE Berthou et l'abbé Durville, chacun : 3 voix. — 1 bulletin
blanc .
M. le Président proclame officiellement la nomination du nouveau
Bureau, qui se trouve ainsi composé :
Président M. le marquis de Bremond d'Ars Migré.
MM. René Blanchard.
le baron Christian de Wismes.
MM. ï'aul de Berthou.
Alcide Dortel.
MM. le baron Gaétan de Wismes.
Joseph Senot de la Londe.
Vice-présidents. . . . <
Secrétaires généraux . . >
Secrétaires du Comité .
— 40 —
Trésorier M. Charles Riardant.
Trésorier-adjoint . ... M. Raymond Pouvreau.
. ,. . ... ( MM. Henry DE LA Peyrade.
Bibliothecair es-archivistes, l ^ , r.
\ Paul SOULLARD.
Sar la proposition de M. le Président, M. Léon Maître est nommé
membre du Comité, en remplacement du regretté baron Bertrand-
Geslin, et MM. Félix Chaillou et le marquis de l'Estourbeillon sont
renommés pour 3 ans.
MM.de Perthou et SouUard, membres du Comité, faisant partie du
nouveau Bureau, des successeurs leur seront donnés à la prochaine
réunion.
La séance est levée à 5 h. 1/4.
Le Secrétaire général,
Baron de Wismes.
LES ROCHERS DE KRAMAGUEN
PRÈS GUÉRANDE
Situés à un kilomètre de Guérande sur la route de Saille,
les rochers de Kramaguen ont attiré l'attention par leur posi-
tion et leur forme bizarre. Là-dessus la légende a fait son
chemin ; et, fiers de leurs rochers, les Guérandais les mon-
trent comme les derniers témoins du port de leur ville. C'est
là, dit-on, qu'abordèrent autrefois les navires phéniciens et
romains^ c'est là que débarquèrent les Normands « in littore
saxonico. » Et mieux que cela, on se hasarde à dire que ce
fameux port existait jusqu'après le moyen-âge.
Quelques auteurs ont contribué à accréditer la légende-
C'est ainsi que M. Ernest Desjardins, membre de l'Institut,
écrivait' : « Au pied même de cette petite ville moderne (Gué-
rande) était un port à l'époque de l'invasion des Normands, et
ce port devait être situé près de Kramagen, vers Saille. »
Aucun texte ne nous dit l'emplacement de ce port ; aucun
môme ne nous dit s'il y en avait. On a placé un port à Kra-
maguen pour cette raison que les rochers ont des rainures et
des sillons verticaux dont on a attribué l'origine à la mer.
Lors des invasions normandes, le prétendu port de Gué-
rande ne devait plus exister. En tout cas, il faudrait le repor-
ter beaucoup plus loin que Kramaguen car nous savons par
Ermoldus que sous Louis le Pieux l'exploitation des salines
était commencée. La donation du comte Pascweten aux reli-
gieux de Redon, et celle du duc Alain Barbe-Torte à ceux de
Landevennec sont encore un argument contre l'existence du
' Géographie hist. et adm. de la Gaule romaine, t. i, I, 3, page- 279.
— 42 -
port de Kramaguen. Le marais devait être en effet, préparé à
recevoir les salines, c'est-à-dire que l'eau n'y séjournait pas
continuellement et partout. Or, aujourd'hui il est avéré que
les salines les plus anciennes sont celles qui font face à
Kramaguen, et sont situées entre Congor et Saille. Voilà un
obstacle à l'arrivée de l'eau au pied de Guérande ; l'époque
romaine nous en donne un autre.
Les fouilles de MM. Martin et Maître' nous ont révélé
l'existence d'établissements romains le long des marais. La
mer ne venait donc pas là plus qu'elle ne vient aujourd'hui.
Il n'est pas prouvé que ces alignements de pieux trouvés le
long des étiers remontent à l'époque gallo-romaine. En tous
cas, ils ne démontreraient que l'existence de ces étiers et non
celle d'un véritable port (qui d'ailleurs serait situé beaucoup
plus bas que Kramaguen.)
Mais, remontons encore plus loin dans le passé. Toute la
côte, de Saille à Lanclis et jusqu'au bord du grand Traict; est
couverte de débris de l'âge de pierre. Sans parler de la
« pefra Concor^ » dont nous ne savons que le nom, mais qui
probablement devait être un menhir comme la pierre Levée
située un peu plus loin, il y a dans le marais, et particulière-
ment près de Congor, des multitudes de silex ouvrés attes-
tant la présence d'établissements de l'époque néolithique.
Plusieurs de ces silex remontent même à l'époque paléolithi-
que. Ces silex ne sont ni dispersés, ni roulés, ce qui serait
inévitablement arrivé si la mer avait formé un port ou un
estuaire dans ces parages.
On pourrait plutôt penser que toute cette plaine des marais
était séparée de la mer à une époque qui n'est peut-être pas
très éloignée de l'apparition des Romains en Gaule. Et,
puisque l'hippopotame vivait bien autrefois dans ce qui est
aujourd'hui la falaise du bourg de Batz, et celle de la Tur-
' L<^on Maître : Villes disparues des Namnètes ; Guérande.
' Mentionnée^au Cartulaire de Redon; pape ^7, acte de 8b9.
— 43 —
balle, pourquoi l'eau douce n'a-t-elle pas été la première fon-
datrice des marais ?
M. Auzou admet aussi la présence de la mer à Kramaguen.
Il nous dits en effet, que les rochers de « Cramaguet » « sem-
blent bien polis par les flots, mais c'a été aux temps préhis-
toriques. » Mais, aux temps préhistoriques, les rivages de la
mer étaient peut-être plus éloignés de Kramaguen qu'ils ne
le sont à présent, ce que nous essayerons de démontrer
ailleurs. A son tour, M. P. -A. Monnier, de Nantes parle des
rochers de Kramaguen. 2
Au début de son paragraphe intitulé : Représentation de
Guen à Guérandfc^ M. P. -A. Monnier, après s être appuyé sur
l'autorité de M. de Kersabiec, nous montre dans les rochers
de Grémagué [sic] «une repésentation grossière(les vieux Celtes
n'en savaient pas faire d'autres) de la déesse (guen) à laquelle
la ville voisine était dédiée. »
Tm mot à dire de cette phrase : Elje est fausse. Les vieux
Celtes savaient peut-être mieux travailler que ne le suppose
M. P. A. Monnier, de Nantes. Puis, comment ces mêmes vieux
Celtes auraient-ils pu consacrer une ville qui n'existait pas à
leur époque à une déesse dont l'authenticité est assez dou-
teuse. Puis encore, guen, dans guenran n'est autre chose
qu'un adjectif : c'est la hauteur blanche, comme il y a plus
loin « l'éminence », « la hauteur noire », « Bran-du* ». Quant
à dire que ces figures de Kramaguen représentent la déesse
Guen pour ce motif que « Guen » est contenu dans « Krama-
guen^ », c'est trop s'avancer. Y a-t-il, d'ailleurs, de véritables
' La presqu'île de Guêraride ; I« part. page. 13.
' Le pays Guérandais.
' Id. Tomel, 3, p. 30.
* M. Desjardins, après M. de Kersabiec, traduit Brandu par Deux Corbeaux,
et identifie ce nom avec le Portus Duorum Corvorum dont parlé Strabon IV,
4, 6. Brandu ne peut pas avoir ce sens. Bran signifie un lieu élevé ; du est un
adjectif qui ne peut identifié avec deii. D'ailleurs il ne peut y avoir eu de port
à Brandu, comme nous le démontrei-ons plus tard.
^ M. Monnier donne à Kramaguen plusieurs étymologies, selon le besoin
d'. xpliquer telle au telle chose.
44
figures aux rochers de Kramaguen?. . . De vagues représenta-
tions plus au moins informes telles que nous en trouvons sur
la côte, de Piriac au Pouliguen, purs effets du hasard.
Quelles sont d'ailleurs les attributions de cette déesse
« Guen ? » Ceci n'inquiète pas M P. -A. Monnier. Voici ce
qu'il dit : « Une déesse celtique était certainement appelée
Gwen ou Gen, autrement Venus, car le rapport est si vrai de
Venus à Guen que les Bretons voulant faire entrer dans leur
langue le mot latin Venus, Veneris, lui ont donné la forme
nationale Gwener. » Allons plus loin. Gomment savons-nous
l'existence d'une déesse Guen ? M. Monnier voit son nom
dans la composition des noms de villes : Genua, Geneva,
Genabus\ « sans compter les villes du nom d'Alba qu'on
pourrait regarder comme une traduction latine de guen. » Avec
des unions, des transformations, des rapports, M. Monnier
arrive à Paphos, à Hermione, puis tombe sur la Vénus de
Phidias, sur Isis, arrive enfin à Kramaguen où il s'écrit à
l'aspect des prétendues figures : « N'est-ce pas Isis ? n'est-ce
pas Guen, la lune d'Armorique ! » Alors, au chapitre VI, de
son même ouvrage, après avoir cherché sa déesse en Grèce
et en Egypte^ M Monnier dans un style aussi majestueux
que celui de Bossuet, nous montre que la piété des Celtes
«< chercha naturellement pour s'épancher, le lieu le plus prb-
pice à une si juste manifestation. Aucun ne convenait mieux
que la butte de Grémagué ou Kramaguen. »! ! !
Du port, nous passons à la mythologie et à la poésie.
M. P. -A. Monnier trouve, avec raison, des marques de
travail à Kramaguen. Quel est ce travail ? Vraisemblable-
ment on ne peut voir que la marque d'une exploitation meu-
lière assez récinte sur le haut des rochers. Voilà tout.
Mais il est une ailtre explication à donner aux sillons
verticaux et aux déesses. Ne peut-on pas, en effet, reporter
tout cela, port et déesses, à l'époque quaternaire. La période
' Suivant M. d'Arbois de Jubainville, l'origine de ces noms commençant
par Gen n'est pas Gwen, mais l'indo-européen « Gano. » (Les premiers
habitants de V Europe.)
— 45 —
glaciaire à laissé de nombreuses traces dans le pays gué-
randais ; je citerai notamment les rochers qui entourent les
coulées de Crémeur, Cardinal et Boga et les blocs erratiques
que l'on trouve autour d'Herbignac. Si l'on explique les
découpures de Kramaguen par la présence de la mer, il faut
expliquer la présence des autres par la même cause ; et
personne n'aura l'idée de penser à l'existence ancienne d'un
port à Crémeur, ou à Cardinal, ou à Boga. Toutes les érosions
que nous trouvons à Kramaguen ne sont quel'effet des glaciers
qui, partout où ils ont passé ont laissé des traces faciles à
suivre, soit qu'ils aient transporté des blocs erratiques comme
il y en a sur les landes de Lanveaux, soit que par leur
frottement ils aient usé les roches, creusé des rainures,
découpé des figures; c'est le cas de Kramaguen; je crois
qu'il ne faut pas en douter.
Henri QUILGARS,
Correspondant de la Société des Antiquaires de France.
LE MENHIR DE LA PIERRE-BLANCHE
COMMUNE DE SAINT-LYPHARD
Cadastre : Secl. G de Kerbourg. 2" feuille n" 788.
Les archéologues qui se sont occupés de la presqu'île
Guérandaise, ont presque tous signalé, sous divers noms, un
menhir près de la Madeleine de Guérartde. Il est à six
kilomètres de Guérande, presque sur le bord de la route de
Sainl-Lyphard, dans le champ de la Pierre-Blanche. C'est un
beau menhir de quartz, haut de plus de deux mètres, au pied
duquel gît une table de granit. Un vieux chêne les abritait
encore il y a quelques années, et faisait avec ces deux
mégalithes un charmant tableau pour les amis du temps
passé.
Ce monument, qui en apparence n'a rien d'exti-aordinaire,
est pourtant l'un des plus curieux du pays. Jusqu'à présent
on s'est borné à y voir les restes d'un dolmen. La chose, au
premier abord, n'était pas impossible. Cependant, ce bloc de
quartz faisait un contraste assez curieux avec la table de
granit. Le meilleur moyea d'apprendre du nouveau était de
pratiquer une fouille. C'est ce que je fis au mois d'octobre 1896
Le terrain primitif était à fleur de terre, et ce terrain n'avait
pas été remué. En approchant du menhir de quartz je tombai
sur des débris de tegulae romaines. Ceci parut d'abord
singulier.
Avant de poursuivre plus loin les recherches, j'interrogeai
le sol du champ et, en parcourant les alentours de la pierre,
je vis que le sol était jonché de morceaux très fragmentés de
ces mômes tegulœ dont les rebords étaient cependant bien
reconnaissables. Mais ces débris ne s'étendaient pas loin :
— 47 —
un hectare à peine ; et dans les champs voisins il fut impos-
sible de trouver de semblables fragments.
Je repris la fouille, et mon étonnement fut grand en voyant
que le menhir au lieu d'être soutenu par des pierres — comme
cela arrive toujours, — l'était en grande partie par des
morceaux de briques beaucoup plus épaisses que les tegulee,
mais ressemblant beaucoup aux lateres.
Sous la table de granit, au contraire il n'y avait que des
pierres et quelques éclats de silex. Mais le sol primitif n'était
plus à la surface ; il avait été remué profondément et remplacé
par des terres grisâtres et noires sa?is analogie avec la terre
des champs, mais telles qu'on en trouve autour et dans les
dolmens.
Cette table offrait une face beaucoup plus grande que les
autres et très unie sur laquelle je relevai un certain nombre
de cupules et un signe indéfinissable. J'ai pu classer ces
cupules en deux catégories : les unes de trois centimètres de
diamètre, en moyenne, bien polies en hémisphère sans doute
avec une pierre : les autres beaucoup plus petites, mais
coniques et terminées par un petit trou aplati qui n'a pu être
fait que par un instrument de métal. (Je n'indiquerai pas ici
les différentes décompositions de ces cupules en figures
déterminées ; je le ferai en étudiant les pierres à cupules
du pays).
Voici donc l'une à côté de l'autre deux pierres qui ne sem-
blent pas de même époque. La présence de débris romains
était surtout intrigante. Pourquoi, dans ce champ seulement
trouvait-on des débris de tegulae ? Point de substructions,
point d'instruments de bronze ; mais des silex comme par-
tout... J'attendais de nouvelles découvertes, quand, au mois
de mars 1897, une fouille de M. Maître, révéla au calvaire de
la Madeleine (à cinq cents mètres des monuments en ques-
tion) la présence de briques et de ciment romains. Dès lors,
l'existence de semblables débris un peu plus loin ne semblait
plus étrange.
— 48 —
Le menhir soutenu par ces briques placées là intentionnel-
lement, était donc contemporain de l'époque romaine, ou
même lui était-il postérieur.
Fallait-il penser que le menhir ait été relevé à l'époque
romaine, en le supposant tombé à l'avance ?. . . S'il y avait
auparavant un dolmen il faudrait affirmer la violation de ce
monument, cela se voit souvent. Mais ici, il n'y a pas eu, je
crois, de dolmen. En effet, à la Pierre-Blanche, nous avons
vu que le sol primitif n'avait été défoncé qu'au seul endroit
de la table de granit; le menhir de quartz était au contraire
sur le sol primitif. Or ceci n'arrive pas dans les dolmens où
l'on trouve des terres rapportées assez profondément et dans
un espace assez large. Les deux mégalithes de la Pierre-
Blanche sont indépendants l'un de l'autre. La table de granit
constitue un monument à elle seule; et elle nappas été dé-
rangée de l'endroit où on l'avait posée.
De plus, voici un menhir de quartz, le seul daus le pays,
car tous les autres monuments sont en granit, il serait
étrange que ce mégalithe qui se trouve dans un groupe de
tant de monuments détruits, fût le seul à avoir été relevé. Le
quartz ne se trouve pas dans les environs, il faut aller assez
loin le chercher. Il est donc peu probable que ce monument
appartienne à l'époque dite communément celtique ; car, s'il
est lo reste d'un dolmen, on ne s'explique pas pourquoi on au-
rait été le chercher,quand le granit est partout à fleur déterre.
Rien n'empêche donc que ce mégalithe de quartz soit de
l'époque romaine. Quelle était la nature de ce monument ?...
Il est difficile de le dire. Etait-ce une pierre votive ? une
borne? une idole ? ne serait-ce pas plutôt une pierre commé-
morative ? That is the question ; et la question est obscure.
Quant à la table de granit, rien ne s'oppose à ce qu'on en
recule l'érection à l'époque mégalithique. Dans le Morbihan,
en particulier à Arzon, on a trouvé des monuments identi-
tiques : une table de pierre recouvrant des celts ou des silex.
Hknri QUILGARS,
FAève de l'Ecole du Loutre.
LES
BIENS DE L'ÉGLISE DE NANTES
ET LA
CHARTE DE LOUIS LE GROS
LES BIENS DES ÉGLISES AU MOYEN-AGE
Pendant l'occupation de la Gaule par les Romains^ le sol,
considéré comme propriété romaine, était divisé en domaine
Public, bien des cités et des églises, bien des particuliers ;
l'Etat recevait des possesseurs une redevance qui était le
signe de sa propriété.
Les Francs trouvèrent en Gaule un clergé riche et puissant :
Jes églises possédaient d'immenses domaines, l'évêque était
le chef de la cité. Les nouveaux conquérants respectèrent
l'administration des pays conquis et Glovis, notre premier
roi, confirma les églises dans leurs iiiens.
L'église gallo-franque concédait l'usufruit de ses terres à
titre de précaire, moyennant une redevance et pour un temps
déterminé ; la concession pouvait être renouvelée. Beaucoup
de petits propriétaires, trouvant leurs biens en sûreté, dans
les mains de l'église, les lui abandonnaient à titre viager ; au
décès du père, ces biens passaient aux enfants au môme
titre.
Les biens que l'église tenait des rois lui étaient concédés
sans condition de reprise ou de renouvellement. Le lise re-
prenait quelquefois ses biens pour punir la trahison ou l'infi-
délité, et il arrivait que les rois, dans le bat de se faire de
— 50 —
nouveaux clients, reprenaient une terre aux uns pour la
donner aux autres. Un édit de l'an 614 de Glotaire II, petit-fils
de Clovis, confirma les dons royaux anciens et récents : l'hé-
rédité n'existait pas encore, cet acte devait y conduire.'
Les églises ne furent pas toujours à l'jibri des spoliations
des rois, malgré les égards des princes pour les évoques.
On trouve dans les actes des conciles des déclarations telles
que celles-ci : « Les biens de Péglise doivent être conservés
« avec tout le soin et la fidélité possible, déviant Dieu qui
« voit et juge tout- ; l'évoque a l'administration de tous les
« fonds appartenant à l'église, soit qu'on Jes ait donnés à
« l'église ou aux paroisses; et, si l'évêque adonné pour un
« temps dos terres à cultiver à des clercs ou à des moines,
« elles appartiendront toujours à l'église, sans qu'on puisse
« alléguer la prescription.^ »
Aussi, l'église n'admet jamais la prescription pour les biens
qui lui avaient appartenu ei l'histoire est remplie de ses
démêlés avec les comtes ou les ducs qui ont voulu en dispo-
ser à leur profit.
11 semble résulter de l'histoire et des expressions de la
Charte de Louis le Gros, dont 'nous allons parler tout à
l'heure, que l'évêque de Nantes n'eut point à se plaindre des
envahissements des biens de l'église par les rois mérovin-
giens et que ses prédécesseurs n'eurent point à partager le
pouvoir politique avec les comtes avant Charles Martel. Le
grand souci de l'église s'est surtout manifesté, sous les méro-
vingiens, au sujet de l'élection des évoques lorsque les rois
tentaient de se substituer au clergé et au peuple.
Charles Martel sécularisa les biens de l'église et les donna
à ses fidèles, à charge de service militaire^ ; mais il employait
1 Histoire générale, par M.\I. Lavisse et UambauJ. T. I Ch. III. VI et VII.
' Concile d'Antioche de l'an 311.
* 1" Concile d'Orléans en 511.
* Histoire générale, p. 283-'281.
— 51 —
les précaires à cet usage ; l'église en conservait la propriété
et le léger revenu qui y était attaché ; elle n'y perdait rien.
A l'avènement de Gharlemagne, le bénéfice a remplacé le
précaire : ici le bénéficiaire reçoit une terre en usufruit
moyennant certaines obligalions envers le donateur. Lorsque
le roi donne des bénéfice^ sur les terres ecclésiastiques, le
bénéficiaire doit le service au roi et une redevance à l'église :
il est l'obligé de l'église et du roi. Le roi ne reçoit point de
redevance.
Sous Gharlemagne, le créateur du pouvoir temporel des
papes, la fortune de l'église subit quelques atteintes et son
Indépendance parut menacée : le souveiain nomma les évêques,
qui furent considérés comme faisant partie de l'État; il étendit
les attributions des comtes et partagea l'autorité entre ces
deux représentants du diocèse et du comté. L'accord de ces
deux pouvoirs n'étant guère possible, une question se posa
dès lors tout naturellement : dans quelle mesure l'évêque doit-
il s'immiscer dans les affaires séculières et le comte dans les
affaires ecclésiastiques ? Et cette grave et grande question,
posée au temps du grand empereur, question souvent agitée,
jamais résolue, passionne encore le monde ! On sait que l'église
eut toujours la préoccupation de conserver tout ce qu'elle a
conquis, soit dans l'ordre moral; où son influence est légitime
et salutaire, soit dans l'ordre matériel, oii la politique et la
science combattent son sentiment.
L'an 851; le roi de France, Gharles-le-Chauve, céda le comté
nantais, augmenté de la rive gauche de la Loire, au roi Breton
Erispoé et en conserva la suzeraineté. 11 avait, au commence-
ment de son règne, placé les comtés de Nantes et de Poitiers
aux mains d'un seul comte, Renaud. Gette union, commencée
en 841, eut d'abord une durée de deux ans et dut avoir des
conséquences heureuses pour le diocèse; elle fut consolidée
par les conquêtes du comte Lambert, limitées, sur la rive gau-
che,par le Layon. Jusqu'ici les bénéfices étaient généralement
— ^2 —
donnés par les rois à titre viager. En 877, Charles le Chauve,
devenu empereur, décréta l'hérédité en principe ; le fils hé-
rita du fief, de la seigneurie, du comlé de son père, en se re-
connaissant, par un aveu, le vassal du souverain. L'héritage
du roi, dans le comté nantais, était passé aux souverains Bre-
tons.
Les invasions normandes couvrirent le diocèse de ruines
pendant plus d'an siècle, à partir de 843, et, dans cet intervalle,
la propriété souffrit du désordre des temps et dut changer
souvent de possesseur. Celle de l'église fut soumise à de rudes
épreuves. Ce fut une période lamentable de son histoire. Elle
commença par la première invasion normande et le meurtre
de l'évêque saint Gohard. Les événements se succèdent.
La partie occidentale distraite du diocèse pour former à
Guérande un évêché nouveau (850-900) ; le comté tour à tour
aux mains des Français, des Normands et des Bretons ;
l'évêque forcé de se réfugier à Angers (886-89) et, à son retour,
suppliant le duc Alain de lui rendre les biens retenus par le
fisc; un autre évêque se réfugiant en Bourgogne (907); puis,
pendant une trentaine d'années (907-939), le comté aux mains
des Normands et le diocèse sans pasteur : la ville déserte, le
pays dévasté; les rapports politiques détruits, plus rien de
régulier dans la vie civile, le commerce sans garantie, la cul-
ture des terres incertaine; tout mouvement borné à la vie
locale. En un mot, le comté désorganisé, les liens de la société
spirituelle brisés, l'existence de la cité misérable. Ensuite,
on voit le duc, restaurateur da comlé en 939, enrichissant ses
fidèles des biens d'autrui, et le diocèse administré sans évêque
jusqu'à958, l'évoque prisonnier des Normands en 960; le siège
vacant sous le comte Guerech qui en percevait les revenus
et le faisait administrer par un mandataire (982 990); deux évê-
ques se disputant le siège, pendant une dizaine d'années, au
milieu du XP siècle.
Dans ces temps de calamités, que pouvaient faire les évêques
pour recouvrer les héritages de leurs devanciers? Et pou-
• — 53 —
vaient-ils saisir un moment plus propice que celui que choisit
l'évêque Brice pour faire appel au roi de France ?
Le roi de France, en cédant le comté nantais à la Bretagne,
n'avait pas entendu le lui abandonner tout e,ntier : en en
conservant la suzeraineté, il y demeura l'expression la plus
élevée de la justice féodale ; on pouvait en appeler à lui des
décisions du souverain breton.
Il paraît démontré que les évoques de Nantes, notamment
le grand Félix, avaient autorité sur la rive gauche de la Loire,
avant son annexion politique à l'autre rive. On peut trouver
des indications à ce sujet dans le grand éloignement du pays
de Retz de son chef-lieu, Poitiers ; dans la fondation de
l'abbaye de Vertou par saint Martin, diacre de 1 évêque Félix,
peut-être aussi dans la conversion, par Félix, des payens
débris d'armées, Alains, Teïfaliens, Saxons, qui infestaient
la rive des Pictons'.
L'année qui suivit son annexion à la Bretagne, le comté
s'agrandit temporairement du pays de Retz ; mais cette mal-
heureuse contrée disputée pendant un siècle par les Poitevins,
les Normands et les Bretons, ne devait être rattachée définiti-
vement au' comté de Nantes que vers l'an 939, par Alain-
Barbe-Torte. Ce prince habile en étendit les limites, trois ans
plus tard, jusqu'au Layon, tributaire de la Loire, à l'Ironne et
au Lay, tributaires de l'océan. Ces limites qui semblent avoir
été celles du comte Lambert furent ramenées, vers 1050, à la
Moine, au cours de la Boulogne et aux sources du Falleron ;
des Marches furent créées des deux côtés des limites nouvel-
les, pour séparer la Bretagne du Poitou et de l'Aquitaine, et
le diocèse conserva dans les Marches et au delà de nombreu-
ses paroisses enlevées au comté.
Le régime de la féodalité changea profondément la Gaule,
on n'en suit pas clairement les commencements ; mais au
XI* siècle, on trouve les domaines transformés en fiefs héré-
♦ Vie des Saints de Bretagne, par Dom Lobineau : saint Félix, p. 123.
- 5i
dilaires, et, on en connaît les possesseurs. On voit l'église de
Nantes en possession dun certain nombre de fiefs : à Nantes,
dans le voisinage de la Galliédrale, de Saint-Nicolas et dans
les faubourgs ; à Guérande, dans la ville et la banlieue ; elle
avait un grand regaire qui comprenait une treizaine de
paroisses, au levant, au- nord et au couchant de Nantes.
L'évêque avait une demeure seigneuriale à Sainte-Luce,
Ctiassny, que le poète Fortunat appelle Gariacum ; il recevait
en don des églises et les dîmes des paroisses ; aux abbayes,
il concédait ou confirmait des églises qui devenaient le siège
de prieurés. Le monastère de Vertou existait toujours. Le
comte de Nantes, qu'il fut ou nom duc de Bretagne, avait
entre autres grands domaines, la châtellenie de Guérande
qui comprenait huit paroisses ("aujourd'hui dix communes) et
embrassait tout le littoral compris entre les deux baies du
Pouliguen et de Mesquer.
• Que s'est-il passé dans ces temps tourmentés où la pro-
priété lut si rudement éprouvée, où de nouveaux seigneurs
prirent la place des anciens? On sait que les ducs de Bretagne
se sont fait une belle part dans les domaines du comté Nan-
tais et qu'ils ont fait une part plus belle encore à leurs com-
pagnons. Ils y ont taillé de grands fiefs, de grandes baronnies,
qu'ils ont donnés à leurs principaux fidèles. G'est au sein de
ces fiefs que nous allons rencontrer les biens qui manquent à
l'église ; nous allons voir la charte les y ranger avec ordre ;
si bien que, sur la rive droite de la Loire, elle ne quittera un
fief que pour passer au fief voisin, ce qui nous permettra
peut être de déterminer la place de quelques noms douteux.
— 55
LA CHARTE DE LOUIS LE GROS
Nous avons trouvé uq certaiu intérêt à chercher la situation
des paroisses énumérées dans la charte, le sens des noms
douteux ou sujets à controverse, l'étendue de cette fortune
que l'église possédait aux temps mérovingiens ; et aussi les
noms des grands domaines qui, dans les jours de réorgani-
sation, avaient englobé ]es paroisses, et ceux des seigneurs
que le prince avait enrichis par le don de ces domaines.
Nous étions parvenu à identifier, sans trop de peine, la
plupart des noms anciens avec les noms modernes et nous
entrevoyions la méthode d'énumération adoptée par le
rédacteur de la charte ; nous en étions arrivé à nous heurter
à une difficulté dont la solution n'allait pas toute seule; quand
il vint à notre connaissance que la charte avait été l'objet
dune publication dans une revue d'un diocèse voisin'. Nous
lûmes l'étude avec tout l'intérêt qui s'attache à. un pareil
document;, en applaudissant à la tentative de l'auteur, M. Léon
Maître, mais sans y trouver la clef de la partie obscure de nos
recherches; et nous avions en vue plusieurs sujets qu'on n'y
avait point abordés.
Nous eûmes alors la bonne fortune d'être présenté par un
ami commun à M. l'abbé Durville, dont l'obligeance et le
savoir sont à l'égal de son désintéressement, et après de
courtois entretiens où l'excellent abbé mit son érudition à
notre disposition avec toute la bonne grâce qui lui est ha-
bituelle, nos doutes étaient levés, nos lacunes en partie
comblées et nous étions fortifié dans la méthode que nous
avions en vue.
Nos savants historiens bretons , dom Lobineau et dom
Morice, ont classé la charte royale parmi les preuves de
1 Etude critique sur la charte du roi Louis VI dit le Gros, par M. Léoa
Maître. Annales de Bretagne, avril 1887.
— 56 —
l'histoire de Bretagne et ils ont cru à son authenticité.
Cependant cette authenticité est contestée.
L'abbé Travers, dont l'œuvre sur notre diocèse est con-
sidérable et de grande valeur, la met en doute en se servant
des arguments suivants :
1" On dénombre dans la charte plusieurs églisee connues et
inconnues et quantité de droits et de fonds dont l'église de
Nantes ne jouissait point alors et dont elle n'a jamais joui
depuis; 2» le palais de Lauriac, sur les confins du diocèse,
ne subsistait plus, ayant été ruiné par les Normands sur la
fin du VHP siècle ; 3° saint Vlaud, titulaire de la paroisse
de ce nom, est un saint moine de beaucoup postérieur* à
saint Pasquier; 4° au reste, le roi Louis VI n'avait rien à voir
en Bretagne oîi Gonan le Gros régnait souverainement ainsi
qu'à Nantes.
La réponse à ces arguments est facile : 1" De ce que le
savant abbé ne connaissait pas toutes les églises dénombrées
dans la charte, il ne s'ensuit pas qu'elles n'existaient pas, et
c'est précisément parce que l'église de Nantes ne jouissait pas
de tous les biens qui lui avaient appartenu que i'évêque les
réclamait ; si elle n'en a pas joui depuis, c'est qu'ils ne lui ont
pas été rendus. 2° Le palais de Lauriac qui était dans notre
diocèse n'a rien à voir ici puisqu'il s'agit du palais royal où
Brice alla voir Louis VI, « malgré la grande fatigue du
voyage ». 3° Pasquier fut évêque de Nantes de 630 à 638,
d'après Travers, d'autres disent vers la fin du VIP siècle et
saint Viaud mourut vers 740^ mais l'église de Nantes reçut
des biens de Charles le Chauve vers 841-43 : elle a donc pu
posséder une église du nom de Saint-Viaud. 4° Enfin, les
évoques de Nantes avaient le droit d'en appeler au roi de
France des décisions des ducs de Bretagne et ces rois se
sont occupés plusieurs .fois des affaires du diocèse.
» Le texte porte antérieur, par erreur. Histoire civile, politique et
religieuse de la ville et du comté de Nantes, T. l"" p. 145.
* Idem, p. 97.
— 57 —
Nous avons vu que l'église n'admettait pas la prescription
et ne renonçait pas volontiers à ses conquêtes. Mais il n'en
était pas ainsi dans la société civile ; et après les révolutions
et les nombreuses mutations qui se produisirent dans la
propriété da IX'' au XP siècle, il n'était pas facile de rendre à
l'église des biens dont elle était séparée depuis longtemps.
Nous avons relevé dans les Preuves de Dom Morice, de l'an
1000 à l'an 1142, dix-sept noms de lieux qui sont dans la
charte (le nonibre peut en être plus grand) : quatorze sont
écrits en latin dans les Preuves comme dans la Charte' et trois
affecteni déjà la forme française dans les Preuves en dérivant
naturellement du latin'.
La charte semble bien du temps dont elle porte la date;
alors, on n'était pas encore bien éloigné de la période d'en-
fantement des fiefs ; la mémoire n'avait pas perdu la trace des
biens envahis ni oublié la haute situation des envahisseurs.
Les lieux sont désignés dans le vieux document avec concision
et régularité ; les paroisses, les églises, les châteaux, les
monastères se succèdent en raison de leur situation dans
le diocèse ; on n'invente rien : cela paraît sincère, cela doit être
vrai. Et même en admettant que son authenticité fut douteuse,
il y aurait toujours intérêt et profit à étudier les modifications
survenues dans l'orthographe des noms de la charte et à
chercher la situation des lieux dans les cas où le doutu
s'impose à notre jugement.
L'original de la charte est perdu. Les reproductions données
par nos deux historiens bretons en sont tirées directement ; ils
y ont vu le sceau du roi dont la légende était en partie efîacée.
Néanmoins, il serait bien extraordinaire que, malgré tout leur
soin, le texte imprimé d'après des copies reproduisit avec
une exactitude parfaite tous les mots de la charte et qu'une
lettre n'ait pas été quelquefois mal lue ou mal copiée. Il ne
1 N«3 2, 3, 4, II, 13, 15. 17 26, 30, 31, 33, 42 et 43, ci-après.
' N«9 33, 37 et 41, ci-après.
— 58 -
nous paraît donc pas téméraire de proposer, avec une grande
réserve, le remplacement d'une lettre par une autre, lorsque
ce changement nous paraît justifié.
Nous ne croyons pas qu'on doive demander au texte latin
de la charte une correction de langage qui n'existait plus sous
les Mérovingiens, qu'on ne demanderait pas à Grégoire de
Tours qui déclare, dans une préface, avoir un langage inculte
et rustique' ; ni à Fortunat « le meilleur des poètes latins dans
<i un temps oi^i il n'y en a plus de bons et chez qui les obscurités
« de la barbarie s'ajoutent à celles de la décadence' ». Ce serait
s'exposer à se tromper de chemin que de s'appuyer sur
certains mots incorrectement écrits, pour en tirer de grosses
conséquences.
Au commencement du XIP siècle, le diocèse do Nantes était
gouverné par l'évêque Brice, actif, énergique, qui prit à cœur
les intérêts de son église et de son clergé et ne craignit pas
de s'opposer à certains envahissements des moines. Doulou-
reusement afîecté par les pertes que l'église avait subies
pendant et depuis les invasions normandes et voulant tenter
de les recouvrer, il fit, en 1123, un long voyage pour implorer
le roi de France, Louis le Gros ; il le rencontra à son palais
de Lorriaci^ et lui demanda le rétablissement des biens dont
les évêques avaient eu la garde ; et le roi de France signa en
sa faveur la charte que nous allons essayer de passer en revue
et dont voici le sens.
« Considérant que la miséricorde et la vérité veulent que
« les libéralités faites aux églises de Dieu par nos prédéces-
« seurs soient connues ; que ces églises soient confirmées
« par notre autorité royale et par celle de nos successeurs
' Il vécut de 539 h 593 et fut nommé évêque de Tours en 573.
' Fortunat vécut de 530 à 600 et fut évêque en 598. Avertissement en tête
de ses œuvres traduites par Nizard.
* Nous lisonsdans le Dictionnaire de Bouillet : Lorris, Lauriacium, ch. 1.
de canton (Loiret) à 19 k. S. 0. de Montargis. C'est la patrie de Guillaume de
Lorris, auteur du célèbre Roman de la Rose et contemporain de saint Louis.
— 59 —
« et que nous donnions à ces derniers l'exemple de faire
<( le bien, afin qu'il soit parlé l'avorablement de nous au
« Grand Juge. Donc moi, Louis, élevé au trône de France
« par la grâce de Dieu, je veux qu'on fasse savoir à tous les
« fidèles, tant futurs que présents, que l'homme vénérable
« Brice, du siège épiscopal de iNanles, est venu humblement-
« en notre présence, malgré la grande fatigue du voyage ; qu'il
« u montré les écrits des plus anciens et des plus vénérables
« rois de France, Charles, Glovis et les enseignements de son
« fils Glotaire, de pieuse mémoire' ; qu'il a prouvé avec soin
« que les biens accordés à la sainte église des apôtres Pierre
« et Paul, pour nourrir et entretenir ses prêtres, serviteurs
« de Dieu, avaient été possédés longtemps par ses prédéces-
« seurs; mais que, de nos temps, ces biens avaient été dis-
« perses par la rapacité des hommes méchants de l'Armori-
« que et même par la cupi.iité et l'avarice des propres comtes
« de la province, enfin que les biens de l'église et les siens
« avaient été enlevés par force et violence.
« G'est pourquoi^ mettant son espérance en notre miséri-
« corde, il eut recours à nous et demanda à Notre Majesté,
u avec supplications et prières, que ces biens donnés à l'é-
« glise par la libéralité royale, pour l'amour de Dieu et des
« saints apôtres, lui fussent rendus, qu'ils fussent réintégrés
« par privilèges et consolidés. »
« Et nous, touclié par la requête juste et raisonnable au
« sujet de concessions faites par tant de rois, nos pères véné-
« râbles et pour lesquelles nous devons garder un respect
« inaltérable, de plus jugeant qu il serait digne, pour les
1 Nous croyons qu'il faut lire : petit-fils de Clovis, c'est-à dire Glotaire II
qui régna de 584 à 628. FréJégaire tait un portrait flatteur de Glotaire 11
qu'il appelle magnifique protecteur des églises et des prêtres. On peut
remarquer que les trois rois nommés ci-dessus sont cités par l'H stoire
comme ayant été les bienfaiteurs des églises : riovis maintint l'Eglise dan?
les biens qu'elle possédait au moment de la conquête franque ; Glotaire 11
confirma les dons royaux en 614, et Gharles le Ghauve rendit les fiefs héré-
ditaires en 877. L'abbé Travers pense que Pasquier fut évêque de Nantes
après Léobard, en 626 ; l'édit de Glotaire est antérieur de 12 ans.
— 60 —
« temps futurs et présents, de donner une sanction durable à
« l'objet des prières du vénérable prêtre Brice, nous accor-
« dons, en sérénité, ce qu'il demande ; nous ordonnons que
« l'on sache que nous confirmons l'égliso dans les biens qui
« avaient été donnés par les rois à la sacrosainte église des
« apôtres et qui ont été possédés par les prédécesseurs de
« Brice, Félix, Pasquier et autres vénérables é vêques du même
« siège ; nous ordonnons qu'ils soient possédés par lui (Brice)
« et tous ses successeurs par notre privilège, par droit perpé-
a tuel. Voici les noms de ces biens. »
Le texte qui en donne l'énumération est des i>lus concis :
il porte le nom d'une villa, d'un chdteait, d'une église, d'une
paroisse dont il indique un grand nombre ; deux fois, il cite
une paroisse avec l'église, trois fois ti7i monastère avec ses
dépendances.
Le titre de seigneur de toute la paroisse était donné, en ce
temps-là, soit au seigneur du bourg, soit au patron fondateur
de la paroisse, soit au possesseur du fief le plus important'.
Lorsque la charte cite une paroisse appartenant à l'évêché,
elle ne nous apprend rien sur la nature ou l'étendue de la
propriété ecclésiastique ; cependant il est à croire qu'il s'agis-
sait surtout de revenus attachés à la fondation de l'église de
cette paroisse, c'est-à-dire des dîmes, fruits et rentes, que
l'évêque, comme seigneur, avait le droit de prélever sur les
produits des fermes ou bénéfices et des revenus provenant de
la juridiction seigneuriale. Lorsqu'il y a quelque chose de
plus, la charte l'exprime en disant : telle paroisse et deux
villas (n°* 27, 28 et 29), ou telle paroisse et une forêt (n* 33) ;
ailleurs c'est une paroisse avec ses eaux (n° 16), une paroisse
avec une île (48), une paroisse avec l'église (3 tM 6.)
Les offrandes déposées sur l'autel et celles qu'on déposait
dans les autres parties de l'église étaient distinctes et pou-
' Dictionnaire des Terres et des Seigneuries du comté Nantais et de la
Loire-lnfêrieure, par M. Ernest de Gornulier, à l'article Nort.
— 61 —
valent avoir deux possesseurs ; dans ce cas la possession de
l'église devait donner à Tévêché le droit de percevoir les reve-
nus casuels ou éventuels en totalité ou en partie.
La charte commence son énumération par la rive gauche
de la Loire et elle y nomme les biens de Téglise sans se
préoccuper de la rive droite. L'énumération est faite avec
méthode et s'étend dans les contrées des diocèses d'Angers
et de Luçon^qui ont fait partie, au moyen-âge, du comté de
Nantes ; elle mentionne même une paroisse du diocèse de
Poitiers, le Boupère, qui e»st située à quelques kilomètres au
nord du Lay, en dedans des limites qui bornaient la Breta-
gne au milieu du IX" et au milieu du X' siècle (v. p. 53.) On
sait d'ailleurs que les limites du diocèse étaient indépendantes
de celles du comté.
La méthode est encore mieux caractérisée sur la rive
droite du fleuve, où elle s'inspire clairement de l'ordre dans
lequel sont placés les fiefs, les seigneuries, les baronnies qui
enfermaient les biens enlevés à l'église.
On peut remarquer que l'énumération commence sur la
rive gauche, par le plus important des biens que l'église y
possédait et il est près de Nantes, c'est la grande abbaye de
Vertou ; puis elle va au couchant, descend au midi, passe au
levant et remonte aux rives de la Loire. Sur la rive droite,
qui vient ensuite, l'énumération suit la même méthode : elle
commence par le plus important des biens de l'église et il est
près de Nantes, c'est le grand domaine de Chassay ; puis elle
va au couchant, remonte au nord, pass'? au levant et descend
aux rives du fleuve. Et de plus, elle suit fidèlement Tordre
des fiefs jusqu'à son arrivée au grand regaire de l'évêché.
On dirait qu'elle néglige comme à dessein, dans une inten-
tion qui nous échappe^ certains groupes pour y revenir
ensuite.
Ainsi, rive droite de la Loire, après avoir terminé la partie
nord du diocèse, du point extrême est, Juigné, elle passe au
— 62 —
poi[it extrême o//(?i7, Blain, pour énuniérer le centre; parve-
nue de nouveau à l'extrémité est, Montrelais au bord de la
Loire, elle revient vers Voiiesl jusqu'à Mauves, par Ligné, en
négligeant quatre lieux au nord et non loin d'Ancenis. De
Mauves, elle remonte à Nort où elle passe sur la rive droite
de l'Erdre en laissant sur la rive gauche tous les biens com-
pris entre Carquefou,Thouaré et Nantes, et elleénumôre tous
les b.ens de cette rive droite jusqu'au bord de la Loire et à
Saint-Etienne de-Mont-Lue. Rntin. de ce point extrême, elle
vient reprendre les lieux renfermés dans le triangle qui a
pour sommets Carquefou, Nantes et Thouaré, el elle termine
les domaines du diocèse par les quatre biens qu'elle avait
laissés près d'Ancerns.
En examinant cette énumération, on ne manquera pas de
remarquer que Guérande n'y figure point et de se rappeler
que l'église y avait cependant un domaine au XI» siècle. Mais
il ne faut pas oublier ce passage de la Charte : « Brice a
« montré les écrits des plus anciens et des plus vénérables
« rois de France, Charles, Glovis et les enseignements de
« Glolaire; il a prouvé avec soin que les biens accordés à
« la sainte église avaient été possédés par ses prédécesseurs. »
L'est donc d'après de vieux documents dont le dernier devait
être de Charles le Chauve, encore maître du comté Nantais
(8i0-850), que Louis le Gros a rédigé la charte de tl23. Tout
porte à croire que le fief ecclésiastique de Guérande est pos-
térieur à Charles le Chauve. En effet : Erispoé, son successeur
au comté, créa, pour des raisons politiques, un petit évêché à
Guérande en 85J , et Salomon,vers 862, y érigea une collégiale ;
or, des créations de ce genre étaient toujours dotées par le
prince, toute charge nouvelle recevait des revenus en raison
de son importance : l'origine du domaine épiscopal doit venir
de cetle dotation, il n'y a de trace pour aucune autre. Après
la mort du nouvel évêque, l'évêché nouveau passa au diocèse
de Vannes et ne revint à Nantes que vers l'an 900. Nous ne
croyons pas que la non mention de Guérande dans la charte
— 63 —
puisse être interprétée dans le sens d'une omission do l'évê-
que Brice; nous pensons qu'on doit considérer les biens qui
y sont inscrits comme ayant été en possession de l'évêché
avant le milieu du IX" siècle et qu'ils étaient énumérés en
trois documents du temps de Glovi?, de Clotaire II et de
Charles le Chauve. C'est aussi l'avis de M. l'abbé Durville.
Dans l'énumération qui suit, contenant les paroisses, les
revenus, les églises, etc., nous donnons un numéro d'ordre
à chaque article, ensuite le texte latin en gros caractères,
puis la traduction française en italique^ et nous faisons suivre
celle-ci d'explications et de renseignements partout où cela
nous a paru nécessaire. Un appendice complète notre essai.
— 64
DENOMBREMENT DES LIEDX ET DES BIENS
Cités dans la '
CHARTE DE LOUIS LE GROS
i. — Medietas Thelonei Nannetensis' civitatis.
Moitié du Tonlieu dans la ville de A'antes.
Le Tonlieu consistait dans la perception des droits sur les
marchandises qui entraient dans la ville ou se vendaient sur les
places et marchés. Du V" au VIII" siècle, lorsque les évoques
de Nantes représentaient le souverain et remplissaient des
fonctions qui tenaient à celles de gouverneur, ils ont dû jouir
de la plus grande partie de ces revenus. Mais lorsqu'après la
race Mérovingienne, le pouvoir politique et administratif fut
confiée des comtes Carolingiens, avec des droits très éten-
dus, l'église, on n'en saurait douter, vit diminuer sa part
dans le produit de Tonlieu. Les souverains Bretons héritè-
rent, au IX siècle, de la partie attribuée aux souverains qu'ils
remplaçaient; après l'anarchie créée par les invasions nor-
mandes et l'organisation du duché par les ducs de Bretagne,
notamment Alain-Barbe-Torte, la part que l'église avait dans
le Tonlieu, se trouva réduite dans une mesure qu'on ne peut
apprécier.
LA RIVE GAUCHE DE LA LOIRE
Après l'indication du Tonlieu, la charte commence l'énu-
mération des biens de l'église par la rive gauche de la Loire
et par le plus important de cette rive. Cette énumération n'est
interrompue par aucune indication des biens de la rive'droite
' 9
Le noiû de Nantes écrit ici avec deux n, est écrit avec mn au n» 7h.
Nous donnons l'énumération des biens d'après le texte latin de dom Morice
sans y rien changer.
— 65 —
2, — Abbatia S. Joannis B. et S. Martini Vertav
sita super fluvium Separis.
Abbaye de Saint-Jean-Baptiste et Saint-Martin
de Vertou, située sur la rivière de Sèvre.
Cette abbaye, la plus ancienne du diocèse Nantais, fut
fondée vers l'an 575 par Saint-Maiiin, né à Nantes et disciple
de 1 évêque Félix. Elle posséda de vastes domaines sur la rive
gauche de la Sèvre et de son afiluent la Maine ; le roi Dago-
bert lui enleva, vers 630;, une partie de la forêt nantaise. Les
moines s'enfuirent devant l'invasion normande, de 843, mais
ils recouvrèrent leur monastère après la pacification. En 1138,
ils recevaient dans leur couvent deux fils du seigneur de
Goulaine, le plus puissant de la contrée. L'abbé, qui était
aussi abbé de Saint-Jouin-de-Marne, cessa d'y résider dans
le temps où parut la charte de Louis le Gros, et l'abbaye fut
gouvernée par des préposés appelés Prévôts qui devinrent
bientôt inamovibles. Le domaine de l'abbaye était entouré
par le domaine ducal de Touffou et la châtellenie de Goulaine.
L'église actuelle recouvre l'emplacement de l'église du VI*
siècle et de celle du XI* qui disparut vers 1880.
Vertou est un chef-lieu de canton, à deux lieues de Nantes.
S'*'.' — Camariacus cum ecciesia
Chémeré avec Véglise.
h' église de Chémeré existait en l'an 1020 , un prieuré y fut
fondé dans ce temps-là et donné à l'abbaye de Saint-Serge
d'Angers. Chémeré est une commune du canton de Bourg-
neuf. C'était une paroisse de la baronnie de Rais, qui fut aux
mains de la lignée mâle des seigneurs depuis le X' siècle
jusqu'en 1248.
* Les chifires 1 et 2 placés en exposant, après le n° d'ordre du dénombre-
ment, répondent au n"* des tableaux 1 et 2 de V appendice ; la lettre qui suit
ce chiflfre, répond à l'un des paragraphes a, b, c, d, du tableau u° 3, La
lettre D, après un nom de iieu, indique que nous devons le renseignement à.
M, Tabbé DurviUe
66 —
Ecclesia Santi Pétri et Sanctae Opportunae virginis
et Sancti Vitalis, mart.
Eglise de saint Pierre et sainte Opportune, vierge,
et saint Viaud, martyr.
Il s'agit ici d'églises et non de domaines. Saint-Père-en-
Retz est un chef-lieu de canton et son église est sous le voca-
ble de saint Pierre. Les quelques maisons de Sainte-Oppor-
tune sont séparées du bourg de Saint-Père-en-Retz par un
petit cours d'eau. Saint-Viaud est une commune du canton,
elle borde au nord et au levant la commune chef-lieu.
L'abbaye de Marmoutier fonda un prieuré à Sainte-Oppor-
tune vers l'an 1040 ; elle percevait les dîmes de cette église :
quelques années plus tard, elle reçut du seigneur du Pelle-
rin, l'église de Saint-Père-en-Retz. Les moines de Saint-
Philbert étaient propriétaires à Saint-Viaud au milieu du
IX« siècle et le baron de Rais y avait quelque domaine au XP :
on le voit, vers l'an 1100, juger comme suzerain un différend
au sujet de revenus contestés à la Verrière'. Le duc de Breta-
gne possédait au XIV« siècle, une terre de Saint-Père-en-Retz
qui passa à Jean de Laval ; elle était au duc Jean V en 1424.
La charte va continuer son énumération au midi du comté
nantais, dans la partie qui n'est restée qu'un certain temps
à la Bretagne.
DIOCÈSE DE LUCON
5*'\ — Coldriacum et Boiram
Coud rie et Boire.
Coudrie, ancienne commanderie (D) de la commune de
Challans, Vendée, à 7 kilomètres du chef-lieu et à 3 kilomètres
de Froidfond. Boire est évidemment une terre de sa dépen-
dance et de son voisinage ; nous ne connaissons pas de lieu
« De la Borderie.
— 67 —
de ce nom-là, mais à une lieue au couchant de Goudrie, à la
limite de Ghallans et de la Garnache, nous voyons le hameau
de la Petit Coudrie qui pourrait bien avoir pris la place de
Boiram.
6-. — Asinesium cum ecclesia S. Benedicti.
Aizenay avec V église Saint-Benoit.
« Juleo de Asineiis 1092 ; ecclesias Asinesii, 1136 (D), ».
Aizenay est une commune :„du canton de Poiré, Vendée.
« Saint Benoit est le patron de l'église (D). »
7. — Ecclesiam S. Pétri de Alba Petra.
Eglise Saint-Pierre de Pierre-Blanche.
Le Boiipère, sous le patronage de Saint-Pierre (D), est une
commune du canton de Pouzauges (Vendée) appelée, en 1238,
Aiba Petra (D) ; elle est à 7 kilomètres au couchant de son
chef-lieu et au nord du Lay qui servit de limite à la Bretagne
au milieu du X° siècle.
DIOCÈSE DE POITIERS
8. — Ecclesiam S. Boniti.
Eglise de Saint-Bonnet.
0
Le Puy Saint-Bonnet (D), arrondissement de Bressuire
(Deux-Sèvres) et à la limite de Maine-et-Loire, à 7 kilomètres
au midi de Gholet et à 4 kil. 1/2 au levant de Mortagne.
DIOCÈSE DANGERS
9. — Dimidiam partem Gestet.
Moitié de part de Gestet.
« Vers 1079, ecclesias curtis Gestia censis (D) ».
Geste, entre Vallet, Loire-Inférieure, et Beaupréau, Maine-
et-Loire. Commune du canton de Beaupréau. En 1789, elle
était, comme actuellement, sur la limite du diocèse de Nantes.
— 68 —
10^ . — Chesiacum.
La Chaise.
« Ghassiacus super Medianam fluvium positus, dans une
•charte du XI» siècle (D) » La Chaise est un village de la com-
mune de Roussay, sur la Moine, à la limite de Montfaucon,
son chef-lieu de canton. Montfaucon, à trois lieues à l'est de
Clisson, fut, jusqu'en 1790, du diocèse de Nantes quoiqu'on
dehors du comté*.
Des enseignements qui découlent du tableau n° 1 (V. Annexe
C), il résulte que Chesiacum se traduit naturellement par la
Chese. Un léger changement en a fait la Chaise. « Ghassiacus
se traduit très bien par Chassay (D) » qui était un grand
domaine de l'église. La charte fait de Cariaciim un grand
domaine (V. 19 ci-après), mais non pas de Chesiacum.
Le nom de Gheix, commune du canton du Pellerin, répond
assez bien à celui de Chesiacum ; mais quoique sur la rive siid
de la Loire, cette commune s'écarte de l'ordre qu'on trouve
dans la charte. Si nous passions sur l'autre rive, pour placer
Chesiacum à Chassay, qui s'appelait Cariacum, ou à Sainte-
Lucedu Ghessail, nous serions obligé d'aller de la rive gauche
du fleuve sur la rive droite pour revenir tout de suite à notre
énumération dé la rive gauche, contrairement à la méthode
que l'évêque Brice a constamment suivie. Avec la Chaise
près de Montfaucon, les n"' 8, 9, 10 et il sont bien groupés et
les numéros suivants viennent en bon ordre.
Les paroisses citées par la charte vont maintenant se rap-
procher de la Loire. Les sept lieux suivants étaient du diocèse
de Nantes, qui a conservé les deux premiers et les deux der-
niers ; les trois autres (n"^ 13, 14 et 15) n'en sont plus depuis
1790, époque à laquelle ils ont passé au diocèse d'Angers'.
' SaintCrespin etTilliers, du canton de Montfaucon, étaientaussi du diocèse
de Nantes, mais non du comté Montfaucon était de la Chàtellenie de Champ-
toceaux, aux seigneurs Chàteauceaux de 1070 à 1118, etCrespin de 11. 8 à 1224.
' Les paroisses de Champtoceaux, Landemont, Saint-Christophe, Saint-
Laurent-des-Autels et le Puiset étaient également du diocèse de Nantes, non
du comté, et elles sont du canton de Champtoceaux ; le Fuilet, du canton de
Monlrevault, était du diocèse de Nantes en 1789.
— 69 —
112 . — Palatium.
Le Pallet.
Commune du canton de Vallet. Abeilard y naquit en 1079.
<f Petrus episcopits de Palatio. Cette localité a autant de rai-
sons que d'autres du même nom, à revendiquer pour elle cet
évêque qui a signé au concile d'Agde en 506 (D) ».
La seigneurie du Pallet était, en 1090, à Daniel de Palalio.
Fr-ançois de Goulaine la possédait en 1550 et la vendit en
1635-52, au marquis de la Galissonnière qui la réunit à son
marquisat.
12 -. — Castrum Rainerii.
Château du Bainier.
Ce château m'est inconnu. Au nord du Pallet et dans la
commune du Landreau, à 3200 mètres à l'est du bourg, il y a
la Rinière de Beauchêne, village, qui répond assez bien,
comme nom et comme situation, à Raineri ; il dépendait de
la Châtellenie de Goulaine :
La châtellenie do Ghamptoceaux qui, comme Montfaucon,
appartenait de 1038 à 1224, aux seigneurs Crespin et Châ-
teauceaux, renfermait les trois paroisses suivantes :
13. — Liriacum.
Lire, commune du canton de Ghamptoceaux.
14. — Droïnum.
Drain, commune du même canton.
15. — Varennam.
La Varenne, commune du même canton.
- 10 —
16. — S. Julianum cum aqua Cancella.
Saint-Julien avec les eaux de la Cancelle.
Saint-Julien de Concelles, canton du Loroux-Bollereau.
En liOi, l'église fut confirmée par l'évêque aux moines de
saint Florent. Cette paroisse était vraisemblablement de la
seigneurie de Goulaine au XIP siècle.
17 ' '^. — Bratiacum cum aqua Golena
Briacé avec les eaux de la Goulaine.
Bas-Briacé, village du Loroux-Bottereau, à 400 mètres de
la Goulaine. C'était une seigneurie, sortie vraisemblablement
de la châtellenie de Goulaine, qui passa dans le marquisat de
la Galissonnière au milieu du XVII* siècle.
A deux kilomètres au levant du village, il y a le château de
Briacé.
« La châtellenie de Bas-Briacé relevait du roi. En 1622,1e
seigneur de la Galisonnière la possédait par l'acquisition qu'il
en avait faite de Françoise de Saint-Phab. La seigneurie de
Briacé était distincte de cette première. Le château dépen-
dait de la seigneurie du Loroux, et la juridiction, du roi. On
trouve un Urvoi de Briacé, Urvoium de Briaciaco, dans un
acte de 1105. (D) »
Une dernière commune du diocèse d'Angers.
18 2 b — Dimidium Mello Martis cum ecclesia.
Moitié de Maulo-Mart avec Véglise.
Saint- Pierre-de-MontUmard, anciennement Maulimard (D).
■Commune du canton de Montrevault qui borde au sud-est
celui de Champtoceaux ; elle est à 1 kil. 1/2 au nord-est de
son chef-lieu de canton et non loin de la Loire.
Ici se termine rénumération des biens que possédait l'église
— 71 —
de Nantes sur la rive gauche de la Loire. Nous allons suivre
la charte sur la rive droite. Nous quitterons une seule fois
cette seconde rive pour une exception justifiée (n^ 65) qui
s'applique aux revenus de deux petits ports situés à l'extré-
mité des ponts de Nantes.
LA RIVE DROITE DE LA LOIRE
Cette seconde partie commence, ainsi que la première, par
une propriété d'importance, Cariacmn, la plus importante des
domaines de la rive droite. Elle est bien à sa place. Comme
la situation de ce domaine est controversée, nous lui consa-
crerons quelques lignes d'histoire.
19 1 a — Cariacum cum omnibus terminis et fmibus
suis et insula Aduneto sibi adjacenti.
Cariacum dans toute retendue de ses limites, de ses frontières,
et Vile Adunet située auprès.
Nous sommes ici à Cariacum où Fortunat reçut l'hospitalité
de révêque Félix, c'est-à-dire selon nous à Chassay, commune
de Sainte-Luce, château et vaste parc entourés de murs, rési-
dence seigneuriale des évoques de Nantes, depuis^au moins
le VP siècle.
Considérons d'abord qu'aucun autre nom de la charte ne
tr-ouve sa place à Chassay ; il y a bien Chesiacum (n* 10), mais
nous venons de le voir, Chesiacum, c'est la Chaise, sur la rive
gauche de la Loire, qu'on ne saurait chercher sur Ja rive
droite sans briser le fil qui relie entre eux les lieux énumérés
dans l'antique document. Considérons que Chassay, le pre-
mier, le plus important des domaines de l'église de Nantes,
doit se retrouver dans la charte de Louis le Gros, et que si
ce Cariacum n'est pas Chassay, l'évêque Brice a oublié son
beau domaine des bords de la Loire dans l'énumération des
biens qu'il mit sous les yeux du roi ; ce qui n'est point admis-
72
sible ; ou Chassay est Gariaciim ou il n'était pas une propriété
de l'église aux temps mérovingien!?.
Quant à l'île Adunet, adjacente à Cariacum, elle était évi-
demment sous les yeux du palais, dans le fleuve. Depuis ce
temps-là, elle a été entourée par lesalluvions de la Loire qui
l'ont réunie à la terre ferme. Ces exemples d'annexions sont
très nombreux entre Ingrandes et la mer. Le bourg de Sainte-
Luce est à l'altitude de 15 à 20 mètres ; le château de Chassay
situé à 200 mètres de là, sur le versant de la Loire, est à deux
ou trois mètres au-dessous, puis le terrain s'incline douce-
ment jusqu'aux prairies du fleuve dont l'altitude est d'environ
4 mètres. Fortunat a pu dire avec raison que le riant domaine
de Cariacum descend en pente douce vers le fleuve.
La rive est formée de prairies submersibles alluvionnées
et aujourd'hui sillonnées de douves qui les séparent des
hautes terres : l'île Adunet était là; elle est englobée dans
cette grande plaine portée au cadastre sous le nom de prairie
de Sainte-Luce. Elle a subi le sort de l'île Hanian qui est dans
la prairie de Mauves et que nous allons voir plus loin au
n''64'. (V. appendice D.)
BARONNIE DE PONTCHATEAU
20 ^-. — Vidunitann insulam Brivatae fluminis
Vidunita, île sur le fleuve du B rive t.
La situation de ce lieu est bien déterminée au bord du
Brivet,,et rien ne paraît mieux répondre à son nom que le
nom de Bethené de Marmoutier, représenté par Besîié, com-
mune du canton de Pontchâteau. Un nom y répond encore
mieux, celui de Windimet que Grégoire de Tours désigne
Ml y a dans la prairie de Sainte-Luce, section D n" 127, une parcelle de
terrain de 44 ares 50 nommée Y Adue-Creuse (en deux mots.) La similitude
entre le premier de ces noms et le nom d'Adunet est grande et il ne serait
pas impossible que l'Adue-Creuse ne représentât l'île Adunet. Mais il serait
éméraire de l'affirmer.
- 73 —
comme une île de la Loire ; et à ce sujet nous avons un doute
que nous exprimons au n" 20 de l'appendice E.
En 1116, l'église de Besné appartenait à des laïcs ; l'évêque
la reçut d'eux et la donna aux moines de Redon.
BARONNIE DE DERVAL
21. — Wenmened id est raontem candidum.
Guémené sur la Montagne-Blanche .
Guémené-Penfao, ctief-lieu de ranton de l'arrondissement
de Saint-Nazaire. Le bourg est en terrain plat au bord du
Don, par 17 mètres d'altitude ; mais à sa sortie, du côté est,
le terrain se relève immédiatement en rampe forte jusqu'à
atteindre 52 mètres. Le village antique a pu être placé vers
le point culminant du plateau.
22 -. — Concorotium.
Conquereuil.
Commune du canton de Guémené, limitant à Vest la com-
mune chef-lieu.
SEIGNEURIES DE FOUGERAY, TEILLAY ET
FERCÉ
23^ ^. Felgeriacum.
Fougeray .
Chef-lieu de canton d'Ille-et-Vilaine, au nord du canton de
Guémené, détaché du diocèse nantais en 1790.
24 * ^ — Heutiacum (Hertiacum D).
Hercé.
Ercé-en-Lamée. commune d'Ille-et-Vilaine, canton de Bain,
au nord-est de Fougeray, à 3 kilomètres du canton de Rougé,
du diocèse de Rennes.
— 74 —
25 ' ^ — Fertiacum.
Fercé.
Commune du canton de Rougé ; avant 1790 du diocèse de
Rennes.
BARONNIE DE CHATEAUBRIANT
26 ^ — Bairiacum.
Beré.
Actuellement faubourg de Châteaubriant, autrefois chef-
lieu de la paroisse. Domaine donné à Marmoutier en 1050
et confirmé par l'évêque de Nantes. La possession de ce
domaine donna lieu, au XP siècle, à un long procès entre les
abbayes de Redon et de Marmoutier.
27 2 b. _ Solzennum.
Soudan.
Commune du canton de Ghâteaubriant. « Rivalloniiis de
Solzen fin du XI' siècle (D). »
28 2. _ Villam Breisram.
Villa Breis.
Lieu douteux. On trouve la Brée', métairie de Soudan, à 2,500
mètres sud-sud-ouest du bourg. Le nom de Brée se rapproche
bien du nom latin et sa situation dans la baronnie de Château-
briant, entre Soudan (27) et Erbray (30), est tout en sa faveur.
Le château de la Briais, à 2,500 mètres au nord-est de Saint-
Julien, tout près du n" 31, est également bien mais il devait
être dans la seigneurie de Vioreau, dont dépendaient les
N"" 37, 38 et 39. On trouve encore : les Brées, métairie de
Saiïré, et la Bréarais, borderie d'Abbaretz, qui sont déjà loin
de la baronnie de Châteaubriant.
' Braies^ dans le Dictionnaire du Comté.
— 75 -
29 2. — Villam Clouionnam'.
Villa Cloujon.
Ce lieu est dans la même situation que la Villa Breis. 11 y a,
-commune de Soudan, le village de Courjon, à 2,800 mètres
sud-sud- ouest du bourg.
Brée et Courjon sont deux hameaux voisins qui répondent
bien aux indications de la charte et leur voisinage est une
présomption en faveur de leur attribution à l'église de Nantes.
La Clouère;, village de Derval, est trop loin de la baronnie.
30 '. — Arbraiacum.
Erbray.
Commune du canton de Saint-Julien de Vouvantes, « Noyses
de Arbriaco 1062 (D). »
31 ^ — Joviniacum.
Juigné-les-Moutiers.
Commune du même canton. « Jovitiiacus, vers 1060 (D) ».
Il y avait deux prieurés au XII' siècle, et l'église fut donnée à
i'évêque en 1123, date de la charte. Dès ce temps-là, les sei-
gneurs de Châteaubriant faisaient exploiter des Forges dans
la forêt de Juigné.
De Juigné, situé à l'orient et le dernier domaine de la
baronnie, la charte passe à l'occident, où elle rencontre Blain,
pour énumérer ensuite les domaines des seigneuries com-
prises entre ces deux extrémités.
' Au XVII* siècle seulement, on commença à distinguer Vi du j et Vu du v.
- 76 -
CHATELLENIE DE BLAIN
32-. — Castrum Bableni.
Cliâteau de Blain.
Sur la rive gauche de l'Isac. Eu 1090 et 1133, Blain était au
nom de Guégon ; entre ces deux dates, en 1106, au duc Alain
Fergent qui fit reconstruire le château, vraisemblablement
comme représentant 1rs intérêls du mineur. On voyait encore
de nos jours, au couchant de ce château, des restes de retran-
chements considérables qui ont pu occuper l'emplacement du
château de l'évôché.
Blain est un chef-lieu de canton de l'arrondissement de
Saint-Nazaire et il touche à l'arrondissement de Ghâteaubriant-
Le bourg esta un demi-kilomètre de l'Isac.sur la rive droite; il
recouvre de nombreux débris antiques et ce fut une impor-
tante station gallo-romaine traversée par de grandes voies.
SEIGNEURIES DISSE DE NOZAY ET DE SAFFRÉ
33^. — Isiacum cum gastina Silvia.
Issé, avec la forêt de Gàtine.
Issé est une commune du canton de Moisdon et Gàtine un
domaine situé dans sa partie tiord, à 1200 mètres au-dessous
de la Forêt-Pavée qui s'étend encore sur quatre communes,
Issé, Louisfert, Moisdon et Erbray.
34 ^ — Noziacum.
Nozay .
Chef-lieu de canton. En 1120, l'église futdonnée parl'évêque
aux moines de Saint-Elorent. << R. de Noziaco, vers 1080 (D) ».
35 ^ — Safriacam.
Safré.
Saffré, commune du canton de Nozay. Des débris gallo-
romains y ont été recueillis de nos jours.
— 77 —
36 ^<-\ — Abbaretiacum.
Abbaretz.
Commune du canton de Nozay. On y rencontre des restes
de retranchements en terre qui, au milieu de ce siècle, cou-
vraient une ligne ininterrompue d'une grande étendue et
d'un relief considérable.
CHATELLENIE DE VIOREAU
37 -^. — Maldonium.
Moisdon.
Chef-lieu de canton. Ce fut le siège d'un important prieuré
dépendant de Saint-Florent-de-Saumur. « M. de Meldone 1062.
A, de Maldone vers 1069. Ecdesia de Meldonio, 1122 (D) ».
38 -. — Voventam.
Saint-Julien de Vouventes.
Chef-lieu de canton. Au milieu du XI' siècle, Saint-Florent
y avait une chapelle et un prieuré.
39 -. — Curtem Alentis.
La Cour d'Alen.
Ce lieu peut paraître douteux ; cependant il fait suite à deux
fiefs de la châtellenie de Vioreau qui avait pour chef-lieu Jouô-
sur-Erdre. Or, près de ce bourg et au bord de la rivière, on
voit une motte féodale du nom de Château d'Alon et deux
métairies du nom d'Aiou ou Allon. Nous pensons que la
Motte-Alon est le château d'Alen. Joué est une commune du
canton de Riaillé.
— 78 -
40 1. — Frugiaoum{Fruffn{acum (D).
Frcigné.
Commune du canton de Gandé (Maine-et-Loire), du diocèse
de Nantes jusqu'en 1790. « H. de Frugniaco vers 1050 (D). »
Elle est bordée par cinq communes de la Loire-Inférieure'.
BARONNIE D'ANCENIS
41 1. — Beligniacum.
Belliyné.
Commune du canton de Varades. La possession de son
église fut confirmée à l'évêché de Nantes en 1123, année de la
rédaction de la Charte.
CHATELLENIE DE MONTRELAIS
42 *. — Monasterium Legum cum omnibus sibi
pertinentibus.
Monaster-Lai, avec fout ce qui en dépend.
« R. de Monasterio legum, 1292. Prioratus de Monasterio
« Legum avant 1317 et au XVIP siècle (D) ».
Montrelais, commune du canton de Varades. Cette antique
localité était protégée par un châleau-fort au XII' siècle. Ici
l'indication d'un monastère avec ses dépendances est sem-
blable à celle du n° 50 ci-après ; elle n'en diffère que par le
nom de Legum à la place d'Ayitnim. Le bourg de Montrelais
est à l'altitude de 10 mètres à peine au-dessus des grandes
crues de la Loire qui viennent quelquefois baigner ses mai-
sons du côté du midi.Lachâtellenie était bordée par le fleuve
au sud et par la baronriie d'Ancenis au nord et à l'ouest.
' La paroisse de la Cornouaille, à l'est de Preigné, taisait également partie
du diocèse de Nantes.
— 79 —
BARONNIE D'ANCENIS (Suite.)
43 ^ — Varesdam,
Va rades.
Commune chef-lieu de canton. II y avail, en 1120, un prieuré
dépendant de Marmoutier.
44 *. — Telliacum.
Teille.
Commune du canton de Riaillé.
45 ' ^. — Lingiacum.
Ligne'.
Commune chef-lieu de canton.
Avec le n° 46 qui suit, va commencer l'énuméralion des
biens restés à l'église de Nantes, biens que nous allons suivre,
peut-être sans solution de continuité, autour ou dans le voi-
sinage de la ville.
ÉGLISE DE NANTES
46 K — Odreacum.
Aurai/.
Commune de ïhouaré, hameau agreste à 4600 mètres au
nord-est du bourg, à mi-penchant du coteau de Thouaré,
sur le contrefort du vallon de Gobert, bien en vue de la Loire
et de sa belle vallée. « Aiiraes est qualifié de paroisse en
1236 (D.). » A 400 mètres de là, on voyait naguère, au bord du
ravin qui limite la commune des Mauves, une petite chapelle
du même nom, isolée et moderne, qui a été démolie de nos
jours.
— 80 "
kl'^^. — Malvam.
Mauves.
Commune du canton de Garquefou. On y rencontre des dé-
bris de riches villas gollo-romaines bien en vue du grand
fleuve.
48-. — S. Medardum cum insula Petrosa quae tune
castellona dicitur.
Saint-Médard avec l'île rocheuse qui est mamtenant appelée
Castellona (petit château).
Saint-Mars dît-Désert, commune du canton de Nort séparée
de VErdre par une bande du territoire de Sucé que nous
allons rencontrer au n" 51. Au bord de cette bande, l'île
rocheuse dépendant de Sucé est appelée Saint-Denis et por-
tait autrefois le nom de Saint-Denis-de-Castelioné . (Gartulîiire
de Redon).
49-. — S. Georgium.
Saint-Georges.
Ici, on peut choisir entre deux lieux distants de 28 kilomè-
tres : Saint-Georges, village de la paroisse de Saint-Donatien,
au bord de la route de Paris, et Saint-Georges, faubourg de
Nort, sur la rive gauche de l'Erdre, où Marmoatier fonda un
prieuré vers 1076. Le lieu, qui répond au premier Saint-
Georges, est situé entre les n«' 59, 60, 61, 62 et 63, au sein des
biens demeurés à l'église ; le lieu qui répond au second est
immédiatement au nord de ces biens, à la jonction de la
baronnie d'Ancenis et de la seigneurie de la Roche-en-Nort.
Voici la raison pour laquelle nos préférences sont pour Saint-
Georges-de-Nort.
En quittant la baronnie d'Ancenis, la charte énumère
Auray, Mauves, Saint-Mars-du-Désert et l'île Saint-Denis sur
— 81 —
l'Erdre, quatre localités qui se succèdent en se touchant ; de
Saint-Denis, elle remonte l'Erdre et rencontre Saint-Georges-
de-Nort, sur la même rive à deux lieues de là; puis elle part
de Saint-Georges pour passer à Casson et énumérer toute
la partie du regaire de la rive droite, ce qui est méthodique ;
arrivée à l'extrémité du regaire, Saint-Etienne-de-Mont-Luc,
elle revient sur la rive gauche, pour reprendre le regaire à
Garquefou, n" 58, et continuer par les villus do Saint-Dona-
tien, Thouaré et Doulon. Si Saint-Georges de Saint-Donatien
avait été à l'église, au lieu de Saint-Georges de Nort, c'est
plus loin qu'il aurait trouvé sa place à côté du n* 61.
50 -. — Cassonam.
Casson .
Commune du canton de Nort, vers le sud.
51 2. — Sucerum (Suceiuni D).
Sucé.
Commune. du canton de la Ghapelle-sur-Erdre, vers le sud
de Casson. L'évêché y avait une châtellenie qu'il conserva
jusqu'à 1790. « Burgitin de Suceio, 1217. Manerium de Suceio,
1267 (D.). »
52 2. Trelieram.
Treillières.
Commune du même canton, au couchant de Sucé. L'abbaye
de Redon y avait un fief au IX* siècle.
53 2 ''. — Orsvaldum.
Orvault.
Commune du même canton, au midi de Treillières.
6
— 82 —
54 2 b. _ Salteronam.
, Sa ut non.
Commune du même canton, au couchant d'Orvault
55-. — S. Similianum.
Saint-Similien.
Saint-Similien, faubourg de Nanies, sur la rive droite du
l'Erdre. Ici, il ne s'agit pas de l'église, mais de la paroisse.
Les églises du faubourg de la rive gauche sont indiquées, plus
loin comme églises, sous les w"^ 16 à 80. L'évoque devait être
le patron fondateur de la paroisse Saint-Similien et y posséder
tous les revenus alLachés à la fondation, tandis qu'il ne devai
avoir que la jouissance du casuel des églises de l'autre rive.
On verra, aux n"' 59, 60 et 61 qu'il possédait trois petits fîefs à
Saint-Donatien, nonobstant l'église qui est citée au n" 76.
56 -. '— Monastepium antrum cum omnibus sibi
pertinentibus.
Monastère cV Indre avec tout ce qui en dépend.
Indre est une commune du 6" canton de Nantes et elle est
formée de trois îlots rocheux : Haute-Indre, Basse-Indre et
Indret. Saint Hermeland fonda un monastère à Basse-Indre à
la fin du VII* siècle. Orvault, n" 53 et des Regairos, est séparé
du monastère par Saint-Herblain que nous trouvons, au XV*
siècle, divisé en de nombreux petits fiefs et dont nous ne con-
naissons pas les seigneurs avant ce temps-là. Avant les inva-
sions Normandes, qui détruisirent le monastère, les îles
d Indre et d'Indret étaient à i'église. «Après les invasions,
l'abbaye passa aux religieux de Bourg-Dieu près Ghâteaux-
Rou.x (D) » En 1050, Tndret était au comte de Nantes.
- 83 —
57. — S. Stephanum.
Saint-Stéphane.
Saint-Etienne-de-Mont-L?cc, chef-lieu de canton de l'arron-
dissement de Saitit-Nazaire, tangent par son angle nord-est à
à l'angle ouest de Saulron. (Saint Stephani de Monte-Lucis^).
En 1063, l'évêque abandonna à son chapelain la moitié des
dîmes de la paroisse. La châtellenie de Saint-Elienne-de-
Mont-Luc était, en 1187, à Guérin de Saint-Etienne ; elle fut
ensuite aux évoques de Nantes, jusqu'en 17923.
Après avoir fait un demi-cerle au nord de Nantes, la charte
se rapproche de la ville jusqu'à y toucher.
58. — Carcafagum.
Carquefou.
Commune chef-lieu de canton de l'arrondissement de
Nantes, conligu à la commune de Nantes. Marmoutier fonda
un prieuré, en 1110, « à la Madeleine en Bois. La paroisse
relevait en 1398 de la châtellenie du Sucé. (Dj. >>
59*. — Cheviriacum.
Cheviré.
Domaine de la commune de Nantes et de la paroisse
Saint-Donatien, au bord de l'Erdre, dans la direction et près
de Carquefou. « Cheviré appartenait, en 1398, au seigneur de
Vigneu (D). »
60* <=. — Rentiacum.
Renzay.
Même paroisse : à 3 kilomètres au-dessous de Cheviré, il y a
le Grand-Ranzay avec son vieux manoir agrandi récemment
et la borderiedu Petit Ranzay, à côté, bordant la rivière. « La
seigneurie de Ranzay appartenait, en 1426, à dame Jehanne
du Molin, veuve de Robert Sorin (D) ».
' Abbé Grégoire : Etat du diocèse de Nantes en 1790.
• Dictionnaire des Domaines du Comté Nantais, de Cornulisr.
— 84 —
61 '. — Popteriacum.
Porterie.
Porterie (Saint-Joseph de), entre Gheviré et Ranzay, suc-
cursale de Saint-Donatien. « La seigneurie de Porterie était,
au XV' siècle, aux Tournemine (D) ». A la fin du XVIII* siècle,
le géographeOgée écrivaitPorterieetc'estainsi que ce nom est
écrit sur le plan cadastral des environs de Nantes, par Charles
de Tollenare. Des auteurs écrivent /*or;(?nc et même Portericg,
ce qui n'est point dans l'ordre.
62 ^ — Tauriacum.
Thouaré.
Commune du canton de Carquefou, au bord de la Loire.
La possession de l'église fut confirmée en 1123, date de la
charte, à l'évêque de Nantes.
Le domaine de Cariacum, porté en tête de la rive droite,
n" 19, est entre Thouaré et Doulon et il serait placé ici, si son
importance ne lui avait pas donné droit à la première place
au nord de la Loire.
63 2b. _ Dolonellam.
Doulonneau.
La commune de Doulon est du canton de Carquefou et tou-
che à la ville de Nantes. L'évêque reçut l'église du baron de
Rais en 1105. Le nom de Dolonellam, au lieu de Dolonam,
indique qu'il s'agit ici d un petit domaine de la paroisse. « On
y trouve au XVIP siècle le Bois-Dolonneau (D) ».
— 85 —
64. — Insulam Haniam.
Ile de la. Hanne.
Depuis longtemps réunie à la terre ferme et comprise dans
la prairie dite de Mauves où s'élève ia gare du chemin de fer
d'Orléans. Au Xll' siècle, elle était séparée de la Hienne par
une douve et une écluse* qui n'ont qu'un rapport de voisinage
avec le canal Saint-Félix.
65-^. — Portum Carchedrarum {Cathedrarum D) et
Poptum Raciaci, cum tribus miliariis sursum et to-
tidem deorsum.
Portechaise et port de Rezé, avec trois mille à l'amont et
autant à l'aval.
Portechaise est un village de Saint-Sébastien au bord de la
Loire et à l'amont des ponts de Nantes. « C'était autrefois
une seigneurie. Le manoir de Port-de-Chaise est mentionné
en 1554 (D) ».
Rezé est un bourg du canton de Bouayp, au bord d'un bras
de la Loire actuellement comblé et à 1 aval des ponts. Rezé
^Ratiatum) fut une importante ville gallo-romaine et la
seconde ville des Pictons.
De l'un à l'autre de ces deux lieux, que sépare l'embouchure
de la Sèvre, la distance est de 3,800 mètres. Les 3,000 pas à
l'amont de Portechaise (pas romain) vont jusqu'à Basse-
Goulaine, et à l'aval de Rezé j usqu'à Bouguenais .
On peut considérer ce rivage comme le complément du ré-
gaire de l'église de Nantes.
Les quatre localités suivantes sont dans le périmètre de la
baronnie d'Ancenis : trois sont au nord à^Q la ville d'Ancenis,
la 4" est au couchant de la baronnie. La situation particulière
• Histoire du Diocèse de Nantes, par l'abbé Travers, t. i, p. 256-257.
- 80 -
qu'elles occupent dans la charte, sans liaison avec les numé-
ros 41 à 45 de la baronnie et immédiatement à la suite du
grand regaire, nous porte à penser, quoique n'ayant pas le
moyen de justifier notre sentiment, que l'église y avait
encore quelque bien en 1123.
66*. - S. Genonem (Gereonem, (D.)
Saint-Géréon.
Commune du canton d'Ancenis et adjacente à la ville,
a L'évêque y avait un fief dès 1305, Un titre de celte année
parle de vignes, etc. in parrochia sancti Gereonia juxta Ance-
nishim , in feodo et domiyiio domini episcopi. Vers cette
même époque, l'évoque et le prieur de Saint-Géréon étaient
en procès au sujet de leur fief (D). » Le prieuré, tombé en
régale en 1557, fut donné par le roi au coadjuteur de l'évoque
de Nantes ; l'église acheta les regaires de saint Géréon en
1562».
67 2 b — Tasconam, Tasconellam.
Tacon, Taconneau.
Il y a un village de près do cent habitants du nom de
Tacon dans la commune de Mésanger, canton d'Ancenis, à
2 kilomètres 1/2 au sud-ouest du bourg, localité très ancienne
avop otiiipelle pricumle du nom de Sciinte-Iiuce ; la chapelle et
le prieuré existaient au XII" siècle. Ce village a dû être formé
de deux agglomérations et il répond, comme nom et comme
situation, à l'énumération de la charte du roi de France.
' Dictionnaire f>f Bretagne, par Og#e, à l'article Saint-Gdréon.
— 87 —
68. — Asimarias. (Asinarias (D)
Asnière ou Annerie.
Lieu à chercher au nord d'Ancenis. Des auteurs ont cru
voir ici Anetz, commune du canton d'Ancenis. Le bourg
d'Anetz occupe un emplacement gallo-romain. En 1104,
l'église du prieuré fut confirmée par l'évêque à l'abbé de-
Sainl-Florent.
« Au point de vue philologique, il n'y a aucun rapport entre
les noms d'Asinarias et d'Anetz. Le premier a dû donner
Asnière. Anetz s'est appelé autrefois : Arnet, vers 1076, 1104 ;
Arnez, 1124, 1196, 1277; Calella de Ern.'io, 1142; Hasnet,
1239 ; Asnez, 1477 ; Asnetz, 1473 ; Agnes, 1467 ; Agnetz, 1521.
Un pouillé de 1686 donne cependant de Asinariis ; mais cette
forme iardive semi)le fantaisiste et ne mérite aucune consi-
dération (D) ».
Deux lieux nous paraissent bien en rapport, comme nom et
comme situation, avec Asinarias : ce sont Ips villages rie
VAnnerie placés, pour ainsi dire, entre les n" 67 et 60 et dis-
tants l'un de l'autre de 5600 mètres ; l'un, commune de Teillé,
à 2500 mètres au sud-ouest du bourg ; l'autre^ commune de
Trans, à 1300 mètres au sud-est de son chef-lieu. Ces deux
communes sont du canton de Riallé.
69 '. — Marcium.
Marc.
Petit-Mars, commune du canton de Nort, au bord de l'Erdre,
joignant Saint-Mars-du-Désert au midi et les Regaires au
couchant et au midi. L'évêque y avait encore au XVIII* siècle
3 à 400 hectares de marais. Cette paroisse appartenait au
seigneur de la Muce-Ponthus en 1200 mais elle relevait de la
baronnie d'Ancenis.
— 88 —
LES DIOCÈSES AU NORD ET AU LEVANT
DU DIOCÈSE DE NANTES
Les domaines suivants font partie des diocèses de Rennes,
d'Angers et de Chartres et n'ont pu, en aucun temps, faire
partie du diocèse de Nantes. Ils ont dû être donnés à notre
église soit par des évoques mêmes de Nantes, comme des biens
provenant de leur héritage, soit par des souverains ou des
particuliers, par reconnaissance ou par attachement.
70 '. — In pago Redonis, Novitiacuni super fluvium
Vicenoniae.
Dans le pays de Rennes. Novice sur le fleuve de la Vilaine.
Ce lieu doit être cherché au bord de la Vilaine, à l'amont de
Redon et même au-delà du Semnon. D'après M. l'abbé Dur-
ville, il s'agit de Noyal-sur-Vilaine.
71 à 73. — In pago Andegavo, (71 ^ ^) Balgiac, (72)
Cuptem Daon. (73) Curtem Genii ac Villam Lineris
cum omnibus sibi pertinentibus.
Dans le pays d'Angers, Beaugé, Cour Daon, cour Genié et
villa Linière avec, tout ce qui en dépend.
Seaugéy chef-lieu d'arrondissement de Maine-et-Loire.
» Daon^ Mayenne, arrondissement de Ghâteau-Gontier. Gêné,
Maine-et-Loire, arrondissement de Segré. Linière- Bouton,
Maine-et-Loire, arrondissement de Beaugé. (D.) »
— 8» —
74. - In pago Carnotineae, Alogiam.
Dans le pays de Chartres, Aloge.
« Alluyes, Eure-et-Loir, appelé autrefois Alogium. (D.) »
Ici se termine l'énuinération des domaines de toutes sortes
et des églises rurales qui faisaient partie des biens de l'église
de Nantes. Il nous reste à parler des églises adjacentes à la
ville de Nantes, d'une église du diocèse d'Orléans et du mono-
pole que l'évoque avait sur deux navires naviguant en Loire.
LES ÉGLISES DE NANTES.
Ces églises sont au nombre de cinq et touchent à la ville
antique même. Il n'y en a point dans l'enceinte gallo-romaine.
In ipsius urbis namneticae menibus assistam.
75. — Ecclesiam SS. Mart. Donationi et Rogationi.
Eglise des saints martyrs Donatien et Rogatien.
Eglise située dans le faubourg Saint-Donatien.
76. — Ecclesiam SS. mart. Cirici et Julittae
Eglise des saints martyrs Saint-Cyr et sainte Julitte.
Cette église était dans l'enceinte du XIII* siècle mais en
dehors de l'enceinte gallo-romaine et dans le voisinage de la
place de la Préfecture.
77. — Ecclesiam sanctae Dei Genitr.
Eglise sainte Mère de Dieu ou Notre-Dame.
Elle était dans le faubourg Saint-Clément, au lieu où se voit
encore le couvent de la Visitation.
— 90 — ■
78. — Ecclesiam sancti démentis papae ac martyris.
Elgise saint Clément, pape et martyr.
Église située dans le faubourg de ce nom.
79. — Ecclesiam sancLi Andreae ap cum omnibus
ad eas in integpum peptinentibus.
Eglise saint André, apôfre, avec toutes ses dépendances.
Cette église était dans le faubourg Sdint-Glément, à la
jonction de la place et de la rue Saint-André.
Après ces églises, vient l'indication de deux navires.
80. — Duas naves tamin fluvio Ligeris quam inaliis
fluminibus ligerim intrantibus navigantes ab omni
tributo libéras.
Deux navires naviguant sur le fleuve de Loire et ses af-
fluents, libres de tout tribut.
Enfin pour terminer :
81. — Praeterea in pago aureliam, ecclesiam SS.
mart. Donationi et Rogat.
De plus dans le Pays Orléanais, iéglise des saints martyrs
Donatien et Hogatien.
«
Ici finit, dnns la charte du roi Louis le Gros, l'énumération
des biens attribués à I Église de Nantes.
— 91
APPENDICE
A — RÉSUMÉ DES BIENS DE L'EGLISE
Les biens que la charte déclare avoir appartenu à l'église
de Nantes, se répartissent ainsi qu'il suit, d'après ce docu-
ment :
INDICATIONS DES BIENS
se
Le Tonlieu de la ville de Nantes
Les revenus de 2 ports contigus
Le monopole sur deux navires
Monastères avec leurs dépen
dances
Résidence et domaine de l'évêque
Châteaux ....
Paroisses seules.
Paroisses avec l'église
1/2 paroisse avec l'égl
Paroisse avec forêt .
Id. avec île.
Id. avec les eaux
Partie de paroisse .
Eglises seules.
Iles
Les villas ou villages ou prieurés
Les domaines dans les diocèses d
Rennes, Angers et Chartres
Eglise dans l'Orléanais. .
Totaux.
TOTALITE
des
biens
1
1
1
3
1
3
35
2
1
1
1
1
\ P
10
2
14
5
1
84
BIENS
supposés
à l'église
en 1123
1
1
1
2
1
»
10
5
1
6
PLUS
les do« 65,
07, 08 et 09
29
1
1
1
2
1
><
13
1
»
»
5
1
7
BIENS
dans le
diocèse
actuel
1
1
3
1
3
28
2
»
1
1
1
»
8
9
12
33
65
— 92 —
L'énumération que nous donnons ci-devant comprend 81
numéros. La différence 3 provient de ce que le n° 4 s'applique
à 3 églises et le n° 67 à 2 villages .
Les biens que nous considérons comme ayant été la pro-
priété de l'église, au temps de l'évêque Brice, sont les n»' 1,
2, 19 et 46 à 65, puis les églises 76 à 80. On peut y ajouter,
peut-être, les n»' 66, 67, 68 et 69.
B. — INDICA TION DES SEIGNEURS
QUI ÉTAIENT EN POSSESSION DES FIEFS
renfermant les Biens réclamés par l'Eglise.
Dans le Dictionnaire des Terres et Seigneuries du comté
naîitais, nous trouvons les seigneurs dont les noms suivent
en possession des biens de l'église de Nantes vers le temps
de l'évêque Brice.
Sur la rive droite de la Loire,
— A Pontchâteau, c'est Daniel du Pont, d'abord, puis
Jarnigon fils de Daniel, en 1040; on trouve le nom du Pont
jusqu'à 1203. De la baronnie de Pontchâteau dépend Besné
N" 20.
— Bonabes de Derval, en 1180, a dans sa baronnie : 21,
GuémenéPenfao et 22, Gonquereuil.
— Brient-le-Bœuf, sire de Nozay en 1202, possède : 23, la
seigneurie de Fougeray, au nom de Brient; 25, la seigneurie
de Percé, au nom de Robert; 33, la seigneurie d'Issé, au
nom de Brient ; 34, celle de Nozay, au nom de Brient ; 36,
celle d'Abbaretz.
— Le seigneur de Teille (Teillai), a 24, Ercé-en-Lamé.
— Brient de Châteaubriant, en 1050, et ses successeurs
directs jusqu'au XIV* siècle : il y a dans la baronnie de
Châteaubriant : 26, Béré ; 27, Soudan; 28 et 29, la Brée et
Courjon, en Soudan; 30, Erbray ; 31, Juigné-les-Moutiers.
— 93 —
— Guégon de Blain, 1090 ; un autre Guégon de Blain
en 1133 ; dans l'intervalle, le duc de Bretagne : 32, Blain.
— Alain de Safré, 1220 : 35, Saffré.
— Hervé de Joué, 1202, châtelain de Vioreau : 37, Moisdon ;
38, Saint-Julien de Vouvanles ; 39, château d'Alon.
— Du diocèse d'Angers et touchant la baronnie d'Ancenis :
40, Freigné.
— Guihenoc d'Ancenis, 1070; Maurice, 1104; Guethenoc,
1149 : 41, Belligné ; 43. Varades ; 44, Teille ; 45, Ligné.
— Guillaume de Montrelais, 1120: 42, Montrelais, châtel-
lenie bordant au nord et au couchant la baronnie d'Ancenis.
— L'église de Nantes : 46, Auray ; 47, Mauves ; 48, Saint-
Mars-du-Désert; 49, Saint-Georges ; 50, Casson ; 51, Sucé ;
52, Treillères ; 53, Orvault ; 54, Sautron ; 55, Saint-Similien ;
56, Monastère d'Indre; 57, Saint-Étienne-de-Mont-!>uc ; 58,
Garquefou; 59, Cheviré; 60, Ranzay ; 61, Porterie; 62,
Thouaré; 63, Doulonneau; 64, Ile de la Hanne; puis 65,
Ports de Portechaise et de Rezé.
Nous avons vu que Ghassay est inscrit sous le N° 19 en tête
des biens de la rive droite, de même que Vertou, sous le N" 2,
en tête des biens de la rive gauche
Les N"" 66 et 69 sont dans la baronnie d'Ancenis ou sur ses
limites ; de sorte que l'énumération coupe la baronnie en deux,
pour placer les biens de l'église dans l'intervalle. Cette
situation pourrait bien indiquer que ces quatre lieux étaient
restés à l'évêché. Ce sont : 66, Saint-Géréon ; 67, Tacon ; 68,
Annerie, tous trois en pleine baronnie, et 69, Petit-Mars, sur
la limite delà baronnie et des Regaires.
Sur la rive gauche de la Loire.
— Bernard de Rais, 1112: 3, Gheméré.
Daniel du Palais, 1090: 11, Le Pallet.
— Marcis de Goulaine, 1112: 12, Ghâteau-Renier;16, Saint-
Julien-de-Carcelles ; 17, Bas-Briacé.
— La châtellenie de Ghâteauceaux renfermait à peu près
tous les domaines du diocèse d'Angers, du N" 9 au N* 18.
— 94 —
TRANSFORMA TION
des noms du latin en français. Noms des lieux
d'après les terminaisons latines.
TABLEAU N» I.
l»
Terminaison
ia est remplacé
par e, é, ie ou ay ,
Noms
en
iacuni.
curn disparait
complètement*.
français
5'»(')Coldriacum.
Goudrie.
Goudrie.
10
Ghesiacum.
Ghese.
Ghaise.
13
Liriacum
Lire.
Lire.
17
^ Bratiacum.
Bracé.
Briacé.
10
* Gariacum.
Gharay.
Ghassay.
23
^ Felgeriacum.
Fougeray.
Fougeray.
24
<^ Hertiacum.
Hercé.
Krcé
25
<^ Fertiacum.
Fercé.
Fercé.
26
Bairiacum.
Bairé.
Béré.
30
Arbraiacum.
Arbray.
Erbray.
31
Joviniacum.
Jouiné.
Juigné.
33
Isiacum. .
Isé.
Issé.
34
Noziacum.
Nozay.
Nozay.
36
'^ Abbareliacum.
Abbarece.
Abbarelz.
40
Frugiacum.
Frugné.
Freigné.
41
Beligniacum.
Beligné.
Belligné.
44
Teilliacum.
Teille.
Teille.
45
Lingiacum.
Linge.
Ligné.
59
Gheviriacum.
Gheviré.
Gheviré.
* Si le texte est pur, on peut dire que ces noms en iacum à l'accusatif,
font iacus au nominatif et iaci au génitif.
* Les lettres en exposant répondent à l'un des paragraphes du tableau
n" 3 ci-4prèfl.
— 95 —
60 '^
Rentiacum.
Renzay .
Ranzay.
61
Porteriacum.
Porterie.
Porterie.
62
Tauriacum.
Taure.
Thouaré.
71
Noviliacum.
Novice.
(Ille-et-Vilaine)
Il en est ainsi de iacus (nominatif), iacam et eacum
(accusatif).
3 «
Gamariacus.
Ghamaré.
Gtieméré
35
Safriacam.
Safré.
SafTré.
46
Odreacum.
Odré ou Odray.
Auray.
C. (suite) — TABLEAU N" 2
2°. — Noms ter
minées en ium.
(accusatif).
6 Asinesium
Il Palatium
22 Concorotium
37 b Maldonium
42
ium est supprimé Noms français.
Asinès
Palat
Goncorot
Maudon
Monasterium legum Monaster-lè
49 S. Georgium Saint George
51 Suceium(v.pl.bas) Sucé
56 Monasterium anlrum Monaster-anire
69 Marcium Marc
Aizenay
Le Pallet
Conquereuil
Moisdon
Montreiais
Saint George
Sucé
Aindre ou Indre
Petit-Mars
3°. — Noms terminés en am et um (accusatif). Ces
syllabes sont supprimées, quelquefois avec la consonne
qui précède et parfois remplacées par e.
14 Droïnum
15 Varennam
16 S. Julianum
20 Vidunitam
Droïn
Varenne
Saint Julien
Vidunit
Drain
La Varenne
Saint Julien
Besné
— 96 —
27 b**Solzenum
28 Breisram
29 Glouionnam
38 Voventam
43 Varesdam
47 ^ Malvam
48 . S. Medardum
50 Gassonam
51 Sucerum
52 Trelieram
53 ^ Orsvaldum
54 ^ Salteronam
55 S. Similianum
56 Antrum
57 S. Stephanum
58 Carcafagiim
63 ^ Dolonellam
65 « Portuni cathfdrarum
66 S. Gereonem
Tasconam
67
Tasconellam
Souzen
Breis
Cloujon
Vovente
Varesde
Mauve
Saint Médard
Casson
Sucé
Trelière
Orsvaud
Sauleron
Saint Similien
Antre
Saint Stéphane
Garcafa
Dolonau
Port-Cathedra ou Port-Chaise
Saint Géréon
Tascon
Tasconau
Soudan
Brée
Gourjon
Saint Julien de Vouvantes
Varades
Mauves
Saint Mars
Gasson
Sucé
Treillières
Orvault
Sautron
Saint Similien
Indre
Saint Sthephane
Garquefou
Doulonneau
Portechaise
Saint Géréon
Tacon
Taconneau
4*>. — Noms au Génitif, en is et en i,
18 b Mello Martis Maulo Mart Montlimard
39 GurtemAlentis Gour d'Alent Ghateau d'Alon
12 Castrum Rainerii Ghâteau de Raineri La Rinière ?
32 Castrum Bableni Ghâteau de Bablen Ghâteau de Blain
— 97 —
C. — TABLEAU N» 3.
Noms des lieux compris dans les deux tableaux
précédents. De quelques changements dans l'ortho-
graphe des noms.
A. — ca, syllabe latine simple, devient cha ou che au
commencement des mots.
19 ^ Cariacum.
3 1 Camariacus.
65 - Portum Catliedrarum.
Gharay.
Chamaré.
Port-Chaise.
Ghassay.
Gheméré.
Portechaise.
B. — Suivies d'une consonne, les S3dlabes latines col,
dol, fol et fel, et sol font cou, dou, fou et sou ; mal
et mel deviennent mau ; sal fait sau et val, vau.
5 ' Goldriacum.
18 2 Mello Marti s.
23 1 Felgeriacum.
27 2 Solzenum.
37 2 Maldonium.
47 - Malvam.
53 2 Orsvaldum.
54 2 Salteronam.
63 2 Dolonellam.
67 2 Tasconellam.
Goudrie.
Maulo-Mart.
Fougeray.
Souzen.
Maudon.
Mauve.
Orsvaud.
Sauteron.
Dolonau.
Tasconau.
Goudrie.
Maulimart. Montlimard.
Fougeray.
Soudan.
Moisdon.
Mauves.
Orvault.
Sautron.
Doulonneau.
Taconneau.
C. — Le t devant iacum devient c ou z
17 ^ Bratiacum. Bracé.
24 ^ Hertiacum. Hercé.
25 1 Fertiacum. Fercé.
36 1 Abbaretiacum. Abbarece.
60 ^ Rentiacum. Renzay.
65 Ratiacum. Rezé.
Briacé.
Ercé.
Fercé.
Abbaretz.
Ranzay.
Rézé.
— 98 —
Dans Ligné ^45), il y a une inversion de deux lettres : Linge
devient Ligné.
Il arrive quelquefois qu'une lettre (46) ou quelques lettres
(»ii une syllabe sont retranchées dans lo cours d'un mot,
uolainment l's (53, 67). Guémêné est un nom celte.
On peut tirer de ces trois tableaux cette conclusion générale :
aucune terminaison latine n'est conservée ou traduite dans le
nom français, et, dans les deux langues, sauf Besné (B pour V),
tous les noms commencent par la même lettre. Tous, sauf
quelques exceptions justifiées, ne diffèrent que par la
terminaison.
D. - DE CARIACUM.
N" 19. — Pour faire notre démonstration sur la situation
de Gariacum, il nous paraît indispensable de remonter à la
vie de saint Aubin, évêque puis patron d'Angers, et plus tard
patron de Guérande.
Saint Aubin fut évêque d'Angers de l'an 529 à l'an 550. Sa
vie a été écrite par Fortunat, qui fut l'ami de saint Félix,
évêque de Nantes de 550 à 583, et aussi de Domitien, évêque
d'Angers à partir de 557. Dom Lobineau a pris à Fortunat la
vie de saint Aubin qu'on trouve dans la Vie des Saints de
Bretagne du savant bénédictin.
Fortunat avait écrit sous l'inspiration de Domitien et lors-
que la mémoire de saint Aubin était encore présente à tous
les esprits. Saint Aubin naquit dans le diocèse de Vannes et
se retirade bonne heure « dans le monastère que Fortunat
« nomme en l^tin Tmcillacense, et qu'il place entre Poitiers
« et Angers, plus près cependant de cette dernière ville que
« do l'autrei. » Dom Lobineau ajoute que, d'après la tradition,
saint Aubin naquit dans la paroisse de Languidic, près Hen-
nebon, et qu'il ne reste aucun vestige du monastère oii il se
• Les Saints de Bretagne, p. 54. L'indication donnée par Kortunat, qui
visiia Tincillié, n'est pas une indication problématique et elle répond bien
à Tillers près de Glisson.
— m —
retira avant d'êlre évêqae, « à moins qu'on ne veuille dire
i< que c'est Tilliers, sur la frontière d'Anjou du côté du pays
« de Nantes*. »
Ces anciens documents nous fixent donc d'une façon cer-
taine sur ces trois points : Saint Aubin naquit dans le diocèse
de Vannes, au nord de la ville de ce nom ; il fut abbé du
ynonastère de Tincillé situé sur la rive gauche de la Loire au-
dessus de Nantes, puis évêqae d'Angers et pour ainsi dire
contemporain de saint Félix.
Fortunat raconte aussi, au livre V. pièce 7 de ses poésies
qu'il alla voir l'évêque Félix « dans ces campagnes que la
<^ Loire baigne de ses eaux limpides, où le riant domaine
'< de Cariacum (cariaci ager) descend par une pente douce
« vers la rivière ; d'un côté, le fleuve réjouit le regard, de
u l'autre, la vigne étale ses pampres et les pins dressent
^< leurs cimes chevelues que fouette le vent du nord*. »
Ici, nous sommes certainement sur les bords de la Loire,
dans V aimable séjour qui retient Félix ; nous sommes à
Cariacum, habitation seigneuriale du grand évêque d'où l'on
descend en pente douce vers le fleuve : c'est Ghassay, com-
mune de SaitiLe-Luce, demeure constante des évoques de
Nantes jusqu à 1790.
Au livre XI du même poète, nous lisons dans l'épîlre 25
adressée à la reine Radegonde : « Quand j'eus pris congé de
• '< vous, l'ami Komondus me reçut avec sa bonté habituelle.
'( Je le quittai pour me rendre en toute hâte au palais de
X Cariaca (Gatiacae aulae), d'où je partis pour aller à Tincillé
>> (Tincilliacensij. De là, l'évêque Domitien m'entraîna aux
« fêtes célébrées en l'honneur de saint Albin. Gela fait, je
« montai sur un petit bateau qm, emporté par le coura?it el
4 pendant qu'il pleuvait, me poussa, déjà fatigué et non sans
<t de nombreux périls, vers un point où un fort vent du nord
« bouleversait le fleuve^ ;>
1 Les Saints de Bretagne, p. 54.
« Poésies de Veuance Fortunat, traduction Charles Nisard, p. l40.
* Id. id. id. p. 26».
— 100 —
En rapprochant ces cilations de la vie de saint Aubin, tout
le monde reconnaîtra ici le Tincillé i\\i diocèse d'Angers, sur
la rive gauche de la Loire ; c'est là que Fortunat visita l'évo-
que Domitien et c'est de là que le prélat l'entraîna aux fêtes
instituées à Angers, et non ailleurs, en l'honneur de saint
Aubin, patron de l'église épiscopale. C'est après ces fêtes que
le poète monta en petit bateau à Angers, qu'il se promena sur
la Maine et dut continuer sur la Loire, vers laquelle un fort
vent du nord poussait la frêle embarcation. La ville de Gué-
rande était inconnue en ce temps là et, eut-elle été connue,
qu'il ne saurait être question d'elle en cette circonstance.
Cependant, de cette histoire, il a été fait la légende que voici,
en la commençant par où finit l'histoire, c'est-à-dire, par un
voyage en petit bateau, non sur le fleuve, comme l'exprime
clairement Fortunat, mais sur le littoral de la mer : Fortu-
nat arrive sur la côte océane, monte en barque dans le voi-
sinage de la Loire, suit le littoral de Guérande, s'arrête à
Piriac (dit Cariacum), entre dans la Vilaine et la remonte,
rencontre l'évêque Domitien à Théhillac (dit Tincilliacensi),
au-dessous de Redon, et il l'accompagne aux fêtes de Saint-
Aubin, à Guérande, Guérande qui n'a fait son entrée dans
l'histoire qu'au IX* siècle et n'a de commun avec le saintautre
chose que le vocable de son église. D'où la conclusion tirée
de cette légende : — Piriac, c'est Cariacum, le palais de l'évê-
que ;— Théhillac, c'est lo monastère de Tévêqne d'Angers,
Tincilliacensi, sur la Vil&,ine; — enfin, Angers est transformé
en Guérande ; — et la Maine se change en Océan.
Nous n'aurions point fait cette digression si des savants
estimés n'avaient admis que cette légende est l'expression de
la vérité.
On sait pertinemment, par Fortunat, que l'évêque de Nantes
avait un beau domaine à Cariacum, au bord de la Loire et près
de Nantes, c'est-à dire à Chassay, commune deSainte-Luce.
On sait aussi, par la charte de Louis le Gros, que l'église
avait un domaine d'une certaine étendue portant le nom de
_ 101 —
Cariacum. Et des savants pour qui la légende est de l'histoire,
estiment qu'il y avait deux Cariacum, celui de Portunat et celui
du roi de France ; le premier à Ctiassay, le second à Piriac.
Cependant, dans l'énumération des biens de l'église où la
la plus petite chose trouva sa place, il n'y a point de place
pour Chassay si Cariacum n'est pas Chassay. D'où cette con-
clusion toute naturelle : ou bien le Cariacum de la charte est à
Chassay ou bien C -assay, l'antique demeure seigneuriale de
l'évoque, ne faisait plus partie des biens de l'église, et il est
remplacé par un lieu où personne n'a connu de bien appar-
tenant à l'église de Nantes.
Examinons ce sujet au point de vue du nom de Cariacum.
Il y a, dans la Charte, 22 noms de l'ancien diocèse nantais ter-
minés par iaciim, un par iaciis et un par iacam (V. Annexe C,
tableau I). Dans ces noms, le nom français abandonne tou-
jours les trois dernières lettres cum, et remplace les deux
autres, ia, par l'une de ces terminaisons : ie, e, é, ay ; on
compte 2 noms en ie\2 en e, 14en(?, 5 en a?/, et enVin' Caria-
cum qui est en question. Il n'y a pas une seule terminaison en
«c ; il n'y a pas un seul nom français qui ne commence ou
n'ait commencé par la première lettre du nom latin, si ce
n'est une fois an pour o, e pour he, ce qui est normal.
D'un autre côté, la charte contient, en outre de Cariacum,
deux noms qui commencent par la Syllabe ca, formée de ces
deux lettres seulement, qui font cha en français. Cette trans-
formation est d'ailleurs générale du latin en français*. De sorte
que le nom de Cariacum doit sûrement commencer en notre
langue par cha et non autrement : il devient naturellement
Charay dans sa transformation la plus simple.
Il ne serait pas impossible que Chassay ne vint de l'emploi
de Cariacum au génitif, sa forme ordinaire. Fortunat en parle
deux fois seulement et sous cette forme : Cariaciager, Gariacse
' Voir n« 61.
* Dans Grégoire de Tours, on trouve Catolaunensï, Chàlons ; Cala, Chelles
CaZatonaum, Chalonnes, Caris, le Cher ; Car?iotenas, Chartres.
— 102 -
anlce. La charte emploie au génitif les noms de châteaux ou
de palais (V. tableau n^ 2, 4°); elle en aurait fait ainsi de
Cariacum et on y aurait dit : grand domaiyie de Cariaci, si on
n'y avait écrit : Cariacum, avec toutes ses dépendances. Par la
suppression, souvent en usag-e*, d'une syllabe au milieu du
nom, on arriverait à Chassay sans peine, en partant du génitif.
Quelle que soit la manière dont se fit la transformation, le
Cariacum de Fortunat, demeure de l'évêque Félix, est bien la
même chose que Chassay, demeure des évoques de Nantes.
D'ailleurs, unerassemblance plus ou moins grande dans les
noms ne saurait infirmer la valeur des rapports de choses, de
lieux et de faits. On sait avec certitude que Chassay portait le
nom de Cariacum, au temps de Félix et de Fortunat, et de ce
temps-là, on ne sait rien de Piriac, dont le nom apparaît bien
plus tard sous la forme de Penseriac ou Penheuriac, ou
Penkeriac et voici à quelle occasion.
Le duc Alain-Fergent ayant abdiqué en faveur de son fils
Conan, surnommé le Gros, et s'étant retiré dans l'abbaye de
Redon, celle-ci reçut plusieurs sortes de dons destinés à sub-
venir à l'entretien du souverain déchu, notamment :
1" acte : de Conan et d'Hermengarde, sa mère, épouse
d'Alain, le produit de la taille sur les hommes de Gucrrandia
et de Penheuriac. 2' acte : d'Alain-Fergent, idem, sur les
hommes de Penkeriac et de Guerran. Le premier acte est
terminé par cette mention : Factum est hoc in villa Roton in
domo Rarbotini. Le second par celle-ci : Factum est hoc apnd
Rotonum in domo Barbotini. MCXII, Luna VIT, lad. V.»
L'indiction V répond bien à l'année 1112 dont la pleine
' Nannetfts, Nantes ; Rerfones, Rennes ; Bnblen, Blain (3J) ; Monasterium
Legum, Montrelais (4V) ; puis le premïpr nom, le troisième et le dernier du
renvoi 2 ci-dessus, d'autre part.
Nous avons déjà dit qu'il ne faut pas demander la perfection à Fortunat
qui sacrifie volontiers la règle des cas aux exigences du rhytme.
' Dom Morice : Preuves pour servir à rHistoi'-e de Bretagne, p. 5i6-527.
L'indiction commençait le 1"" ianrier ; la nouvelle lune fictive de 1112 était
le 5. Il s'ensuit que la 7' lune avait commencé le l"" juillet : les actes passés
à Roton ou Redon sont donc du mois de juillet 1112.
— 103 —
lune pascale fut le 18 avril ; la Pâques, qui représentait alors
le 1" jour de l'année, eut lieu le 21 avril. Brice était alors
évêque de Nantes. Les deux actes sont conten:iporains de la
charte du roi de France qui parut 11 ans plus tard.
Nous sommes ici en présence de deux actes du même temps
rédigés dans la même maison pour la même cause, et le nom
de Piriac n'y est pas écrit de la même manière. Il nous paraît
qu'il faudrait d'autres marques, d'autres documents, d'autres
preuves, pour identifier le nom de Piriac avec Gariacum.
Nous avons déjà dit que si on traduit Gariacum par Piriac,
l'antique demeure des évêques de Nantes ne figure point
dans là charte.
E. — AU SUJET DE WINDUNET
N* 20. — On admet que Windunet et Besné sont un même
lieu. Gependant, Windunet était une île déserte de la Loire,
d'après Grégoire de Tours, et Besné est sur le Brivet à 10
kilomètres du fleuve, à vol d^oiseau . Si ces deux noms repré-
sentent un même lieu, saint Friard n'a pu naître là, malgré
la croyance, puisqu'il a quitté son pays pour aller vivre dans
la solitude. Tout n'est pas clair dans ces désignations. J'ad-
mets volontiers que le Vidunitam de la charte soit devenu
Bethené puis Besné, mais malgré lagrande ressemblance des
deux noms, j'ai un doute sur l'identification de l'île du Brivet
avec celle de la Loire ; l'île du Brivet, qui a plus de cent
hectares, est séparée du grand fleuve par toute la grande
commune de Donges, elle n'est séparée des terres de Donges
et de Grossac que par un marais étroit qui borde Grossac au
couchant et la presqu'île d'Her au midi ; elle faisait corps,
pour ainsi dire, avec la terre ferme, tandis que l'île de la
Loire, où l'évêque Félix allait voir quelquefois le saint reclus,
était déserte et éloignée des hommes.
Il est vrai que rien sur la Loire ne répond actuellement au
nom de Windunet, ce qui n'est pas une raison. Les noms
— 104 —
qui s'en rapprochent le plus sont : l'île Adet, réunie aujour-
d'hui à la rive gauche, çXIndret qui, au VII* siècle, s'appelait
Antricinum . On peut remarquer qu'Indret avait déjà deux
vieux oratoires abandonnés, qu'elle appartenait à l'église et
n'était qu'un rocher de 15 hectares isolé au milieu de la Loire .
Je soupçonne fort Secondai^ Sabaud et Friard de l'avoir choisie
pour demeure, d'accord avec l'évoque Félix.
Je croirais volontiers que le lieu de naissance de saint
Friard, dont le nom antérieur est inconnu, a reçu, après la
mort du solitaire, le nom de l'île déserte où il vécut, c'est-à-
dire Windunet, qui devint Vidunitam, Bethené puis Besné,
mais il m'est plus difficile de croire que la grande île de
Besné, bordée de tous côtés par la grande terre et très facile-
ment accessible aux hommeS;, ait été au VI« siècle une île
déserte sans contact avec les hommes.
F. — Monastepium Legurçi.
N* 42. — Le diocèse nantais n'avait eu, jusqu'au XIP siè-
cle, que trois monastères absolument connus : Vertou
(2, Abbatia Vertav) fondé vers Tan 575 par saint Martin, qui
fut diacre de l'évêque Félix ; Jiidre (56, Monasterium An-
trum), fondé par l'abbé Hermeland au VU* siècle, sous les
auspices de l'évêque Pasquier ; et Deas ou Saint-Philbert,
fondé au milieu du IX° siècle par les moines de Noirmoutier.
La charte ne mentionne pas celui-ci, qui fut fondé sans le
secours de l'évoque; mais elle en contient un autre qui n'est
point connu et dont il semble que personne n'ait parlé :
Monasterium Legum, d'oîi nous vient Montrelais.
Ici, la charte dit : Monasterium Legum cum omnibus sibi
pertinentibus. Et plus loin, au n" 56, elle dit : Monasterium
antrum cum omyiibus sibi pertinentibus. L'expression est abso-
lument la même dans les deux cas. Quant au nom de Mon-
trelais, il ne vient pas du seul mot de Monasterium mais bien
des deux mots réunis : Monasterium Legum.
— 105 —
Le tableau n° 2 nous montre que la syllabe terminale ium
disparaît dans les mots français, et aussi la syllabe um quel-
quefois avec la consonne qui précède. De sorte que, en sup-
primant la lettre a et intervertissant les lettres er, ce qui n'a
rien d'anormal, nous obtenons Monstrelé ou Montrelais. Le
nom de Montrelais ne saurait venir de 7no7it ; le bourg est en
terrain plat et bas et les grandes inondations de la Loire
viennent effleurer ses maisons.
G. — Les Ports de Porte-Chaise et de Rezé.
N° 65. — Nous avons réuni ces deux ports sous un même
numéro, parce que, dans la charte, ils sont liés par la conjonc-
tion et. Nous avons compris que l'indication de Vamont s'appli-
que à Porte-Chaise et celle de Vaval à Rezé.
Le pas romain, pas double encore en usage dans ce temps-
là, était de 1°'473 ; 3,000 pas représentaient 4,420 mètres ; de
sorte que, si le droit de l'évêque comprenait toute la rive
entre les deux ports, sans solution de continuité, il s'étendait
de Bouguenais à Basse-Goulaine, sur une longueur totale de
12,640 mètres.
Ce n° 65 est sur la partie de la rive gauche de la Loire, qui
formait déjà comme un faubourg de Nantes, et qui l'est en
réalité depuis longtemps; l'énumération sort ici, par excep-
tion, de la rive droite ; mais ces deux ports font suite, depuis
le n° 5ft, à des lieux voisins de la cité avec laquelle ils sont
reliés par la ligne des ponts. Cet article s'applique d'ailleurs
à un objet spécial, le seul de cette espèce, et sa place ici n'a
rien que de très naturel ; il termine la liste des lieux qui
représentaient les régaires de l'évôché.
E. ORIEUX.
LES ANCIENS FIEFS DE NANTES
DU X" SIÈCLE A LA RÉVOLUTION
Fiefs de la vieille Ville: le fief de l'Evêque, le flef au Duc
et leurs démembrements.
L'origine des fiefs de la ville de Nantes remonte à la pre-
mière moitié du X" siècle. La délimitatioti en a été tracée par
l'épée d'Alain Barbe-Toile, au lendemain des victoires par
lesquelles il eut le bonheur d'expulser les Normands de notre
pays.
« Alain, dit notre vieille Chronique nantaise, divisa la ville
en trois parties. Celle des évêques, terminée par le mur même
de la cité, allait du nord jusqu'à la Porte Charrière' et aux prai-
ries de la fontaine de la Bienheureuse Marie. Quant aux deux
autres parties, il les distribua à ses compagnons d'armes. »
Le texte de la Chronique de Saint-Brieuc est sur ce point
plus détaillé et plus clair : « Alain, dit cette chronique, divisa
toute la ville en trois parlies. Celle des évêques est, comme il
le paraît assez clairement, terminée au nord par le mur
même de la cité. A partir du chanceau de Notre-Dame elle
descend par une petite rue jusqu'à la porte Charrière, qui se
trouve au midi, la seconde après la poterne de l'Évêque »2.
' Et simili modo ipsam urbem in très partes distribuit De quibus pars
Episcoporum in ipso muro civitatis ab Aquilone terminabatur usque ad
poriam Charariam et prata fontis B. M. : reliquas duas partes, militibus suis
distribuil. » Dom Morice, Pr. I 146.
' Simili modo ipsam urbem quam Episcopi a pristinis temporibas in
proprietatti sua tenuerant, totam in très partes distribuit. De quibus pars Epis-
coporum usque in ipso muio civitatis satis evidenter ab Aquilone terminata
apparat, et juxta sanctse Marise Cancellam per quemdam viculum
descendit usque al portam Carariam quae post porticulam episcopalem
secunda ad au«trum habetur. » D. Morice, Pr I. '28.
— 107 —
La Chronique de Saint-Brieuc paraît avoir reproduit ici
d'une manière plus complète et plus fidèle le texte primitif
de la Chronique Nantaise dont l'original est malheureuse-
ment perdu. C'est donc à son texte que, dans cette circons-
tance du moins, nous donnerons la préférence sur le texte de
la Chronique Nantaise tel qu'il a été publié par Dom Morice
d'après un manuscrit suivi par le Baud et qui nous semble
avoir été imparfait.
La cité dont il est ici question est évidemment la très an-
cienne cité nantaise, telle qu'elle existait au temps d'A.lain,
avant les agrandissements qui, au XIIl' siècle, reculèrent
sa limite jusqu'à l'Erdre et jusqu'au delà de l'église Saint-
Nicolas. Terminée à l'est par ce qui forme aujourd'hui le
Cours Saint-Pierre et une partie du Cours Saint-André, elle
l'était au nord par une ligne qui venait couper sa limile
orientale dans la direction marquée actuellement par la rue
Garde-Dieu. A l'ouest, les remparts de la ville suivaient assez
exactement la direction des rues Saint-Léonard, des Carmes
et de la Poissonnerie jusqu'au BoufTay. A partir du Bonffay,
ils se dirigeaient parallèlement à la Loire, et à une petite dis
tance du fleuve, vers l'église des Jacobins, et de là jusqu'à
leur point d'intersection avec la limite orientale, point situé
dans ce qui est aujourd'hui le Château.
On se fera une idée plus exacte encore de la limite de
l'ancienne ville de Nantes si. au nord, à l'ouest et nu miili, on
tient compte de la profondeur des maisons qui bordent du
côté de l'extérieur de la ville les rues que nous venons d'énu-
mérer. Quand les fortifications de la vieille cité eurent été
pour ainsi dire déclassées, des maisons vinrent sur tout leur
parcours s'accoler à cette enceinte désormais inutile. Le
rempart situé à l'est, étant toujours resté en activité de
défense, fut le seul sur lequel on ne laissa aucune construc-
tion s'appuyer.
C'estdoncdans cette étroite enceinte, noyau de notre grande
ville, que nous rechercherons la délimitation des fiefs, telle
qu'elle a été faite par Alain.
— 108 —
Nous ferons d'abord observer que nos deux chroniques ne
nous donnent qu'une ligne pour limite de ces fiefs. Elles sup-
posent évidemment qu'il est inutile d'indiquer leurs autres
limites. Il s'agit seulement de la division de la ville : c'est
avec les murs mêmes de la ville que les autres limites de ces
fiefs doivent se confondre. Cette simple considération eût
empêché Ugée de songer à placer la porte Gharrière en Saint-
Nicolas.
Oij se trouvait cette ligne? Son point de départ nous est
clairement indiqué. Après nous avoir dit que le fief épisco-
pal était limité au nord par le mur même de la ville, la
Chronique de Saint-Brieuc nous donne pour premier point
de repaire le chanceau de Notre-Dame : jitxta saticta^ Mariœ
Cancellam. Or le Chanceau est la même chose que le chœur
de l'église. Cancellus signifie à proprement parler la grille,
la partie grillée, réservée, de l'église, celle qui renferme les
stalles et le maître-autel.
La situation de l'ancienne Collégiale est bien connue ; nous
placerons donc notre premier jalon près du chœur de l'an-
tique église, reconstruite par la piété d'Alain.
Ce point initial fi.vé, recourons aux indications de notre
texte. La limite du fief épiscopal descend, dit-il, par une
petite rue jusqu'à la porte Charrière. Cette expression des-
cend mérite tout particulièrement d'être signalée. Notre
auteur après avoir fait connaître au nord la limite de ce fief,
nous dit, que sur un autre côté, elle descend jusqu'à un point
situé au sud, en suivant une petite rue qui alors n'avait pas
de nom. Ce nom, il est facile de le lui donner. C'est la rue
Saint-Denis, qui part, dans la direction du sud, de la place
Dumontier autrefois place de Notre-Dame.
Arrivés à l'extrémité de cette rue, à la librairie Mazeau, où
chercherons-nous notre porte Charrière? Travers tournant à
gauche semble l'avoir placée au fond de l'impasse Saint-
Laurent. « La porte Charrière, dit-il, était entre le château
— 109 —
d'aujourd'hui et la tour du Mûrier*. » Ogée tournant à droite
est allé la chercher au delà même de l'Erdre : d'après lui, les
Regaires donnés à l'évêque par Alain s'étendaient « depuis le
mur qui était du côté du nord jusqu'à la porte Gharrière au-
jourd'hui Saint-Nicolas'^ ». Elle est à l'est, dit Travers, elle
est à l'ouest, dit Ogée : en fait d'opinion en voilà deux qu'on
peut bien appeler diamétralement opposées. La vérité n'est
pourtant pas à ces extrémités lointaines. Notre porte Ghar-
rière a un point de commun avec la vertu. Gomme le ditAl-
ceste, « La parfaite vertu fuit toute extrémité .»
« In medio stat », elle se tient au milieu : mais nous n'y
sommes point encore arrivés, du moins à notre porte, sinon à
la vertu.
Le texte que nous suivons de près ne nous permet aucun
écart, ni à droite, ni à gauche ; la rue qui limite le fief épiscopal
descend au midi. A moins de placer la porte Gharrière à
l'extrémité de la rue Saint-Denis, hypothèse insoutenable,
nous n'avons qu'une direction à prendre celle de la rue des
Garmélites, autrefois appelée rue Saint-Gildas. Nous ne nous
arrêterons même pas à l'extrémité de la rue. Nous avons fait
si peu de chemin que nous n'avons nul besoin de nous asseoir
sur les bancs qui, sur un rudiment de place, sollicitent la
paresse des passants. Bailleurs, la chapelle des Jacobins est
si près I Qui sait si de l'autre côté de la chapelle nous ne
rencontrerons pas du moins un soupçon de cette introuvable
• Travers, Hist. de Nantes, I. 157. Dans ud autre passage de son Histoire
notre auteur assigne à cette porte la môme position. « Antérieurement aux
ouvrages de Gui de Thouars, dit-il, une porte de ville qu'on appelait la porte
Gharrière, ouvrait au bout du jardin de la maison de la Trésorerie, et, par une
rue ouverte au travers de la maison de l'archidiacre de la Mée, conduisait
directement à la rue Notre-Dame. Le comte Gui la fit fermer, ainsi que
l'autre porte par laquelle on sortait sur la Motte Saint-André, près de l'Epe-
ron, et, à la place des deux portes il fit ouvrir la porte de Saint-Pierre (Epi-
semasie de Biré publiée en 1637, p. 80). L'ancienne porte Gharrière se dé-
couvrit en 1.^97, lorsque le duc de Mercœur pour ouvrir la ville du cAté de
l'évèché, fit faire un dehors à la ville ou un bastion sur la Motte Saint-Pierre. »
Trav., \, 30S.— L'existence d'une vieille porte de ville sur ce point est incon-
testable : mais Travers a tort de l'identifier avec la porte Charriera, placée
non pas à l'est, mais au midi.
' Ogée, Dictionnaire, t. II, p. 96.
— 110 -
porte dont la recherche a divisé et séparé, de toute la longueur
de la ville, géographes et historiens nantais.
Si cette fois nous ne rencontrons pas la porte Oharrière, il
nous faudra définitivement renoncer à la chercher. Elle per-
çait l'enceinte nantaise du temps d'Alain. Or l'enceinte de
Nantes déplacée, nu midi, comme à l'occident et au nord, a
été reportée dans la suite plus près de la Loire : et nous imi-
terions l'inconséquence dOgée, en cherchant une porte qui
existait dès le X" siècle, dans un rempart qui ne fut élevé
qu'au XII'.
C'est donc tout près de l'église des Jacobins que nous
croyons pouvoir fixer la porte Charrière de nos vieilles chro-
niques. Qu'on ne nous reproche pas de faire une trouée dans
l'enceinte de la ville pour le besoin de notre cause. L'exis-
tence d'une porte en cet endroit nous est déjà indiquée par la
direction de la rue que nous avons suivie. Il semble que,
en voirie, on peut admettre à priori que tout chemin, toute
rue conduit à une issue, à une porte ; les impasses ne sont
que des exceptions explicables par des faits particuliers.
Nous ne nous arrêterons pas à développer cette considéra-
lion générale ; car, au XIV siècle, nous avons plusieurs textes
qui mentionnent positivement l'existence, sur ce point, d'une
porte différente de la porte Brient-Maillard : la porte appelée
alors la Porte Drouin-Lillart. En 1357, Charles de Blois amor-
tit en faveur des Dominicains une vieille maison et érau,
« près et joignant dou lieu doudit couvent siz entre le che-
min qui maine de la porte Drouin Lillard à l'aive d'une part,
et l'érau où fut jadis la Vieille Monnoie d'autre ».
Or la Vieille Monnaie se trouvait entre les deux enceintes de
la ville, l'enceinte primitive, et la nouvelle. Cette position lui
est assignée par un acte de 1365 concernant l'agrandissement
du couvent des Jacobins. Dans cet acte, le duc Jean IV donne
aux religieux une place « 011 souloitestre la Monoie, joignant
d'une part à un courtil desdits frères, qui est entre ladite place
et la rue qui vet à la Porte Drouin Hillart et la maison Maceet
— 111 —
Bitaut dit Paleffroiz et les degrez par où l'en monte sur le mur
de la ville, jouste et auprès de la porte Briant Maillart devers
f.oire, d'autre ; et entre ledit 7nur d'une part et les anciens
murs (le la ville jouste lesquels à présent est la novelle
aumonerie ou ospital assise, de l'autre'- »
Ces textes établissent premièrement l'existence, au XfV*
siècle, d'une double enceinte de la ville : le mur d'alors et les
anciens murs entre lesquels se trouve la Monnaie : ils
établissent aussi en second lieu l'existence, sur la Loire, de
deux portes distinctes ; la porte Briant-Maillard et la porte
Drouin-Hillard. Cette dernière ne faisait pas partie de la
nouvelle enceinte ; car les biens accordés aux Dominicains se
trouvaient sur le chemin qui conduit de la Porte Drouin-Lillart
à la Loire. Nous croyons donc avoir dos raisons de l'identifier
avec la Porte Gharrière ofi nous sommes arrivés en suivant
la petite rue que nous avons descendue en quittant le chœur
de l'église Notre-Dame.
Il est d'ailleurs à remarquer que les édifices religieux de
Nantes se sont élevés aux endroits les plus passants de la ville
et principalement à ses portes. L'église de Sainte-Radegonde,
celle de Saint-Laurent, celle de Saint-Saturnin, les couvents
des Gordeliers et celui des Carmes remplissaient tous le rôle
de Nisus au camp d'Enée. Ils gardaient les portes comme lui et
en leur qualité d'immeubles, mieux que lui. « Nisus erat portœ
custos. D En s'établissant, en 1228, près d'une des portes méri-
dionales de Nantes les Jacobins ne faisaient que suivre un
usage aussi facile à constater qu'à expliquer
La limite assignée par Alain Barbe-Torte au fief de l'Evêque
et à celui du Duc, descendait donc du chœur de l'église Notre-
Damo jusqu'à la chapelle des Jacobins en suivant les rues
actuelles de Saint-Denis, des Carmélites et de Jussieu; et
c'est à cette dernière extrémité qu'il faut fixer la porte
Gharrière placée par notre vieux chroniqueur, non pas à l'est
i Archives départ. H. 299.
- H2 .-
comme l'a insinué Travers, non pas à l'ouest, comme l'a cru
Ogée,mais a«?<2îi5/ri/m c'est-à-dire au midi, ywx/a Sanctœ Marise
cancellam per quemdam viculum descendit usque ad portam
Carrariam quse... ad Austrtim habeiur.
i
Les déductions précédentes nous ont été suggérées par la
simple étude de notre texte. Les faits postérieurs viennent jeter
sur ce texte une clarté qui rend plus évidentes ces conclusions.
Remontons maintenant la rue que nous venons de descen-
dre. Des données incontestables nous permettent de nous
livrer à une sorte de contre-épreuve, d'où la vérité ressortira
mieux que de tous les raisonnements.
Il suffit d'avoir ouvert une histoire de la ville de Nantes
pour connaître l'existence, àl'intérieurde la ville, de deuxfiefs
importants : le fief épiscopal et le fief de la Prévôté, appelé
aussi le gentil fief du duc, et même, par un pléonasme que
nous avons rencontré parfois, le Joltj ye?itil fief du duc. Ce
fief du duc est devenu, depuis la réunion de la Bretagne à la
France, le fief du roi.
Les limites en sont tracées dans différentes déclarations
des domaines qui vont de 1426 à 1678. Celle de 1678 les donne
avec une précision qui ne laisse rien à désirer. Elle compte
toutes les paroisses, toutes les rues, toutes les maisons qui en
faisaient partie. Si nous ne craignions d'ôti'e trop long, il
nous serait facile de compter le nombre de ces maisons, de
mesurer le toisé de leur façade. Bornons-nous seulement à
donner les conclusions auxquelles nous a amené un pointage
minutieux sur chacune de ces rues et chacune de ces maisons.
En partant de la place des Jacobins, nous rencontrons sur
notre gauche quatre îlots de maisons ; or tous les quatre font
partie du fief de la Prévôté.
Le premier de ces îlots est celui dont quelques maisons
donnent sur la place elle-même en face de la chapelle qui
— 113 —
vient de disparaître. Il commence à la maison des sieurs de
la Pinsonnière. C'est l'un d'eux, Jean Fournier, écuyer, qui
par contrat du 9 novembre 1654 vendit pour 3000 livres aux
Jacobins le fond dont ils firent cette place. En 1658, on la
trouvait « fort grande, estant de plus de 50 pieds de largeur
et de plus de 80 pieds de longueur. « Aujourd'hui que l'on
fait plus grand, ces dimensions paraîtraient mesquines pour
une place, et la place fort grande alors des Jacobins logerait
à l'aise dans un des coins des places que nos contemporains
savent tailler à leur ville dans l'intérêt de sa beauté et de sa
salubrité.
En vendant une partie de son terrain, le sieur de la Pinson-
nière en a gardé la plus grande: son logis avec toutes ses
dépendances, situé sur le fief de la Prévôté, s'étend de la
place des Jacobins jusqu'à la petite venelle aujourd'hui étran-
glée à son issue sur la rue Dubois ; et qui va de cette rue à
celle du Port Brient-Maillard. Toutes les maisons qui suivent
la sienne en descendant la rue appelée, depuis l'an VI, rue de
Lemery et auparavant rue Basse-des-Jacobins, appartiennent
également au fief de la Prévôté.
Sur la place des Jacobins, toujours à gauche en remontant,
donne un second îlot de maisons. Il commence au coin de la
rue par la maison de l'abbaye de Villeneuve, occupée aujour-
d'hui par la maison Haie. Elle s'est appelée la maison du
Ghesne-Briacé, puis maison de la Table-Ronde. Elle a appar-
tenu à la dame de Vieillevigne,, puis à madame la duchesse
de Luxembourg qui, par contrat du 28 juin 1593, l'échangea
avec R. P. en Dieu Antoine Bouguier, abbé de Villeneuve.
Elle relève aussi de la Prévôté ainsi que toutes les maisons
qui s'échelonnent le long de la rue appelée autrefois rue
Haute-des-Jacobins et, depuis l'an VI, rue de Jussieu en
l'honneur du grand botaniste.
L îlot s'étend jusqu'à la rue des Chapeliers appelée de ce
nom en 1698, et auparavant rue du Lion-d'Argent, en souvenir
de la maison du Lion d'argent qui la commençait du côté du
8
— 114 —
Pilori. Les maisons qui le composent appartiennent à deux
paroisses, celle de Sainte-Croix et celle de Saint-Denis, mais
sont toutes deux dans le même fief, celui de la Prévôté.
Suit un troisième îlot borné par la rue actuelle des Carmé-
lites. Jusqu'au XVIII" siècle, elle s'est appelée rue Saint-Gildas,
de la chapelle Saint-Gildas qui se trouvait du côté opposé à
la chapelle des Carmélites, un peu plus près de la Grande Rue.
La Révolution laïcisa ce nom en celui de rue Maupertuys.
Mais dès 1817 elle reparaît sous le nom qu'elle porte aujour-
d'hui.
Cet îlot s'étend jusqu'au Pilori. Presque toutes ses maisons
appartiennent au fief de la Prévôté. Seules les quelques mai-
sons qui lui forment lisière le long de la place du Pilori et
quelques autres à leur suite dans la rue Basse-du-Château,
relèvent du fief de la commanderie de Saint-Jean, fondée et
dotée par les ducs de Bretagne.
Ce serait trop nous attarder que d'entrer saluer dans leur
demeure les personnages illustres qui ont habité ces vieilles
rues nantaises. Faisons cependant une exception en faveur
d'une de nos gloires nantaises, d'une de nos gloires bretonnes,
d'une de nos gloires françaises. C'est dans la rue où nous som-
mes, près de la chapelle Saint-Gildas, -qu'habitait notre grand
connétable : Olivier de Clisson.
Au sortir de la rue des Carmélites, nous tombons sur le
carrefour appelé carrefour Saint-Denis, et pendant quelques
temps, au commencement du XVI" siècle, carrefour Babouin,
en souvenir sans doute des Babouin, seigneurs de l'Angle, en
Saint-Etienne*de-Montluc.
En traversant rapidement le carrefour, nous reprenons la
rue Saint-Denis qui nous conduit jusqu'à la place de Notre-
Dame. L'îlot borné par cette rue, sur notre main gauche, appar-
tient à deux fiefs. Jusqu'à l'église située vers le milieu de la
rue, c'est le fief de la Prévôté : à partir de l'église commence
le fief de Notre-Dame qui se continue jusqu'aucarrefourSaint-
Jean. Or le prieuré de Notre-Dame a été fondé sur le fief du
— Il5 —
duc, et les terres qui lui ont été données ne l'ont été que par
leur concession.
Ainsi donc, de la place des Jacobins jusqu'à celle de Notre-
Dame, tous les îlots de maisons situés du côté du Boufîay et
limités par les rues que nous venons de suivre appartenaient
soit au fief ducal, soit à des fiefs formés par suite de son
démembrement.
Au contraire, tous les îlots de piaisons situés de l'autre côté
de cette rue, du côté de la cathédrale,, relevaient soit du fief
épiscopal, soit de fiefs formés sur celui de l'Evêque en faveur
de son Chapitre ou des grands dignitaires de son église.
Une particularité du couvent des Jacobins nous permet d'y
placer, avec autant de sûreté qu'au chanceau de Notre-Dame^
un second jalon pour indiquer la direction et l'extrémité de la
limite tracée par Alain entre le fief épiscopal et le fief au Duc.
Ce couvent avait été fondé primitivement et en entier dans
la paroisse de Sainte-Radegonde et sous le fief de l'Evêque.
Limité au sud par la Loire et à l'est par le Château^ non seule-
ment il dut renoncer à s'accroître de ces côtés, mais encore,
lors de la construction des tours nouvelles du Château au
XV* sièclC;, il dut laisser dans les douves dont on les entoura
une partie de son cimetière et de son enclos.
Forcé de se rejeter sur un autre côté, il sorlit de paroisse et
aussi de fief, en s'étendant à l'ouest. C'est aiti-^i que Charles de
Blois, Jean IV et la duchesse Anne cédèrent aux Jacobins les
terrains situés sur leur fief et oii se trouvaient autrefois la
Vieille Monnoie et l'Hôpital. L'opposition que Guil. Larchier,
recteur de Sainte-Croix, fit en 1499, à cet agrandissement,
n'aurait eu aucune raison d'être, si les Jacobins eussent con-
tinué à se développer seulement dans la paroisse de Sainte-
Radegonde. Le recteur de Sainte-Croix prenait les intérêts de
son église, comme celui de Sainte-Radegonde avait pris ceux
delà sienne dans l'arrangement final intervenu en 1258, avec
Tiphaine de Rais, bienfaitrice des Jacobins.
Les religieux avaient donc pour ainsi dire un pied dans la
— 116 —
paroisse de Sainte-Radegonde et dans le fief de PEvêque, et
l'autre dans la paroisse de Sainte-Croix et dans le fief de la
Prévôté. Ils avaient affaire à deux seigneurs différents, et
autrefois rendaient aveu pour une partie de leur enclos à
l'évêque et pour l'autre au duc ou au roi.
Mais l'absorption dans leur enclos de la rue qui limitait
primitivement les fiefs, finit par faire substituer une ligne
fictive à une limite aussi évidente, aussi incontestable : et en-
tre l'évêque et le roi s'élevèrent ces discussions si fréquentes
entre deux voisins qui se touchent de trop près.
I/évêque, qui se rappelle que le couvent a été fondé dans la
paroisse de Sainte-Radegonde, et par conséquent, dans son fief,
réclame la mouvance du couvent, sans tenir assez compte de
son développement sur la paroisse de Sainte-Croix.
« En prenant,dit-il,en 1681,devantrégliseSainte-Radegonde,
dans la rue du Chasteau au Pillory depuis la maison aparte-
nanteà M. d'Harouis joignant les douves dudit chasteau et
l'église des religieux Jacobins j usques à la maison du sieur de
la Pinsonnière qui fut an. h. Vital de Contour, s. de Ternay,
vivant trésorier et receveur général de Bretagne, et avant lui
à n. h. François Ménardeau, sieur de la Mitlrie et damoiselle
Jeanne Bricaud, sa compagne, dont partye des cours logis
et jardins derrière et touttes les petittes maisons au-dessus
jusquesau coing de la rue des Jacobins à Sainte-Croix qu'on
appelloit la petitte ville, depuis quelque temps abattue pour
faire le placistre quy est à présent devant l'église des Jaco-
bins, sont déclarés par eux estre de la paroisse de Sainte-Rade-
gonde et dans le proche fief dudit évesché*.
Mais les commissaires du roi se bornentà considérerquela
maison principale des Jacobins, par suite de son déplacement,
est actuellement en la paroisse de Sainte-Croix dans laquelle
l'évêque n'a jamais eu le moindre fief. Par sentence du 23
avril 1682, ils tranchent la question à l'avantage de leur maître
1 Archives départ. G. 7.
— 117 —
et déclarent que «l'Evêque ne pourra prétendre la mouvance
des Jacobins et apartenances, ny la maison du sieur de la
Pinsonnière. »
En ce qui concerne cette dernière maison leur sentence nous
paraît] uste; en ce qui concerne le couvent des Jacobins, ils au-
raient pu se rappeler utilement l'exemple soit d'Alexandre, soit
de Salomon. Pour trancher la difficulté avec le glaive de la jus-
tice nous aurions à leur place, séparé en deux l'enclos litigieux,
adjugé une partie au roi, une partie à l'évêque et laissé le tout
aux Jacobins. C'est dommage, dirait peut-être Garo à notre
place, que nous ne sojons point entré à leur conseil : aujour-
d'hui nous venons bien tard pour éclairer leur religion.
Si, à l'intérieur du couvent des Jacobins, la disparition
d'un bout de rue finit par créer la confusion des fiefs de l'Evê-
que et de la Prévôté ; à l'extérieur, la ligne de démarcation
entre les deux fiefs fut toujours reconnue et respectée de
part et d'autre. Aucun d'eux n'enjamba jamais les rues
qu'Alain leur avait tracées pour limites.
En 1682, le Chapitre fait remarquer comme un fait naturel
que « le fief et juridiction de la Prévôté autrefois appelé le
gentil fief du duc n'outrepassait dans l'enclos de ladite ville,
comme il fait encore à présent, les rues Saint-Denis, Saint-
Gildas et autres descendant directement à la place qui est
devant l'église des Jacobins dudit Nantes ; » et les Commis-
saires du roi qui revendiquaient pour la Prévôté la mouvance
de quelques maisons prébendales situées au-delà de ces rues,
dans le fief du Chapitre, durent renoncer à des prétentions
élevées alors pour la première fois, et sur de mauvaises
raisons.
Prenant les uns après les autres, tous les îlots de maisons
situés sur notre gauche en montant des Jacobins à la place
Dumontier, nous avons constaté qu'ils appartenaient tous
au fief de la Prévôté. En suivant la même méthode pour les
îlots situés à notre droite, nous constaterons avec autant de
certitude qu'ils faisaient primitivement partie du fief épiscopal.
— 118 —
Nous avons déjà vu que le premier de ces îlots relevait
de l'évêque. La déclaration citée plus haut le mentionne dans
le même article que le couvefit des Jacobins, auquel il était
alors contigu. La rue de l'Union, qui sépare les débris de
l'église des Jacobins de la maison de la Caisse d'épargne,
n'existait autrefois qu'à l'état de venelle. En 1626, un portail
en interdisait l'entrée au public. Kn 1668, lors de la recons-
truction de ce portail, la ville reconnut les droits des Jacobins
à la possession de cette venelle. Ce ne fut qu'en 1733 que, à
la suite d'une nouvelle discussion, elle tomba dans le domaine
public*. Mais, en 1681 notre déclaration n'en tient aucun
compte et termine cet îlot par la rue devant Sainte-Rade-
gonde et qui va du Château au Pilori.
Le second îlot s'allonge depuis cette dernière jusqu'à la
Haute-Grande-Rue ; il est partagé en deux fiefs : celui de
l'Evêque et celui du Chapitre.
Le fief de l'Evêque remonte la rue Saint-Gildas ou des
Carmélites, jusqu'au delà du couvent des religieuses. En
voici le débornement:
« L'église parrochiale de Sainte-Radegonde située devant
le chasteau de Nantes, son presbitaire et touttes les maisons
courts et jardins qui sont dans ladite parroisse relèvent pro-
chement dudit évesché, à commencer dans la rue quy dessend
de Sainct-Pierre au chasteau, du costé de ladicte église de
Saincte-Radegonde, par la maison qui appartient aujourd'huy
au sieur Paulus et avant lui au sieur des Gravelles Cornullier,
jusques au coing de ladite église près la porte dudit chasteau,
d'oîi allant au coing de la rue de Saint-Gildas et remontant
par icelle rue de Saint-Gildas au couvent, église et enclos des
religieuses carmélittes jusqu'au delà de la maison des Eschelles,
apartenante aux maires chapelains de Saint-Pierre qui relève
aussi prochement de l'évesché'. »
' Archives départ. H. 306.
' Archives départ., G. 7 décl. du 13 déc. 1681.
— 119 —
Le fief du Chapitre commence immédiatement après celui
de l'Évêque. Il comprend dans la paroisse de Saint-Laurent
tout le reste de l'îlot délimité dans le passage suivant :
« A prendre vers midi depuis le couvent des religieuses
Carmélites de Nantes scitué en la rue de Sainct-Gildas, parle
logis des deux anciens maires chapelains de l'église de Nan-
tes, à entrer dans la Grande Rue de cette ville, monter le
long d'icelle et passer au devant de la place et placistre dudit
Saint-Pierre, retourner et descendre par la Haute Rue du
Ghasteau jusques à un logis qui est au-devant de la douve
dudit chasteau autrefois appelé le Petit Logis, duquel est à
présent propriétaire le sieur Paulus, lequel logis et ledit
couvent des Carmélites sont et dépendent de la jurisdiction
et fief des Régaires ; et est ledit logis jointif de celui du sieur
Paulus vers orient, qui est le dernier dudit fief et juridiction
du Chapitre, scitué en la paroisse de Sainte-Radegonde, et le
surplus des autres, jusques audit couvent des Carmélites,
sont en ladite parroisse de Saint-Laurent'. »,
Au fief du Chapitre, après avoir traversé la Grande-Rue
succède le fief du Grand Archidiacre, situé tout entier dans la
paroisse de Saint-Laurent.
Le manoir du Grand Archidiacre, maison à pignon avec
chapelle et auditoire se dresse sur le « placistre de Saint-
Pierre. Sa porte principale est « vis-à-vis de l'église de Nantes.
Derrière la maison se trouvent cours et jardins avec issues
sur trois rues différentes : une sur la rue Saint-Denis, une
autre sur la rue qui conduit à la Collégiale, la troisième « sur
la Grande Rue de Saint-Pierre appelée la Chaussée ».
L'Archidiacre avait droit à ces issues « en quatre rues de la
ville parce que tout ce qui est contenu entre icelles estait
antiennement dudit archidiaconné et s'appelait l'isle de l'ar-
chidiaconné. » La plus grande partie de l'île était de son
domaine; le reste relevait de sa juridiction*.
* Archives départ. G. 250, Déclar. de 1178.
* Archives départ. G. 114.
— 120 —
Enfin au delà de la rue Notre-Dame qui conduisait de la
Collégiale à la Cathédrale, nous atteignQns ce qui est toujours
resté non seulement du fief mais. encore du domaine de l'Évo-
que : domaine limité au sud par cette rue. à l'ouest par la place
de Notre-Dame, au nord et à l'est par les murailles qui
entouraient Nantes au temps d'Alain.
« Le palais épiscopal est scittué en la ditte paroisse de
Saint-Jean, au septentrion de l'église de Saint-Pierre,
s'estendant de l'occident à l'orient, depuis la porte septen-
trionalle de laditte église, jusques à la muraille et porte de
la ville de Saint-Pierre; les logements de laquelle porte et
muraille l'ont partie dudit pallais, et du midy au septentrion,
s'extendant depuis ladite église jusques à la muraille delà
ville, descendant le long de la rue de ladite porte Saint-Pierre
qui sépare en deux le palais épiscopal, jusques à la maison
prébandalle du sieur du Breil par une part, et continuant le
long des dittes murailles de la ville jusques au placistre de
Nostre-Dame et dans cet espace, l'auditoire, les prisons, des
regaires, jardins et servitudes y sont compris. »
Ces dernières lignes ne déterminent qu'assez vaguement le
tracé qui limitait le fief de l'Evêque à partir du chœur de l'église
Notre-Dame, jusqu'à l'ancien rempart septentrional de Nantes.
Il est vraisemblable que la ligne séparative de nos fiefs
quittait ce rempart à la porte située au nord de la ville, dans
l'axe des rues que nous venons de parcourir.
Si nous considérons la direction de ces rues, si nous nous
rappelons que l'église Notre-Dame était loin, au X' siècle,
d'avoir les proportions qu'elle finit par atteindre, nous soup-
çonnerons déjà que cette ligne de rues après avoir passé, sur
ce point encore, près d'une église, aboutissait^ au nord
comme au midi, aune porte de ville.
Ce soupçon ne tarde pas à se changer en certitude, grâce au
témoignage de nos historiens. Après avoir parlé du cimetière
de Saint-Cyr ou Saint-Cyric, situé dans les terrains occupés
aujourd'hui par les abords de la Préfecture, Travers ajoute:
— 121 —
« On voit encore près de l'Espron ou du Trépier des vestiges
d'une porte de ville, ouvrant du côté du cimetière de Saint-
Cyric'. »
Cette porte a dû être condamnée dans les agrandissements
de Nantes par Pierre Mauclerc au XIII* siècle. Dans la suite,
des constructions s'avançant le long- des remparts, les unes
au devant des autres, auront fini par obstruer complètement
un passage déclassé, et il ne sera restéentre le fief de l'Évêque
et celui du Duc représenté par celui de Notre-Dame, que le
mur qui limitait le ténement des Régaires.
Nous ne devons pas cependantdissimuler que dom Moricea
publié un document qui, au premier abord, laisse entendre
que le couvent des Gordeliers appartenait avec sa chapelle
au fief épiscopal. D'après cette hypothèse, ce fief se serait
allongé entre l'église Notre-Dame et le rempart septentrional
de la ville jusqu'au carrefour Saint-Jean.
Dans ce document de 1253 l'évêque de Nantes échange avec
l'abbé de Saint-Gildas-des-Bois_, « une chapelle, un cimetière
et les maisons dans lesquelles les frères Mineurs avaient
coutume d'habiter, le tout situé dans le fief du même évoque,
dans la rue qui est appelée Rue Perdue^.
Ce passage ne nous semble nullement concerner l'enclos où
nous trouvons les Cordeliers depuis le XIII' siècle jusqu'à la
Révolution. Les expressions même de cet acte désignent
clairement que les Cordeliers n'habitaient plus le lieu donné
par l'Evêque à l'abbé de Saint-Gildas. Il s'agit de maisons où
ils avaient demeuré précédemment, ubi manere solebant :
habitation qui se trouvait abandonnée précisément depuis le
moment où ils avaient fixé leur demeure dans l'endroit occupé
aujourd'hui par les Religieuses de la Retraite.
Cet enclos s'étendait pour la plus grande partie en dehors
' Travers. I. 175.
' « Quamdam capellam et cimiterium... et domos cum suis pertinentiis, in
quibus fratres Minores manere solebant in feodo ejusdem episcopi, in civi-
tate Nannetensi si tas, in yico qui dicitur vicus perditus. » D. Morice, Pr. I. 953.
— 122 —
de la vieille ville ; et l'on peut voir encore, dans le jardin des
Religieuses de la Retraite, l'antique rempart septentrional de
Nantes utilisé par les Gordeliers dans la construction de la
chapelle qu'ils firent consacrer en 1232. Il est incontestable
que de temps immémorial tout l'enclos des Gordeliers
relevait non pas de l'Évêque, mais du roi à qui les religieux
en rendaient aveu.
Oii était cette première habitation des Gordeliers située
dans le fief de l'Évoque ? Où se trouvait cette rue appelée
« Rue Perdue, vicus perditiis ? »
Une interprétation défectueuse de l'acte précédent lui a fait
donner par Travers une position discutable : il faut la chercher
avec la première résidence des Gordeliers, dans le fief de
l'Évêque. Peut-être pourrait-on la placer dans le même quar-
tier, aux environs. Peut-être se trouvait-elle près de la porte
de ville qu'on venait de boucher à quelques pas de là. Peut-
être appelait-on alors Rue Perdue vicus perditiis^ ce bout
d'une rue désormais sans issue, qui jusque-là avait continué
de séparer le fief de l'Évêque de celui du Duc à partir du
chœur Notre-Dame jusqu'au mur septentrional de la cité.
Ainsi, depuis les anciens murs nord de la ville de Nantes
jusqu'à la place des Jacobins, tous les îlots de maisons bornés
par la place Notre-Dame ou Dumoutier, les rues Saint-Denis,
des Garmélites et de Jussieu, et situés du côté de la Cathédrale
étaient du fief de l'église de Nantes.
' Le reste du territoire qui s'étend entre ces îlots et les murs
du Cours Saint-Pierre, l'était également. C'est d'abord la
partie située à l'est de la Rue-Haute-du-Château. « Et de
l'autre costé de ladite Haute Rue du Ghasteau, ledit fief et
juridiction du Chapitre commence aux douves dudit chasteau,
remonte le long de ladite rue jusques à l'église de Saint-
Pierre, et comprend tout ce qui est en ladite Haute Rue
du Chasteau, les murailles et clostures de ladite ville, lesdites
douves du Chasteau et ladite église de Saint-Pierre. »
Tout en reconnaissant que la Cathédrale, par suite des lois
— 123 —
spéciales qui régissent cette sorte d'édifices, fait partie du
domaine du Roi, le Chapitre revendique pour son fief toute la
place de Saint-Pierre. C'est ce qu'il fait remarquer dans un
supplément à ajouter à la déclaration de ses biens pour
réparer les omissions qui s'y sont glissées.
« La première des obmissions faictes parlesdicts sieurs du
Chapitre est de n'avoir pas dict en leur dicte déclaration que
la croix de taille et d'architecture qui est à présent en la place
de Saint-Pierre y a esté esrigée pour signe de la recognoissance
que ladite place despend de leur juridiction du Chapitre,
et que en icelle estoient des cymetières enfermés de murailles,
lesquels auroient esté, après le consentement desdits sieurs
du Chapitre, de l'ordre de Monseigneur le duc deMontbazon,
gouverneur de ceste ville, chasteau et compté de Nantes
esplanadez, et ladite place pavoyée et mise en lestât auquel
elle est à présent avecq condition qu il ne s'y poura tenir et
establir aucuns marchez, ou faire exercice publique auxdits
lieux que par la permission desdits sieurs du Chapitre et
autres conditions portées en l'acte du ISfebvrier 1617, raporté
par Carte et Penifort notaires royaux*. »
Les cimetières dont il est ici question étaient ceux des
paroissses Saint-Jean et Saint-Laurent. Ce dernier « estoit
communément appelé le cymetière de laPsalette, lequel nom
lui estoit donné parce qu'il estoit jointif laditte maison de la
Psalette. » Grâce à cette situation, il n'était pas exclusivement
réservé au repos des morts, mais il servait une fois par an,
contre sa destination naturelle, à la récréation des vivants^
C'était au temps du Mardi-Gras. Les enfants de la Psallette
renfermés dans une enceinte trop étroite pour leurs jeux,
aspiraient à prendre le grand air. Ils présentaient chaque
année une requête aux chanoines qu'ils parvenaient facilement
à toucher — et on lit dans les vieux registres, à la date de
douze à quinze jours avant le Mardi-Gras : « Les enfants de
1 Archives départ. G. îbO.
— 124 —
la Psallette ontprésenté aux vénérables chanoines une requête
en faveur de laquelle Messieurs leur ont permis de reposer leur
esprit de l'étude des Muses, et leur ont donné la permission
d'aller jouer dans les cimetières, à partir de ce jour jusqu'au
jour des Gendres, afin qu'ils reviennent ensuite au travail
avec plus d'ardeur. »
Celte permission et un écu pour l'achat d'une poule! Dans
ces temps où les goûts étaient simples, les enfants de la
Psallette n'en demandaient pas davantage pour bien passer
leur Mardi-Gras.
Ces jeux funèbres ont été rejoindre d'autres jeux funèbres
en usage chez les anciens. Les Psallettiens cessèrent d'aller
au bois quand les cyprès furent coupés ; et leurs successeurs
trouveraient le Carnaval bien lugubre si, dans cette circons-
tance, c'était dans un cimetière qu'on les lâchait.
Nous ne nous arrêterons pas à prouver que les fiefs de
Grand Archidiacre et du Chapitre furent pris autrefois sur le
fief épiscopal. Les évêques de Nantes par bienveillance pour
leur Chapitre et les hauts dignitaires de leur église avaient
eux-mêmes démembré ce fief en leur faveur. Ce démembre-
ment fut commencé par un contemporain d'Alain, l'évêque
Gautier. Hervé, évêque de Nantes à la fin du X^ siècle imita
l'exemple de ses prédécesseurs ; et Quiriac, en 1063, fit en
faveur du Chapitre une donation très importante, dont le
commentaire nous entraînerait dans la banlieue de Nantes et
nous ferait sortir de notre sujet.
Tout en reconnaissant trois seigneurs différents, l'évêque,
le Chapitre et le Grand Archidiacre, le quartier nantais qui
nous occupe faisait, dans son ensemble, partie du fief de
l'église de Nantes. Depuis Alain jusqu'à la Révolution, il con-
tinua d'en faire partie tout entier, excepté le terrain occupé
par le château et sa douve, qui, depuis le XIIP siècle furent
réunis à la Prévôté.
Mais si, à cette époque, le Château n'était pas du fief de
l'Eglise, ce n'est pas qu'il n'en ait jamais fait partie, c'est qu'il
— 125 —
en était sorti. Le Château de la Tour neuve remplaçait l'an-
cienne demeure des évêques, objet constant de la convoitise
des ducs établis au Bouffay. Le fond primitif et les accroisse-
ments successifs en furent pris sur les fiefs de l'Kvêque et
du Chapitre qui occupaient à eux deux toute la paroisse do
Sainte-Radegonde à laquelle le Château ne cessa jamais
d'appartenir.
En 1207, Guy de Thouars reconnaît expressément que la
douve qu'il vient de creuser a été prise sur le fief des Cha-
noines. « in feodo canonicorum\ et un des griefs allégués
contre le duc Pierre Mauclerc était qu'il retenait contre la
justice le fond du Château appelé la Tour neuve situé entre
les murs de la Cité et appartenant à l'Evêque « fundiim in
quo situm est castruin qiiod dicitur Tiirris nova infra muros
civitaiis ad ipsum Episcopimi Nannet. pertinentem, contra '
justitiam detinef-. »
Aussi en reconnaissance de cet ancien état de choses, la
Prévôté était-elle chargée de payer certaines rentes aux
seigneurs dépossédés.
« Item est deub audit evesché au terme de Langevine sur la
Tour neuve du chasleau de Nantes ou estoit autres fois le
manoir épiscopal de Nantes il liv. 5 s.
Et pour les emplacements et maisons abattues par ordre de
la reine Anne, pour accroistre le chasteau et ses douves sur
lesquelles maisons estaient deubs rentes féodalles audit
Evesque, est deub au terme de Noël 7 liv. 9 s. 3 d . ; lesquelles
rentes de 11 liv. 5 s, et 7 liv. 9 s. 3 d. le tout monnaie, sont
payées annuellement par les receveurs des domaines du
roy^ »
Une partie de ces faits se trouve assez clairement exposée
dans la supplique suivante adressée au roi Charles VIII,
après la construction des tours du château.
1 D. Morice, Preuves I, 809.
» D. Morioe, Preuves I, 837.
^ Arch. dép. G, 7, p. 5, l'arrangement est de 1259, D. Morice, Pr. I. 972.
— 126 —
Supplient. .. les évesque, doyen et chappitre de l'église de
Nantes, comme ainsi soit que pour l'accroissement des ville
et chastel de Nantes et du boulouart et fossez d'iceulx, a esté
prins quantité et estendue de terre qui estoit du fié et de
l'ancienne fondacion de ladite église, et mesme le feu duc
derroin déceodé, au Dieux pardoint, en son temps flst
croistre ledit chastel de la moitié et plus,et,pour ce faire,print
en dedans de la ville la terre qui estoit l'ancien regalle dota-
tion et fondacion d'icelle église en ladicte paroisse saincte
Redagonde, et dehors ladite ville vers Richebourg et Saint-
Clément; et avec ce, à l'occasion des guerres et pour la seurté
et deffence de ladite ville et chastel, grand nombre de maisons,
qui estoient dudit fié d'icelle église ont esté desmolies et abat-
tues tant à la Fosse, Marcheix, Saint-Clément, Richebourg
que autres lieux et environ... (depuis) a esté faitz amplitude de
fossez, pour lesquels faire a esté de rechef prins de la terre
dudit fié et regalle en ladite parroisse Saincte Redagonde, et
ont esté abattues maisons, dont ledit fié est diminué de la
moitié ou environ, flesquellesj terres tirées desdicts fossez ont
esté mises es jardins d'icelx supplians et jusques près les
maisons, église et presbitaire de Saint-Lorans, jaçoit ce qu'il
ne fut nécessité de le faire, tellement que maisons, habifacions
et jardins d'icelx supplians sont rendus presque inutilles au
grant préiudice desdits supplians'. »
En considération desquels faits ils demandent de faire faire
une enquête et de remédier au tort que l'agrandissement du
château leur a causé.
Il faut reconnaître que la Prévôté en général fut assez fidèle
à tenir les engagements que lui avait créés cet ordre de choses.
Mais parfois elle cherche à s'y soustraire et ne les remplit pas
toujours avec la meilleure grâce. Les droits du Chapitre
avaient été déterminés par des lettres des ducs Pierre en 1213,
(Arthur) en 1307, de la duchesse Jeanne on 1334 et du duc
* Archiv. dép. G. 264.
— 127 —
Jean TV en 1363. Lors de la Réformation des domaines, le
Chapitre les ayant communiquées, on les lui garda : « Les
commissaires dit un mémoire de ce temps, cherchent à
détruire les droits de l'église. Ils ont gardé quatre lettres
ducales en faveur du Chapitre, les plus considérables de
celles qui avaient été produites^ »
Il semble que le Domaine réussit enfin par l'emporter dans
sa lutte séculaire : d'après un passage de Travers, on serait
tenté de croire que du temps de notre historien, l'Evêque et
le Chapitre avaient fini par être dépossédés même de cette
rente qui perpétuait le souvenir de droits si anciens.
i
ii
Nous venons de voir la répartition des fiefs de l'Eglise de
Nantes ; il nous reste à voir celle des fiefs de la Prévôté. Alain
d'après la chronique donna une partie de la ville à ses com-
pagnons d'armes. Quelle est cette partie ? Elle est difficile à
déterminer.
Le reste de la vieille Ville était occupé par la Prévôté et par
quatre petits fiefs, celui de Notre-Dame celui de la Comman-
derie de Saint-Jean, celui du prieur de Sainte-Croix, et celuj
des Dervallières.
Celui de Notre-Dame entourait assez exactement la Collé-
giale. Partant de l'église de Saint-Denis, il descendait au car-
refour Saint- Jean et occupait dans la rue de la Commune la par-
tie voisine de l'enclos des Saintes-Glaires ou Clarisses.en face
de l'hôtel de Rosmadec, ainsi que le Prieuré de Toute-Joye.
Le fief de la Commanderie comprenait plusieurs petites en-
claves. La plus importante entourait le manoir principal,
dont le grand portail était vis-à-vis de l'église des Gordeliers.
En voici le débornement d'après un aveu de 1619.
« L'église de Saint- Jean de Nantes et le cimetière y adjaçant
* Archiv. dép. G. 'i.iO . Moyens de griefs, etc, p. 18.
— 128 —
avecq le manoir et maison dudit seigneur Commandeur, con-
sistant en deux corps de logis séparés, avecq leurs courts, es-
curies, jardins et autres logis, dans lequel cimetière est
l'auditoire où s'exerce la jurisdiction de ladite Gommanderie,
le tout ayant de largeur et face sur la rue environ de 200 pieds
et 140 de profondeur, ou environ, sittué à vis le couvent des
Gordeliers, borné vers orient la rue et pavé qui conduit du
Carrefour Saint-Jean au Port-Communau, ver midy maison
dépendante du Chapitre de Notre-Dame vers occidant logis
au sieur de Bréafort maistre des Comptes, et vers le septen-
trion à la dame Belottreau Lebreton. »
Le fief s'étendait à la suite du manoir principal dans la rue
de Verdun actuellement rue de la Commune, jusqu'à l'hôtel
Rosmadec occupé aujourd'hui par les Frères de la Doctrine
Chrétienne.
Dans la même rue de Verdun, en face du prieuré de Toute-
Joye occupé par l'Orphelinat de Saint-Pierre, le fief de Saint-
Jean comprenait deux maisons au Carrefour de la Petite-Rue-
Notre-Dame appelé autrefois Carrefour de Sesmaisons : puis
plusieurs autres maisons sur la place du Pilori ainsi que
quelques maisons adjacentes situées à gauche dans la Rue-
Basse-du-Château, quand on remonte du Pilori au Château.
Si ce n'était sortir de la vieille Ville, nous attribuerions au
même fief plusieurs autres maisons de la place des Changes ;
entre autres, en 1580, celles de maistre Estienne Maillard audi-
teurdes comptes, et de sire Olivier Tertoux et sa femme, à cause
d'elle, enfants de Pierre Maillart; maison appartenant précé-
dement aux confrères de l'antique confrérie de Saint-Crespin.
Le fief de Sainte-Croix, donné au commencement du XII''
siècle, aux religieux de Marmoutiers entourait en grande
partie leur prieuré.
D'après l'aveu del676,il comprenait la maison prioraleavec
tout le pâté de maisons appelé « isle de Sainte-Croix, au mi-
lieu de laquelle est située l'église parochial depuis peu bastie,
laquelle isle joignait vers orient la rue de la Basclerie, occi-
— 129 —
dent, partie de la rue de la Poulaiilerie et le total de celle de
Belle Image, midi la grande place du Bouffay, septentrion
rue Sainte-Croix. »
De l'autre côté de la rue de la Bâclerie, il s'étendait sur
six loges « depuis la rue de la Germonde (aujourd'hui du
Petit-Bacchus) qui se rend à Port-Maillard et monte jusqu'au
haut de la dite rue à vis le grand portail du prieur, lesquelles
maisons joignent par le derrière les maisons du presbytère
de Sainte-Croix, occident rue de la Bâclerie, midi rue de la
Germonde, septentrion, logis au sieur Bruneau relevant de
la Prévôté, allée entre deux », plus quelques maisons joignant
les précédentes à remonter dans la rue de la Juiverie.
Dans ce fief nous signalerons entre autres la maison de la
Jaille où habitait en 1446, Guill. le Veneur sieur de la Jaille.
Possédée en 1543 par Claude Geslin, en 1560 par Bertrand
Geslin elle le fut plus tard par les Lorido. Une demoiselle
Lorido épouse d'écuyer Guill. de l'Isle sieur de la Nicollière, la
vendit en 1679 à la fabrique de Sainte-Croix, lors de l'agran-
dissement de l'église.
L'hôtellerie où au XVI' siècle pendait pour enseigne la
Belle-Image n'appartenait ni au fief du prieur, nia la paroisse
de Sainte-Croix. Située de l'autre côté de la rue, elle était du
fief de la Prévôté et de la paroisse de Saint-Saturnin.
Le prieur revendiquait, mais à tort, la mouvance de la mai-
son qui a donné son nom à la rue de la Bâclerie, et que son
fief entourait de deux côtés. C'était la maison, où, en 1678^
pendait pour enseigne le Bon Conseil. Elle occupait le coin
formé par la place du Boufîay et la rue de la Bâclerie à gauche
en entrant dans cette rue. Elle avait de face depuis la croix
de la maison de l'Epine ou de la Pine dépendant du prieuré
jusqu'au coin de la rue de la Bâclerie 126 pieds. Là était au
XV^ siècle la Baguerie du duc. La rue s'appelait alors rue
de la Baguerie, et en 1493, on y trouvait des orfèvres. A partir
du siècle suivant le nom de la rue se déforme et depuis
1518, le nom de Basclerie a fini par prévaloir.
9
— 130 —
Malgré les prétentions du prieur, la maison semble avoir
toujours relevé du fief au Duc. Un titre de 1537 rappelle qu'elle
avait été baillée à Jehan Mauraz et Guillemette d'Orléans par
la duchesse nostre souveraine dame » et qu'elle appartenait
alors à Guillaume Loaysel et Françoise Malaisé sa femme
sieur et dame de la Touraudaye. Ce titre a interverti le sexe
des donataires. La donation de la duchesse Anne, datée de
Blois au mois de septembre 1507, est faite en faveur de sa
« chère et bien aimée femme de chambre Jehanne Maurray
et Guillaume Porchier son mary. »
Ces différents fiefs ont été donnés aux XI* et Xll* siècles à
ces établissements religieux en partie par les ducs de Breta-
gne, en partie par des seigneurs laïques qui les possédaient
sous la suzeraineté des ducs. Il semble que l'on peut voir
dans ces derniers donateurs les successeurs des compagnons
d'armes à qui Alain Barbe-Torte avait distribué une partie
de la ville.
Outre ces fîefs secondaires, la vieille enceinte de Nantes en
renfermait un autre qui est resté constamment laïque : celui
des Dervallières.
Ce fief commençait dans la rue de la Commune à partir de
l'hôtel de Rosmadec, limite du fief de la Gommanderie. Il
s'étendait jusqu'au prieuré de Toute-Joie, comprenant deux
ténements importants : celui de la Mairie, et la plus grande
partie de l'hôtel de Rosmadec.
Ce dernier hôtel construit en 1653 par César de Renouard,
seigneur de Drouge, s'est appelé primitivement, de son nom,
hôtel de Drouge. Le mariage de Bonne de Renouard avec
messire Michel d'Espinose, seigneur de Portric, le fit passer
dans la famille d'Espinose ; et en 1679, Michel d'Espinose, au
nom de ses filles Elisabeth, Bonne et Claude reconnaissait
devoir sur son hôtel la somme de 50 sols au seigneur des
Dervallières. Bonne d'Espinose s'étant mariée avec Sébas-
tien de Rosmadec, l'hôtel de Drouge perdit son premier nom
pour prendre celui sous lequel il est aujourd'hui connu.
— 131 —
Sans entreprendre l'histoire de l'Hôtel de Ville nous rappel-
lerons que, situé sur le fief des Dervallières, il s'appelait au
XV* siècle encore « l'herbergement de Derval. » Possédé
ensuite, avec la seigneurie des Dervallières par les Tissart,
seigneurs de Bizart, il tira son nom de cette seigneurie du
pays Blésois. La ville acquit en 1575 Thôtel de Bizart pour en
faire son Hôtel de Ville, et continua de payer à la seigneurie
des Dervallières les cinq sols monnoie de rente dont il était
chargé.
« Item, dit un aveu rendu à cette seigneurie le 6 février
1679, les maire, eschevin, procureur sindic de la ville dudit
Nantes tiennent à foi hommage et rachat de ladite terre et
jurisdiction des Dervallières la Maison commune de Ville
dudit Nantes. . . icelle ci-devant nommée Derval ou Bizard ;.
pour homme vivant, mourant et confisquant, ont donné leur
concierge de ladite maison de Ville ; icelle maison composée
de plusieurs grans bastimens couverts d'ardoise, cours au
devant et grans jardins derrière, sise et située rue de Verdun,
paroisse Nostre-Dame ; le tout enfermé de murailles joignant
d'un coslé à la chapelle du prieuré de Toute-Joie, et d'autre
la maison de M* Guillou, greffier des Insinuations de la ville
de Nantes... et aux logis et jardin du sienr Derouge (sic pour
Drouge), et d'un bout à ladite rue et pavé de Verdun. »*
Tels sont les fiefs qui jusqu'à la Révolution ont partagé la
ville de Nantes, dans son enceinte contemporaine d'Alam
Barbe-Torte.
Les audiences de chacun de ces fiefs se tenaient dans les
auditoires différents, leur juridiction s'exerçait par des
officiers particuliers.
hes a,nciennes Etrenf les Nantaises donnaient chaque année
sur tous ces points les détails que les Nantais étaientintéressés
à connaître. A titre de curiosité nous empruntons quelques-
uns de ces détails aux Etrennes Nantaises de 1757, insérées
1 Arch. dép. B. Chantenay.
— 132 —
dans les Archives Curieuses de la Ville de Nantes, par Verger.
T. m. 182.
Nous nous contentons de les reproduire, après avoir toute-
fois fait remarquer que la justice du roi se rendait au Prési-
dial,etque l'on donnait le nom de Regaires aux fiefs et juri-
diction de l'évêque.
« Tribunaux de la ville de Nantes.
Présidial. — Le Présidial se tient les lundi matin, mardi
matin et soir, jeudi matin, vendredi matin et soir et samedi
matin.
M. le sénéchal tient aussi une audience particulière les
mardi et samedi matin.
Binet, seigneur de Jasson, grand bailli ; Bellabre sénéchal,
président-présidial, Jégo de la Blottière, alloué, lieutenant-
général ; Bourgoin, juge-criminel; Le Ray du Jumet, lieu-
tenant civil et criminel.
Conseillers. — Jouin doyen, Ertault de la Brosse, con-
seiller d'honneur, Drotiet, Adam, Delaville, Bodin de la Rau-
dière, Lelasseur, de la Haye Moricaud.
Gens du roi. — Dachon, avocat du roi ; Goullin de la Brosse
avocat clu roi. N... procureur du roi.
Greffiers. — Morel greffier civil ; le Mesnaiger greffier civil ;
Hardi;, greffier criminel. »
Ce tribunal comprenait en outre, huit commis jurés au-
dieîiciers, et quatre huissiers.
Les autres tribunaux avaient un moins grand luxe de
magistrats.
« Réguaires,
Delaville, sénéchal, Turpin du Prouzeau, alloué ; Geffray
Duplessis Belair, lieutenant; Thomas, procureur fiscal.
Brossais, notaire et greffier, Tusson, notaire et sergent féodé.
Cominis-gref fiers. — Potier, Bongrain, Cormier.
Les plaids des Réguaires se tiennent aux mois de mars, juin
et décembre.
— 133 —
Les audiences se tiennent aux Réguaires^ derrière Notre-
Dame.
Chapitre.
Les audiences se tiennent rue Saint-Laurent, les lundi et
jeudi à 3 heures de relevée.
Ballais, sénéchal ; Angebault, lieutenant, Le Beau, procu-
reur d'office ; Mongin, greffier-notaire.
Archidiaconé .
Les audiences se tiennent rue Saint-Denis, le jeudi, à deux
heures de relevée.
Saint-Jean et Saijite-Catherine .
Les audiences se tiennent près les GordelierS;, le samedi à
trois heures du soir.
Richard de la Morlière, sénéchal, Urien, procureur d'office,
Frondât greffier.
Prieuré de Sainte-Croix .
Les audiences se tiennent rue de la B^clerie, les mardi et
samedi, à onze heures.
Le Beau du Bignon, sénéchal, Bonnain, procureur d'office ;
Monnier greffier.
Les Dervallières.
Les audiences se tiennent dans la grande salle du Palais,
le samedi, à deux heures.
Bidon, sénéchal, Baudouin, procureur d'office ; Jalabert,
greffier.
Toute-Joie.
Les audiences se tiennent rue Verdun, près la chapelle, le
samedi à deux heures.
Petit de la Bauche, sénéchal ; Chevillard, procureur d'of-
fice, Lamy, greffier. »
Outre ces tribunaux, les Etrennes Nantaises en men-
tionnent encore à Nantes quelques autres. Nous les retrouve-
rons quand, pour compléter cette première étude, nous nous
— 134 —
occuperons des fiefs situés en dehors des murs de l'ancienne
ville de Nantes et dans la banlieue.
Parmi ces tribunaux les Etrennes nantaises placent, après
les Régaires, l'officialité. C'était un tribunal ecclésiastique
d'un ordre complètement à part.
Bien qu'autrefois l'officialité ait joué un rôle très important,
au point de vue temporel, dans les actes de la vie civile,
même pour les laïques, son ressort, à cette époque, sem-
ble n'avoir été que d'un ordre spirituel. Ce qui est certain
c'est qu'aucun fief spécial n'a jamais dépendu de sa juridic-
tion ; et \es Etretiîies Nantaises ne nous semblent énumérer
ce tribunal parmi les autres qu'au même titre qu'elle énu-
mère les Manufactures, V Amirauté le Consulat^ le Commerce ,
etc., tribunaux qui avaient des attributions suffisamment
désignées par ces noms.
Aussi sommes-nous surpris de trouver les lignes suivantes
dans l'article consacré à Nantes par l'abbé Expilly.
« h'Officiaiité, tribunal ecclésiastique, composé de l'official,
du vice-official, du promoteur, du vice-promoteur, du greffier,
et du sergent-appariteur, a son ressort distribué en plusieurs
districts, savoir: le Chapitre, l'Arçhidiaconé de Nantes, Saint-
Jean et Sainte-Catherine, Sainte-Julie et Bongarant, le prieuré
de Sainte-Croix, le prieuré de Pihnil, les Dervallières, Toute-
Joye, la Gascherie, la Desnerie, Belle Ile et Port-Durand en
Saint-Donatien. Il y a un sénéchal, un procureur d'office et un
greffier pour chacun de ces districts'.
Nous ne voyons nullement quels rapports pouvait avoir
l'officialité avec toutes ces juridictions qui s'exerçaient dans
des fiefs relevant tous, en dernier ressort, du roi. Autant dire
que, de nos jours encore, les justices de paix des cantons de
Nantes ressortissent de l'officialité.
Bien que cet article ait paru pour la première fois en 1766,
dans le Dictionnaire géographique, historique et politique des
Gaules et de la France, nous ne croyons pas à l'exactitude de
sa rédaction sur ce point.
' Cet article a été inséré àd.ns Nantes Ancien par M. Dugast-Matifeux, p. 43!.
— 135 —
Les Etrejines Nantaises du XVIIP siècle énumèrent tous ces
diiîérents tribunaux à la suite de VOfficialité ; ils figurent
simplement sur la même liste : sans que rien permette de les
rattacher à ce tribunal ecclésiastique, sous quelque rapport
que ce soit.
Le rédacteur de cet article, tout en travaillant sur des do-
cuments sérieux fournis par des Nantais, était lui-même
étranger à Nantes. Dans son ignorance de nos usages locaux,
par suite peut-être d'une confusion dans l'ordre de ses notes,
il aura rattaché à l'officialité, par des liens de sa création,
toutes les juridictions qui sur ses documents n'étaient men-
tionnées que fortuitement à la suite les unes des autres, après
ce tribunal.
Nous sommes loin d'avoir épuisé la matière : et chacun des
fiefs dont nous avons eu à parler dans cette étude, pourrait
être l'objet d'une étude spéciale pour laquelle les documents
ne manquent pas.
Notre but principal a été d'expliquer un passage de notre
vieille Chronique Nantaise. Ce passage, précédemment, avait
été diversement interprété sans que les difficultés qu'il sou-
lève aient encore reçu, du moins à notre connaissance, une
solution satisfaisante.
La principale difficulté consistait à retrouver les jalons
placés par Alain Barbe-Torte, pour délimiter les fiefs qu'il
partageait avec l'évêque autrefois seul seigneur.de toute la
ville de Nantes.
Un de ces jalons, placé près du chœur de l'église Notre-
Dame, était assez apparent pour attirer l'attention de tout le
monde ; il n'y a eu à se tromper sur ce point que ceux qui
l'ont bien voulu.
Le second, jalon placé près de la porte Gharrière, était com-
plètement disparu avec cette porte, et cette disparition re-
montait à une époque si ancienne que, dès le XV' siècle, nos
historiens ne pouvaient plus réussir à le retrouver.
Nous avons déjà rappelé le passage dans lequel Travers
— 136 —
place cette porte au fond de l'impasse Saint-Laurent. Notre
historien qui a vu et entrevu tant de choses, avait pourtant
sur ce point entrevu aussi dans une circonstance, une partie
de la vérité.
Après avoir donné son opinion, sur laquelle, comme nous
l'avons fait remarquer, il revient encore dans un autre endroit
il ajoute. « La portion de l'évêque est autrement bornée dans
la chronique de Saint-Brieuc. Elle commence, selon cette Chro-
nique, à l'église de Saint-Pierre, descend par larueSaint-Denys,
remonte par la rue Saint-Gildas, descend par la petite rue des
Jacobins, et se termine à la rue Germonde, au Port que l'on
appelle aujourd'hui le Port Briand-Maillard, autrefois le
Port Tarare, selon Pierre le Baud qui a lu dans la Chronique
de Nantes ; iisque ad portum Tararium, au lieu de portam
Charariam que d'autres y lisent. »
Nous avons, dès le début de cette étude, publié le texte de
la Chronique de Saint-Brieuc. Le lecteur peut constater qu'il
y est question non pas de l'église Saint-Pierre placée près du
mur oriental de l'enceinte de Nantes, mais du mur septen-
trional « in ipso muro civitatis ah Aqiiilone tertninata. »
A part cette inadvertance, le tracé que nous donne
Travers dans ces lignes est exactement celui que notre étude
nous a fait adopter.
Mais Travers prolonge ce tracé au delà de l'église des' Jaco-
bins, jusqu'au Port-Maillard ; nous avons établi qu'il fallait
. l'arrêter près de cette église, à la porte de la vieille enceinte
de Nantes. Les deux côtés de la rue Germonde, aujourd'hui
rue Lambert se trouvent en dehors de cette enceinte primi-
tive, et ont constamment appartenu au fief de la Prévôté.
Il est regrettable que notre historien n'ait pas cru ici de-
voir s'attacher de préférence au texte de la Chronique de
Saint-Brieuc. Du moins, nous a-t-il fait faire une première
promenade archéologique dans les vieux quartiers de Nantes.
Si le lecteur s'est plu dans notre société, autant que nous nous
plaisons dans la sienne, il sera facile de nous redonner mu-
tuellement ce plaisir. G. Durville.
UN ARCHITECTE DE CATHÉDRALE
AU XV' SIÈCLE
Mathurin RODIER
Maistre maczon de l'Eglise de Nantes.
Les grandes œuvres que des hommes de génie ou de talent
ont laissées à l'admiration de la postérité ont parfois un défaut
qui ressemble de bien près à l'ingratitude. Elles attirent tel-
lement l'attention des hommes qu'elles finissent par l'absorber
toute entière, en la détournant de celui à qui elles doivent
l'existence : si bien que l'on peut dire que l'enfant a fait oublier
le père, et que la beauté d'une œuvre a parfois nui à la gloire
de son auteur.
C'est ce qui est arrivé surtout dans les arts. Combien ils
nous offrent de merveilleux chefs-d'œuvre dont les auteurs
sont inconnus I combien d'autres dont on ne connaît que le
nom qui les a signés ! C'est ce que l'on constate principale-
ment à propos de tant d'admirables cathédrales des XIP et
XIII« siècles. Si celle de Nantes, commencée plus tard, a con-
servé du moins le nom de son principal architecte, elle ne le
dit pas à tous ceux qui passent sous son riche portail ; et, à ceux
à qui elle redit encore ce nom, elle a oublié de dire ce qu'il fut.
C'est à cet oubli que nous essayons de remédier en partie,
en recueillant dans celte étude différents détails sur le vieil
architecte de notre cathédrale : Mathurin Rodier.
— 138
i
Il ne semble pas que Mathurin Rodier ait été le premier
archilectede la cathédrale. Si l'on considère qu'il vivait encore
en 1485, et que la cathédrale fut commencée
« L'an mil quatre cent trente-quatre
A my-Avril sans moult rabattre, »
il faudrait admettre qu'il en dirigea les travaux pendant
cinquante ans.
Cette hypothèse, à la rigueur, ne serait pas inadmissible.
Les différentes carrières étaient autrefois moins encombrées
que de nos jours. Un jeune homme de vingt-cinq ans jouissait
déjà d'une position à laquelle, actuellement, un homme de qua-
rante ans n'est pas encore parvenu ; et les esprits, sans être
peut-être plus précoces, trouvaient pour leur développement,
à l'époque même de leur formation, des circonstances favo-
rables qui ne viennent pins maintenant que trop tard, pour
que cette formation puisse en bénéficier.
Aussi, si nous n'avions que cette première considération,
elle ne serait pas suffisante pour enlever et même pour dis-
puter à Mathurin Rodier, la gloire d'avoir (^té le premier
architecte du portail que nous admirons.
Mais en marge d'un Registre capitulaire de 1458, à la date
du 19 juin, on lit la note suivante : « à celui qui a commencé
la construction de l'église, un marc d'argent. lUi qui incepil
opus ecclesie, luiam marcam argenti. » Le texte signalé par
cette note indique tout à la fois le nom de ce premier archi-
tecte, sa situation douloureuse, et la charité avec laquelle le
Chapitre y remédie selon son pouvoir. « Les chanoines, dit le
texte ont donné gratis par un sentiment de pitié à maître
Guillaume de Dommartin, qui a commencé la construction
nouvelle de l'église, un marc d'argent, à prendre sur les res-
— 139 —
sources attribuées à cette construction, parce qu'il est main-
tenant, dit-on, réduit à la plus grande misère*. »
Ce titre de maître, ces expressions « qui primo incepit opus
novum ecclesie » ne nous laissent aucun doute. Nous salue-
rons dans maître Guillaume de Dommartin le premier archi-
tecte de la cathédrale de Nantes, et nous remercierons le Cha-
pitre^ non seulement d'avoir soulagé son extrême misère, mais
encore de nous avoir conservé son nom. Ce n'est souvent que
par la souffrance que l'on parvient à la gloire. Si Guillaume
de Dommartin n'eût pas connu la pauvreté, son nom ne figu-
rerait pas dans le registre des libéralités du Chapitre ; et tout
en admirant ce qui est en partie son œuvre, nous aurions
perdu jusqu'à son souvenir. C'est faire œuvre de justice que
de lui restituer sa gloire : il y a d'autant plus de droit qu'il a
été plus malheureux.
Avec cette simple indication, il est impossible de deviner
pour quelle cause, et à quelle époque, maître Guillaume de
Dommartin dut quitter son entreprise. A cette date de 1458,
Mathurin Rodier l'avait déjà remplacédepuis plusieurs années.
Les Registres du Chapitre donnent son nom pour la première
fois en 1454, au l" juillet, à propos d'un règlement décompte,
qui nous fait aussi connaître les noms de quelques autres
ouvriers de la Cathédrale.
« On s'est arrangé tant de la part de l'Évêque que de celle du
Chapitre avec Mathurin Rodier maître, et Philipot de la Court,
Jean Chauvin, Jean Benoist et Julien Bonne Vaine, ouvriers
de la nouvelle construction, au sujet de certains reliquats
du temps où Robin le Mercier était miseur de la cons-
truction, et de certains billets aux mains de ces ouvriers,
faisant mention de certaines sommes d'argent qui leur sont
dues. On leur donnera deux cents livres monnaie. Quant
' Dederunt gratis intuitu pietatis magistro Guillelmo de Dommartin, qui
primo incepit opus novum ecclesie, unam marcham argenti super pecuniis
eiusdem operis, eo quod nunc ad inopiam permaximam ut dicitur est deduc-
tus. » Conclusiones capitulares. an. 1468.
— 140 —
au reste de ce que mentionnent leurs billets, ils en ont
généreusement donné le tiers. On leur payera le surplus aux
prochaines indulgences : ils seront quittes envers l'église, et
réciproquement, jusqu'au premier mai dernier. Désormais ils
auront leur solde chaque mois, à la fin du mois, selon ce qui
paraîtra être le mieux'. »
Robin le Mercier, chanoine de Nantes et miseur de la
Cathédrale, fut inhumé vers le milieu de la nef de la Cathédrale
le 5 novembre 1453. Il était remplacé en sa qualité de miseur
dès l'année 1451, par Jean de Ghasteau-Giron, le généreux
fondateur de l'hôpital Saint-Armel de Savenay. A ne consulter
que les titres du Chapitre, on peut donc affirmer que Mathurin
Rodier succéda à Guillaume deDommartin avant 1451.
Mais l'abbé Travers nous a heureusement conservé un texte
qui nous apprend que laconduitedes travauxde la Cathédrale
lui était déjà confiée quelques années encore auparavant.
Ce texte que nous reproduisons plus loin, nous dit
qu'en 1444 « Mathelin maistre masson de Saint-Pierre, »
était aussi chargé du pcrtailde Saint-Nicolas. Ce Mathelin est
évidemment notre Mathurin. Dix ans à peine après la pose de
la première pierre du portail de Saint-Pierre, la construction
en était dirigée par celui qui devait la diriger pendant près de
quarante ans.
Tout en signalant le désintéressement remarquable avec
lequel Mathurin et ses collaborateurs abandonnent une partie
de ce qui leur est dû, nous nous arrêterons un instant à
expliquer un passage assez obscur de ce texte : le passage
relatif aux indulgences.
Pour solliciter la pieuse générosité des fidèles envers une
œuvre qui exigeait d'immenses ressources, le Chapitre avait
demandé à Rome des indulgences pour tous ceux qui con-
tribueraient de leur aumône à cette œuvre locale. Ces indul-
gences fixées à certains jours et accordées pour un certain
' Conclusiones Capitulares, an. 1458.
— 141 —
nombre d'années, étaient prêchées dans toute la Bretagne. On
rencontre à cette époque des chanoines de Nantes ou d'autres
prédicateurs annonçant les indulgences nantaises à Vannes',
à Dol, à Saint-Brieuc. Cette demande d'indulgence fut très
souvent accordée par le Saint-Siège qui s'intéressait à la
construction d'une église que Léon X déclarait en 1518,
remarquable entre toutes les églises cathédrales du duché de
Bretagne, et construite avec la plus grande somptuosité « iiiter
alias Cathédrales ecclesias ducatus Britanyiie insignis ac opère
sumptuosissimo co7istructa-. »
Plus tard ce fut à ce moyen qu'on eut recours pour la cons-
truction de Saint-Pierre de Rome. Luther s'en scandalisa et y
trouva un prétexte à sa révolte; mais en Bretagne, au XV*
siècle, on trouvait tout naturel que l'Eglise ouvrît ses trésors
spirituels à ceux qui concouraient spontanément à l'érection
des édifices qui contribuent si grandement à la beauté des
cérémonies du culte, au développement des arts et à l'embel-
lissement des cités.
L'arrangement conclu entre le Chapitre et son architecte
eut son application dès le mois de septembre. Les chanoines'
donnèrent à Mathurin Rodier 10 livres sur les indulgences
du premier dimanche de ce mois, avec la charge de les distri-
buer immédiatement à ses ouvriers^ Les indulgences du
premier dimanche d'octobre eurent la même destination,
1 Kn mr.i 1466, le Chapitre accorda 100 pains capitulaires à Pierre le Cozic
qui a prêché, à Vannes, les indulgences de l'Eglise de Nantes. Les Délibéra,
tions Capitulaires mentionnent plusieurs dons de ce genre accordés, tantôt au
secrétaire de l'évêque de Rennes, tantôt h un chanoine de Vannes ou
d'ailleurs, tantôt à d'autres personnages occupés à cette mission dans la
Basse-Bretagne, à Saint-Malo, à Rennes, à Dol, etc. D'autres fois le Chapitre
prend directement à sa charge tous les frais de voyage de son missionnaire.
iOn 1484, il accorda au prieur de Mauves, délégué pour prêcher les indulgen-
ces, vil sols et VI deniers par jour pour lui et pour son cheval
* Bulle de Léon X, donnée à Rome l'an du Seigneur 1518, le 7 des calendes
d'avril ; original aux Archives du Chapitre.
' Tradiderunt Maturino Rodier decem libras super indulgencias prime
diei dominice hujus mensis, dividendas per ipsum mature operariis sive ser-
vitoribus novi operis, et de quibus ipse computabit. Conclus, capit. 22 sept.
— 142 —
Mais tout en construisant le portail de la cathédrale on avait
encore à s'occuper du clocher. De nouvelles indulgences
ayant été obtenues, par maître Pierre Chauvin, du cardinal
d'Estouteville pour tous les dimanches de l'Avent et du Ca-
rême, on fit deux parts des ressources qui en proviendraient.
Les chanoines décidèrent que ces ressources seraient em-
ployées à la couverture du clocher, de telle façon cependant
que celles qui auraient été recueillies le premier dimanche du
mois, resteraient, comme précédemment, attribuées à la
construction du portaih.
Jean de Château-Giron ayant été remplacé en sa qualité de
miseur de la construction, il intervint le 16 juin 1455, entre
le Chapitre et Matliurin Rodier un nouveau règlement relatif
aux anciens comptes : « On a fait un arrangement dit le
Registre, avec les ouvriers de la construction^nouvelle, c'est-
à-dire avec Mathurin Rodier bien qu'il soit absent, Hervé
Huerry, Philipot de la Court, Jean Chauvin pour lui et pour
Julien Bonne Vaine et Jean Benoist. Sur les deux cents livres
qui leur restaient dues du temps où maître Robin Le Mer-
cier et Jean de Château-Giron étaient miseurs, comme il
paraît dans leurs billets faits à ce sujet, ils doivent recevoir
maintenant 100 livres et 100 sous de monnaie courante sur
l'argent des dernières indulgences. Les dits ouvriers ont
donné le reste dès maintenant, et tiennent quittes le Chapitre
et l'église jusqu'au premier mai passé. »
Les arrangements précédents nous ont appris ce que le
' « Quia nuper impetrate fueruntde novo permag. Petrum Chauvin cano-
nicum, quedam indulgencie auctoritateapostolica concesse per R.P.D.Guil. de
Estoutevilla..card S.R E. ita quodipse concessitomnibusetsingulisChristifide-
libus qui ecclesiam singulisdiebus dominicis Adventus et Quadragesime (visi-
tarent) pro qualibet die dominicâ unum annum et unam quadragenam indul-
genciarum, prout in litteris super hoc confectis latius continetur, ideo con-
cluserunt Domini quod pecunia inde proveniens reservabitur ad tegendum
campanile ecclesie, per alique'm ad hoc instituendum applicabitur ; ita tamen
quod dum hujusmodi indulgencie occurrerent prima die dominicâ alicujus
mensis.quà fuerint alie indulgencie perantea concesse dicte ecclesie, tune
nichil pro campanili hujusmodi relinebitur, sed quidquid inde perveniet
illâ die, ad opus inceptum noviter convertetur. » Conclus, capit. 1454, 22 nov.
— 143 —
Chapitre devait collectivement à tous les ouvriers employés
à la construction de la cathédrale. Un autre nous révélera ce
que le maître maçon gagnait de plus que ses ouvriers, et nous
montrera en outre, que le Chapitre n'oubliait pas dans ses
comptes la digne épouse du bon architecte. Voici en effet ce
que nous lisons à la date du 16 juillet 1455 :
« Mathurin Rodier, maître de la construction nouvelle, s'est
arrangé avec les seigneurs du Chapitre, pour tout le temps
passé. Comme en sa qualité de maître, il devait, d'après l'an-
cien marché, avoir lui-même un blanc de plus que les autres
ouvriers, et, avec cela, pour son salaire et ses gages, une
tunique de la valeur d'un marc d'argent par chaque année,
vu que, pendant plusieurs années, il n'aété payé que comme
les autres, et qu'il lui restait dû une somme de 100 livres,
tant par suite des arrérages de ses gages que par suite de
l'accumulation de ce blanc de chaque jour, et de cette tunique
de chaque année, on s'est arrangé mutuellement et à l'amia-
ble de la manière suivante. Le Chapitre, en vertu des arran-
gements antérieurs paiera pendant les trois ou quatre ans
prochains, ou le plus tôt qu'il le pourra commodément, une
somme de 120 livres monnaie courante, à prendre sur l'argent
des indulgences : de telle façon cependant que sur les dites
120 livres, on en consacrera 10 à acheter dans l'année une
tunique à l'épouse dudit Rodier. Par suite, le même Mathurin
tient quittes ledit Chapitre et l'entreprise pour tout le temps
passé'. »
' Maturinus Rodier magister novi operis composuit cum Dominis de
Capitulo, ita quod pro toto tempore elapso usque... (espace laissé en blanc)
eo quoi ipse, tanquam magister, ex anliquo pacto, débet habere unum
alltum ultra alios operarios, et cum hoc debebat habere pro stipendiis et
vadis suis, unam tunicam valoris marche argenti, quolibet ànno, et quia
per nonnullos annos ipse fuerat par aliis operariis, ideo restabat sibi tam ex
erreragiis stipendiorum, quam ex augmento dicti albi diurni et tunice
annualis summa centum librarum monete cunentis, super quo ipsi compo-
suerunt ad invicem ex utriusque partis beneplacito ita quod Capilulum
sibi solvere débet, occasione premissorum, per annos très vel quatuor
proxime futures ant quantocius commodo fieri poterit, super pecuniis indul-
genciarum, summam centum viginti libr. mon. curr., ita tamen quod ex
— 144 —
Le marc d'argent vers cette époque valait de 8 à 9 livres.
L'homme se contentait d'un marc pour l'achat de sa tunique.
Le Chapitre en consacrant deux livres de plus à la tunique
du sexe qui s'orne a fait à sa coquetterie une concession très
raisonnable. Si le sexe fort était moins faible;, il garderait la
proportion indiquée par le Chapitre, et l'on ne rencontrerait
pas, dans toutes les conditions de la société, des femmes qui
sont trop chères à leurs maris. Mais n'insistons pas sur ce
point. Les gens mariés trouveraient que nous en parlons
bien à notre aise ; et les dames se plaindraient que, mécon-
naissant leurs droits à la toilette, nous voudrions les ramener
sous le figuier oii, trouvant à la fois le vivre et le couvert,
l'homme et la femme empruntaient à la même pièce un com-
plet qui ne coiitait pas plus cher pour l'un que pour l'autre,
d'étoiïe ou de façon.
Outre sa tunique d'un marc par an, Mathurin Rodier rece-
vait en plus de ses ouvriers un blanc d'argent par jour. Le
blanc d'argent monnaie de Bretagne valait en 1383,10 deniers'.
Il semble qu'il était alors de la même valeur : ce sont en effet
10 deniers qui sont assignés ailleurs comme salaire particu-
lier de notre architecte : « Mathurin Rodier, architecte ou
maître de la construction nouvelle de l'église, lisons-nous
encore, aura dix deniers pour chacune de ses journées com-
prises dans le compte de Jean Hamon pour l'année dernière-. »
A cette époque les journées d'hommes se payaient de vingt
deniers à quatre sous. En 1454, les hommes qui pavaient la
Cathédrale et les couvreurs qui en couvraient le clocher de
rouche, recevaient II sous VI deniers* ; les hommes de peine
qui aidaient les uns et les autres, XX deniers ; d'autres ouvriers
dicta summâ centum libr., convertentur dcem libre in emptionem unius
tunice pro uxore dicti Rodier, in Ira unum annum ; et, per hoc, idem
Maturinus quitavit dictutn capitulum et opus pro toto tempore elapso
usque... (espace laissé en blancj. Conclus. Cap. 1455, 16 juillet...
' Travers, Hist.de Nantes, l. 445.
' Goncl. capit. 22 juillet 1456.
' .\rch. du Chapitre : compte de 1454.
— 145 —
qui semblent avoir été le mieux rétribués à cause de leur
métier, III s. IlII d.
Dix deniers par jour, une tunique d'un marc par an, voilà
donc ce que l'architecte d'une cathédrale gagnait en plus de
ses ouvriers. C'est ce qu'il appelait son salaire, ses gages,
stipendium, vada: le mot d'honoraires seraitbien prétentieux
pour un si modeste gain.
Une autre délibération capitulaire nous fait connaître en
gros le gain annuel de notre maître maçon. Le 8 février 1458,
les chanoines ordonnèrent au miseur de l'OEuvre de payer
« à Mathurin Rodier maître de l'OEuvre du nouveau portail,
XX livres pour ses gages de l'année passée, à condition qu'il
tienne l'OEuvre quitte de la tunique quilui avait été promise*. »
Si l'on défalque de cette somme de 20 livres, le prix de cette
tunique qui pouvait valoir de 8 à 10 livres, il reste pour gain
annuel, en espèces, une somme de 10 à 12 livres. La livre
valait 20 sous; le sou, 12 deniers. Les fêtes d'obligation étant
alors beaucoup plus nombreuses que de nos jours, les jours
de chômage étaient, par suite, plus nombreux : l'ouvrier ne
travaillait pas 300 jours dans l'an : 300 jours à 10 deniers
nous donnent 3000 deniers, ou 250 sous, ou 12 livres et demie.
En livres ou en deniers, en gros ou en détail, l'architecte de
la Cathédrale touchait à peu de chose près la même somme
chaque an.
Les successeurs de Mathurin Rodier commencèrent de
bonne heure à être mieux rétribués. En 1506 le Chapitre
décida de donner « à Jacques Drouet maître de l'OEuvre de
l'église de Nantes, sept sous et demi chaque jour qu'il tra-
vaillerait à ladite œuvre.* »
Hâtons-nous d'ajouter que le Chapitre ne se bornait pas à
i « Voluerunt quod... misiator operis novi solvat Maturino Rodier magistro
operis novi portails XX lib. pro stipendiis suis anni ultimi, dum tamen
quitetopus pro tunicâ sibi promissâ. > Conclus, capit.
2 1506,27 mai. :( Domini capitulantes concluserunt quod Jacobus Droutt,
magisttr operis ejclesie Nannet. habeat septem solidos cum dimidio, qua-
libet die qua prefatus Jacobus ad dictum opus operaretur. »
10
— 146 —
payer strictement ses gages à son arctiitecte : et avec raison,
car c'est bien à propos des rémunérations dans les carrières
libérales que l'on peut dire summum jus, summa injuria.
Parfois, il lui apportait le secours de son influence pour le
faire exempter de certaines corvées qui ne souriaient, et qui
ne souriraient encore, que très médiocrement à bien des
hommes d'études peu faits pour le métier de garde nationale.
En 1468, le Chapitre échoua dans sa. démarche, mais Mathurin
Rodier n'y perdit pas tout. Par délibération du 15 juillet, les
chanoines ordonnèrent de lui payer « outre ses gages la
somme de 100 sous, parce que ledit Mathurin avait été forcé
de faire la porte et la garde ou le guet de la ville'. »
En 1477, le connétable de la Ville se montra plus traitable.
Le Chapitre, dans sa reconnaissance, lui accorda 25 pains ca-
pitulaires2,grande faveur qu'il réservait aux évêques,aux ducs
et duchesses, à ses bienfaiteurs, en un mot à tous les grands
personnages qu'il voulait honorer ou récompenser.
Quand on demande aux autres des faveurs pour ceux à qui
l'on s'intéresse, il ne serait pas bienséant de ne pas leur en
accorder soi-même, lorsque l'occasion s'en présente. Le Cha-
pitre n'avait garde de tomber dans cette inconvenance.
C'était autrefois, à Nantes, un usage très commun, pour
mettre fin aux procès, de jurer sur les reliques conservées à
la Cathédrale, et en particulier sur celles de saint Hervé. On
ouvrait alors le reliquaire et l'on donnait à l'église une cer-
taine rétribution. C'est de cette rétribution que le Chapitre
exempta Mathurin Rodier dans un procès oii il se trouvait un
jour engagé : « Comme Mathurin Rodier maître de la cons-
truction nouvelle a fait hier ouvrir les reliques pour prêter
' 1468. 15 juillet. « Domini capitulantes ordinaverunt solvi et dari Mathu-
rino magistro operis portalis, ultra sua stipendia sumoiam centum solidorum
super compotis, et hoc in t'ayorem, et eo quod ipse Mathurinus compulsus est
ad faciendum portam et custodiam seu guetum civitatis.» Conclus. Capitul.
« 1477, 29 janvier : « Domini ordinaverunt dari conestibulario huius
villse pro eo quod exemit Mathurinum Kodier a porta civitatis... XXV panes
capitulares. » Conclus. Capitul.
— 147 —
un serment, vu qu'il travaille pour la fabrique, les chanoines
lui ont fait grâce de ce qu'on donne ordinairement pour cela.'»
D'autres fois le Chapitre ne se bornait pas à faire exempter
ou à exempter Mathurin Rodier de droits imposés à tout le
monde ; il lui donnait spontanément un supplément d'hono-
raires. Le 21 juillet 1479, on lit à la marge du registre la
simple mention : « Pro Mathiirino. Pour Mathurin. » Ce
Mathurin, bien que son nom de famille ne nous soit pas indi-
qué, est bien encore le nôtre : voici en effet ce que nous dit
le texte : « Dans ce jour du 21 juillet, les chanoines ont donné
gratis à Mathurin, contre-maître de l'église, 60 sous à prendre
sur le gain de l'église^ »
Mais Mathurin se faisait vieux. En 1480 il y avait près de
quarante ans qu'il dirigeait seul les travaux de son portail. Le
Chapitre prit en considération ses longs et bons services, et,
par pitié de son âge, lui donna gracieusement un bâton de
vieillesse. Au lieu de l'écarter définitivement d'une œuvre qui
était sa vie, il lui nomma un coadjuteur. Il fut décidé que l'on
v( donnerait Jean Mestre comme coadjuteur et sous-maître à
Mathurin Rodier, maître de la construction de l'église^ », et
une délibération du 9 janvier 1480 confirma cette décision
arrêtée dans la délibération précédente.
Le Chapitre ne se borna pas à donner un coadjuteur à son
vieil architecte pour lui conserver son ti.te et ses fonctions ;
il lui assura aussi la retraite que méritait sa vieillesse : « Le
6 septembre 1480, les chanoines, considérant sa vieillesse,
1 M Quia Mathurinus Rodier magister operis novi fecerat heri operiri reli-
quias pro quodam juramento, attente quod ipse facit of us circa fabricam,
ideo Domini dederunt sibi debitum assuetum. » Conclus, capit. 15 déc. 1456.
' 1479. « Pro Mathurino : hac die XXI« Julii ipsi capitulantes donaverunt
gratis Mathurino contre maistre (sic) ecclesie LX sol. super lucro de Ecclesia.»
Conclus. Capitul.
' 14S0. De coadiutore operis : Hac die IX Januarii, conclusio in ultimo
capitule facta, videlicet q\iod Mathelino Rodier magistro operis ecclesiae da-
retur coadiutor et submagister Johannes Mestre, confirmata luit. » Conclus.
Capitul.
— 148 -
lui accordèrent pour chaque année à venir, 55 livres à pren-
dre sur la bourse de la construction de l'église*.
Mathurin Rodier eut à jouir de sa retraite quelques années
encore ; quant aux fonctions que lui avait continuées le Cha-
pitre, il les avait quittées en 1482. Le 4 août de cette année,
le Chapitre pria « Jean Le Maistre, maître do l'OEuvre, de
dire désormais aux maçons et à leurs aides de commencer et
de finir leur travail aux heures accoutumées, comme le font
les autres maçons, ainsi que leurs aides, qui travaillent soit
au château, soit à l'entreprise de la Ville^ » 11 paraît que, en
ce temps-là, ceux qui travaillaient au compte de l'Eglise en
prenaient plus à leur aise que ceux qui travaillaient au compte
des autres administrations.
De même à la date du 11 février 1485, nous trouvons Jean
le Maistre seul mentionné avec son titre significatif dans
un marché conclu au sujet de deux cents pierres vulgaire-
ment appelées de Saint-Aignan, à prendre dans la carrière
deBolle-Roche. « Le vendeur Etienne Jarron, paroissien de
Saint-Lamberl-des-Levées, près Saumur, doit les faire
amener à Richebourg près du Château, et, avant de les des-
cendre à terre, les faire examiner par Jean le Maistre, maçon,
maitre de la construction de l'église. »
Plusieurs des passages que nous venons de citer ont déjà
été publiés par M. de la Borderie et par M. de la Nicollière à
qui rien n'a échappé des moindres détails de notre histoire.
On pourra cependant constater que ces robustes moisson-
neurs ont traité les pauvres glaneurs qui viendront après
eux, aussi généreusement que le riche et charitable Booz
, 1480, 6 septembre « Domini capitulantes ordinaverunt LV libras pro
stipendiis et diebus suis ipso quolibet anno, in futurum super bursam
operis ecclesie, attenta ejus senectute. » Conclus, capitul.
»« Ordinaverunt... Petro du Leroux... per ipsos Dominos deputato ad
controrolandum operarios dicte ecclesie, et Joh. le Maistre, magistro operis,
ut de cetero ipsi dicant latomis et aliis servitoribus dicte ecclesie, quatenus
ipsi veniant ad laborandum et... recédant horis consuetis, et in die sabbati,
sicut faciunt alii latomi et servitores tam castri quam operis Ville. » Conclus.
Capitul.
— 149 —
traitait Ruth la Moabite : « Vous jetterez exprès des épis de
vos gerbes, disait Booz à ses ouvriers, et vous en laisserez
sur le champ, afin qu'elle puisse les recueillir.' >> C'est pour
que rien ne se perde que nous avons recueilli ces épis dé-
laissés.
Au risque d'étendre encore un sujet déjà trop vaste et de
paraître parler non plus de l'architecte de la cathédrale
mais des ressources avec lesquelles elle a été construite, sujet
qui ne serait pas lui-même sans intérêt, nous nous permet-
trons cependant une remarque et une explication relative-
ment à un passage que nos illustres devanciers ont publié
d'après le registre du chapitre.
Ce passage fait allusion à une règle de la liturgie et à une
coutume très ancienne de l'église de Nantes. L'ignorance de
l'une et de l'autre, bien pardonnable à tous ceux qui ne sont
pas, de par leur condition, versés dans ces matières, serait
inexcusable de notre part. C'est à ce titre que nous osons rec-
tifier la lecture de ce passage tout en en donnant l'explication.
Dans les quelques jours qui précèdent la fête de Noël,
l'Eglise a placé dans ses offices, à Magnificat, de grandes an-
tiennes qui commencent toutes par l'exclamation 0. Pour
cette raison, on les appelle les antiennes 0, et le Chapitre au-
trefois les appelait simplement les 0. Le chantre Elle, chantre
de l'église de Nantes, a donné dans son curieux Ordinaire de
1268 l'ordre dans lequel se chantaient ces antiennes. La pre-
mière, celle du 17 décembre : 0 Sapientia, était réservée à
l'évêque, les autres étaient entonnées par les dignitaires du
Chapitre suivant le rang de leur dignité. C'est ce que les cha-
noines appelaient : « chanter l'O, faire l'O. »
Paire l'O était un grand honneur : mais comme tout hon-
neur se paie, chacun de ceux qui faisaient l'O devait payer
à la cathédrale une somme qui variait suivant les ressources
de l'année. Quelle que fut cette taxe, l'évêque en payait tou-
1 Ruth, II. 16.
— iôO —
jours le double : c'était justice : à tout seigneur, tout honneur.
Le produit de l'O était attribué à telle ou telle œuvre parti-
culière d'après les délibérations des chanoines. En 1485, le
Chapitre qui concentrait toutes ?es ressources pour la cons-
truction de la cathédrale ne pouvait manquer de lui appli-
quer ce produit. C'est là l'objet de la délibération suivante
que Ton comprendra plus facilement.
Le registre porte en marge « pro 0 0 : Pour les 0 0 : >•
voici la traduction du texte : Le xuii novembre, les Seigneurs
tenant chapitre et délibérant sur les 0 à faire, voyant que
l'année avait été mauvaise pour le vin, et considérant d'un
autre côté qu'il fallait trouver beaucoup d'argent pour la fer-
rure des portes, ordonnèrent et délibérèrent que chaque di-
gnitaire paiera 8 livres cette année au procureur de la fa-
brique pour payer ces ferrures et pour les autres besoins de
l'église. Révérend Père en Dieu le seigneur l'Evêque en
paiera 16'. »
Le registre qui mentionne cette délibération porte dans le
texte : pro o o fiendis : le double o o a été pris pour une abré-
vation de eausse et l'on a eu ainsi pro caiisis fieyidis, au lieu
de pro 0 o fiendis.
Nous signalons cette méprise bien excusable, de peur qu'on
se torture l'esprit pour une difficulté qui par ailleurs reste-
rait sans solution. La paléographie offre parfois de si singu-
liers rébus, que le meilleur œdipe, à moins d'être de la partie,
serait embarrassé pour les expliquer.
Revenons maintenante notre bon architecte, maître Mathu-
rin, ou simplement Mathurin, comme on l'appelait souvent
avec une grande familiarité qui suppose de sa part une grande
bonhomie. Nous le trouverons à régler ses dernières volontés
en vue d'une mort qui, à son âge, ne pouvait pas être bien
éloignée.
' En I4b"2 Monseigneur de Nantes pava pour « ses Ooz » XX lirres, et
chaque dignitaire du Chapitre X lirres. En 1454. ces dignitaires furent taxés
a un marc d'argent applicable au clochar: c unam marcham argeoti que ad
campanile applicabitur. » Concl. Capit. l'a dot.
— 151 —
Ses affaires avaient été prospères. Grâce à son activité, il
ne se contentait pas de travailler à la cathédrale. Dans un
vieux compte de Saint-Nicolas, reproduit par Travers, nous
lisons : « Jtem à M' Mathelin, M' masson de Saint-Pierre,
pour la portraiture du devis du portai de Saint-Nichollas en
trois fassons apourtez devant le duc (François I") et pour sa
peine d'avoir été plusieurs fois voir le delTaire du portai
LXXV sols »'.
Mettant son talent au service de l'Etat comme à celui de
l'Eglise, il se distinguait dans l'architecture militaire comme
dans l'architecture religieuse. Les Registres du Chapitre ne
sont pas les seuls à avoir conservé son souvenir ; les Regis-
tres de la Chancellerie de Bretagne, à l'occasion des répara-
tions du château de Nantes, mentionnent aussi en 1473 le nom
de « Mathelin Rodier maistre des œuvres de l'Eglise de
Nantes ».
Une cathédrale et un château sur les bras en même temps !
il y avait de quoi casser les bras à bien d'autres. Mathurin
n'y prenait garde. Il était heureux de voir que le bâtiment
allait. Or, tout le monde le sait, quand le bâtiment va,
tout va.
De sa capacité à bien traiter les grandes affaires, ses con-
temporains ne concluaient pas à son incapacité à en bien
traiter de petites. A ses occupations d'architecte, d'entrepre-
neur, de maçon, il ajoutait les fonctions d'expert. Et, comme
on avait foi non seulement dans l'habileté de son art, mais
encore dans la droiture de son jugement et dans la loyauté de
son caractère, on recourait à son arbitrage plutôt que d'en
venir à de coûteux procès. Une difficulté s'était élevée, à pro-
pos d'une maison, entre le Chapitre de la Collégiale de Notre-
Dame de Nantes et Jehan Bretet, les intéressés choisirent
« Mathurin Rodier et Gefïroy Pasquier pour arbitrateurs ou
aimables compositeurs. » Mathurin adjugea le 18 octobre
1 Travers, Hist. de Nantes, t. i. 558.
— 152 —
1467, à Jehan Bretet, à titre d'indemnité, une rente de 5 sous
que le Chapitre lui paya sans plus de discussion'.
Aussi, à la fin de sa vie, le grand entrepreneur des travaux
de la ville de Nantes n'en était-il pas réduit, comme son pré-
décesseur à exciter la pitié du Chapitre. Il avait une maison
et de nombreuses ressources, et laissait assez pour donner à
l'Eglise une partie de ce qu'il en avait reçu légitimement par
son travail.
Couronnant dignement une vie consacrée à élever à Dieu
un temple qui ne fut pas trop indigne sinon de sa gloire, du
moins de la grandeur de la ville de Nantes, il songea plus
particulièrement aux intérêts de son âme.
Il y avait à la Cathédrale une société formée de six chape-
lains, quatre bacheliers et doux enfants, appelée la société de
Saint-Guillaume. Fondée par Olivier Maugendre, de Saint-Si-
milien, chantre de Nantes et recteur de Saint- Dolay, elle avait
été approuvée par l'évêque Henry le23 j uin 1415'.C'esten faveur
de cette société que Mathurin Rodier prit ses dernières dis-
positions. L'acte qui les renferme se trouve sur parchemin en
double exemplaire dans les archives du Chapitre. Outre le
nom de l'épouse de notre architecte, il nous apprend plusieurs
détails curieux sur les usages du temps. Si sa longueur nous
empêche de le citer tout entier, nous en détacherons du moins
les principaux passages.
LeditMathurin Rodiermac^on,y est-t-ildit, etEdeiinePonset
sa femme, « désirans pourvoir au salut pardurabledes ammes
d'euls etde leurs pères et mères , parens, amys etbienfaiteurs
trespassez, augmenter et accroislrele divin service de Dieu,
nostre Père Créateur, en nostre mère sainte Eglise et par es-
picial en ladite église parroclTlal de Saint-Laurens de Nantes
en laquelle lesdits Rodier et sa dite femme veulent et ordon-
nent dès à présent estre enterrez et en sepulturez quant le
deceix d'euls avendra » fondent dans l'église de Saint-Laurent
1 Archives Départ. H, 317.
' Archives du Chapitre.
- 153 -
un anniversaire au jour de la mort de chacun d'eux. Cet anni-
versaire sera célébré par les chapelains de Stiint-Guillaume.
Ils iront « en une mesme compaignie en manière de procession,
de ladite église de Nantes à ladite église parrochial de Saint-
Laurens y dire vespres et vigilles des mors, o (avec) neuff
leczons ou troys leczons sellon l'occurance des temps à celui
jour, et, le lendemain aller semblablement de ladite église de
Nantes à ladite église dudit lieu de Saint-Laurens et y dire et
célébrer une messe de Requiem o note, faire prière et
commemoracion pour les ammes desdiz Rodier et sa femme
et aultres leurs prédécesseurs et successeurs, o les sufîraiges
y apartenans; et iceuls chapelains aller touzàl'ofîrande et of-
frir à l'autier. à céder au profilt du curé de ladite église chas-
cun ung bon denier monnaie courante, et à la fin d'icelle
messe venir à la tombe des diz Rodier et sa femme, e de cha-
cun, en ladite église dire l'anthoine (l'antienne) de Libéra me
Domine, o les versets et oraisons y apartenans o leurs respons
de Mors.' »
Les chapelains fourniront chaque année six cierges de cire
neuve, chacun d'une livre ; deux pour le grand autel, quatre
pour la tombe « avecques ung drap noir dessus ladicte tomble,
qui serviront esdites vespres et vigilles de mors et ladite
messe de Requiem, dès le commencement jucques à la fin, et
à la fin d'iceulx, les pourront prendre et emporter, chacun an,
sans débat que ledit curé ne ses successeurs y puissent
mectre ; et après leur deceix, chacun an, au jour que chacun
d'eulx décédera, durant ladite messe de Requiem, incontinant
à la fin d'icelle, dire ou faire dire etcélébrer le nombre de doze
messes en contant, outre ladicte messe de Requiejn o note,
dont le curé de ladicte église, son serviteur chapelain et fermier
pourront dire chacun uned'icelles messes, s'ils voyent l'avoir
à faire ; et s'ilz ne les dient, les diz chapellains commectront
d'autres chappellains et serviteurs pour eulx et leurs succes-
seurs, et en feront poiement. »
De plus, ils paieront au recteur de Saint-Laurent cinq sous
— 154 —
de rente à la fin de l'anniversaire pour qu'il leur le laisse faire
et prendre les ornements de l'église.
Les fondateurs assignent 8 liv. de rente par moitié, à Noël
et à la Saint-Jean-Bapliste, sur leur maison, située en Saint-
Laurent entre la maison de Macé Laudron, celle d'Urban
Regnault, le pavé qui conduit de l'église de Saint-Pierre au
Pillory, et par derrière une maison prébendale de l'église de
Nantes.
L'acte est daté du 20 juillet 1484; le document qui le
rapporte, du6 aoûtde la même année. Au dos de l'un des deux
exemplaires on lit en écriture du temps la mention suivante ;
« La fondacion de Mathelin Rodier et Edeline Ponset sa
femme, de VIII livres de rente pour deux anniversaires à
estre faictz au jour de leur decez, dont ladite Edeline deceda
le 'VHP jour de novembre l'an mil 1111^ IIII" et cinq. »
Ces documents nous permettent daffîrmer en toute certitude
que Mathurin Rodier et sa femme voulaient être inhumés
dans l'église de Saint-Laurent leur paroisse, et que cette
volonté, pour cette dernière, a reçu son effet.
A quelle époque mourut Mathurin et sa dernière volonté
fut-elle réellement exécutée? Les registres de la paroisse de
Saint-Laurent ne remontent malheureusement pas à cette
époque, et nous devons renoncer à trouver son acte de décès.
. A la date du 7 novembre 1485, il devait vivre encore, puisqu'il
n'est alors question que de l'anniversaire de sa femme. Son
grand âge ne permet pas de croire qu'il lui ait survécu
pendant longtemps.
Quant à sa sépulture, on a dit qu'elle avait eu lieu sous le
porche de la Cathédrale. Sur quelle donnée s'appuie cette
tradition? à quelle époque remonte-t-elle? Nous l'ignorons. Si
elle ne reposait sur aucun fait incontestable, il semble plus
plausible d'admettre que les dernières volontés de Mathurin et
de sa femme ayant été exécutées pour cette dernière, elles le
furent aussi pour son mari, et que l'un et l'autre furent
inhumés à Saint-Laurent.
— 155 —
Les chapelains de la société de Saint-Gailiaume célébraient
chaque année plusieurs anniversaires à Saint-Laurent. Au
milieu de nombreuses ratures d'une feuille qui contient l'or-
dre des fondations qu'ils desservaient, nous relevons les
mentions suivantes :
« Dominica 3'^ post epiphaniam :
Jeudi, anniversaire à Sainct-Laurens pour un laïc, 8 liv. il s.
Dominica 20^ post pentecosten.
Mardi, anniversaire à Sainct-Laurens pour une famé,
4 liv. 16 s. »
Ce dernier anniversaire fixé au mardi après le vingtième
dimanche de la Pentecôte, semble avoir été celui d'Edeline
Pohset décédée le sept]novembre. L'anniversaire fixé au jeudi
après le troisième dimanche de l'Epiphanie était peut-être
celui de Mathurin Rodier.
Ajoutons que les mêmes chapelains perçurent jusqu'à la
Révolution la rente assignée pour cet anniversaire. En 1696,
elle était réduite de 8 livres à 103 sols deux deniers. Les litres
de cette époque la disent assise sur un logis situé en la paroisse
de Saint-Laurent au haut de la Grande-Rue : logis qui en 1484,
ajoutent-ils, appartenait à Mathurin Rodier et à sa femme, et
depuis à Jan de Lavau et Janne du Val, à présent à Germaine
Verdier veuve de Maurice Guesselin, cause ayant de Louise
Gaurier. Depuis elle passa à Armand, maître tailleur, fermier
de la terre de la Seillerais à Garquefou, qui la tenait en 1730
et en 1745.
Ces indications ne. permettent pas de désigner sûrement
cette maison. Mais qu'importe si l'on ignore le lieu que
Mathurin Rodier habita de son vivant et celui qui reçut son
corps aprèssa mort. Son œuvre qui nous reste nous dit ce qu'il
a été comme architecte, les détails que nous venons de don-
ner sur lui, nous montrent ce qu'il a été comme homme,
comme travailleur et comme chrétien. Nous avons tout-lieu
— 156 -
de croire que les soins qu'il a pris pour le salut « perdurable
de sou âme» ont obtenu plus de succès que ceux qu'il a
pris pour la sépulture de son corps, et qu'il a pénétré dans
le temple auquel il pensait et qu'il entrevoyait dans ses
rêves, lorsqu'il exécutait l'œuvre à laquelle il a laissé son
nom.
Un mot pour terminer. La cathédrale, dans les cinq siècles
qu'a duré sa construction, a eu affaire à bien des architectes.
A Guillaume de Dommarlin, à Mathurin Rodier, à Jean
Maistre, à Jacques Drouet', tous habitants de Nantes ont
succédé de nombreux architectes, de Nantes ou d'ailleurs.
Au point de vue artistique, la cathédrale n'eût rien perdu à
rester toujours entre les mains des premiers. Notre ville, si
riche en toutes sortes de talents, offre un corps d'architectes
si remarquables, que nous n'avons, sous ce rapport, rien à
envier, même à Paris. A d'autres points de vue, la cathé-
drale, le Chapitre y eussent-ils gagnés ? Question toujours
brûlante : il vaut mieux la laisser à traiter aux historiens de
l'avenir. Mais, si nous comprenons bien le langage de roseaux
qui, comme au temps du roi Midas, croissent et murmurent
sur le tombeau de certaines confulences, nous ne pouvons
nous empêcher de regretter que l'achèvement, que l'embellis-
sement de la cathédrale n'ait pas été exclusivement réservé à
des artistes nantais. Avec leur amour pour leur art, avec leur
amour pour leur ville, aucun d'eux n'eût jamais pu être soup-
1 Jacques Drouot semble avoir obtenu, parmi ses cont<^mporains, comme
architecte entrepreneuf, autant de considération que Mathurin Rodier. Chargé
également de la construction de la cathédrale et de celle du Château, il
paraît encore dans plusieurs autres constructions de cette époque. Il avait
remplacé Jean Maistre ou le Maistre dès 150G, et portait le titre de maistre
de l'œuvre du Château de Nantes en 1528. En 1543 et en 1547, la cathédrale
ava^t pour architecte « maître François Moysan. »
— 157 -
çonné de chercher à faire de notre chère cathédrale un bâti-
ment de rapport, et le Chapitre, toujours si zélé pour une
construction qui l'intéresse plus que tout autre, eût été heu-
reux de pouvoir continuer avec tous ses architectes les excel-
lents rapports qu'il entretint pendant quarante ans avec le
bon Malhurin Rodier. G. Druville.
COMMISSION DU DUC DE BEDFORD'
Qui se qualifie duc d'Anjou et comte du Maine pour faire
décider la c/uerelle entre Pierre de Boylesve, chevalier du
parti du roi de France, et le gouverneur anglais de Sainte-
Suzanne, donnée à Paris le VIII avril 1431 .
Le duc de Bedfort et d'Anjou, comte du Maine, de Riche-
mont, de Rendal et de Harcourt.
A vous, messire Jehan de Bueil, chevalier, faisons sçavoir
nous avoir faict veoir deux lettres ouvertes escriptes en nos-
tre nom, les unes le xvii" et les aultres le xxii" jour du mois
de mars dernier passé, et en chacune d'icelles estait placqué
le scel de vos armes. Les premières faisans mencion en effet
que de Sainte-Suzanne ung- chevallier de nostre party nommé
messire Pierre Boylesve, chevallier, que dictes avoir été
prins soubz nostre sauf-conduit par aulcuns de la garnison
dudict lieu et, en enfreignant iceluy et dont procès est meu et
pendant en nostre ville du Mans par davant nos bien amez
messire Richard Gethin, chevalier, et Richard Lucas, écuïer,
bailli du Maine, a esté transporté de nostre juridiction, et
mené à Domfront ; et les secondes faisant mencion en effet
d'un excès et abus que dictes avoir esté faictz et commis à
rencontre de nostre sauf-conduit et au grand grief, préjudice
et dommaige d'un autre chevallier de vostre dict party nommé
' Ce document et le suivant font partie du chartrier de la maison
de Boylesve, en Anjou, aujourd'hui éteinte. Us nous ont été commu-
niqués et lus en séance par M. Joseph Senot de la Londe, neveu du
R. Père de Boylesve, mort en 1892, et possesseur de cet important
chartrier.
- 159 -
messire Jehan de Pontbriand par ung anglais pour lors
maréchal d'Alençon nommé Kirkeby, au regard d'un scellé
que contre bonnes mœurs il a exigé dudit Pontbriand, de
messire Jacques de Dinan chevallier seigneur de Beaumanoir,
de non jamais faire poursuittes des injures, emprisonne-
ment;, griefs et dommaiges audit de Pontbriand faictz et
inferrés par ledict Guillaume de Kirkeby à rencontre de
noslre dit sauf-conduit, et nous requierez et sommez de pro-
vision convenables sur les deux faicts.
Surquoi nous vous signifions que nos sauf conduits
vouldrions garder et loïalement entretenir, et ceulx de l'o-
béissance de monsieur le Roy et de nous qui les enfraindraient
vigoureusement punir sans quelque dissimulation ne faintize,
et de ce soyez certain. Et à ceste fin au regard dudict messire
Pierre Boylesve et pour sa délivrance ou au moing qu'il soy
promptement mis etrendu en notre dicte ville du Mans, es
mains des dicts juges pour illec partys oyez estre à droict
comme il appartient. Escrivons présentement et mandons très
expressément à nostre amé et féal le sire d Escalles^ gouver-
neur depar nous de nos pays d'Anjou et du Maine etcappitaine
desdicts lieux de Sainte-Suzanne et de Domfront, et ce
signifions à nos amés et féaux les gens de nostre conseil
estans audict lieu du Mans, affin qu'ils en fassent diligence
à la conservation de notre honneur. Et au regard du faict
du dict messire Jehan de Pontbriant, nous escrivons pré-
sentement vostre faict et complainte à nostre bien amé
Thomas Gower escuyer notre lieutenant à Alençon, et lui
mandons très expressément que inquisicion sur ce par luy
faicte de la matière, il face par ledict Guillaume de Kirkeby
rendre et restituer audict de Pontbriant le scellé dudit
Jacques de Dinan exigé au faict de la promesse de la non
poursuitte dont dessus est faicte mention ; et au cas que ce
faire ledict Kirkeby soit refusant ou délaïant, qu'il le mette
réalement et de faict en arrest et le dict scellé preigne et
mette en nostre main en assignant pour certain et compectant
- i60 —
audict Guillaume Kirkeby destre et comparoir soubz caution
suffisante par devant nous ou nos amés et féaulx chancelier
et genz de nostre conseil. Lequel jour face semblablemént
sçavoir audict messire Jehan de Ponlbriaut en cerliffiant de
tout son exploit nous ou nos dictz chancelier et gens de
nostre conseil pour au surplus être fait, procédé, apoincté et
ordonné par la manière qu'il appartiendra par raison. Sy
tenons que par les dits seigneurs d'Escalles et Thomas Gower
sera tellement faict et procédé chacun en son regard que par
raison vous et les dils deux cehvaliers en debvrez être contans
et n'aurez cause de vous vouloir de nous.
Donné à Paris soulz le contre scel du scel de nos armes, le
quatrième jour d'avril après Pasques, l'an de grâce mil quattre
cent trente et ung. Ainsi signé par Monseigneur Le Duc à la
relacion du grand conseil, Dhosay.
L'original représenté par Monsieur Marin de Boylesve,
écuyer, seigneur de la Maurouzière, conseiller du roy, lieu-
tenant-général d'Anjou, conservateur des privilèges royaulx
de l'université d'Angers.
Scellé en placquart des armes de France et d'Angleterre
et ung cercle de paille dessus.
«- 161 —
UN COMBAT EW CHAMP CLOS
AU XV'' SIECLE
Procès-verbal et jugement du Conseil du roi d'Angleterre en
faveur de niessire Pierre de Boylesve [6 août 1431).
Comme des pièçà messire Pierre Boylesve, chevalier, s'était
rendu plaignant à nous et aux gens de nostre conseil que
ayant esté prisonnier, arreslé sous nosire sauf-cnnduit où
était placqué le scel de nos armes par le jeune sire d'Escalles
capitaine de Sainte-Suzanne et de Domfront, et que pour rai-
son du bris, nous avons ordonnné que le plaignant et le
déffendant seront mins et rendus par devant nostre féal
escuier messire Richard Lucas, bailly du Maine pour faire
enquête et justice audit messire Pierre Boylesve pour sa déli-
vrance; et y allant avait ledit messire Pierre été robbé de
notre second scellé par ledit sire D'Escalles lequel avait dénié
et envoyé son gaige de bataille audit messire Pierre, qui
l'avait levé en déffaut d'autre preuve pourveu que le voulis-
sions tenir sous notre sauf-conduit, parcequ'il n'est du party
de monsieur le Roy ; pourquoi sçavoir facsons que nos sauf
conduits voulons garder loïaument, sans dissimulation et
feintize à notre honneur et pouvoir, avons ordonné que les
parties viendront ensemblément et affirmeront sur saints
Evangiles ; et après le dit D'Escalles a mins la main sur saints
Evangiles, et dit qu'il avait droit d'avoir appelé le dit messire
Pierre pour son honneur réparer, et juré sur sa foy et balême
que il n'a sur luy ne sur son cheval pierres, paroles, Chartres,
brevets ne nulle chouse où il ait espérance, qu'ils lui puis-
sent aider à grever son ennemi, fors son corps, son cheval et
ses armes, et que le dit messire Pierre a juré semblablement
11
— 162 —
que le dit sire Descalles lui a robbé ses sauf conduits et
contre iceux l'avait arrêté pour rançon en avoir ; et quand
ils ont fait le serment tantôt chacun en son rang, ayant
monté à cheval, le soleil parly par entre eux, et se joigni-
rent en leurs targes, ayant mins leurs glaives à l'arrest,
esperonnèrent les chevaux et adressèrent l'un sur l'autre
au plus droict qu'ils purent, et se ferrèrent si durement
que ledit messire Pierre Boylesve frappa ledit D'Escalles
par telle puissance et vertu qu'il luy perça le cœur et le
corps tout outre, dont il chûst tout mort sur le champ. Et
a esté le dit D'Escalles vaincu, en assurance de quoy avons
fait délivrer ces présentes scellées des armes de Monsieur le
Roy, audit messire Pierre, lequel avons envoyé absous et
mins sa personne en délivrance, et en la protection de
Monsieur le Roy, sans que aucun des nôtres le puissent
enfreindre ;
Donné en la ville du Mans le sixième jour d'août après
Pâ jues, l'an d<! grâce mil qualtre cent trente un, signé sur le
reply par Monseigneur lé Duc dans son Conseil, auquel vous
Messieurs les G'imtes de SufToIck, di; S.ilisberry, messire Jean
Talbot, Robert de Willanmgljy, Ambroise de Loré, Jean de
Bueil, Geoffroy de la Grézille chevalier, et Richard Lucas,
écuyer bailly du Maine, étiez. Signé : St Offange et scellé sur
lacs de soie rouge et jaune aux armes de France et d'An-
gleterre esquartelées.
r »
UNE QUESTION DE PRESEANCE
POUR LA PROCESSION
DE LA
FÊTE-DIEU A NANTES
AU XVIIIe SIÈCLE
DOCUMENT INEDIT
M Colombel ^maire de Nantes en I SUH ,esprit sincèrement libéral,
déclarait, au sujet de la procession de la Fête-Dieu, qu'il ne voyait
aucun motif sérieux d'interdire une cérémonie qui constituait,
à bien dire, la seule fête vraiment populaire que le passé eût
léguée aux Nantais.
Juste quarante ans plus tard, l'Administrrtfion municipale de
notre ville était renversée pour son refus systématique de rétablir
cette solennité ; et depuis lors personne n'a songé à supprimer une
fête qui transforme nos rues en voies triomphales et met un peu
de joie au cœur des plus déshérités.
C'est dire que toute pièce qui se rattache à ce point de notre
histoire locale contient une parcelle d'intérêt ; c'est justifier la pu-
blication d'un document qui sommeillait dans mes carions.
Il nous révèle quelques détails probablement inédits, car ils ne
se trouvent ni dans la description remarquable de Mellinef\ ni
1 La Commune et la Milice de Kanfes, V. liS-lag.
- 164 —
dans la curieuse brochure de noire regretté compatriote M. du
Sel des MontsK
Au surplus, ce document offre un croquis assez divertissant de
cette lutte sempiternelle des préséances qui, née avec Vorgueil de
Lucifer, ne s'éteindra, en dépit du rêve fou de légalité parfaite,
qu'avec le dernier fonctionnaire
G. iW .
i La Fêle-Dieu. Etude d'histoire religieuse d'après des documents ori-
ginaux, Nantes, Grimaud, 1889.
MÉMOIRE
DE M. L'ÉVÊQUE DE NANTES
AU SUJET
De la marche de sa Juridiction des Reguaires à la
Procession de la Fête de Dieu.
' MÉMOIRE
Pour Messire Pierre Mauclerc de laMuzanchère, Conseiller
du Roi, Èvêque de Nantes.
Contre M. le Procureur général de la Chambre des Comptes
de Bretagne^
En requête, lettre de commission et assignation des 9 et 15
janvier 1754.
Messieurs de la Chambre des Comptes ont appelé en la
Cour M. de la Muzanchère pour faire décider avec lui la
contestation qu'ils avaient formée à M. de Sanzay son
prédécesseur et qui n'ofîre d'autre question à juger que de
savoir s'ils sont en droit de renverser l'usage de plusieurs
siècles où sont les évoques de Nantes d'être suivis aux
processions générales par les officiers de leur juridiction des
reguaires, portant à la main des torches avec les panonceaux
des armes de l'évêque.
On verra prouvé que cet usage est de toute antiquité, qu'il
subsistait dès le temps que la Chambre des Comptes fut fixée à
Nantes, qu'il a subsisté sous ses yeux pendant deux cents ans
sans trouble et sans obstacle, qu'il a même été reconnu par
MM. de la Chambre des Comptes, qui dans leur première atta
que, née en 1725, ne s'opposaient qu'à la marche du greffie
— 166 —
des reguaires et déclaraient ne point contester celle des trois
juges et du procureur fiscal, la reconnaissant fondée sur la
possession la plus ancienne et la plus constante.
Quand ces preuves seront rapprochées du langage qu'ils
tiennent aujourd'hui, la surprise doit être grande de le voir
annoncer ce droit antique, cette possession plus qu'immé-
moriale, comme une nouvelle entreprise des derniers évêques
de Nantes et Von sera peut-être plus étonné encore de ce qu'il
leur soit tombé dans l'esprit de soupçonner quelque préséance
honorifique dans un devoir qui se remplit avec des siqjies
manifestes de domesticité, ancien vestige de la qualité de
commensaux, commune autrefois à tous les officiers des
évêques.
Fait
Quoique la Chambre des Comptes soit fixée à Nantes depuis
1495, il paraît qu'avant 1600 elle ne marchait point en corps
aux processions delà Fête-Dieu. Plusieurs de ses membres y
assistaientsuivantleurdévotion particulière, maistoutelaCom-
pagnie ne s'en fit un devoir que sur la fin du XVI* siècle. Elle
y trouva deux usages établis, l'un pour les juges présidiaux
qui y tenaient la première place parmi les corps laïques, l'autre
pour les officiers des reguaires qui depuis leur création y
marchaient dans la même place et dans la même forme qu'ils
y marchent aujourd'hui. Elle s'opposa à l'un de ces usages et
ne songea point à contredire l'autre; elle fit décider au
Conseil du Roi que les juges présidiaux ne marcheraient
qu'après elle; mais, à l'égard des officiers des reguaires qui
ne suivaient le Saint-Sacrement qu'en portant des torches
avec les panonceaux aux armes de l'évêque, la Chambre ne
vit point en eux ce qu'elle a cru y voir plus de cent ans après ;
trop judicieuse pour imaginer que leur marche ainsi
caractérisée eût un air de préséance, persuadée qu'elle n'avait
ni motif ni intérêt d'en prendre aucun ombrage, elle respecta
cette ancienne coutume, elle l'a respectée pendant cent vingt-
— 167 —
cinq ans, et lorsqu'en 1725 elle entreprit pour la première
fois delà combattre, son entreprise se borna à vouloir exclure
le greffier des reguaires, en déclarant nettement qu'elle n'en-
tendait point au reste troubler l'ordre et l'usage à l'égard des
juges et procureur fiscal.
Il n'y a pas un seul de ces faits dont on ne soit en état de
donner des preuves; les uns sont écrits dans les anciens
registres du chapitre de la cathédrale de Nantes, les autres
sont constatés par des mémoires du propre fait de MM. de
la Chambre des Comptes.
En 1601, temps auquel ils commencèrent à vouloir marcher
en corps aux processions de la Fête-Dieu, ils eurent un
préalable à remplir qui fut de faire régler le rang qu'ils y
tiendraient; ils plaidèrent au Conseil du Roi contre le Pré-
sidial de Nantes, et, dans le cours de l'instance, les juges
présidiaux requirent que le Chapitre de Nantes eût attesté
l'usage qui s'était jusqu'alors observé; le Chapitre attesta que
de tout temps MM. de la Chambre n'étaient point dans l'usage
de marcher en corps aux processions de la Fête-Dieu, qiiod
ab oimii œvo domiyii Camerœ computorum noji consiieverunt
incedere in commiini et in corpore in die solemni proccssionis
generalis sanctissimi et augiistissimi Sacrametiti Corporis
Chris ti.
Ce témoignage donné le 6 mai 1601 se trouve rapporté dans
le registre capitulaire du même temps ; il fut produit au
Conseil du Roi et suivi d'un arrêt rendu le 17 août 1601, par
lequel Sa Majesté ordonna que les officiers de la Chambre des
Comptes précéderaient en corps ceux du Présidial de Nantes,
en toutes assemblées générales, même en la procession du
Sacre.
Ces expressions même en la processioji dn Sacre annoncent
que le Conseil du Roi en réglant ces droits décidait une
contestation qui ne faisait que de naître et qui n'avait pu être
plus tôt agitée ni décidée, parce que jusqu'alors MM. de la
Chambre des Comptes n'avaient point marché en corps aux
— 168 —
processions de la Féte-Diea ainsi que le certifiait le Chapitre
de la Cathédrale de Nantes.
Mais dès à présent on conçoit que s'ils avaient envisagé la
marche et la place des officiers des regiiaires comme un rang
qui donnait atteinte à la supériorité de leur prérogative, ils
n'eussent pas manqué d'en parler dans le même temps, ils
eussent dès 1601 demandé au Conseil du Roi contre les juges
des reguaires ce qu'ils demandèrent contre les juges pré-
sidiaux; c'était là le moment de faire décider le tout par le
même arrêt, puisqu'il s'agissait d'établir en leur faveur un
ordre immémorial pour la première fois qu'ils marcheraient
en procession et pour toujours à l'avenir. '
Cependant ils ne firent qu'acquiescer à l'ancienne possession
de l'évêque et des officiers de sa juridiction; leur silence et
leur présence en devinrent l'approbation la plus authentique.
Ce fut l'année suivante, le 6 juin 1602, jour de la Fête-Dieu,
qu'on vit pour la première fois la Cl-jambre des Comptes
marcher en corps à la procession. Cette édifiante nouveauté
était rem.arquable, elle rendait la cérémonie plus nombreuse
et plus solennelle, elle changeait la marche des juges pré-
sidiaux ^circonstance assez considérable pour mériter d'être
transmise dans les archives des Compagnies). Le Chapitre de
la Cathédrale de Nantes en rapporta sur ses registres un
procès-verbal qui offre un tableau exact de l'ordre observé
lors et depuis cette époque. En voici l'extrait :
Ex die veneris septimâ junii 1 602.
Die Jovis, in festo sacratissimi Corporis Christi, totis ordo
servatus fuit in processione generali.
R. D. Episcopiis fer ébat Sacramentiim.
Qiiator presbyteri cum fascibus accensis, iJisignitis armis
ecclesiœ, duo ante precedebant et duo sequebantur a tergo,
postea officiarii reguliuni, senpscalus, proiirœfectus et procii-
ralor fiscalis cum fascibus ardentibus insigiiitis armis /?. D.
Episcopi.
Insuper domini computorum ciim suis officiariis in corpore
incedebaîit.
— 169 —
On voit là tout aussi clairement que si l'on avait été présent
à cette procession de 1602 quelle fut d'un consentement
unanime la marche de l'évêque, des officiers, des reguaires
et de la Chambre des Comptes ;
D'abord l'évêque portant le Saint-Sacrement ;
Avec lui quatre prêtres, deux devant et deux derrière, qui
portaient des torches revêtues des armes de l'église cathé-
drale ; ensuite les juges des reguaires, portant des torches
avec les panonceaux aux armes de l'évêque, officiarii regu-
liiim cum fascibus ardentibiis insignitis armis H. D. e/tiscopi.
Et puis MM. de la Chambre des Comptes avec leurs offi-
ciers, insuper domini computonan cum suis officiariis.
Le même procès-verbal ajoute qu'ils occupèrent par leur
grand nombre toutes les stalles des deux côlés du chœur de
l'église cathédrale, quoiqu'il n'y eût que celles du côlé gauche
qui leur fussent destinées' quibus iii chorum introeuntibus
' Sur ce point il n'est peut-être pas sans intérêt de reproduire deux pièces
qui doivent être tort peu connues. Voici la première :
Arrest du Grand Conseil portant homologation des actes et délibérations
capitulaires des 2 et 4 juin 1632 du Chapitre de Véplise de Saint-
Pierre de Nantes au sujet Jei places que la Chambre doit occuper dans
le chœur de ladite égide lorsqu'elle assistera en corps aux cérémonies
publiques.
Du 30 sept-^mbre 1670.
Extrait des registres du Conseil privé du Roy.
Sur la requête présentée au Roy en son Conseil par Ir^ procureur général
de la Chymbre des Comptes de Bretagne, conien-int que pour ôt. r tout sujet
de contestations qui arrivent aux processions générales et cérémonies publi-
ques, le sieur Evêque de Nantes et les l'oy^n, Chanoines Chapitre de l'église
cathédrale de Saint-Pierre de la dite ville, conjointement avec les olficiers de
ladite Chambre des Comptes, seront réglés pour les places que les uns et les
autres doivent tenir et occuper dans le chœur de ladite église cathédrale de
Saint-Pierre, lorsque ladite Chambre des Comptes marche et assiste en corps
auxd. cérémonies publiques ; il en a été arrêté deux actes de délibérations
capitulais s en plein Chapitre, lesquels ont toiijours été gard'^s et observés
jiisqu'ft présent; et pour y donner plus d'autorité le suppliant en requérait
l'hoiiiologation au Conspil de S. M. afin de les faire plus religieusement
observer Veu ladite re^uêtrt signée du Kr. stie. lesdils actes cappulaires des
2 et 4 juin I63i et autres pièces atlachi^es à lad. requête ; ouï le rapport du
sieur Le Jay, conseiller du Roy en ses conseils, m::ître des requêtes ordinaire
en son hôtel, commissaire à ce député ; tout considéré. Le Roy bs son Conseil,
— 170 -
Reverenrlo Domino Episcopo missam celeôrante, pro sedibus
siniatri lateris catliedrœ assif/natss swit, ipsi tainen cum honore
gratias agentes, qnia in magno numéro vénérant, cathedras
omnes îitriitsque lateris occiipariint tam siiperiore^ quam infe-
riores.
L'année 1615 fut aussi la première époque' de lusage où
ils ont été depuis de porter le poîle- aux processions de la
ayant égard à. lad. requête, a homologué et homologue lesd. deux actes de
délit) 'rations cajiilubiires, ordonné qu'ils seront {tardés et oHservés ainsi
qu'il a toujours été fait, avec déf-^nse d'y contrevenir. Fy»iT au Conseil privé
du Roy, t-'nu à S iint-(<ermain-en-I.ayt^, le 3^ ' jf^ur d« sej tembre 1670. Signé
par coilationne La. Guillaumie, Au 2 liv noir, fol. 72.
0BSKrt.V.\T10N
Il semble que les actes capilulaires mentionnés en cet arre<^t auraient dû
être attachés sous le contre-scel de cet arrest et enregistrés à la Chambre,
mais ne l'ayant point été nous n^avons pu les insérer en cet endroit ;
ainsi nous dirons seulement que la Chambre est en usage depuis Vannée
1632 d'occuper toutes les stalles ou chaires de la cathédrale, tant hautes que
ba ses. le jour de la fêle- Pieu, lorsqu'elle se rend en Céglise de Saint-
Pierre pour marcher à la procession, à l'exception de trois, sçavoir : celles
du Doyen du Chapitre et des deux Archidiacres, tant d'un côté que de
l'autre.
Voici la seconde pièce ;
EXTRAIT Dis RUGISTRES DE LA CHAMBRK DKS COMPTES DE BRETAGNE
du 31 janvier 1722.
Le procureur général du Roy, entré au Bureau, a remontré que
La Chambre, semestres assemblés, laisant droit sur la remontrance du pro-
cureur général du Roy, a ordonné pt orlonne que ordonne aux huis-
siers de marcher à la tète de la Compagnie, tous les jours d'entrée, lorsqu'elle
va à la mpsse aux Cordeliers et jusqu'à ce qu'elle en soit sortie ; en outre,
ordonne qu'à tour et rang un d'iceux se tiendra sur le banc de la Chambre
à l'église cathédrale de Saint-Pierre, es jours de sermon, pendant l'Avent, le
Carême et granle-j Fêtes de l'année, pour empêcher que personne n'occupe
les places de messieurs de ladite Chambre, et à peine de l'amende de cent sols
pour chacun des délinquants.
Cette dernière disposition, à l'égard du banc dans Véglise de Saint-
Pierre a été révocquée par arrêt rendu, semestres assemblés, sur la requête
des huissiers, le 26 mars 1722.
' La Cour des Comptes obtint du C apitre (1615) le privilège, jusque-là
réservé aux prêtres, de porter le dais. » (Uu sel des monts : La tête-Dieu,
p. 20).
* Poêle : Dais portatif soutenu de colonnes qui consiste en un ciel et des
pentes, sous lequel on met le Saint-Sacrement quand on le porte par les rues.
On invite des gens de qualité à porter le poêle le jour de la Fête-Dieu.
(Trévoux : Dictionnaire universel, T. VI).
— 171 —
Fête-Dieu, et c'est ce qui se trouve également rapporté par
les registres du Chapitre de la cathédrale: « Jeudy. 18 de
juin 1615, jour du Sacre, la procession du Saint-Sacrement
s'rst faite à Saint-Nicohis avec les honneurs et cér-émonies
accoutumés. Messieurs de la Chambre des Comptes ont porté
pour la première fois le poîle, sçavoir six Maîtres. »
Cette relation fait voir que le Chapitre était extrêmement
attentif à faire note de tout ce qui arrivait de nouveau dans
Tordre des processions; ici il remarque la nouvelle forme de
porterie poîle et i! ajoute au surplus que la procession s'était
faite avec les honneurs et cérémonies accoutumés ; ce qui
démontre que l'ordre et la marche décrits dans le procès-
verbal du 7 juin 1602 n'avaient souffert aucun changement ;
que Messieurs de la Chambre ne s'étaient donc point avisés
de trouver mauvais que les officiers des reguaires suivissent
immédiatement le Saint-Sacrement, en portant des torches
garnies de panonceaux aux armes de l'évêque.
Cet usfige, loin d'être troublé ni interrompu dans la suite,
se conserva si entier, si constant, si notoire, qu'il fut plus de
50 ans après certifié, reconnu, confirmé par des actes solen-
nels formés sous les yeux de la Chambre, et sans aucune
contrariété de sa part.
Car en 16S3, M. de Beauveau, évêque de Nantes, l'employa
dans sa déclaration qu'il fournit au Domaine ; il y déclara
être en droit et possession immémoriale de faire marcher
processionnellement tous ses olficiers laïques et greffiers
vêtus de leurs robes et bonnets quarrés immédiatement avec
lui ; sa déclaration en ce point ne fut ni contredite, ni impu-
nie* ; elle fut vérifiée et jugée par le doyen de la Chambre
des Comptes qui, à l'exception de quelques articles étrangers
à celui dont il s'agit, confirma l'évêque dans tous les droits
qu'elle contenait, conséquemment dans le droit d'être suivi
' Impunissements. On appelle ainsi en Bretagne ce qu'on nomme blâmes
dans les autres coutumes en matières féodales, (la curne de sainte-pala.ye :
Dictionnaire historique de l'ancien langage français.)
— 172 —
aux processions par les officiers de sa juridiction des reguai-
res.
Et, en 1686, le même droit, le même usage étaient attestés
au Conseil du Roy par le corps entier de l'Université de
Nantes qui y plaidait à son tour pour faire régler sa marche
et son rang aux processions publiques. On lit dans le vu de
l'arrêt qui intervint le 5 mai 1686 cette reconnaissance très
positive : « Les officiers du seigneur évêque l'accompagnent
et la Chambre des Comptes a coutume de suivre. » C'est
ainsi que, depuis 1495, temps de l'établissement fixe de la
Cliambre des Comptes à Nantes, et même depuis 1602
qu'elle commença de marcher en corps aux processions, elle
avait vu sans aucun nuage pendant le cours de deux siècles
entiers les officiers des reguaires suivre immédiatement leur
évêque : témoin dans tous les temps de cet usage, elle l'avait
trouvé établi, elle l'avait vp continuer, elle l'avait suivi, et
plus de deux cents ans s'étaient écoulés dans cet état tran-
quille avant qu'elle eût pensé d'y causer le moindre trouble.
Mais parce que dans les dernières années de M. de
Beauveau ses infirmités ne lui avaient pas permis d'assister
aux processions, que M. de Tressan, son successeur, ne
résida point à Nantes pendant les six ans de son épiscopat,
et qye les officirrs des reguaires bien éloignés de regarder
comme un droit honorifique pour eux l'obligafion où ils sont
de porter des torches et des armoieries avaient profité de ces
conjonctures pour ne point marcher quand l'évêque ne
marchait pas ; de là, MM. de la Chambre des Comptes voyant
l'ancien usage discontinué pendant douze à quinze ans
seulement le prétendirent anéanti et s'opposèrent à ce qu'il^
fût repris par M. de Sanzay.
Leur première opposition est comme on l'a dit en 1725;
ils la formèrent au moment même que l'évêque portait entre
ses mains nos Mystères augustes et redoutables; la procession
en fut arrêtée, le peuple s'en scandalisa, l'évêque en gémit et
se pressa d'ordonner à ses olficiers de se retirer; c'était tout
- 173 —
ce qu'il pouvait faire pour abréger le scandale. Il écrivit à
M. le Garde des Sceaux qui demanda l'avis de M. de Brou,
Commissaire départi en Bretagne, devant lequel on fournit
de part et d'autre des mémoires.
C'est dans ces mémoires qu'il est appris de la bouche même
de MM. de la Chambre des Comptes que la contestation
qu'ils formaient alors ne ressemble point à celle qu'ils sou-
tiennent aujourd'hui ; il n'est pas possible de s'y méprendre
à la vue de la requête présentée à M. de Brou par M. de
Sanzay et des réponses qu'y fit la Chambre.
D'un côté, M de Sanzay soutenait être généralement en droit
de faire marcher après lui tous ses officiers des reguaires sans
exception ; il se fondait sur l'ancienne possession des évêques
de Nantes, sur la déclaration fournie au Domaine en 1683,
sur la sentence de réformation rendue le 6 mars de la même
année par un doyen de la Chambre des Comptes, sur la
reconnaissance faite au Conseil du Roy lors de l'arrêt de 1686
rendu avec l'Université de Nantes, enfin sur les circonstances
qui accompagnent la marche des officiers des reguaires et qui
en éloignent toute idée de préséance honorifique .
D'un autre côté, MM. de la Chambre des Comptes recon-
naissaient bien pour la marche des juges et procureur fiscal
des reguaires le droit des évoques de Nantes et leur ancienne
possession ; ils n'en voulaient qu'à la marche du greffier et
ils s'en expliquaient si clairement qu'il suffit de copier leurs
expressions pour mettre cette vérité dans tout son jour, ils
donnaient ce titre a leur mémoire : Réponse des officiers de
la Chambre des Comptes aux prétentions de M. lévêque de
Nantes touchant la marche des officiers des reguaires à la
procession de la Fête-Dieu. Et puis ils commençaient en ces
termes ; « La Chambre ne conteste point aux officiers des
reguaires de Nantes l'usage et la possession de marcher à la
procession du Saint-Sacrement au nombre de quatre, qui sont
le sénéchal, l'alloué, le lieutenant et le procureur fiscal, ayant,
chacun à la main une torche de cire blanche où sont attachés
— 174 —
les panonceaux de ses armes en gros volume ; mais comme
elle n'avait point vu que le greffier de ladite juridiction y
eût marché, elle fut surprise de voir à la procession de
l'année 1725 que cetolficierse fût présenté pour marcher avec
les autres contre l'usage, ce qui obligea la Compagnie de lui
envoyer dire par un de ses huissiers de se retirer, ce que
n'ayant voulu faire, elle députa deux officiers à M. l'évêque
de Nantes pour lui donner avis de cette innovation, afin qu'il
donnât sur cela les ordres nécessaires pour éviter le scandale
et à Vmstaiil il leur ordoima de se retirer tous. »
On n'a la vérité qu'une copie non signée du mémoire dans
lequel MM. de la Chambre s'exprimaient ainsi, mais on n'a
garde de soupçonner qu'ils veuillent disconvenir qu'elle est
exactement conforme à l'original dont ils sont saisis; et
d'ailleurs la preuve du même fait, c'est-à-dire la preuve qu'ils
réduisaient leur unique contestation à la marche du greffier
des reguaires, se trouve dans l'arrêt qui intervint au Conseil
du Roy le 8 mars 1727 d'après l'éclaircissement des droits
respectifs devant M. de Brou.
Leur demande et ses motifs sont expliqués dans le pré-
ambules de ccl arrêt : il est dit que l'évoque de Nantes ne
peut aux proct'ssions du Saint-Sacrement et de l'Assomption
se fajre accompagner par lus officiers de ^a juridiction des
reguaires avec leur- greffier parce que cela marquerait un
corps de juridiction qui aurait le pas devant une Cour
supérieure.
D'oii il est évident qu'ils avaient établi leurs prétentions
au Conseil du Roy dans les termes de leur mémoire fourni
devant M. de Brou, ne s'opposant qu'à la marche du
greffier des reguaires, supposé qu'avec celle des juges elle
semblait former un corps de juridiction et déclarant au reste
très expressément ne point contester aux sénéchal, alloué,
lieutenant et procureur fiscal l'usage de marcher à la pro-
cession du Saint-Sacrement dans la place qu'ils y tiennent de
tous les temps, ayant chacun à la main une torche de cire
— 175 —
blanche où sont attachés les panonceaux des armes de l'évêque.
Il est donc bien éclairci que la marche du greffier des
reguaires fut le seul point contesté par la Chambre, jugé au
Conseil du Roy par arrêt du 8 mars 1727 et décidé en faveur
de l'évêque en ces termes :
« Sa Majesté a ordonné et ordonne que la sentence des
sieurs commissaires nommés pour la confection du papier
terrier et réformation des domaines de la province de Bre-
tagne du 6 mars 1683, rendue sur la déclaration à eux fournie
par le feu sieur de Beauveau évêque de Nantes, sera exécutée
selon sa forme et teneur; en conséquence que ledit sieur
Turpin Crissé de Sanzay, évêque de Nantes, ne pourra être
troublé par lesdits officiers de la Chambre des Comptes dans
la possession où il est de se faire accompagner de tous ses
officiers et greffiers de sa juridiction des reguaires, marchant
immédiatement après lui avec les panonceaux de ses armes ;
décision terminée par deux motifs :
« 1° Par l'ancienne possession commune au greffier des
reguaires comuie aux autres officiers de sa juridiction. —
2° Par la sentence de réformation du 6 mars 1683, confirma-
tive des droits référés dans la déclarution de M. de Beauveau,
du nombre desquels est positivement expliqué le droit de
faire marcher immédiatement avec lui les greffiers de sa
juridiction de même que ses autres officiers laïijues. »
Il est vrai qu'on lit à la fin du même arrêt : « Sauf aux
officiers de la Chambre des Comptes à interjeter appel de
ladite sentence au Parlement de Rennes, s'ils le jugent à
propos, pour être sur icelui et sur les demandes et défenses
desdites parties statué par ladite Cour ainsi qu'il appar-
tiendra. » C'était leur laisser une voie de recommencer la
procédure contre l'évêque de Nantes, et ils n'ont pas manqué
de la suivre. Dès 1727 ils relevèrent appel en la Cour de la
sentence de réformation du 6 mars 1683 ; ils ont suivi cet
appel jusqu'en 1730 et puis ils en ont interrompu les suites
jusqu'en 1754 qu'ils ont fait assigner M. de la Muzanchère en
reprise du procès.
— 170 —
Leur appel et leur nouvelle procédure ne doivent naturelle-
ment avoir d'autre objet que la môme contestation qu'ils
avaient fait naître en 1725, c'est-à-dire le seul point de savoir
si la marche du greffier des reguaires peut leur causer plus
d'ombrage que celle des juges et procureur fiscal dont on vient
de voir qu'ils reconnaissaient si formellement le droit et la
possession. Mais ils semblent avoir perdu de vue cette re-
connaissance: ce n'est plus contre le seul greffier des reguai-
res, c'est contre tous les officiers de la juridiction qu'ils pren-
nent les conclusions les plus étendues tendant à ce que,
réformant la sentence de 1683, l'évêque de Nantes soit plei-
nemenldébouté du droit énoncé dans ladéclaration fournieau
Domaine par M. de Beauveau, avec défense à lui ainsi qu'aux
officiers de ses juridictions d'en user à. l'avenir de quelque
manière que ce soit au préjudice de la Chambre des Comptes.
Ils n'ont conclu à rien moins par leur écrit du 28 juillet 1738
et il y persistent dans leur dernier mémoire sans réfléchir sur
l'étonnante contradiction dans laquelle ils tombent avec eux-
mêmes.
M. l'évêque de Nantes réduit ses défenses à trois moyens.
Il soutient :
1' Que MM. de la Chambre sont non recevables dans leurs
demandes.
2*» Qu'ils plaident sans objet et sans intérêt.
3" Que les principes les plus puissants en cette matière s'é-
lèvent contre leur contestation.
PREMIER MOYEN
Messieurs de la Chambres des Comptes sont non recevables
dans leurs demandes.
L'espace de 44 ans écoulés depuis la sentence de 1683 jus-
qu'à l'appel relevé en 1727, la qualité du commissaire réfor-
mateur (M. de Bellestre Henry, doyen de la Chambre des
Comptes) qui la rendit, le dépôt de cette sentence et ^e la
déclaration de M. de Beauveau au greffe de la Chambre, ces
— 177 —
circonstances ne sont pas les seules qui rendent les appelants
non recevables dans leurs demandes ; la fin de non-recevoir
qu'on leur oppose tire sa propre force de leur propre recon-
naissance et de la longue possession qu'ils ont vue continuer
sans murmure, qu'ils ont suivie sans obstacle, à laquelle ils
ont pleinement acquiescé pendant plus d'un siècle.
Il n'est plus possible de craindre que la vérité de ces faits soit
susceptible d'une contestation sérieuse après la preuve qu'on
en a donnée : il est de la dernière certitude que le premier mo-
ment qui vit Messieurs de la Chambre des Comptes détermi-
nés à marcher en corps à la procession de la Fête-Dieu les
vit approuver la marche et la place des officiers des reguaires
portantdes torchesavec les panonceaux aux armes de l'évêque,
immédiatement après le Saint-Sacrement.
Ce premier moment remonte à 1601^ et c'est en s'y trans-
portant qu'il faut les considérer.
D'abord occupés à faire régler le rang qu'ils tiendraient à
la procession, persuadés eux-mêmes qu'il n'y avait d'autre
changement à faire dans l'ordre observé jusqu'alors que d'o-
bliger la Compagnie du Présidial à se reculer pour leur céder
la première place, ne formant en conséquence que cette seule
demande au Conseil du Roy, ne trouvant rien à redire aux
officiers des reguaires qui marchaient dans la même place et
de la mênie sorte depuis la coutume établie de porterie Saint-
Sacrement en procession (dans leXIV° siècle.)'
Venus pour la première fois en corps assister à celle de
1602, y voyant sous leurs yeux les officiers des reguaires mar-
cher à la suite de l'évêque cwm /a5C^■ô^^5 ardentibus insignitis
armis R. D. episcopi, et n'imaginant pas qu'ils eussent lieu
* Suivant M. du Sel des Monts, Daniel, érêque de Nantes, bien qu'ayant
assisté au fameux concile de Vienne (1312) où la procession de la Fête-Dieu
fut rendue obligatoire pour toute la Catholicité, ne s'occupa point de faire
exécuter ce décret dans son diocèse; pendant un siècle et demi chaque
paroisse célébra la fête du Saint-Sacrement en son particulier et sans céré-
monie extérieure, c« n'est qu'à la fin du XV- siècle que nos chroniques
locales mentionnent la procession du Sacre.
12
— 18 —
de s'offenser de ne mai-cher qu'après eux: insuper domini
co7npiitornm cum suis officiariis iii corpore incedebant.
Peut-on à ces premiers traits méconnaître Tacquiescement
le plus formel de MM. de la Chambre des comptes à l'usage
où était l'évoque, usage dès lors ancien, de se faire accompa-
gner par les officiers de sa juridiction.
Considérant ensuite que depuis 1602 jusqu'en 1725 ils ne
s'étaient pas plaints une seule fois du même usage, quoiqu'ils
l'aient vu toujours le môme, toujours subsistant et attesté
dans les actes les plus authentiques, dans la déclaration four-
nie au Domaine en 1683, revue, vérifiée et jugée par leur do-
yen, et dans l'arrêt du Conseil de 1686 rendu avec l'Univer-
sité de Nantes. Peut-on révoquer en doute que leur consente-
ment ainsi renouvelé tous les ans pendant le cours de cent
vingt-cinq ans, dont il n'y a à retrancher que les douze ou
quinze années des infirmités de M de Beauveau et de la non-
résidence de M. de Tressan, n'a été rien moins qu'un consen-
tement public, donné dans la forme la plus notoire et répété
cent fois. Et puis quand on joint à ce consentement de fait et
de la plus grande publicité ce consentement qu'ils ont, en 1725,
donné par écrit devant M. de Brou et au Conseil du Roy :
« La Chambre ne conteste point aux officiei's des reguaires de
Nantes l'usage et la possession de inarcher à la procession du
Saint-Sacrement au nombre de quatre qui sont le sénéchal,
V alloué, le lieutenant et le procureur fiscal, ayant chacun à
la main une torche de cire blanche où sont attachés les panon-
ceaux de ses armes en gros volume-, malgré tout cela, suppose-
ra-t-on qu'ils n'en sont pas moins recevables aujourd' hui à
demander contre l'évoque de Nantes un déboutement plein
et entier du droit référé dans sa déclaration de 1683 et qu'il
lui soit fait défense d'en user à l'avenir, de quelque manière
que ce soit ?
Pour admettre cette supposition il faudrait commencer par
en faire plusieurs autres. Il faudrait supposer que la Cour aura
la volonté et le pouvoir d'accorder à MM. de la Chambre des
— 179 —
Comptes plus qu'ils n'ont prétendu eux-mêmes; supposer
qu'elle envisagera leur acquiescement multiplié comme des
actes indifférents quoiqu'en général il n'y ait point d'actes plus
efficaces à opposer aux prétentions des parties : supposer en-
core que la Cour méconnaîtra en leur faveur les principes du
droit commun qui imposent à toutes personnes de quelque
rang- qu'elles puissent être la nécessité de vouloir perpétuelle-
ment ce qu'elles ont voulu librement et publiquement pen-
dant plus d'un siècle, principes plus inviolables en matière
de pure cérémonie qu'en tout autre cas.
On sent combien ces propositions sont révoltantes, et ce-
pendant sans elles les demandes de MM. de la Chambre des
Comptes sont sans appui ; ils ne peuvent pas se dissimuler
que, du moins dans l'étendue qu'ils y donnent, ils sont évi-
demment contraires à eux-mêmes ; ils ne persuaderont à per-
sonne qu'ils aient ignoré la sentence de 1683 rendue par leur
doyen et déposée dans leur greffe avec la déclaration de la
même année ; ils sont au contraire convaincus par ces faits
d'en avoir eu la plus parfaite connaissance ; ils ne peuvent
plus aussi contester honnêtement d'avoir exécuté cette sen-
tence depuis qu'elle est rendue comme auparavant ; ils sen-
teront au moins que leur contestation serait trop choquante
à l'égard des juges et du procureur fiscal des reguaires, dès
qu'ils voudront bien se i^appeler l'aveu qu'ils faisaient en
1725 de l'usage et de la possession de ces officiers.
L'arrêt de 1727 leur laissa bien la faculté d'interjeter appel,
mais il ne décida point que cet appel fût recevable ; il con-
serva à l'évêque de Nantes ses droits et ses défenses en leur
entier ; il ne jugea pas que MM. de la Chambre des Comptes
pussent prétendre au Parlement ce qu'ils n'avaient pas pré-
tendu au Conseil du Roy, il ne présupposa en aucune façon
qu'ils pussent parvenir à faire réformer une sentence à
laquelle ils ont acquiescé pendant plus de quarante ans. Cet
arrêt ne peut donc pas mettre le moindre obstacle à la fin de
non-recevoir qui naît et de leur acquiescement et de leur pro-
— 180 —
pre reconnaissance et de leur consentement répétés chaque
année pendant la durée de plus d'un siècle.
DEUXIÈME MOYEN
Messieurs de la Chambre plaident sans objet et sans
intérêt.
Toute la dissertation faite pour prouver qu'il y a dans
l'ordre public des distinctions et des honneurs attachés aux
dignités qui ne peuvent jamais être usurpés par l'inférieur
contre les supérieurs est un étalage perdu dans une cause où
il ne s'agit nullement d'un combat de préséances. Quoique la
juridiction des reguaires soumise à la seule autorité du Par-
lement ne soit point subordonnée à la Chambre des Comptes,
l'évêque de Nantes n'a jamais prétendu que l'on pût disputer
à l'autre aucun attribut honorifique, et ce n'est point là du
tout la question.
Qu'il soit donc certain que MM. de la Chambre des Comptes
doivent avoir au vis-à-vis des officiers des reguaires, en tous
temps, en tous lieux, en public, en particulier, les prérogati-
ves dues aux corps et aux membres des Compagnies supé-
rieures, on ne le conteste pas ; mais s'ils les ont en effet quel
peut être l'objet de leurs plaintes, c'est là le vrai point à
examiner.
Il n'y a peut-être pas de jour ni de moment où la différence
soit plus sensible et annonce davantage la prééminence de la
Chambre sur les autres corps laïques de la ville de Nantes
qu'aux processions publiques ; c'est là que les signes les plus
manifestes caractérisent et publient cette différence.
!• La Chambre, en habits de cérémonie qui la distinguent,
marche avec un grand nombre d'huissiers qui la précèdent.
Les officiers des reguaires ne sont précédés ni suivis d'au-
cun huissier de leur tribunal, ce qui fait voir que dans le
moment ils ne sont point en corps de juridiction.
2* Quelle comparaison peut être entre la marche pompeuse
de MM. de la Chambre des Comptes, portant en main des
— 181 —
branches d'oranger, et l'humble contenance des officiers des
reguaires, portant des torches de cire revêtues de panonceaux
aux armes de l'évêque? ces torches, ces panonceaux, ces
armoiries n'effacent-ils pas jusqu'à l'ombre d'aucune sorte de
préséance dans la marche et la position de ces officiers.
3" Messieurs de la Chambre occupent des stalles dans le
chœur de la cathédrale au départ et au retour du Saint-Sacre-
ment.
Les officiers des reguaires sont hors du chœur, confondus
avec les autres membres de la procession ; ils ne reprennent
leur place qu'à la suite du dais, et dans cette place ils ne se
trouvent marcher avant la Chambre que parce que le dais
marche avant elle.
4* Aux reposoirs et dans les églises où la procession entre,
MM. de la Chambre des Comptes ne fléchissent le genou que
sur des carreaux qui leur sont préparés.
Les officiers des reguaires n'ont d'autres appui que leurs
torches de cire revêtues de panonceaux.
Ces signes de différence ne suffisent-ils point à manifester
la supériorité, le rang distingué, la prééminence de MM. de la
Chambre ? Un habitant du Nouveau-Monde qui sans rien
savoir de nos mœurs et de nos usages assisterait pour la
première fois à la procession pourrait-il s'y méprendre? Et
quand il est ainsi démontré que la Chambre des Comptes jouit
de tous les honneurs et marques de distinction dus à sa dignité
cette conséquence n'est-elle pas évidente que la Chambre
plaide donc sans objet et sans intérêt.
S'il s'agissait de nouvelles attributions, il serait juste de s'y
opposer et de soutenir que les juges n'ont plus de droit de
commensalitéS ni l'évêque celui de faire marcher ses com-
mensaux dans les cérémonies publiques ; mais il s'agit d'un
1 Les commensaux avaient la préséance dans les cérémonies sur tous les
officiers, même royaux, et autres personnes dont l'état était inférieur à celui
des commensaux (Saint- Alais : Dictionnaire encyclopédique de la Noblesse
de France, t. i, p. 178 )
— 182 —
usage très ancien, qui s'est introduit naturellement à raison
de la dignité de l'évêque et qui, par la manière dont il est
pratiqué, est évidemment un reste do domesticité.
Cet usage est-il vicieux et fait-il préjudice à qui que ce soit?
1^ Cent consentements répétés de MM. de la Chambre des
Comptes déposent en sa faveur et Us ne Pont pas eux-mêmes
trouvé vicieux ; ils l'ont, au contraire, ti'ès expressément
approuvé pendant plus d'un siècle et ce sera toujours là con-
tre eux l'argument le plus décisif.
2° Il n'y a pas d'apparence à y soupçonner de vice pour peu
qu'on en recherche l'origine. Personne n'ignore qu'originai-
rement les seigneurs rendaient eux-mêmes la justice à leurs
vassaux ou la leur faisaient rendre par les officiers de leur
Maison ; le premier et le principal de ces officiers était le
sénéchal qui avait la surintendance de la maison : « Senes-
calliis, dit du Cange, offtcialis in aiilis regum vel procerum
atque adeo etiam privatorwn, cui domih cura incumbebat ; »
et c'était lui aussi qui rendait la justice : « Senescalloriim
denique erat jus reddere. » D'où il est arrivé dans la suite
que, lorsqu'on a créé des juges en titre, le premier de chaque
siège a communément retenu le nom de sénéchal, qualité qui
rappelle ses premières fonctions, et de là on conçoit sans
peine comment s'est établi l'usage dont il s'agit : il était natu-
'rel que l'évêque se fît accompagner des principaux officiers
de sa maison ; s'ils cessèrent d'être ses commensaux pour se
consacrer aux seules fonctions de la justice, ils en conservè-
rent Tancieu titre, et à ce titre ils continuèrent de le suivre
aux processions, y portant des armoiries attachées à des
torches comme une marque de l'ancienne commensalité,
3" Cet usage ne fait préjudice à qui que ce soit dès qu'il ne
désigne ni préséance, ni le moindre attribut honorifique. Si
on remontait à l'ancien temps, on verrait des évêques de
Nantes jouir de plusieurs droits infiniment plus considéra-
bles, du consentement des Ducs et de toute la nation, tels par
exemple, que le droit d'être, à leur entrée dans la ville, portés
_ 183 —
par quatre barons ; et, loin de trouver nulle part que la
Chambre des Comptes leur contesta aucune de leurs préroga-
tives, on la verrait se faire honneur de les voir à sa tête,
comme y fut Guillaume Gueguen, Premier Président de cette
Chambre et évêque de Nantes.
Mais, c'est par des vues de religion qu'on doit principale-
ment considérer l'ordre des processions tel qu'il subsiste à
Nantes depuis plusieurs sièles, et cette considération n'auto-
risera pas MM. de la Chambre à le troubler. On a vu qu'il y a
plus de cent ans que leur établissement à Nantes était fixe et
permanent avant qu'ils eussent marché en corps aux proces-
sions de la Fête-Dieu ; il dépendait d'eux de passer des siècles
encore sans y assister, car on sait que l'assistance des Com-
pagnies supérieures n'est de nécessité qu'à la procession de
l'Assomption ordonnée par Louis XIII en 1638, qu'elle n'est
aux autres que pieuse coutume et pure dévotion. Or, pour
remplir un acte de piété volontaire, personne n'est en droit de
renverser les anciens usages qu'il trouve établis, surtout des
usages qui ne tendent qu'à inspirer de la vénération pour le
premier ministre de ces augustes cérémonies. Il n'eût donc
pas convenu que MM. de la Chambre des Comptes venant
enl602pour lapremière fois à la procession delaPête-Dieuse
fussentélevés contre lacoutumeoùils trouvèrent l'évêque de se
faire suivre par les officiers de sa juridiction des reguaires ; ils
ne s'y opposèrent point aussi, et la preuve la plus invincible
que cette coutume continua de leur propre consentement c'est
la confession qu'ils en firent eux-mêmes en 1725 par rapportaux
juges et procureur fiscal. Toujours témoins queces officiers ne
marchaient à la suite de l'évêque qu'en portant des torches,
des panonceaux, des armoiries, toujours persuadés que cela
n'a pas la plus faible lueur d'attribut honorifique, ils avaient
toujours senti que leur contestation serait sans objet et sans
intérêt. Par quel aveuglement la même vérité si longtemps
reconnue a-t-elle cessé de leur faire la même impression ? Ils
n'ignorent pas la disposition de l'édit de 1695 : « Voulons, dit
— 184 -
le législateur dans Tarticle 45, que les évoques soient mainte-
nus dans tous les droits, honneurs, rang, séance, avantages,
dont ils ont joui ou dû jouir jusqu'à présent, et que même les
laïques dont on est obligé de se servir en certains lieux pour
aider au service divin y reçoivent pendant ce temps les hon-
neurs de l'Eglise préférablement à tous les autres laïques. »
Les évoques de Nantes ont joui dans tous les temps du
droit de faire marcher après eux leurs officiers des reguaires ;
ils y doivent donc être maintenus, ils n'en peuvent- être dé-
pouillés sans une contravention ouverte à l'édit de 1695.
On peut dire aussi que les laïques qui portent des torches
à la suite du Saint-Sacrement aident au service divin, et consé-
quemment, quand même leur place aurait un air honorifique,
ils doivent la conserver, parce qu'alors ils doivent participer
aux honneurs de l'Eglise, préférablement à tous autres laïques
suivant la même disposition de l'édit de 1695. Mais il en faut
toujours revenir à ce point décisif ; la marche des officiers des
reguaires ne ressent en rien l'honorifique ni la préséance, elle
n'en a pas plus d'apparence que n'en a la marche du porte-
crosse. Il est donc évident encore une fois que MM. de la
Chambre des Comptes plaident sans objet ni intérêt.
TROISIÈME MOYEN
Leur contestation est combattue par les principes les plus
puissants en cette matière.
Après les preuves qu'on apporte de la possession des évê-
ques de Nantes, il semble inutile de répondre en détail au
système fondé sur la supposition qu'ils n'en ont aucune. On
est persuadé qu'à la vue de ces preuves, MM. de la Chambre des
Comptes seront eux-mêmes surpris d'avoir porté l'inattention
au point de nier des faits qui se trouvent vérifiés par leur pro-
pre reconnaissance et par les témoignages publics du chapitre
de la Cathédrale et de l'Université de Nantes^ témoignages an-
ciens et respectables, les uns consignés en des registres d'un
temps non suspect, les autres rendus dans le premier tribunal
— 185 -
du Royaume. On ne se bornera donc qu'à faire voir que le droit
contesté n'a pas besoin d'un titre spécial pour se soutenir
dans son intégrité et que le plus fort de tous les titres est la
longue possession qu'en a consacrée l'usage.
L'édit de 1681 porta à la vérité que la preuve des droits
prétendus pour fondations d'église, prééminences, juridic-
tions et autres droits seigneuriaux et féodaux, se fera par ti-
tres, documents et actes par écrit, mais il ne s'agit ici ni de
fondation ni de juridiction, ni de droits seigneuriaux et féo-
daux. Cet édit est donc ici sans aucune application.
Les Bénédictins de Rennes se font accompagner à la proces-
sion de la Fête-Dieu par les officiers de leur juridiction de
Saint-Mélaine, et cependant on ne croit pas qu'ils ayent aucun
titre par écrit qui fasse mention de ce droit, ni qu'ils en ayent
même fait article dans les déclarations qu'ils ont fournies au
Domaine ; mais ils ont la possession qui vaut mieux que tous
les titres, et l'on ne serait pas écouté si l'on prétendait les y
troubler.
En vain dit-on que la marche des officiers de Saint-Mélaine
ne fait pas perdre au Parlement le premier rang qu'il occupe
et qu'il ne souffrirait pas que les juges de M. f évêque de
Rennes marchassent de la même manière que le font ceux de
M. l'évêque de Nantes ; car on convient bien que si M.
l'évêque de Rennes voulait introduire cet usage, dans la pos-
session duquel il n'est point et n'a jamais été, le Parlement
ne le souffrirait pas parce que ce serait une nouveauté et qu'on
ne doit point tolérer les innovations ; mais on est en même
temps persuadé que, si M. l'évêque de Rennes était en pos-
session immémoriale d'un pareil usage, le Parlement ne le
troublerait pas dans cette possession et ne penserait point du
tout ni perdre par là le premier rang, ni que les juges des
reguaires eussent la préséance.
D'ailleurs le clergé séculier, qui voit les officiers de Saint-
Mélaine marcher dans un rang plus honorable en apparence,
ne s'en plaindrait-il point s'il n'était convenu que cette obli-
— 186 —
gation où ils sont d'accompagner les Bénédictins aux pro-
cessions n'est point pour les juges une marque de distinction
et que la possession immémoriale fournirait aux Bénédictins
une raison invincible pour se maintenir dans leur usage. C'est
du reste une erreur de soutenir que les abbayes régulières
doivent avoir le pas aux processions publiques sur le clergé
séculier : ce n'a jamais été qu'aux Abbés chefs d'Ordre qu'on
a accordé la préséance et à eux personnellement sans qu'elle
se communique à leurs religieux.
Ainsi l'argument tiré de l'exemple des juges de Saint-
Mélaine subsiste dans toute sa force. Cet exemple prouve que
l'usage contesté à M. l'évoque de Nantes n'a rien de fort
extraordinaire et que la possession immémoriale, quoique sans
titres, suffit dans ces matières plus que dans toutes les autres.
La maxime est si certaine que nos livres sont remplis d'arrêts
rendus sur des questions de préséance, par lesquels il paraît
que les Cours souveraines ont toujours pris pour motifs de
décider la possession et l'usage, conformément à la doctrine
de Balde sur le chapitre : « Cum olim est de consiietudine
possessio, dit le jurisconsulte, assignat loca standi et sedendi
qiiœ non debent interverti aiit posterari. » Sans recourir à des
autorités étrangères, les auteurs de la province nous offrent
plusieurs arrêts de ce Parlement qui ont confirmé la même
maxime : « Au regard des anciennes coutumes, dit Sauvageau,
qui concernent les cérémonies, rang, processions et autres
droits qui ne blessent point la religion, elles sont autorisées
par les constitutions canoniques, et quand ces anciennes
coutumes ont été contestées dans les tribunaux séculiers elles
y ont été autorisées. >> Il rapporte un arrêt du mois de février
1694, par lequel la Cour confirma une sentence des présidiaux
de Nantes qui maintenait les recteurs de Mézanger d'aller
processionnellement chaque année le jour de Saint- Bar-
thélémy avec leurs prêtres et leurs paroissiens célébrer la
grand'messe dans la paroisse de Pouillé : ils n'étaient point
curés primitifs de cette paroisse, ils n'y avaient aucun droit,
— 187 —
ils n'avaient aucun titre, et leur possession était contraire au
droit commun ; elle fut cependant suffisante pour les main-
tenir dans cet usage malgré les oppositions du recteur de
Fouillé.
Jl est aussi contre le droit commun que les moines portent
le Saint-Sacrement d'une église paroissiale le jour de la Fête-
Dieu à l'exclusion du recteur, et cependant la Cour a maintenu
par plusieurs arrêts les religieux de Ghâteaubriant, confor-
mément à leur possession, dans le droit de porter le Saint-
Sacrement et de précéder le recteur.
L'évêque de Castres s'est fait maintenir par arrêt du Con-
seil d'Etat à marcher en procession après le poêle et à avoir
avec lui, outre les ecclésiastiques qui l'accompagnent, deux
domestiques pour porter les choses nécessaires à son ser-
vice. La même décision avait été rendue par arrêt du 4 jan-
vier 1629 en faveur de l'archevêque de Toulouse. On pourrait
citer une infinité de cas semblables oij les coutumes ancien-
nes l'ont emporté sur le droit commun, mais personne ne
révoque en doute la force des anciens usages dans ces sortes
de matières ; tout le monde s'accorde à penser qu'il est injuste
de vouloir innover ce que nos pères ont approuvé, que c'est
pour ainsi dire faire injure à ceux dont nous devons nous
faire une loi de suivre les exemples. De là l'autorité de cette
maxime que la possession immémoriale est plus puissante
que les titres ; elle est le fondement le plus solide de la tran-
quillité de l'Eglise et de l'Etat, ce qu'il y a de plus inébranlable
ne subsiste que par elle, sans elle tout devient incertain et il
n'y a pas d'établissement sacré ou profane qui ne puisse être
renversé. « C'est en sa faveur dit un savant jurisconsulte,
qu'on doit tout supposer, tout suppléer. » En sorte que si on
peut imaginer plusieurs causes qui y aient donné lieu, les
unes justes et favorables, les autres injustes et odieuses, il
faut attribuer aux premières et rien aux autres. En un mot,
on doit dire à bien plus juste titre d'une possession de plu-
sieurs siècles ce que les lois disentde la possession de quarante
— 188 —
ans, qu'elle est la patronne du genre humain ; et si la possession,
lacoutumeancienne, sert de loi dans les matières de préséance,
à plus forte raison doit-on s'y soumettre dans une espèce où
il ne s'agit pas de maintenir les officiers des reguaires dans
une préséance sur la Chambre des Comptes, mais seulement
de confirmer l'usage dans lequel les évêques de Nantes ont
toujours été de faire marcher après eux les officiers des re-
guaires aux processions de la Fête-Dieu, usage tellement
modifié et caractérisé par des torches, des panonceaux, des
armoiries, qu'il y a une chimère inconcevable à y supposer
de l'honorifique.
Enfin, pour forcer MM. de la Chambre des Comptes à con-
venir de l'injustice de leurs contestations, ne devrait-il pas
suffire de les rappeler à eux-mêmes, à cette époque de 1601,
temps auquel ils n'attaquèrent au conseil du Roy que le
Présidial de Nantes, à l'année suivante 1602, où ils commen-
cèrent pour la première fois à marcher en corps à la proces-
sion de la Fête-Dieu et de ce moment commencèrent par leur
présence à approuver la marche des officiers des reguaires,
et ce long cours de plus de cent vingt ans écoulés depuis 1602
jusqu'en 1725 pendant lequel ils ont vu annuellement le même
usage et ne l'ont pas contesté, de leur propre reconnaissance
de la possession des juges et procureur fiscal faite par écrit
en 1725 et 1726 devant M. de Brou et au Conseil de S. M.,
possession toujours commune au greffier comme à ces autres
officiers des reguaires.
Il faut ajouter encore que cette possession de plus cent ans
sans aucun trouble n'était que la suite de la coutume dès
lors observée depuis deux cents ans, c'est-à-dire depuis l'usage
des processions de la Fête-Dieu, et observée du consentement
des juges présidiaux qui, dans l'absence de la Chambre des
Comptes, eussent eu le même intérêt de la combattre si elle
avait pu l'être efficacement.
Tout cela étant démontré, il n'y a pas sans doute lieu de
— 189 —
craindre que la condition des évêques de Nantes puisse être
ciiangée après tant de siècles.
Le défendeur persiste aux fins et conclusions qu'il a prises
au procès avec dépens.
Signé :
Le Chapellier, M. Chef du Bois Sonnet,
Avocat. Procureur.
M. DE Marnières de Guer,
Rapporteur.
Grande Chambre.
')î»nîî<'
TABLE DES MATIÈRES
Liste des membres de la Société archéologique de Nantes et de
la Loire-Inférieure. Bureau. .... 5
Comité central . ....... 6
Membres titulaires . 7
Membres correspondants 17
Membres honoraires 20
Sociétés correspondantes 21
Extraits des procès-verbaux des séances, par MM. le baron
DE WiSMES et le vicomte de Kervenoaël 24
Les rochers de Kramaguen près Guérande, par M. Henri
QUILGARS 41
Le menhir de la Pierre-Blanche, commune de Saint-Lyphard,
par M. Henri Quilgars 46
Les biens de l'église de Nantes et la charte de Louis le Gros,
par M. E. Orieux 49
Les anciens fiefs de Nantes, du X* siècle à la Révolution, par
M. l'abbé G. Durville. ... 106
Un architecte de cathédrale au XV* siècle, Mathurin Rodier,
maistre maczon de l'église de Nantes, par M. l'abbé
G. Durville 137
Commission du duc de Bedford, par M. J. Senot de la Londe. 158
Une question de préséance pour la procession de la Fête-Dieu
à Nantes au XVIII* siècle, document inédit, mis au jour et
annoté, par M. le baron Gaétan de Wismes 163
GRAVURES
Carte du diocèse de Nantes : Biens de l'Église aux temps méro-
vingiens et carolingiens 49
Vannes. — Imp. Làfolte, 2, place des Lices.
SOCIÉTÉ ARCHEOLOGIQUE
DE NANTES
BULLETIN
Di; LA
/ /
SOCIETE ARCHEOLOGIQUE
DE NANTES
ET DU DÉPAKTEIIKINT DE LA L()II{E-1NFÊHIKIJIIE
TOME TRENTE-NEUVIÈME
Anxkk 189S
DEUXIÈME SEMESTRE
NANTES
BUREAUX DE LA SOCIÉTÉ AHCHÉOLOGTQUE
1898
LE GENERAL
DE LA
PAROISSE DK BATZ
1732-1738
C'est seulement de nos jours que des savants cherchent
l'histoire de nos paroisses dans les registres des délibérations
prises par le général, et il me semble qu'il n'y a pas de docu-
ments plus convenables pour nous faire connaître la vie
communale de nos ayeux, dont nous ne savions pas encore
grand'chose il y a un demi-siècle. Les généraux de paroisse
fonctionnaient depuis fort longtemps lorsque la tenue d'un
registre de leurs délibérations fut rendue obligatoire par un
édit du Parlement de Bretagne du 11 mars 1689.
M. l'abbé Glenet, curé du Groisic, ayant mis très obligeam-
ment à ma disposition celui du général de la paroisse de Batz,
qui embrasse le temps compris entre le 26 décembre 1732 et
le 26 décembre d738, j'ai pensé qu'il pouvait y avoir quelque
intérêt à en présenter un résumé à la Société Archéologique.
Le livre a 200 pages in-folio et il est paraphé à chaque feuillet.
Les trois communes actuelles du Groisic, de Batz et du
Pouliguen, ne formaient, avant 1763, qu'une seule paroisse
sous le nom de Batz et elle était administrée par deux Con-
seils élus qui étaient :
1° La communauté de ville du Groisic et de la paroisse de
Batz. — Ce Gonseil avait dans ses attributions les ports du
Groisic et du Pouliguen, la réparation des quais, le curage
des chambres, l'entretien du château et la nomination du
13
— 19i —
miscur chargé des receltes et des dépenses de la communaulé.
Il était nommé par les bourgeois et manants représentant la
plus saine et la meilleure partie des habitants de la paroisse ;
il avait son maire et son procureur syndic et il él-ait présidé
par le capitaine du château. Aux réunions de la communauté
assistaient : le gouverneur de la ville pour le roi, trois gen-
tilshommes demeurant dans la ville, les anciens maires et
procureurs syndics ; les premiers marguilliers, les anciens
administrateurs de l'Hôtel-Dieu, le capitaine et le lieutenant
de la milice bourgeoise. La présence de douze délibérants au
moins était nécessaire pour permettre à la réunion de pren-
dre des décisions.'
2* Le r/énéral de la paroisse de Batz. — Nous allons parler
dans cet essai de l'administration de ce Conseil.
Le nom de général de la paroisse s'appliquait à l'ensemble
des habitants notables, aussi bien qu'aux membres du Conseil
réunis en assemblée. Les réunions comprenaient générale-
ment une vingtaine de membres. Nous indiquons dans le
tableau ci-après la qualité des membres présents pour six
des plus importantes réunions tenues de 1732 à 1738. Après
le nom et la qualité de ces membres, le registre porte quel-
quefois cette mention : et autres ou plusieurs autres bour-
geois ; ce que le tableau marque ici par la lettre x.
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COMPOSITION
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1737 .
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1
^
»*
20
' Histoire du Croisic, par M . Caillo .
— 195 —
On voit que les anciens margailliurs étaient toujours nom-
breux dans ces réunions.
Le général faisait administrer les affaires de la paroisse par
deux margailliers. Ces deux membres, dits marguilliers en
charge, géraient ces affaires suivant l'usage ordinaire et
conformément à la décision du général : ils s'occupaient des
travaux et réparations à faire aux églises, au presbytère et
au cimetière ; ils réglaient les places des prêtres de chœur,
souvent vacantes, et donnaient leur avis sur les messes de
fondation ; ils acceptaient les dons, les rentes en nature ou
en argent ; ils louaient les biens fonciers et plaçaient l'argent
en rentes ; ils représentaient la paroisse lorsqu'elle avait des
procès. Ils assistaient à toutes les réunions du général et
commençaient par en exposer l'objet. Ils étaient renouvelés
tous les deux ans, le 26 décembre, lendemain de Noël.
Pendant ces six années, de 1732 à 1738, les délibérations du
général furent toujours prises de la même manière et la no-
mination des deux marguilliers se fit régulièrement de deux
ans en deux ans et comme suit: La convocation du général
était annoncée, au son de la cloche, dans les églises de Batz et
du Groisic, le dimanche qui précédait le jour de la réunion, et
elle était renouvelée ce jour-là même ; les membres s'assem-
blaient, tour à tour, dans la sacristie de ces deux églises.
Au début de la séance, les deux marguilliers exposaient que
les deux années de leur charge allaient expirer et qu'il y avait
lieu de nommer, suivant l'usage, deux nouveaux marguilliers,
pour deux ans également ; ils priaient le général de délibérer
et de croiser sur les listes qui leur étaient soumises. Le pre-
mier marguillier dressait, sur le registre des délibérations,
une première liste de quatre ou cinq noms sous le titre de :
« Liste de Messieurs les Bourgeois de la ville du Groisic pour
« l'un d'eux être premier marguillier. « Le second marguillier
en dressait une seconde à la suite sous le titre de : « Liste de
« Messieurs les Bourgeois et habitants du Pouliguen et des
« champs de Batz pour l'un deux être second maguillier ».■
— 100 —
Chaque nom occupait une ligne et il était écrit au commen-
cement.
Les deux listes étant dressées, chacun des assistants venait
tracer un trait vertical sur la ligne horizontale, à la suite du
nom de son choix. C'est ce qu'on appelait croiser. Le général
proclamait aussitôt les résultats du scrutin. Les marguilliers
entraient en charge six jours plus tard, le !•' janvier.
Le général ne délibérait jamais sans être en nombre suffi-
sant. Quoique cela ne soit point exprimé, il me semble qu'il
fallait douze membres au moins pour permettre à l'assemblée
de prendre une décision. Dans les quatre nominations de
marguilliers efTectuées de 1732 à 1738, j'ai relevé 21, 16 et 15
volants. Lorsqu'il arrivait que la réunion n'était pas assez
nombreuse, le général refusait de délibérer et le premier
marguillier faisait des réserves sur les dommages qui pou-
vaient en résulter pour la paroisse. Il en fut ainsi pour un
certain nombre de séances ordinaires. Tous les membres
présents n'avaient pas voix délibérative ; il s'agit probablement
de ceux qui sont désignés par : et atttres bourgeois, et qui
faisaient partie du général tout entier.
Le registre des délibérations commence par un inventaire
des actes, titres et renseignements concernant le temporel des
églises de Saint-Guénolé-de-Batz et de Notre-Uame-de-Pitié
du Croisic. Au mois de juillet 1731, le général avait chargé
les deux marguilliers en fonctions de dresser ce document
conjointement avec deux anciens directeurs de l'hôtel-Dieu du
Croisic. L'inventaire fut fait en présence du recteur de Batz et
Croisic, avec l'assistance du notaire royal de Guérande, et il est
inscrit tout au long en tête du registre où il occupe une ving-
taine de pages in-folio. Le premier acte mentionné est de
1513. Voici le résumé des biens, provenant de dons et d'ac-
quisitions, qui y sont inscrits.
1° 158 œillets de marais salants, représentant environ 12
hectares, situés dans l'île de Batz et la paroisse de Guérande;
— 197 —
2" 166 livres de rentes sur maisons, terre et jardins;
3" 72 livres, 4 sous, 5 deniers de rentes, franchissables par
1300 livres de capital ;
4" 2800 livres pour placer en rentes ;
On y trouve en outre :
• 3 sillons de terre évalués 20 livres ;
1 maison rue des Gordiers ;
1/3 de logis et jardin ;
1 jardin pour qu'il soit dit deux messes ;
58 sillons de pré : à ce sujet, les marguilliers étaient tenus
de faire dire et chanter, par deux enfants, un salut et trois ave
maria, et de donner à ces enfants 18 livres par an de 6 mois
en 6 mois.
Les capitaux provenant de dons ou de ventes devaient être,
sans trop de retard, placés en rente par les marguilliers.
A cet effet, ceux-ci annonçaient par publications, le mon-
tant de la somme à placer, les conditions du placement et le
jour de réception des demandes. Au jour indiqué, ils ad-
mettaient la demande de celui qui présentait les offres
les plus avantageuses ou les meilleures garanties. S'il ne
se présentait personne ou si les demandeurs n'offraient pas
des garanties suffisantes, le premier marguillier, autorisé
par l'Assemblée, faisait le placement aux péril et fortune du
général, par grosses parts, autant que possible, et à des per-
sonnes solvables fournissant caution.
Parmi les actes inventoriés, « une délibération du général
« des habitants de la paroisse de Batz, du 13 juin 1675, » porte,
en autres choses « que le sacm^e de Saint-Guénolé de Batz
« envoiera les ornements et statues d'argent au Groisic, à la
« manière accoutumée, toutes et quantes fois il en sera besoin,
« fau^e de quoi il sera destitué et mis un autre à sa place. »
Nous voyons, dans un autre de ces actes, qu'il y avait un
vicaire perpétuel de Batz et Groisic et un prieur de la paroisse :
le premier nommé par l'abbé de Landevenec, dont dépendait
le prieuré de Batz, le second par la cour de Rome. Les intéres-
— 198 — "^i
ses ne s'entendaient pas toujours sur leurs droits respectifs
et il y eut, à ce sujet, un procès qui commença en 1647 et se
termina le 13 mai 1650 en aveur du prieur de la paroisse. En
1695, une sentence du présidial de Nantes fut favorable au vi-
caire perpétuel ; mais en 1696, un arrêt de lacour annula lasen-
tence et maintint le recteur quitenait sa nomination de Rome.
Le pape nommait , alors aux cures de Bretagne pendant
huit mois de chaque année ; les quatre ^autres mois apparte-
naient à l'évoque. Lorsque la nomination était à l'alternative,
chaque partie avait six mois : janvier appartenait au pape,
février à l'évoque, et à suivre alternativement. Le pape renonça
à son droit en 1740.
Nous allons maintenant passer en revue le registre des
délibérations.
Le 26 décembre 1732, les deux nouveaux marguilliers furent
donc nommés parle général réuni dans la sacristie de l'église
de Batz. L'assemblée comprenait dix-sept membres, qui sont
nommés et désignés sur le registre, et plusieurs autres bour-
geois sans indication de noms ni de nombre. 11 y eut21 votants,
à chaque scrutin, le premier marguillier obtint 17 voix et le
second 19 voix.
Quatre jours après, le 30 décembre, le marguillier en chef
sortant rendit au marguillier en chef rentrant l'inventaire des
objets d'or et d'argent, chasubles et linges appartenant à
l'église de Notre-Dame-de-Pitié de la ville du Groisic.
1733. — Le 8 février 1733, le premier marguillier commu-
niqua au général un mandement do Mgr l'évêque de Nantes
portant, notamment, le règlement des honoraires du clergé et
des droits des fabriques du diocèse. Après avoir entendu la
lecture de cet acte, l'assemblée invita le premier marguil-
lier *< à se donner l'honneur » d'écrire au seigneur évêque,
de lui faire observer que le mandement contient plusieurs
articles préjudiciables à cette fahrice et au public et de deman-
der à Sa Grandeur la liberté de suivre l'ancien usage.
— 199 —
Le 4 avril le général nommait, dans la forme ordinaire, un
second marguillier pour remplacer le titulaire décédé. Il y eut
treize votants et l'élu obtint neuf voix.
Un débiteur ayant affranchi une rentes de 19 livres 8 sous
10 deniers, par le versement d'une somme de 350 livres, et le
général ayant autorisé le placement de ce capital, le premier
marguillier, après publications faites au Groisic et à Batz,
reçut trois demandes et il admit celle qui lui parât présenter
les meilleures garanties de solvabilité.
Il y avait alors six prêtres de chœur.
Dans sa réunion du 27 décembre, le général reconnut que
la maison d'habitation du curé de Bas était en mauvais état
et décida qu'elle serait rebâtie à neuf aux frais u tant des
« habitants de la paroisse que des propriétaires y possédant
« des biens. >'
173i. — L'année 1733 avait eu dix-sept réunions du général.
En 1734, il y en eut dix seulement. On procéda au remplace-
ment des marguilliers le 26 décembre : il y eut 16 votants et
chacun des marguilliers fut nommé par 12 voix. Le 29 décem-
bre, le premier de ces marguilliers reçut de son prédécesseur,
en présence du prêtre, les ornements inventoriés de l'église
du Groisic et il en donna décharge.
1735.— Les réunions de 1735, au nombre de cinq seulement,
furent tenues au Groisic, et ne présentèrent rien de saillant.
Les convocations pour les petites affaires étaient annoncées
par publication et au son de la cloche le dimanche même de
la réunion.
1736.— Au mois de février 1736, une demande de 3259 livres
11 sous fut adressée aux marguilliers, par mandement des
commissaires des Etats de Bretagne, pour Vimposition du
dixième du revenu des biens ruraux de la paroisse ; le mande-
ment était accompagné d'un arrêté des commissaires du
bureau diocésain de Nantes en date du 4 février. Les deux
documents furent publiés le 19 au prône de la grand'messe
et placés sous les yeux du général le 26. L'assemblée compo-
— 200 —
sée de 14 membres, décida qu'ils seraient remis par les mar-
guilliers au maire syndic de la ville du Groisic, que ce magis-
trat et les commissaires nommés par la communauté procé-
deraient à la répartition du dixième selon l'usage, et que le
montant du rôle serait payé aux bureaux indiquées dans le
mandement.
On voit que le général et la communauté étaient chargés de
la perception des contributions levées au profit du roi. Nous
allons les voir opérer dans la rentrée des impôts concernant
la communauté et la paroisse.
La paroisse avait emprunté en 1702, pour un besoin pres-
sant, une somme totale de 2000 livres, dont 500 livres seule-
ment avaient été remboursées. La créance de 1500 livres,
augmentée de 1366 livres 8 sous 6 deniers par les intérêts de
retard, les frais d'avocats et les avances des marguilliers,
avait été portée à 2866 livres 8 sous 6 deniers'. Sur la requête
présentée au roi par les nobles, bourgeois et habitants de la
ville du Groisic, le roi avait ordonné, par un arrêt rendu en
Gonseil d'Etat, que la somme serait payée et avancée par le
miseiir, sous forme d'emprunt, sur les fonds de la ville et
communauté, et qu'elle serait remboursée en 1736 et 1737, par
portions égales, au moyen d'une levée spéciale faite sur tous
les habitants et propriétaires des maisons et héritages situés
dans la ville du Groisic, exempts et non exempts, privilégiés
et non privilégiés. La communauté de ville, que cette affaire
concernait, était invitée à nommer quatre anciens notables
pour répartir ladite somme entre les contribuables, à faire
vérifier les rôles et les rendre exécutoires par l'intendant, et
enfin à en faire opérer les recouvrements par des collecteurs
de son choix. La communauté donna suite à ces diverses
i Au prêteur: capitall500l., intérêts 8331. 6s. 84.frais 671. 6s. 240H 0» g**
Aux marguilliers pour avances 158 10 »
A l'avocat. 111 10 »
Divers 195 7 10
Total 28661 8» 6<i
— 201 —
opérations et le général, après avoir pris lecture des pièces
communiquées, décida que l'arrêt, les contrats et quittances
seraient enregistrés et déposés aux archives pour y avoir
recours. Toutes les pièces sont en effet copiées à la suite sur
le livre deg délibérations.
Ainsi les deux conseils, le général et la communauté, pre-
naient connaissance des affaires de la paroisse : mais chacun
d'eux ne s'occupait spécialement que de celles qui le
concernaient.
Le 15 juillet 1736, le général nomma, pour une nouvelle
période de neuf ans, l'organiste des églises de Batz et du
Groisic. Le 25 novembre, il approuva, pour une durée de sept
ans, le marché concernant l'entretien, et le rétablissement
des tombes de l'église de Batz, enfin le 26 décembre;, il procéda
à l'élection des deux marguilliers pour 1737 et 1738: il y eut 16
votants mais le nombre des membres présents était plus
grand, et plusieurs bourgeois s'étaient retirés ; les deux élus
obtinrent 16 et 14 voix.
Le 29, le marguillier en chef sortant dressa l'inventaire des
ornements de l'église du Croisic en présence du prêtre et de
son successeur.
Les années 1736 et 1737 furent laborieuses pour ces fonction-
naires paroissiaux non rétribués.
En 1736, le général avait reconnu la nécessité de faire exé-
cuter d'importantes réparations à l'église de Batz. En consé-
quence d'une ordonnance du 30 Juin, rendue par l'Intendant
de Bretagne, et d'une délibération du 12 août, prise par le
Général de la paroisse, des devis furent dressés avec soin et
beaucoup de développements pour les maçonnerie, le pavé,
la charpente, la couverture, la plomberie, le lambris, la
menuiserie et le vitrage à exécuter ; l'ensemble de ces travaux
y était évalué à la somme de 23050 livres.
Un avis publié et affiché à Rennes le 30 août, à Nantes et à
Vannes le l" septembre et au Groisic le 15 septembre, invitait
les entrepreneurs à comparoir, les 24, 26 et 29 septembre.
— 202 —
au bourg de Batz , devant le subdélégué de l'intendant de
Bretagne chargé de recevoir les offres au rabais, à éteinte de
bougie. Le 29 septembre, l'adjudication fut close par le sub-
délégué, ancien maire du Groisic, assisté d'un greffier et d'un
notaire royal, en présence des deux marguilliers. Les soumis-
sions durent être nombreuses car le rabais fut considérable,
près de 32 pour cent. Les travaux furent adjugés à un entre-
preneur de Redon pour une somme de 15 800 livres et l'adju-
dication fut régularisée le 21 octobre, après le dépôt du can-
tonnement.
i'îSl. — Les travau.K furent commencés avant l'arrivée à
Batz de l'approbation royale du traité. Le 22 avril 1737, le
général reçut de l'entrepreneur, par l'intermédiaire des mar-
guilliers, la demande d'un premier acompte de 3950 livres
représentant le quart des travaux ; mais comme il n'avait
point encore reçu l'arrêt qui devait autoriser la levée dès
deniers destinés à payer l'entrepreneur, il sollicita de l'Inten-
dant l'autorisation d'emprunter cette somme au miseiir de la
communauté, s'engageant à la rembourser sur les premiers
deniers de la levée qui serait faite à ce sujet.
Par un arrêt du 26 mars rendu en conseil d'Etat, le roi
approuva l'adjudication des ouvrages et réparations à faire à
l'église paroissiale de Batz et ordonna que la somme de
15800 livres, représentant le prix des travaux, serait imposée
et levée sur tous les habitants et sur tous les propriétaires
des biens fonds situés dans l'étendue de la paroisse, exempts
et 710JI exempts, privilégiés et non privilégiés, ecclésiastiques,
genstilshommes, roturiers, domestiquas, gens de journées, et
ce par un seul rôle de répartition. L'arrêt portait que le rôle
sera dressé le plus équitablement que faire se peut par quatre
notables habitants nommés soit par le général, soit d'ofïice par
Mgr l'Intendant ou M. son subdélégué au Groisic, puis, qu'après
avoir été rendu exécutoire, il sera remis à des collecteurs sol-
vables qui en feront le recouvrement en quatre termes égaux
dont le dernier devra échoir au mois de septembre 1738..
— 203 —
Pour se conformer aux stipulations de l'adjudication, le
général désigna, le 19 mai et sur la demande des marguilliers,
quatre commissaires du Groisic, un du Pouliguen et deux
anciens marguilliers de Batz, pour examiner les travaux et
les matériaux qu'on y devait employer ; les sept examinateurs
étaient invités à s'adjoindre le recteur et les maguilliers en
charge, et à marquer au fer à fleur de lys les bois examinés
et reçus. Il nomma également sept membres pour procéder à
la répartition du rôle des contributions, et décida enfin que les
ressources pour payer les frais et avances et la confection de
ce document seraient levées conjointement avec les 15800
livres, et que la taxe et liquidation de ces ressources serait
faite par le subdélégué d'après les mémoires qui lui en seront
présentés.
Le général ayant omis, dans cette réunion du 19 mai, de
nommer des collecteurs pour faire l'amas, c'est-à-dire la per-
ception, de la somme de 15800 livres, les marguilliers le lui
rappelèrent dans la séance suivante du 2 juin. Ce jour-là,
l'assemblée n'étant pas en nombre suffisant pour prendre une
décision,, les marguilliers protestèrent de tout ce qu'ils doivent
et peuvent protester contre les défaillants. Dans la séance du
7 juillet, ils revinrent sur leurs remontrances des 19 mai et
2 juin : ils firent remarquer que le rôle était arrêté du 21 juin
par les commissaires égailleurs nommés le 19 mai et qu'il
était rendu exécutoire par l'ordonnance du 23 juin du subdé-
gué de l'intendant, ils ajoutèrent que faute au général, et no-
notamment à ceux qui ont voix délibérative, de nommer des
collecteurs pour la cueillette de l'impôt, les marguilliers
déclarèrent qu'ils entendaient abandonner le tout aux péril et
fortune du général et des défaillants, ceux-ci devant supporter
tous mauvais événements, dépens, dommages et intérêts
pouvant résulter de la non nomination des collecteurs.
Cette fois l'assemblée comprenait 20 membres. Elle nom-
ma 22 collecteurs à raison de deux par cueillette, savoir : au
Croisic, 8 collecteurs pour les cueillettes du Layiigo, de Notre-
— 204 —
Dajne^ûe Saint-Christhuphe et de Saint-Yves ; à Batz,12 collec-
pour celles du bourg, de Kerlan et Kerdréan, de Kerva(et, de
Treyaté, de Kermoisan, de Roffiat ; au Pouliguen, 2 collec-
teurs pour la cueillette du Pouliguen et Penchâteaii. Ces col-
lecteurs avaient pour mission de recueillir, dans les quartiers
qui leur étaient assignés, les fonds des deux premiers termes
du rôle et d'en remettre le montant aux mains des marguil-
liers, en observant les délais fixés par l'ordonnance, sous
peine d'y être solidairement contraints par provision, même
par corps, comme pour les derniers royaux.
1738. — Des collecteurs en même nombre et choisis dans
les mômes lieux, furent chargés dans la séance du 9 mars 1738,
de faire l'amas des deux derniers termes de la même manière
que pour les deux premiers.
La surveillance des travaux rendait la tâche des marguilliers
difficile. L'entreprise ne remplissait pas les conditions de son
marché : les matériaux étaient trouvés défectueux et les tra-
vaux subissaient des retards. Fatigués de protester en vain,
les marguilliers. portèrent leurs plaintes devant le général et
celui-ci, dans sa séance du 24 mars, les chargea de présenter
en son nom, à l'intendant de Bretagne, une requête portant
que les approvisionnements étaient insuffisants, que les bois
n'étaient pas d'assez bonne qualité, qu'il y avait trop de châ-
taigniers, que le nombre de chevrons employés avait été réduit
de 1/7, que les ardoises étaient de qualité inférieure, que les
voûtes souffraient, que l'orgue était avarié'. Et cependant les
entrepreneurs avaient reçu des acomptes qui dépassaient la
valeur des travaux exécutés. La requête devait solliciter la
nomination, aux frais de qui il appartiendra, d'un architecte
pour visiter les travaux.
Les entrepreneurs répondirent à ces réclamations en adres-
sant au subdélégué de l'Intendant, un plaidé qui fut transmis
' Dans la séance du 18 août 1737, les marguilliers avaient été chargés par
le général de notifier aux entrepreneurs qu'ils étaient responsables des dégâts
survenus à l'orgue, pour ne pas l'avoir garanti contre la plaie.
— 205 -
au général et communiqué, le 20 juillet, aux commissaires
chargés de la surveillance.
Les 10, 17 et 24 août et 7 septembre, il y eut des réunions du
général dans lesquelles les membres n'étaient pas en nom-
bre suffisant pour délibérer. Les membres présents protes-
tèrent contre les défaillants de tous dé pens, dommages et inté-
rêts. Il en fut ainsi à la réunion du 4 décembre.
Dans l'intervalle, en 1737, les chapelles de Notre-Dame-du-
Mûrier de Batz et de Saint- Yves du Groisic avaient été répa-
rées par les soins des Marguilliers et deux des cloches de
l'église de Batz avaient été refondues.
Le général après avoir reconnu que deux des trois cloches
de cette église étaient fêlées, avait, le 8 septembre, autorisé les
marguilliers à passer marché pour les faire fondre et les
remettre en place, moyennant une somme de mille livres et
et un an de garantie. Elles furent fondues au bourg avec suc-
cès. Des commissaires avaient été chargés d'assister à leur
réception, d'en visiter le métal et de vérifier les pesées. La
descente des cloches, la fonte du métal et toutes les opérations
nécessaires jusqu'à leur mise en place avaient pris une hui-
taine de mois. Le 2 juin 1738, le général nomma les deux
parrains qui devaient assister au baptême des deux cloches en
leur laissant le soin de choisir les deux marraines ; l'un deux
fut le maire en charge de la ville et communauté du Groisic
l'autre un ancien marguillier demeurant au Pouliguen.
Le général acheva l'année 1738 en nommant, le 26 décembre,
les deux marguilliers qui devaient gérer les affaires de la
paroisse pour les années 1739 et 1740 et terminer la laborieuse
affaire des travaux de l'église de Batz. Quinze des membres
présents prirent part au vote : le premier maguillier fut nommé
par sept voix et le second par huit. Cette dernière réunion
mentionnée sur le registre des délibérations, eut lieu dans la
sacristie de l'église Saint-Guénolé-de-Batz.
Nous venons de voir l'action du général et des marguilliers
— 206 —
dans les alTaires de la paroisse de Batz au cours du XVIII» siè-
cle, conformément à un usage qui, sauf des modifications de
détail et quelques réglementations, pouvait remonter à
300 ans ; nous avons vu le général prenant des décisions et
les marguilliers se chargeant de l'exécution.
On n'a pas manqué de remarquer qu'en malière de recou-
vrements d'impôts, le pouvoir du général était plus étendu
que n'est actuellement celui du conseil municipal. En effet :
il choisissait dans la paroisse des répartiteurs ou égailleurs
qui dressaient le rôle des contributions'pour un objet déter-
miné, et des collecteurs chargés de recevoir les sommes
portées aux articles du rôle. Le rôle, une fois terminé et
rendu exécutoire par l'intendant ou son délégué qui résidait
au Groisic, était confié aux collecteurs ; ceux-ci en faisaient la
cueillette dans leurs quartiers respectifs et en versaient le
montant aux marguilliers. Les collecteurs pouvaient être
rendus solidairement responsables de leurs recettes ; les
marguilliers, à leur tour, étaient responsables de l'argent
confié à leurs soins ; ils avaient une responsabilité assez
grande qui pouvait les atteindre dans leur fortune.
Les communautés de ville, comme celle du Groisic, étaient
très rares dans le comté nantais. Dans les paroisses où il n'y
en avait point, le général avait des attributions plus nom-
breuses que celui de Batz. 11 faisait percevoir les impôts
royaux comme ceux de la paroisse et les marguilliers en
étaient encore responsables. Cependant, tandis que beaucoup
de privilégiés étaient exempts de l'impôt royal, personne ne
pouvait se soustraire à l'impôt levé au profit de la paroisse :
tous les habitants, tous les propriétaires y étaient soumis.
C'est ainsi qu'aujourd'hui l'Etat, qui possède des biens dans
une commune, paie à la commune des contributions pour ces
biens. .
Le général de la paroisse fut remplacé, en 1790, par le
Conseil municipal de la commune. Ce conseil, lorsqu'il était
— 207 —
réuni aux plus imposés qui furent supprimés en 1882, portait
le nom de Conseil gétiéral de la commune.
La commune n'eut qu'une demi-existence de 1795 à 1800.
La loi du 17 février 1800 lui rendit une partie des attributions
que lui avait données la Constituante et la mit plus directe-
ment en rapport avec le pouvoir central que représentait le
sous-préfet.
Les fabriques furent établies par la loi du 8 avril 1802,
ayant pour attributions de veiller à l'entretien et à la conser-
vation des temples, et d'administrer les biens et les ressour-
ces affectés à l'exercice du culte. Elles furent réglementées
par un décret de 1809.
Le conseil municipal, d'une part, et le conseil de fabrique
d'une autre part, tiennent actuellement la place du général
de la paroisse ; mais celui-ci était loin d'avoir les nombreuses
attributions qui sont aujourd'hui aux mains du conseil muni-
cipal et dont les écoles et les chemins vicinaux occupent le
premier rang. Cependant il en avait de bien délicates : il
choisissait les soldats qui devaient servir dans l'armée du
roi, les égaillcurs chargés de dresser le rôle de répartition des
contributions applicables aux dépenses de la paroisse, les
collecteurs chargés d'en faire la perception et le miseiir qui
centralisait les recettes et en faisait la dépense.
E. Orieux.
APPENDICE
NOMS DES HABITANTS DE LA PAROISSE DE BATZ
Relevés sur le lieyi.slre des délibérations du Général
PAK
M. l'Abbé CLENET curk du Croisic
Réunion du 26 décembre i 752 — Fête de saint Etienne.
Présents : Messieurs Rielland, prêtre, recteur de cette pa-
roisse ; du Sorinay le Querré, maire sindic en charge, écuyer ;
Jean le Pourceau, sieur de Lenicobin, et François le Pourceau,
sieur de Kercario ; Morvan et de la Grée Yviquel, anciens
maires ; Klin du Bochet et Lemée, anciens premiers mar-
guilliers ; de Messemé Goupil et Jacques Le Tilly, anciens
seconds marguilliers ; Trevenant Loyseau et de Dressigné
David, anciens directeurs de l'Hôtel-Dieu du Croisic; Rathier
et Baume fils, avocats ; Baume et Benoist, notaires royaux et
plusieurs autres bourgeois.
De la part de nobles gens Jean le Besson, sieur du Parcjégo,
premier marguillier, et Pierre Loyseau, second marguillier.
Liste de Messieurs les bourgeois de la ville du Croisic pour
l'un deux être premier marguillier.
Messieurs : de KvinBourdic, de Dressigné David, de Kroux
Maillard, de Parcjumel Tenguy. Bellinger et de la Grée Yvi-
quel nommés par le dit sieur de Parcjégo suivant l'usage.
Liste de Messieurs les bourgeois et habitants du Pouliguen
et champs de Bas pour un d'eux être second marguillier.
Messieurs : Guillaume Le Huédé fils Guillaume, Aubin
Montfort, François LeCallo. Pierre leTorzec nommé par ledit
sieur Loyseau suivant l'usage.
M' Bellingé et François Le Gallo, élus !
— 209 —
Réunion du Dimatiche 26 décembre i754
Présents ; Messieurs Rielland, prestre recleur de celte pa-
roisse ; Tenguy, maire en charge de la ville et communauté
du Groisic, Raphaël, ancien marguillier ; de Kerval Le Fauché,
avocat au Parlement ; Lartaudière du Bois, directeur en
charge de l'Hôtel-Dieu ; de Kvin Bourdic et Gharault de Gareil,
anciens bourgeois ; Michel Montforf, Julien Le Huédé, Louis
Le Huédé, Vincent Le Huédé, Jacques Le Tilly, anciens mar-
guilliers ; Benoist notaire royal et autres.
Réunion du diînanche 26 février i736
Présents. Messieurs : Rielland, recteur ; de Parcjumel Ten-
guy, maire sindic en charge ; de la Grée Yviquel et du Sorinay
Le Querré, anciens maires sindics ; Bellinger, de Messemé
Goupil, Michel Montfort, Vincent et Louis Le Huédé, anciens
marguilliers ; Loyseau Trevenant,Dresigné David, Lartaudière
Dubois, anciens directeur de l'Hôtel-Dieu du Groisic; Gharault
de Gareil, ancien bourgeois, Benoist et Guyomart notaires
royaux.
Noms des prêteurs de la somme de 2 mille livres : M. Audet,
miseur de cette ville et communauté ; sieur de Parcjégo le
Besson et sieur Bellinger, anciens marguilliers ; sieur de la
Mote Degermes, avocat au Gonseil ; sieur de Morinay Galvé ;
la veuve des Forges Maillard et enfants et Benoist leur pro-
cureur ; sieur de la Grée Yviquel et du Sorinay le Querré.
Suivant l'ordonnance de Mgr de Pont Carré de Viarmes
intendant.
Réunion du dimanche 1 5 juillet 1756
Le sieur Augustin Gotton du Ghancy fut reçu pour organiste
de Saint-Guignolay de Batz et de Notre-Dame-de-Pitié du
Groisic pour 9 ans.
14
— 210 —
liéîmion du 26 décembre ^756.
Présents : MM. Rielland, prestre-recteur ; de Parcjumel
Tenguy, maire en charge de la ville et communauté du
Croisic ; François Le Pourceau, écuyer ; sieur de Kcario, de
ia Grée Yviquel, ancien maire ; Bellinger ; de Messemé
Goupil ; Michel Monfort ; Vincent Le Huédé ; Louis Le Huédé ;
Jacques Le Tilly et Guillaume Le Huédé, anciens marguilliers ;
Trevenant Loyseau, de Drésigué David et Lartaudière Du-
bois, anciens directeurs de l'Hôtel-Dieu du Croisic ; de Rval
Lefauché, avocat à la Cour ; Benoist et le Bourdic, notaires
royaux et plusieurs autres qui se sont retirés.
Réunion du 19 mai 1737.
Commissaires choisis pour l'examen des approvisionne-
ments destinés aux réparations de l'église : Messieurs: de la
Grée Yviquel; Tenguy de Parcjumel, Bellinger et Desbutes
Larragon, du Croisic ; M. Sébastien Gandin, du Pouliguen et
les sieurs Jacques Le Tilly et Guillaume Le Huedé, anciens
marguilliers de Batz.
Commissaires choisis pour la répartition du rôle des con-
tributions : Messieurs : Bellinger, de Kroux Maillard, Lar-
taudière Dubois, et de la Piquellero Goupil, du Croisic ;
Monsieur de laRiaudière Gaudiii, du Pouliguen ; et Messieurs
Michel Montfort et I^ouis Le Huédé, anciens marguilliers et
Jean Babvieille et Jacques Le Nué, du bourg et champs de
Batz.
Réunio?i du 7 Juillet 1757.
Noms des collecleurs et des cueillettes. — Savoir, de la
ville du Croisic : pour la cueillette du Lanigo, Guillaume
AUaire, fils, et René Daniel, charpentiers ; pour la cueillette
àe Notre- Dame, Allain Lagadec et Guillaume Durand, char-
pentiers ; pour la cueillette de Saint-Christophe, Guillaume
- 211 —
Jacq et Joseph Bertho, et pour la cueillette de Saint-Yves,
Hiérosme Darty et Guillaume Soreau ; pour le bourg de Batz :
Noël Le Huedé, du Gouriec, et Jean Le Gallo le jeune ; pour
ftlan etKiirean : Nicolas LejCallo et Jean Letilly dit Beaure-
gard ; pour Kvalet : René Bourdic et Jean Le Gallo ; pour
Trégaté : François Le Breton et Jean Brenic, cordonnier ;
pour fiinoïson, René Montfort et René Gdvalen ; pour Roffiat :
Guillaume Nicot et Le Guerver et Guinolay Nicol et pour le
Pouliguen et Pinchâteau : Ollivier Doucet et Charles Jos-
seaume, lesquels feront l'amas chacun dans leur cueillette.
Réiuiioii du 9 mars 1738.
De la ville du Groisic : pour la cueillette du Lenigo, les
sieurs Jean-Baptiste Guette et Mathurin Dangel ; pour la
cueillette de Notre-Dame, Julien Darty et Guillaume Morin,
maîtres de barques ; pour celle de Saint-Christophe : Pierre
Tessier, capitaine, et Jean-Baptiste Galpin, marchand ; et pour
Saitit-Yves : René Morand, capitaine et François de Lorraes,
officier. Pour le bourg de Batz : Julien Bourdic, Guinolay
Bataille, paludier pour Elan et Rdrean et Puiguer, Jean
Gavalen et Jean Benoit, paludiers ; pour Kvalet : François Pen
et Nicolas Le Berre le jeune, paludiers : pour Trégaté : Jean
Le Gallo, menuisier, et Jacques Le Berre, paludier ; pour
fimoisan, Guinolay Nicol, dit Leprince, et Guillaume Le Gallo,
paludiers ; pour Roffiat : Michel Le Huédé et François Le
Berre, paludiers ; pour le Pouliguen et Pinchâteau : René
Berthelot, mathelot et François Garet, couvreur.
Réimion du 22 juin 1738.
L'Assemblée a nommé pour parrains de cloches, savoir,
pour la première cloche, noble homme Pierre Tenguy sieur
de Parcjumel, maire en charge de la ville et communauté du
Croisic, et pour la seconde cloche, noble homme Pierre
— 212 —
Raphaël, ancien marguillier de cette paroisse, demeurant au
Pouliguen, lesquels choisiront pour marraines chacun dans
leurs endroits telles personnes qu'il leur plaira.
Rétmion du vejidredi 26 décembre 1758.
Jour de Saint-Etienne. Messieurs le lecteur de Lenicobin
le Pourceau, et de Kcario le Pourceau, genstishommes ; de
Parcjumel Tenguy, maire en charge ; du Bochet et de la Grée
Yviquel, anciens maires ; Raphaël, Michtfl Monfort, Jean le
Tilly, Louis Le Huedé ; de Messemé Goupil, et Guillaume
Le Huédé, anciens marguilliers ; Trevenant Loyseau, ancien
directeur de l'Hôtel-Dieu du Groisic ; de la Picquelière Goupil,
directeur en charge dudit Hôtel Dieu ; etBenoist notaire royal
et autres.
INVENTAIRE
Des objets composant la toilette, les bijoux, le mobilier
DUNE JEUNE FEMME DE LA FIN DU XVÎI^ SIÈCLE
L'Archéologie est généralement bien sérieuse. Toujours des
substructions, des investigations, des déductions, des défini-
tions, des observations, des citations qui certainement n'ont
point le don de plaire beaucoup, ou d'intéresser ces dames et
ces demoiselles. Aujourd'hui, cependant, nous pensons leur
offrir un vrai régal, qui charmera leur légitime curiosité, et
les déterminera à feuilleter un peu notre ennuyeux Bulletin,
puisqu'il s'agit de latoilette^, leur passe-temps préféré.
Nous avons, en effet, à leur présenter l'inventaire des objets
composant la toilette, les bijoux, le mobilier d'une jeune
femme, vivant à la fin du XVIP siècle, c'est-à-dire aux beaux
jours du règne, de Louis XIV. Espérons que pour une fois, au
moins, leurs mains mignonnes s'arrêteront sur les pages
d'un livre qui bien souvent n'obtientqu'une froide indifférence.
Mademoiselle Françoise Aubry de la Fosse, née en 1664,
appartenaità une famille qui, à la fin du XV!» siècle, possédait,
depuis longtemps déjà, les domaines conligus de la Fosse et
des Bouroflères, situés paroisse de la Chapelle-Blanche, près
Bourgueil en Touraine*. Elle mourut le 18 octobre 1700, à la
maison de campagne de sa sœur, Madame Barré de la
Freslonnière, près Tours.
• Ces terres d'ane contenance de 200 hectares, passées par héritage dans
la famille Chenantais, ont été vendues vers 186C.
— 214 —
C'est l'inventaire, fait après son décès, des objets à son usage
que nous présentons au lecteur.
Elle était grande tante de René-Jean-Guillaume Aubry, né
en 4745 à la Cliapelle-Blatiche, venu se fixer à Nantes, où il
épousa le 25 juillet 1759, Catherine Fleury Doré, et de Martin-
Jean-François Aubry, son frère, religieux bénédictin, fixé en
dernier lieu au couvent de Vertou, évêché de Nantes.
M. Lallié, aux excellents travaux duquel nous sommes tou-
jours heureux de recourir, cite parmi les 132 Nantais',
(> 4. Aubry, René-Jean-Guillaume, 48 ans ; 5, Aubry, Martin-
Jean-Franrois, religieux bénédictin. » Epuisé i)ar les mauvais
traitements, les fatigues, les privations, qu'il eut à supporter
pendant le trajet, le chef d'escorte le consigna à l'auberge de
la Montagne à Blois, où, arrivé le 29, il mourût le 31 décembre
1793.
L'aîné avait été emprisonné au château de Nantes avec son
frère le 17 mars 1793. Aucune mention ne se retrouve de la
seconde arrestation des deux frères, dans les jours qui précé-
dèrent le départ des malheureux Nantais pour Paris. C'est
dans cette ville que mourût M. Aubry de la Fosse, atteint du
typhus, à la maison Belhomme, où il était détenu, le 11 nivôse
an II, (31 décembre 1793).
Malgré les difficultés et les dangers que présentait alors
pour des femmes le long voyage de Paris, Madame Aubry
n'hésita pas à l'entreprendre dans le but d'esssayer de sauver
son mari, ou tout au moins de le voir une dernière fois. Elle
partit à la fin d'avril accompagnée de sa jeune nièce et filleule,
Mademoiselle Madeleine Fleury-Chenantais. En arrivant elle
apprit que son infortuné mari n'était plus.
Un cachet ayant appartenu à M. René-Amable Aubry,
prieur du célèbre monastère des Bénédictins de Marmoutiers,
près de Tours, en 1635, supérieur, en 1640, des couvents des
1 Les Cent trente-deux Nantais, par Alfred I,;illi^, Angers, Germain, in-8.
127 pp. 1894.
— 215 —
Bénédictins de la province de Tours, avec rang d'évôque ; un
écusson sculpté sur la patience de la stalle occupée par un
Aubry, prieur de la chapelle*, "patience offerte à madame
Lejeane de la Martinais, née Chenantais, par le curé de cette
paroisse, lors de la démolition assez récente de l'ancienne
église, donnent les armes de la famille Aubry : D'argent à
trois lamproies de sable, posées en pal, accompagnées de 7 étoi-
les on molettes de même, 2, 4, 1.
Les deux frères Aubry ont certainement acquis droit de
cité à Nantes, mais nous venons de prononer deux fois le nom
de Chenantais, honorable entre tous ceux de nos honorables
compatriotes, et qui se rattache étroitement à cette famille de
Tours. Ils avaient une sœur : Renée-Adélaïde-Amable-Victoire
Aubry, qui épousa M. François Chenantais de L'Ofîerière.
receveur des domaines du Roi à Amboise, et décédée à Tours
en 1825.
Le 21 juin 1774, madame Chenantais mettait au mon-
de deux jumeaux, dont voici un extrait de l'acte de
baptême' :
« Le 22 juin 1774, ont été par nous, Dom Martin-Jean-
François Aubry, célérier et dépositaire de l'abbaye de Cor-
mery, baptisés, Etienne-François et Ktienne-François-Marlin,
enfants jumeaux, nés le jour précédent, fils de François
Chenantais de TOfTérière, receveur des Domaines du Roy à
Amboise, et de dame Renée-Magdelaine-Amable-Adélaïde-
Victoire Aubry, sa légitime épouse.
« Ont été parrain et marraine de l'un et de l'autre : Très
haut et très puissant seigneur Monseigneur Etienne-François
' Stalle, siège de chœur d'une église, se leyant et se baissant à volonté.
Baissée elle présente un siège assez bas. Levée elle offre sur le siège une sorte
d'appui en forme de cul-de-lampe, nommée misérico^-de ou patience. Dans le
principe la règle voulait que l'on chantât debout ; cet espèce de demi-siège
ne fut ajouté que par tolérance, afin de soulager les personnes âgées.
- « Extrait des registres de baptêmes, mariages et sépultures de la paroisse
de Saint-Florentin d'Amboise, département d'Indre-et-Loire, année 1774,
délivré par nous Maire d'Amboise, le 8 mai 1871, signé : Morbau, adjoint.*
— 210 —
de Ghoiseul, duc de Choiseul — Amboise, pair de France,
marquis d'Estainville et de la Bourdaisière, chevalier des
ordres du Roy et de la Toison d'Or, lieutenant général des
armées de Sa Majesté, gouverneur et lieutenant-général do
la province de Touraine, gouverneur et grand bailly de
Mirecourt et du pays des Vosges Ooerlandrogt, grand bailly
de la préfecture Lagueneau, ministre d'Etat, et très haute et
très puissante damo, madame Louise-Honorine Grozat du
Chatel, duchesse de Ghoiseul-Amboise. épouse dudit sei-
gneur, son mari »
Etienne-François-Martin, fils de François Ghenantais et
d'Amable-A-V. Aubry, épousa Mademoiselle Marie-Madeleine
Brobant dont il eut entre autres enfants :
Joseph-Fleury Ghenantais, né le 5 octobre 1809, marié le
4 novembre 1839 à Mademoiselle Joséphine-Victoire Monnier
du Pavillon.
Il suffit de citer le nom de l'architecte Ghenantais, pour
se trouver de suite en présence de sympathiques sou-
venirs.
Elève de Scheult, de Garnaud, de l'école des Beaux-Arts,
membre de la commission départementale des bâtiments
civils, chevalier de la Légion d'honneur en 1855, cet artiste
au talent vraiment populaire, M. Ghenantais à laissé à Nantes :
Le Palais de Justice, ouvert en 1853 (en collaboration avec
M. Sctieult ; L'église de Notre-Dame-de-Bon-Port, 1846-1858 ;
URôtel-Dieu, 1856-1865 ; Manufacture royale des tabacs, 1857 ;
Cercle des Beaux-Arts, iSôS; La pj'ison,iSQ9 : La gendarmerie^
le théâtre de la Renaissancr'. Outre ces œuvres importantes,
il construisit encore nombre de maisons et d'hôtels dans la
ville, de châteaux, d'écoles, de mairies et d'églises dans le
département ; la mairie, les halles d'Ancenis ; les gares de
Paris-Orléans, Nantes et Ingrandes, etc..
Son fils Eugène a noblement suivi les traces de son père.
Entré au corps des sapeurs- pompiers, le 3 août 1845, comme
chef de bataillon, Ghenantais sût bien vite s'y concilier l'estime
- 217 —
de ses subordonnés. Il mourut, en activité de service, le
l*' novembre 1868, à l'âge de 59 ans.
A la séance du 20 novembre suivant du Conseil d'adminis-
tration, le procès-verbal dit : « Avant de passer à l'ordre du
jour, le corps d'officiers tient à manifester sur le registre de
ses délibérations l'expression de ses regrets de la perte qu'il ^
a faite en la personne de son commandant. Monsieur Joseph
Ghenantais, décédé, le 1"" de ce mois, puis comme témoignage
d'estime et d'amitié, il décide, à l'unanimité, qu'un buste, en
bronze de son aucien commandant, sera érigé à sa mémoire
par le bataillon, sur son tombeau. A cet effet une liste de
souscription sera ouverte dans les différentes compa-
gnies... »
Le buste très ressemblant, représentant le commandant en
uniforme, est dû ou cispau artistique du sculpteur nantais
Ménard.
Le docteur Jules-Louis Chenantais, très apprécié à Nantes,
était frère de l'architecte, qui avait pour sœurs Mademoiselle
Clarisse-Adélaïde Chenantais, femme de M. Pierre-René de
Veillechèze, notre confrère à la Société d'Archéologie.
Une troisième sœur, nous avons déjà cité Madame Le Jeune
de la Martinais, Mademoiselle Stéphanie Ghenantais, épousa
M. Constantin Montfort, capitaine au long-cours, etne doit pas
être oubliée. Klle a, en effet, donné à notre ville un médecin
très apprécié comme son oncle, et un architecte de talent,
longtemps membre de notre Société, dont il a enrichi le
Bulletin d'une fort bonne étude sur la porte de la ville dite de
Saint-Pierre, près l'évêché.
Jules-Charles-Etienne-Montfort, né à Nantes le 8 mai 1844 ;
élève de Questel et de l'école des Beaux-Arts, deuxième
grand prix de Rome, architecte diplômé, membre de la
Société centrale des architectes de Paris. Au salon nantais de
1886, on voyait de lui : Château de Kerfily, commune d'Elven,
trois châssis et un cadre ; Manoir de la Chantelière, commune
de Vertou, un cadre. Pour cette exposition M. Montfort
— 2iS —
reçut un diplôme décerné par la ville de Nantes, {A7't ancien
et Archéologie).
Cette digression, un peu longue peut-être, a pour objet de
démontrer que l'intéressant Inventaire de Mademoiselle Au-
bry de la Posse a bien droit de cité à Nantes ; et nous aimons
à croire qu'en raison de sa bonne origine, il sera favorable-
* ment accueilli par nos honorés confrères.
S. HE LA NiCOLLIÈRE-TkIJEIRO.
INVENTAIRE
DES OBJETS COMPOSANT LE MOBILIER, LES BIJOUX ET LA TOILETTE
d'une jeune FEMME A LA FIN DU XYII""^ SIÈCLE.
1 Robe de chambre doublée de bleu.
1 Petit corset avec une dentelle- d'argent, le devant couvert
de moire d'argent.
1 Devantière de cheval, étamine et rubans jaunes.
1 Gourtin de drap minime.
1 Petit tablier tafetas bleu.
1 Coiffure de taffetas noir.
1 Coiffure de dentelle Cambray et Bourgogne*.
1 Autre coiffure de Cambray mouchetée, garnie de dentelle
à réseau, le surtout et la Bourgogne tout montée, garnie
d'un ruban couleur de rose.
1 Stinkerque de mousseline claire^.
1 Coiffure de "nuit garnie a'une dentelle à réseau grandes
fleurs.
1 Autre coiffure à petite dentelle, à brides avec son bonnet,
garnis de chacun leur fond.
1 Paire de manchettes plates garnies de mousseline rayée ;
2 autres paires de manchettes garnies de mousseline de
baptiste.
1 Paquet manchettes de mousseline. — Une pièce de corps
d'argent à fleurs.
' Bourgogne et Cambrai, sortes de dentelles, le nom delà dernière est encore
très usité.
* Steinkerque, grand mouchoir de coton ou de soie, que les femmes mettent
autour du cou et dont les deux bouts pendent devant, ou sont entrelacés
dans les rubans ou lacets de leurs corsets. Elles lui donnèrent ce nom en
France, après la bataille de Steinlierke. en 1692.
- 220 —
1 Corset de futaine garni d'un tour de gorge de linon garni
de dentelle à réseau et pièce de satin blanc.
1 Ceinture blanche rayée de noir; deux boutons avec pen-
dants d'argent.
1 Étui à peignes, la pelotte garnie de dentelle et un rond
couvert d'un ruban couleur de cerise.
1 Toilette de toile de coton avec une dentelle à réseau autour.
4 Paires de bas de soie blanche ; 2 paires de bas de soie
une violette et une rouge , Plusieurs autres paires de
bas de laine et un paquet de chaussettes.
1 Paquet gants de soie, mitaines, gants de baptiste.
1 Miroir de toilette enchâssé d'ébè ne, garni d'argent, son
ruban et sa boîte.
1 Masque couvert de drap noir.
1 Paire de souliers avec ses boucles d'acier.
2 Paires de souliers en maroquin rouge garnis de rubans
d'argent.
1 Paire de pantoufles rubans argent.
1 Surtout et sa Bourgogne de mousseline rayée.
1 Manteau de taffetas rayé jaune et rubis, doublé de chagrin
rubis, et la jupe de pnreille étoffe de chagrin doublée de
taffetas bleu rayé.
1 Corps tout neuf piqué, doublé d'un taffetas aurore avec
sa pièce d'argent fin brodé.
1 Vieux corps dont le devant est de chagrin noir.
1 Manteau de ras Saint-Maur.
1 Autre manteau vénitienne rayé blanc, à petites fleurs
doublé de taffetas vert,
i Autre manteau de drap noir et sa jupe.
1 Tapis de Turquie vraie Perse.
4 Ecrans et manches doublés de vert.
1 Surtout, sa Bourgogne, ses manchettes à 3 rangs et le tour
de gorge de linon uni, le tout garni de franges.
1 Surtout avec sa Bourgogne tout soie de Perse et manches
à 2 rangs de mousseline et un petit fil autour.
— 221 —
2 Coiffures de mousseline rayée, l'une de linon uni et l'au-
tre rayé.
1 Bonnet et une cornette avec leurs fonds garnis de den-
telles, l'un à réseau, l'autre à bride.
1 Toilette de toile de coton garnie de dentelles à réseau.
2 Etuis à peigne l'un brodé, l'autre de toile garnie de den-
telles avec 2 dessus de pelottes aussi garnis de dentelle.
1 Coitfure, les surtout de Bourgogne de linon, toute neuve,
mouchetée, garnie d'une mignonnette à brides avec
une paire de manches plates aussi de linon mou-
cheté.
1 Paire de manches froncée toile de Hollande avec une
petite dentelle à réseau.
1 Tablier de taffetas garni d'une grande dentelle d'argent fin.
1 Fontange doublée jaune et argent'.
1 Autre nœud de rubans blancs et couleurs cerises avec le
nœud de ruban de devant.
1 Autre nœud de rubans à frange noire.
1 Paladin doublée d'un ruban bleu.
1 Boîte contenant des glands de soie cramoisie.
1 Mantelet soie à petites fleurs blanches doublé de pelle-
terie blanche.
1 Jupe de falbalas rayé vénitienne à fleurs avec trois quarts
de môme étoffe, la jupe doublée de taffetas.
1 Jupon de damas blanc doublé de toile de Hollande.
1 Jupon vénitienne rayée.
1 Peignoir de nuit garni de dentelles.
1 Jupon damassé rayé de bleu, doublé de toile café.
1 Echarpe en falbalas de taffetas blanc et noire.
1 Autre écharpe en falbalas noir.
1 Manchon d'oursin.
' Fontange, nœud de ruban que les dames portent sur le devant de leur*
coifiure, un peu au-dessus du front, et qui lie la coiffure. Ce nom vient de
Mademoiselle de Fontanges qui la première porta un nœud semblable. —
'^OO
58 Mouchoirs à moucher, torchons, tabliers froncés et tapis
serge verte, chemises, camisoles de bazin, 16 cornettes
de nuit, coëffes de nuit, japons de dessous, etc.
1 l'eignoir de nuit garni de dentelles.
1 l*aire d'Heures avec des agraffes d'argent.
1 Livre de VlmUatlon de J.-C. avec fermoirs d'argent.
1 Autre livre de rouge couvert.
1 Livre couvert en veau, composé de deux tomes.
1 Autre livre qui a pour inscription : « L'Oratoire du cœur. »
4 Petits livres.
>) Les paraphrases sur les Psaunies de David.
1 Autre livre qui a pour titre : « Le Guide spirituel. »
1 Semaine sainte couverte en maroquin avec un reglet
garni de semence de perles'.
i Collier de perles fines de 77 perles et une séparée.
1 Diamant et 1 boucle estimés 600 livres (ces deux objets
ont été offerts à la dame Barré de la Freslonnière en
reconnaissance des soins donnés à sa sœur.)
1 Pot d'argent à l'ancienne mode pesant 2 marcs 1/2
(ou 0,625 grammes, le marc représentant 0,250 gr.)
» Couverts.
2 Coutelières de, chacune une demi-douzaine de couteaux à
manches d'ivoire garnis d'argent.
1 Tenture de tapisserie verdures- composée de 8 morceaux
avec ses soubassements, estimés 450 1.
12 Chaises et fauteuils en tapisserie à rotes garnis d'une
frange de soie, estimés 300 1.
5 Tabourets de paille, étoffe de tapisserie.
1 Petite chaise également de tapisserie.
5 Caquetoirs couverts de damas rayé écarlate et blanc,
neufs^
' Reglet ou régnet, petit ruban pour servir de marque dans les livres.
' Verdure, tapisseries verdures, ornées de feuillages verts.
' Caguetoire fauteuil sur lequel on causait à son aise au coin du feu. Du
verbe caqueter. — Dict. Richelet.
4 Autres caquetoirs de tapisserie.
48 Serviettes et nappes ouvrées.
103 Serviettes de toile.
iS Nappes.
20 Draps fins.
1 Lit avec ciel de lit feuilles mortes, composéde huit pièces
et le fond garni de ses paumes et rubans. Autres lits,
matelas, couettes, oreillers, couvertures laine, courte-
pointes, etc.
Pour la défunte : une année et demie de messes.
Trente autres messes pour les âmes du Purgatoire.
Pour copie conforme :
Nantes, le 1" octobre 1898.
A. DE Veillughèze.
TABLE DES MATIERES
Le général de la paroisse de Batz,(l7:«-1738), par M. E. Orieux. 19:î
Inventaire des objets composant la toilette, les bijoux, le mobi-
lier d'une jeune femme de la fin du XVII" siècle, par M. de
LA NlCOLLlÈRE-lEtJEIRO 213
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